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Waterloo 1815 – 2015, mémoire et bicentenaire
Cinq millions d’euros, deux-cent-mille visiteurs en quelques jours, une dizaine d’années de mise en place et deux siècles de mémoire très contrastée : le bicentenaire sera la résultante d’une dynamique à la fois proche et lointaine. Certains éléments en sont bien oubliés, mais ils continuent de façonner les traces matérielles et immatérielles de la bataille. Paradoxalement, ce lieu, ce nom et cet évènement, si prégnants dans l’imaginaire collectif de plusieurs nations, ont peu été commémorés de façon jubilaire en Belgique : le cinquantenaire (1865), le centenaire (1915) et les cent-cinquante ans (1965) n’ont, pour des raisons diverses, pas été commémorés ou ont été boudés par la France. Par contre, les cent-septante-cinq ans (1990) sont au seuil d’une montée d’intérêt qui culmine avec le bicentenaire, véritable happening international. Parallèlement, on constate une désappropriation de la prise en charge de la commémoration au niveau national, au profit d’initiatives associatives et politiques locales.
18 juin 1815, le dimanche de Waterloo
Waterloo est un lieu de mémoire par excellence. Un lieu de mémoire d’abord topographique, ancré dans le paysage, dans les monuments qui y sont construits, mais aussi dans l’imaginaire, notamment littéraire, qui accompagne les visiteurs des lieux. Car c’est aussi un lieu de mémoire immatériel, au sens où « Waterloo » (entendez : la bataille de Mont-Saint-Jean, livrée le dimanche 18 juin 1815 sur le territoire des actuelles communes de Braine‑l’Alleud, Waterloo, Lasne et Genappe) évoque de nombreuses associations mentales et symboliques liées à une interprétation du passé, plus ou moins développées selon les individus, mais bien ancrées dans la culture de masse1.
Prenons le temps de nous interroger sur les variations significatives de cette mémoire et ce qu’elles nous révèlent. Conflits de mémoire, instrumentalisations politiques et revendications mémorielles concurrentes sont bien présents dans ce dossier. La mémoire de « Waterloo » est un cas exemplaire qui peut nourrir la réflexion sur notre rapport au passé et sur nos discours mémoriels. Le bicentenaire est lui-même le point d’aboutissement, provisoire, d’une fascinante évolution.
Une mémoire vive, des monuments privés et un monument national
Vainqueurs et vaincus
Le duc de Wellington a fêté chaque année l’anniversaire de la bataille, dans sa demeure londonienne, entouré de ses anciens généraux et officiers d’état-major. Sa popularité et la carrière politique qu’il a menée au sein du parti tory, occupant le poste de Premier ministre, lui ont permis de soigner sa propre image et, domination britannique aidant, d’imposer pour la bataille le nom de Waterloo. Il fit construire à l’intérieur de la Tour de Londres une caserne nommée Waterloo Barracks, devant laquelle sont disposées des pièces d’artillerie françaises issues du butin de 1815 (actuellement des répliques). Et c’est après Waterloo que les régiments d’infanterie de la garde vont adopter le bonnet à poil d’ours de leurs anciens adversaires, aujourd’hui encore une des principales icônes touristiques de Londres (avec son exact pendant cérémoniel à Ottawa depuis 1959). Est-il besoin de rappeler l’emploi toponymique des mots Waterloo et Wellington dans l’ancien Empire britannique, du nom d’une gare à celui d’une ville ? Tout ceci montre l’impact durable de l’évènement dans la culture du vainqueur. Amsterdam, autre capitale victorieuse, possède sa Waterlooplein, Hanovre a sa Waterlooplatz et Berlin eut sa Belle-Alliance-Platz (portant le nom prussien de la bataille, tandis que Hanovre suit la tradition britannique). Depuis Sainte-Hélène, Napoléon donnera plusieurs versions successives de la bataille, accablant ses subordonnés, soignant sa légende et tronquant la réalité sans vergogne. En France, le romantisme et l’amertume des vaincus vont générer le très riche imaginaire de la défaite glorieuse, qui contribue encore à marquer les esprits jusqu’à nos jours. Dans les divers pays concernés, la littérature, la peinture, la gravure et l’estampe, le discours politique et les premiers travaux historiques vont façonner une image de Waterloo à géométrie variable. Mais venons-en à l’ancien champ de bataille, lui-même très vite couvert de monuments commémoratifs, que le visiteur et l’automobiliste aperçoivent encore aujourd’hui…
Des stèles au Lion
Certains d’entre eux sont très anciens, comme le monument Gordon, le long de la grand-route (actuelle N5), élevé dès 1817 par sa famille en mémoire du lieutenant-colonel Gordon, aide de camp de Wellington. De l’autre côté de la route, les officiers de la King’s German Legion ont fait ériger l’année suivante une pyramide tronquée honorant les noms de leurs quarante-deux collègues officiers morts au combat, dont deux colonels ; c’est le monument des Hanovriens. Plus modestes, de nombreuses plaques ont été posées dans la Chapelle royale de Waterloo par des officiers britanniques honorant la mémoire de leurs collègues, nommément cités, auxquels ils ajoutent parfois leurs sous-officiers et soldats, se contentant de donner le nombre de ces anonymes. En 1819, un monument prussien est élevé à Plancenoit, exprimant aux héros morts la reconnaissance du roi et de la patrie, sur une hauteur au nord du village, à l’ancien emplacement d’une batterie. Il y en eut d’autres encore, comme cette plaque en marbre sur le mur de la ferme de la Haie-Sainte (1822), dont certains ont disparu. Du côté français, de semblables démarches sont presque inexistantes. La veuve du général Duhesme, commandant la Jeune Garde à Plancenoit, fait élever en 1826 un monument à sa mémoire dans le cimetière du village de Ways (entité de Genappe), sans doute à l’emplacement de sa tombe. Lancé en 1837, un projet français de souscription pour un monument, lui aussi français, sur les lieux de la bataille, finit par avorter dix ans plus tard.
Le monument le plus visible est bien entendu le fameux Lion de Waterloo (sur Braine‑l’Alleud). L’idée de ce monument officiel date de 1815 et devait commémorer l’endroit où l’héritier du trône, commandant un des corps d’armée de Wellington, fut blessé. Un premier cahier des charges est publié à Bruxelles en 1819. Parmi les projets non retenus, celui d’un obélisque entouré de temples à l’antique illustre bien l’état d’esprit : il s’agit de commémorer la bravoure qui permet d’instaurer la concorde et de rétablir la paix européenne, tout en honorant le souvenir victorieux du prince Guillaume et son armée de Bataves et de Belges (« zyne legers der Bataviers en Belgen »). Les Alliés virent en effet leur victoire de Waterloo comme ouvrant un retour à la paix sur le continent européen, longtemps troublé par les campagnes de Napoléon. De fait, il n’y eut plus de conflit généralisé avant 1914, et aucun en Europe de l’ouest avant 1870. Un autre projet souligne qu’il convient d’éviter que le monument comporte des attributs qui soient un « outrage pour d’autres peuples ». La butte du Lion elle-même, achevée en 1826, n’est pas vindicative à l’égard de la France ; elle célèbre plutôt la paix retrouvée, le « repos que l’Europe a conquis dans les plaines de Waterloo », dit son architecte. Meilleur marché que d’autres projets, ce tertre masquant la colonne sur laquelle repose le lion en fonte avait d’abord comme propos, selon son concepteur (s’exprimant, il est vrai, après une attaque parlementaire belge en 1832 contre le monument), celui de la gravité, « si éloignée de blesser aucune susceptibilité nationale ».
Le champ de bataille fit l’objet de visites romantiques et curieuses. Le vétéran britannique Edward Cotton († 1849), sergent-major lors de la bataille, ouvrit un hôtel en 1818 pour accueillir les visiteurs et y adjoint un musée. L’écrivain écossais sir Walter Scott, l’auteur d’Ivanhoé, visita les lieux dès le mois d’aout 1815, accompagné par deux officiers. Il en tira un poème, publié l’automne suivant, dont la vente se fit au profit des veuves et orphelins des soldats (britanniques…) morts à Waterloo. Lord Byron, le poète romantique et libéral, y vint à son tour. Wellington lui-même revint à quelques reprises. Les rois de Prusse et d’Angleterre s’y rendirent en mai et aout 1821.
Progressivement, la disparition des contemporains de la bataille et de ceux qui, plus jeunes, les ont fréquentés, induit la transition d’une mémoire vive de celle-ci à une mémoire culturelle, portée par différents vecteurs : littérature, art, monuments et musées, figurines et dioramas, travaux d’historiens, école (et par la suite le cinéma et la télévision, plus récemment encore la reconstitution sous forme de living history)2.
1865 : entre menace française et réconciliation des peuples ?
Dans les années 1860, la Belgique et ses élites francophones craignent particulièrement un regain d’expansionnisme français sous le Second Empire. Le Lion est réapproprié par l’opinion belge, à un triple titre : en tant que rappel d’une défaite française, avertissement à l’égard du puissant voisin et rassurant gage d’Indépendance nationale (une signification nouvelle, donc, qu’il ne possédait pas à l’origine). La bataille de Waterloo est perçue comme un premier pas vers cette Indépendance nationale, un sens qu’elle conservera longtemps dans la vision belgicaine (ou unitariste) du passé belge. Toutefois, pour ne pas trop froisser Napoléon III, et malgré le débat que se livrent les organes de presse de l’époque, le gouvernement belge renonce à organiser une commémoration officielle des cinquante ans de la bataille en 1865…
Opposant au Second Empire, Victor Hugo livre depuis son exil une lecture républicaine hostile à Napoléon Ier, enfant de la Révolution devenu tyran, mais exalte le combattant français sur le mode épique. Ce sont les vers du chant II de l’Expiation (1852 – 53): « Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine ! Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine, Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons, La pâle mort mêlait les sombres bataillons. D’un côté c’est l’Europe et de l’autre la France. Choc sanglant ! des héros Dieu trompaient l’espérance ; Tu désertais, victoire, et le sort était las […] Et cette plaine, hélas ! où l’on rêve aujourd’hui, Vit fuir ceux devant qui l’univers avait fui ! » Et c’est la prose des Misérables (1862), avec la charge des cuirassiers dans le « chemin creux d’Ohain ». On sait qu’Hugo avait séjourné l’année précédente à Waterloo pour y terminer ce roman. Depuis, l’imaginaire relatif au champ de bataille est imprégné de la vision qu’en donna le grand écrivain (on tentera par la suite, avec des succès divers, de marquer par un monument et par un musée locaux ce séjour hugolien et la marque que ses textes ont laissée sur la mémoire collective).
Dans un poème de 1840, Hugo évoque avec rage la butte du Lion, dont il attribuait la construction aux Anglais — « Oh ! qu’il tremble, au vent qui s’élève, Sur son piédestal incertain, Ce lion chancelant qui rêve, Debout dans le champ du destin ! » —, mais en 1872, son espoir est celui de la réconciliation des peuples, suscité par la présence d’un rouge-gorge nichant dans la gueule du Lion : « Et l’oiseau gazouillait dans le lion pensif. Le mont tragique [= la butte] était debout comme un récif Dans la plaine jadis de tant de sang vermeille […] Et, peuples, je compris que j’entendais chanter L’espoir dans ce qui fut le désespoir naguère, Et la paix dans la gueule horrible de la guerre » (L’Année terrible, 1872).
1890 – 1950 : le Waterloo des Français, des Belges et des wallingants
L’ombre de Napoléon
En 1890, un nouveau monument est érigé le long de la grand-route, aux Quatre-Bras de Baisy-Thy, à la mémoire du duc régnant de Brunswick, tué le 16 juin 1815 à la tête de ses troupes et de ses soldats. Ce monument produit par le petit État, dans le cadre fédératif du Reich unifié depuis 1871, vient ponctuer la longue série de monuments commémorant la place des Alliés de 1815 sur l’ancien champ de bataille. Il en va de même du mémorial créé à Bruxelles au cimetière d’Evere par le sculpteur belge J. de Lalaing, magnifiant les sépultures britanniques de Waterloo qui viennent d’y être déplacées (1889 – 1890). Un projet de monument français, la même année, n’eut pas de suite.
Le souvenir français restait dès lors peu présent dans le paysage, alors même que la prose et les vers d’Hugo abreuvaient le public belge et français. L’ascension de la monumentale butte du Lion entrainait bien des visiteurs de la Belle Époque dans l’émotion, en songeant au destin de l’empereur. La défaite glorieuse prend le pas sur le propos initial du monument. Mais la richesse de cet imaginaire contrastait avec l’absence matérielle de marqueurs mémoriels dans la topographie même des lieux.
C’est pour cette raison et en vue de réaliser un monument français qu’en 1900 trois particuliers ont acheté un terrain. Quatre ans plus tard y était inauguré le modeste monument à l’Aigle blessé (1904), réalisé par le sculpteur français J.-L. Gérome. Celui-ci s’élève à l’emplacement présumé du dernier Carré de la garde impériale. Tout un symbole. Rien n’est neutre, en l’occurrence. Alors qu’il ne reste plus guère de contemporains vivants de cette bataille, la mémoire vive est en France marquée par une nouvelle défaite héroïque, celle de 1870. L’inauguration, organisée par l’ambassade de France, se fait en présence de représentants des gouvernements français et belge, ce dernier n’étant d’ailleurs que modérément enthousiaste. Le monument, bien français dans sa destination première, sera par la suite accaparé dans un contexte belgo-belge par le mouvement wallon, comme nous allons le voir.
En 1912 enfin, c’est au tour de la colonne Victor Hugo d’être inaugurée à deux pas, avec un an de retard (elle aurait dû marquer les cinquante ans du séjour d’Hugo à Waterloo); elle ne sera toutefois achevée qu’en 1954 : loin d’être un hommage littéraire neutre, un tel monument célèbre aussi la vision de la bataille donnée par le grand écrivain. En 1912 encore est posée à Hougoumont une stèle aux Soldats français morts durant la longue et vaine attaque de cette ferme ; un ossuaire est aménagé par le particulier qui occupe la ferme du Caillou, ancien quartier général de l’empereur, tandis qu’au pied de la butte est inauguré le Panorama, vaste rotonde abritant la peinture circulaire représentant la grande charge de cavalerie française magnifiée par Hugo. Cette attraction touristique, conçue en prévision du centenaire de la bataille en 1815, adopte le discours pictural de la défaite glorieuse et donc une sensibilité marquée par le point de vue français et la légende napoléonienne. Dans la foulée, une loi est votée en 1914 pour assurer la protection du site du champ de bataille contre toute nouvelle construction intrusive. Elle est toujours en vigueur.
Le centenaire des Belges
Le centenaire de la bataille allait tomber en 1915. Un comité national est mis sur pied pour en assurer la préparation, dès 1911. On y trouve plusieurs généraux et officiers, mais également des forces vives du Brabant wallon, en l’espèce le vice-président du Sénat et le bourgmestre de Nivelles, ville touchée par les préparatifs et les suites de la bataille en 1815 et par ailleurs chef-lieu d’arrondissement dont relèvent Waterloo et les communes voisines. Ce comité lance une souscription nationale pour l’édification d’un monument aux Belges, sur un terrain offert à l’État belge par un particulier. Terminé en 1914, il se situe en plein site du champ de bataille, au carrefour de la grand-route Charleroi-Bruxelles et du chemin menant à la butte. Ce monument est dédié à tous les Belges ayant combattu à Waterloo, quel que soit leur camp. C’est avant tout la bravoure, comme trait national qui est commémorée : le « Belge » en est grandi, quel que soit l’uniforme, français ou belgo-néerlandais, que les circonstances lui ont fait endosser. L’inscription évoque l’honneur du drapeau (sans dire lequel) et des armes. Belle illustration, en somme, du sens belge du compromis. L’inauguration officielle lors du centenaire n’a toutefois pas eu lieu, la Grande Guerre ayant bouleversé tous les projets… C’est sans beaucoup d’effet qu’une proclamation allemande, lors de l’invasion d’aout 1914, appelle les Belges à se souvenir du rôle joué à leurs côtés en 1815 par les Allemands, contribuant à fonder l’indépendance acquise en 1830. Par contre, la résistance inattendue des soldats belges amènera à relire rétrospectivement l’héroïsme des Belges de Waterloo3.
Le Waterloo du Mouvement wallon
Depuis le tournant du siècle, le mouvement culturel et politique d’émancipation flamande avait suscité en réaction un mouvement wallon. Celui-ci se signalait notamment par sa résistance au bilinguisme et par son insistance sur l’identité culturelle française de la Wallonie. Entre appartenance des Wallons à la culture française et volonté de rattachement politique à la France, justifiée par une identité ethnique, il n’y a pour certains militants qu’un pas. Pour ceux-ci, la Wallonie est donc française, la Belgique artificielle et la bataille de Waterloo, qui permit de séparer France et Wallonie, une erreur de l’Histoire. Commémorer Waterloo pour ces rattachistes, c’est donc héroïser la participation des Wallons dans l’armée française et sa défaite, marquer une communauté de destin et militer dans un sens irrédentiste. C’est, pour certains, souhaiter la destruction du Lion, perçu comme une humiliation française et… wallonne. C’est aussi passer sous silence les Belges, et parmi eux des Wallons, qui ont combattu dans les rangs, somme toute très légitimes à l’époque, de l’armée belgo-néerlandaise du royaume des Pays-Bas. C’est, dans le « drame des Belges à Waterloo » qui peut apparaitre comme un affrontement fratricide, privilégier les seuls combattants en uniforme français, pour des raisons politiques et idéologiques. C’est aussi volontairement s’opposer au discours national officiel : ces militants s’opposent ainsi avec virulence, mais en vain on l’a vu, à l’érection du monument aux Belges.
Sans pouvoir éradiquer la vision belgicaine typiquement consensuelle, qui imbibe notamment les manuels scolaires, le discours wallingant rattachiste va toutefois marquer le site de la bataille à partir de 1928 par l’organisation d’un « pèlerinage » annuel au monument de l’Aigle blessé, pendant du pèlerinage flamingant à la tour de l’Yser. S’ils n’étaient que quatorze la première année, les pèlerins seront 20.000 en 1938. Le rattachisme n’anime toutefois qu’une partie de ceux-ci ; pour beaucoup, il s’agit de marquer leur attachement à une vision wallonne de la Belgique de 1830, à l’amitié avec la France, au rejet du flamingantisme et du pangermanisme. Les discours traitent largement de l’actualité politique étrangère et intérieure. Ces pèlerins n’en suscitent pas moins l’indignation de la presse unitariste et belgiciste. Coïncidence enfin, c’est au soir du 18 juin 1940 que des pèlerins de Waterloo entendent l’appel du général de Gaulle et entrent en résistance (ce sera le mouvement Wallonie libre). Le pèlerinage reprit après la guerre, tout en drainant moins de foule et en étant même interrompu entre 1983 et 1986.
Ce changement de mémoire dans le chef d’une partie de l’opinion durant l’entre-deux-guerres est intéressant aussi en ce qu’il réactive la dimension de « pèlerinage ». Celle-ci était présente chez les premiers touristes du champ de bataille (piété et sensation se partageant sans doute les motivations). Elle est transposée ici sous forme d’un rassemblement de masse, mais dans une appréhension toujours aussi romantique du destin des troupes du Premier Empire. Cette dimension de piété due aux prédécesseurs, sinon aux ancêtres, se perpétuera encore dans certaines cérémonies, notamment en 1965. Mais à l’approche du bicentenaire, elle cèdera progressivement le pas à un « tourisme de mémoire », voire « de compréhension historique4 ».
L’après-guerre : deux quartiers généraux, quatre musées
Les années 1950 sont assez intéressantes : elles voient la mise en place d’institutions muséales durables sur le site, qui sont aussi un moyen de sauvegarder des bâtiments liés au patrimoine de la bataille. Jusqu’ici, le site comportait des monuments commémoratifs et le Panorama peint en 1912, auxquels s’ajoutaient des cabinets de souvenir, fruits de l’initiative privée. Désormais, le terrain va être également investi par la mission pédagogique de deux musées publics, installés dans les anciens quartiers généraux de Napoléon et de Wellington. La dynamique mise en place implique ce que nous appelons aujourd’hui la société civile et le milieu associatif. Elle s’inscrit dans une prise en charge locale de la mémoire de 1815, qui ira croissant tout au long du demi-siècle qui va suivre. Enfin, le dispositif mémoriel qui se dessine de la sorte fait la part tant aux Alliés qu’aux Français, même si le souvenir prussien semble être confiné au second rôle. Une relative faiblesse des moyens et une attitude parfois indifférente caractérisent toutefois aussi cette période.
Dès 1949, un musée de cire est ouvert en face de la Butte, dans l’ancien hôtel du sergent Cotton. L’attraction principale en est la série de personnages réalisés par les artistes du musée Grévin : on voit qu’ici Paris n’a pas hésité à travailler pour illustrer le terrain d’une défaite… Jugé plutôt folklorique par les uns, formidable par les autres, ce musée privé a finalement fermé ses portes en 2014 pour voir ses collections intégrées dans le futur Mémorial, sous la forme d’un dépôt.
La Société belge d’études napoléoniennes est fondée en 1950 pour assurer la sauvegarde de la ferme du Caillou. Grâce à elle, ce lieu devient en 1951 le musée du Dernier Quartier général de Napoléon. Lors de l’inauguration, l’ambassadeur de France déclara que le symbole du Lion, jadis menaçant, n’a pas empêché les troupes françaises de secourir la Belgique en 1831, 1914 et 1940 (passant sous silence les menaces et pressions françaises qui pesèrent parfois au XIXe siècle sur la Belgique…); il s’étonne positivement qu’Anglais et Néerlandais soient désormais avec « nous », « associés dans une œuvre commune ». D’ajouter : « Et aujourd’hui, alors que toute cette Europe occidentale se trouve unie et dressée contre un autre péril [= la menace soviétique], je pense qu’il faut, dans le champ de bataille de Waterloo, voir aussi un symbole : c’est celui qui dit qu’il n’y a pas de bataille qui sépare définitivement les peuples et que l’on peut toujours espérer une communion universelle de tous ces peuples, de toutes ces nations dans la paix. » Ce discours est symptomatique d’une évolution : la mémoire de Waterloo va désormais s’inscrire sous les auspices de la construction européenne et de l’espoir que se termine un jour la guerre froide. Quant au Dernier QG, il sera subsidié par la province à partir de 1964, avant d’être racheté par celle-ci en 1972. Rendue nécessaire par l’importance des charges, cette opération fait de l’autorité provinciale un acteur directement intéressé à la sauvegarde et à la promotion du champ de bataille. Les conséquences s’en feront sentir au tournant du siècle.
En 1953, l’ancien quartier général de Wellington, au centre de Waterloo, abrite un « misérable café », un cinéma de quartier et un atelier de tailleur, quelques reliques de 1815 étant présentées à l’étage. C’est dire le peu d’appropriation dont le lieu jouissait en tant que lieu de mémoire. Il faillit être démonté, déménagé aux États-Unis et remplacé par une station-service. Le fils de l’ancien secrétaire particulier de Léopold III et petit-fils du grand historien Henri Pirenne, mit sur pied une initiative de sauvegarde qui aboutit à la création du musée Wellington (1954) et à la préservation des lieux. Dans ces mêmes années 1950, l’Hôtel des colonnes abrita durant quatre ans un modeste et éphémère musée Victor Hugo, où l’on montrait le lit du poète, avant d’être rasé pour faciliter la circulation automobile, malgré une campagne de presse menée jusqu’au Figaro littéraire : voilà bien un lieu de mémoire avorté et éradiqué au profit de la modernité. Cela doit nous rappeler que rien ne va de soi et que l’état actuel de « conservation » ou de mémorialisation du site est bel et bien le résultat d’une sédimentation et de choix posés à chaque génération, parfois de façon conflictuelle. Par ailleurs, les institutions mises en place restent de taille modeste. Leurs possibilités et leurs moyens s’en ressentent. L’année qui précède les cent-cinquante ans de la bataille, le Times de Londres publiera un appel du septième duc de Wellington et de l’ambassadeur britannique à Bruxelles, en faveur de donations pour rafraichir le musée Wellington et la chapelle royale de Waterloo !
1965 : De Gaulle, les Belges et Waterloo
Le cent-cinquantième anniversaire de la bataille sera bel et bien commémoré en 1965. Expositions diverses (dont celle de la Bibliothèque royale, grande institution culturelle de l’État), attention soutenue dans la presse, dépôts de couronnes, inauguration de trois plaques à la mémoire de combattants français par la Société belge d’études napoléoniennes (contribuant à rééquilibrer dans un sens français le marquage des lieux), dérives commerciales ci et là, et surtout cérémonie à Hougoumont. Cette dernière fut une véritable cérémonie militaire d’hommage aux tués de la bataille : les honneurs sont rendus par un millier de militaires britanniques et néerlandais, en présence d’une délégation militaire allemande en civil. Prières, sonneries et pluie battante. La France s’est abstenue, malgré les nombreuses voix belges entonnant le double refrain de la défaite glorieuse et de la réconciliation européenne nécessaire. Le gouvernement belge s’est aligné sur cette abstention, au grand dam de certains5. Occasion bêtement manquée, ont jugé bien des observateurs de l’époque.
En 1965 toutefois, l’ambassade de France à Bruxelles considère comme une victoire le fait d’avoir boycotté les cent-cinquante ans de la bataille6. Cela témoigne sans doute de la susceptibilité des autorités de la Ve République (alors sous la présidence du général de Gaulle), mais aussi des enjeux de politique étrangère de l’époque : concurrence franco-britannique pour la suprématie en Europe de l’ouest et bras de fer autour de l’admission de la Grande-Bretagne à la Communauté européenne (une adhésion bloquée à deux reprises, 1963 et 1967, par de Gaulle et acquise en 1973 seulement). Dans le sympathique monde de la Realpolitik, la France gaullienne bataillait pour conserver son leadeurship quelque peu brutal au sein de l’Europe des Six et ne tolérait pas que son allié britannique lui fasse de l’ombre7.
Dès sa succession au titre, au décès de son père (1972), le huitième duc de Wellington s’investit dans la protection du champ de bataille et suscite le Waterloo Committee (1973). Celui-ci permet d’éviter que le ring de Bruxelles ne coupe le site et reste actif aujourd’hui. Le huitième duc, décédé en 2014, accompagnera jusqu’à la veille du bicentenaire l’évolution du site.
Ces années confirment que la bataille de Waterloo est bien implantée dans la culture populaire internationale. Sans qu’on sache hélas toujours très bien de quoi on parle. Le tube planétaire du groupe Abba en 1974 en est la preuve : Waterloo raconte comment la chanteuse succombe à son soupirant et trouve son Waterloo, tout comme « at Waterloo Napoleon did surrender ». C’est bien là que le bât blesse, puisque Napoléon ne s’est pas rendu : il a pris la fuite. Ce qui n’empêchera pas la commune de Waterloo de commémorer les quarante ans de la chanson par une exposition et un concert en 2014. Il est vrai qu’à défaut d’exactitude, l’air avait d’autres qualités.
Vers un bicentenaire organisé d’en-bas ?
Du cent-septante-cinquième à l’an 2000
La commémoration des cent-septante-cinq ans de la bataille en 1990 est marquée par le refus du compositeur français Jean-Michel Jarre de venir commémorer une défaite par un spectacle son et lumière (décidément, voilà une manie bien récurrente). Le programme comporte aussi l’émission d’un timbre-poste spécial, un festival du film d’empire, la publication d’un répertoire de cent-trente-cinq vestiges et monuments de 1815, une exposition itinérante et une reconstitution de la bataille. Elle se situe aussi à un tournant.
Les enjeux des années 1980 et 1990 sont en effet considérables pour le site. Alors que l’intérêt pour le patrimoine culturel va partout croissant, les musées et monuments deviennent ici vieillots, telle façade est nettement décrépie, et une tendance à la baisse du nombre de visiteurs s’installe. Les préparatifs du bicentenaire et les anniversaires intermédiaires peuvent donc être compris comme une tentative d’inverser la tendance. Trois aspects majeurs peuvent être soulignés : primo, le recours aux re-enactors bénévoles ou « reconstituteurs » (également dénommés « reconstituants »), de plus en plus affirmé au point de devenir emblématique dès les années 2000 ; secundo, la modernisation de l’infrastructure du site (musées, monuments et accès); tertio, la coordination des acteurs et décideurs locaux.
Une asbl réunissant la province et les quatre communes concernées (Genappe, Braine‑l’Alleud, Waterloo et Lasne) voit le jour en 1989 sous l’appellation « Bataille de Waterloo 1815 ». Elle assure d’abord la gestion de la butte, puis l’animation générale du site. Créée en vue des cent-septante-cinq ans, elle est toujours aux commandes pour le bicentenaire. Sur le plan institutionnel, la création en 1995 de la province du Brabant wallon (succédant à la province unitaire du Brabant) rapproche les acteurs. De même, il n’est pas anodin que le portefeuille du Tourisme au sein du gouvernement wallon ait été occupé en 1999 – 2004 par le bourgmestre de Waterloo.
Reconstituteurs et histoire vivante
Les deux premières « reconstitutions » de la bataille au pied de la butte eurent lieu en 1985 et 1990 (cent-septantième et cent-septante-cinquième anniversaires), précédées par un premier essai du genre en 1982. La « reconstitution historique » n’a rien à voir avec les marches folkloriques d’Entre-Sambre-et-Meuse. Celles-ci sont avant tout des processions, où des marcheurs en uniforme escortent des reliques et tirent des salves à blanc. Esprit de clocher, sérieux processionnel et convivialité caractérisent ces manifestations. L’uniforme porté, qu’il soit du Premier Empire ou non, n’est qu’un élément du décorum, l’aspect fondamental étant l’ancrage du rituel social dans le terroir et la communauté, même en cas de revitalisation ou de néo-folklore (le nombre de Marches a quadruplé depuis les années 1950). Il s’agit bien du village, aujourd’hui, dans sa durée8. Et non d’un ailleurs temporel à redécouvrir et à explorer. La reconstitution ou « histoire vivante », elle, s’attache aux gestes, vêtements et objets de l’époque, étudiés et reconstitués d’après les sources, recherchant par-dessus tout l’exactitude, dans une approche expérimentale et didactique (voir dans ce dossier l’article de Pierre Lierneux). Dans un premier temps toutefois, on eut recours à des marcheurs, pour donner la couleur empire nécessaire : par exemple en 1984 lors de l’inauguration d’un bâtiment annexe au musée du Caillou, et encore en 1990 pour la reconstitution de la bataille, où authentiques reconstituteurs et marcheurs se côtoyaient, pour atteindre un total de quelque deux-mille figurants.
Cette démarche est appelée à une belle postérité. À partir de 1999, un bivouac napoléonien est organisé annuellement au musée du Caillou par la province. Le nombre de reconstituants, désormais soigneusement sélectionnés quant à l’historicité de leur démarche, va augmenter, un second voire un troisième bivouac seront organisés, celui des Alliés se tenant à Hougoumont ; la reconstitution de bataille (deux certaines années) devient le clou du weekend. À partir de 2005, la figure de Napoléon est également présente. Le public peut assister à son déjeuner, mais aussi aux soins donnés aux blessés. La manifestation prend de l’ampleur et, à partir de 2007, l’organisation intègre les communes, l’asbl Bataille de Waterloo 1815 et l’opérateur privé Culturespaces gérant le site de la butte. Expositions et marchés napoléoniens (articles pour reconstituteurs, livres, illustrations, figurines…) accompagnent l’évènement in situ. La reconstitution de juin 2010, avec plus de trois-mille reconstituants venus de dix-sept pays et un budget de 700.000 euros, a été présentée comme la répétition générale du bicentenaire ; elle a drainé quarante-mille spectateurs pendant le weekend, dont un tiers d’étrangers. En 2014 par contre, pas de bivouac ni de bataille, on se concentre sur la préparation de l’année suivante. La commune de Genappe en profite pour organiser un bivouac et une reconstitution de combat à proximité du centre du bourg. Si le reenactment séduit un large public, son essor est aussi parallèle à une nouvelle orientation de l’histoire militaire sensible à la vie du combattant subalterne, intégrant son quotidien, sa résistance au stress et à la peur, son rapport à la brutalité. Sur le plan académique, la bataille de Waterloo est traitée sous cet angle dès les travaux pionniers du Britannique John Keegan (1976); cette approche d’en-bas, à hauteur d’homme, modifiera progressivement la clé de lecture de la bataille : ni héroïsation romantique ni réduction de l’évènement à ce qui se lit sur une carte d’état-major. On la retrouvera dans le documentaire d’Hugues Lanneau (2014), qui intègre des reconstituants et sera diffusé lors du bicentenaire, et dans la scénographie du futur mémorial (voir l’article de Roland Baumann dans ce dossier).
La mise en place du bicentenaire
La décennie de préparatifs du bicentenaire révèle une situation parfois alambiquée, marquée par une multiplicité d’acteurs publics, associatifs et privés, par des conflits d’égo, par des retards et des litiges, qu’on ne peut débrouiller ici, mais dont la presse s’est fait régulièrement l’écho9. Si besoin était, cet état de chose souligne l’importance des enjeux, en termes de rentabilité d’exploitation, de patrimoine et d’image locale. On peut résumer comme suit les grandes lignes du processus mis en place : professionnaliser la gestion du site autour de la butte du Lion, restaurer les monuments et moderniser les musées, intégrer les musées périphériques (Wellington et Caillou) à un circuit centré sur le hameau du Lion, créer un mémorial au pied de la Butte en réaménageant les abords de celle-ci, tirer parti de l’engouement international pour le re-enactment. Ces structures forment le dispositif sur lequel s’appuiera l’évènement du bicentenaire et sont appelées à lui survivre. Les lieux de mémoire (monuments, musées, paysage, et imaginaire) dont nous avons suivi la lente évolution voient désormais leur destin uni à la reconstitution. Celle-ci comme ceux-là, dans leur double dimension de piété et de pédagogie, se retrouvent au cœur d’enjeux entrepreneuriaux, liés à la politique locale et régionale, au développement d’un tourisme culturel ou de mémoire et au divertissement populaire. Avec une double exigence, citoyenne et politique, d’une part, historienne de l’autre : savoir ce qui est commémoré. La découverte du squelette d’un fantassin hanovrien lors des travaux en 2012 au hameau du Lion, est là pour relancer l’interpellation.
La mise à neuf des structures
Dépoussiérer, faciliter l’accès et la mobilité, mettre les scénographies au gout du jour : le programme est clair sur le plan muséal. Un centre d’interprétation, baptisé Mémorial, doit remplacer le centre des visiteurs au pied de la butte. En 2006, le marché public pour la conception est attribué à la société Tempora, un acteur bien connu en matière d’expositions temporaires, associée au célèbre Franco Dragone pour le film 4D animant la visite. Sept ans plus tard, un nouveau ministre lance un nouveau marché, plus englobant, comportant conception et réalisation : les concurrents dénoncent la longueur d’avance offerte à Tempora et se regroupent en association momentanée sous l’appellation Belle-Alliance, bien de circonstance, avec Gérard Corbiau, cinéaste oscarisé, pour le film. Ces derniers obtiendront le marché fin 2013, après bien des tergiversations, le retrait de Fr. Dragone et des actions en justice10. Après une suspension par le conseil d’État sur requête de Tempora, le marché sera néanmoins ré-attribué par le gouvernement wallon à Belle-Alliance (avril 2014), Tempora renonçant alors à introduire un nouveau recours, mais clamant son bon droit par communiqué. La réputation des protagonistes, notamment Dragone et Corbiau, dit assez les ambitions des promoteurs.
Après que les pouvoirs publics ont remédié dans les années 1990 à deux affaissements des pentes de la butte, la professionnalisation de la gestion touristique du site de la butte du Lion (le hameau du Lion) a été confiée en 2004 à la société française Culturespaces, spécialiste en cette matière. Le contrat porte sur vingt-cinq ans. La fréquentation du site ayant encore baissé de 6% en 2003, on espère une relance spectaculaire. Le chiffre oscillera désormais entre 150.000 et 300.000 visiteurs par an. Mais le chantier d’aménagement des abords du futur Mémorial engendre nuisances, chute de fréquentation et baisse de rentabilité pour l’opérateur. Celui-ci se retire en 2013 et l’intercommunale, propriétaire des lieux, reprend la gestion. À l’heure du bicentenaire, le choix d’un nouvel opérateur n’a pas encore eu lieu ; une désignation n’est espérée que pour 2016. Deuxième ombre au tableau !
Au centre de Waterloo, l’achat par la commune de la maison voisine du musée Wellington en 2007 permet d’envisager une extension de celui-ci. La modernisation du musée est menée en 2011, pour un cout de 375.000 euros. Au pied de la butte, le Panorama est rénové en 2008. Plus au sud, le musée du Caillou/Dernier Quartier général de Napoléon, à la présentation démodée, n’attire que 10.000 visiteurs annuels. Début 2015, les transformations de la muséographie sont en cours. Au-delà de l’objectif bicentenaire, on espère tripler le nombre d’entrées au musée.
Ayant cessé son activité agricole, la ferme d’Hougoumont, est achetée en 2003 à la famille propriétaire par les pouvoirs publics (intercommunale Bataille 1815), pour la somme d’un million et demi d’euros. S’ensuit une importante campagne de rénovation, où grâce à l’entremise du huitième duc de Wellington, les autorités britanniques investissent un million de livres sterling. Outre la remise en état du bâti et des abords, ce projet comporte un volet interprétatif confié à la société Tempora. Dans le même temps, nouvelle ombre au tableau : le Christ (XVIIe siècle) de la chapelle de la ferme d’Hougoumont, témoin des combats de 1815 restauré en 2008, a été volé en janvier 2011, faute de surveillance adéquate, et retrouvé en octobre 2014 chez un habitant de Braine‑l’Alleud.
Quant à l’ancienne ferme du Mont Saint-Jean, qui servit d’hôpital de campagne anglais en 1815, étant située entre la ligne de front et la localité de Waterloo, elle vient d’être acquise en 2014 par le groupe brassicole A. Martin (de Genval) qui entreprend, à titre de promoteur privé, d’achever la restauration du bâtiment, en vue d’y installer un musée et des espaces de restauration et d’évènementiel, ainsi qu’une microbrasserie. On y produit les bières Waterloo, nouvelle acquisition du groupe, dont l’étiquette illustrée de la charge des Scots Greys vise manifestement à attirer les gosiers britanniques. De haute fermentation, le produit est commercialisé depuis 2005, initialement présenté comme issu de la tradition d’une brasserie médiévale de Braine‑l’Alleud. Cette mention a disparu de l’étiquette depuis le rachat et l’installation dans la ferme.
Quant au site de la bataille dans son ensemble, il est repris depuis 2008 sur la « Liste indicative » pour la Belgique, étape préalable à l’inscription au Patrimoine mondial de l’Unesco.
Dans le même temps, diverses associations et comités continuent depuis les années 1980 à installer plaques ou stèles commémorant la mort de tel combattant ou l’emplacement de telle unité. Leur démarche reste étonnamment celle de l’hommage, parfois partagé, mais souvent lié à un camp du passé (il ne s’agit donc pas de médiation du savoir dans un cadre patrimonial ou touristique). Aux Quatre-Bras sont même élevés, en 1990, un monument à la cavalerie néerlandaise et, en 2002, un monument aux troupes britanniques et hanovriennes de Wellington, ce dernier à l’initiative du huitième duc. Par ailleurs, les monuments anciens font l’objet de préoccupations et de restaurations. L’état de la colonne Victor Hugo laisse à désirer et on peut craindre son écroulement. Le rachat du monument de l’Aigle blessé permettrait d’en aménager les abords dans le cadre d’un circuit touristique. La restauration du monument Gordon est réalisée en 2011, celui des Hanovriens en 2015. Aux Quatre-Bras, le monument de Brunswick (actuelle commune de Genappe) qui menaçait ruine il y a deux ans, a été restauré et inauguré le 24 avril 2015, en présence des ambassadeurs de France et d’Allemagne, le ministère des Affaires étrangères allemand ayant contribué aux travaux pour quelque 100.000 euros. Dans son allocution, l’ambassadeur d’Allemagne voit Waterloo non comme le début d’une ère de stabilisation du continent (point de vue de l’époque et des historiens), mais comme le début d’une ère de rivalités qui se termine avec la Première Guerre mondiale. Contamination des commémorations ? Il ajoute : « Aujourd’hui, Belges, Français, Britanniques et Allemands sont en mesure de commémorer ce bicentenaire ensemble, dans une Europe pacifique », reprenant par là un leitmotiv bien ressassé (mais semblant oublier les Néerlandais). À l’occasion de la même cérémonie, le bourgmestre de Genappe estime, non moins classiquement, mais non sans emphase, qu’«il est bon de rappeler, à la veille des cérémonies du bicentenaire de Waterloo, que d’autres lieux, d’autres sites, d’autres villages ont été marqués à jamais par cette campagne historique11 ».
Le programme
Après l’infrastructure du site, venons-en au programme commémoratif lui-même. Durant plusieurs années, Waterloo est représenté au salon international du tourisme de Londres, avec reconstituteurs dans le stand, et prépare le terrain. On vise l’internationalisation et l’ouverture au monde anglophone. Le programme est dévoilé un an à l’avance. Pas de cérémonie protocolaire avec discours, ni de dépôt de gerbes avec prise d’armes : du spectacle à grande échelle, et le recours massif à la démarche de living history. Lors de sa conférence de presse, l’asbl Bataille de Waterloo 1815 annonce quelque cinq-mille reconstituteurs et trois-cents chevaux, et une centaine de canons. Le budget de l’organisation dépassait les 4 millions d’euros (il avoisine depuis les 5 millions). Pour gérer la partie spectacle et reconstitutions, l’asbl recourt à des opérateurs privés spécialisés dans l’évènementiel : VO Communication agit comme producteur délégué pour l’organisation et la communication, et s’associe à Verhulst Events and Partners pour la commercialisation et le sponsoring. L’organisation met en vente les billets dès juin 2014 : à la mi-mars 2015, les cent-dix-mille places prévues pour les trois spectacles étaient déjà vendues. Les acheteurs sont issus de plus de soixante pays12. Le changement d’échelle à cet égard est spectaculaire par rapport aux années 1950 : fini l’entre-soi. Même si les acteurs locaux sont encore présents par différents biais et détiennent en dernier ressort le pouvoir d’initiative et de décision, ils doivent composer avec les niveaux supérieurs de pouvoir et surtout recourir aux moyens mercenaires de firmes privées. Enfin, le dossier de presse indique les objectifs, non sans une certaine gravité, affectée ou non : « Depuis cent-nonante-neuf ans, des touristes du monde entier foulent cette terre meurtrie pour honorer les soldats tombés au combat et ainsi commémorer la fin de vingt interminables années de guerre en Europe […] L’asbl souhaite marquer la mémoire collective au travers du bicentenaire de la bataille de Waterloo et envoyer au monde entier un signal de paix et de démocratie. » Cette affirmation, dans laquelle on aurait tort de ne voir qu’un alibi, est bien dans la ligne qui s’est développée peu à peu lors des anniversaires annuels et des commémorations-pivots de 1965, 1990 et 2005. Cette lecture irénique et apaisée est portée au niveau brabançon wallon et belge, ainsi que par de nombreux participants et partenaires. Même en recourant à des opérateurs évènementiels, il y a bien ici un travail de sens à l’œuvre, et il faut s’en féliciter.
Au total, trois sites de bivouacs, deux reconstitutions de la bataille, un spectacle d’ouverture (qui prend le texte de l’Expiation, de Victor Hugo, comme fil conducteur, réinstallant une lecture mémorielle romantique glorifiant les soldats français sur le mode épique), le hameau du Lion relooké incluant la butte, le nouveau mémorial et le Panorama, la ferme de Hougoumont restaurée et comportant des espaces interprétatif et muséal, les musées Wellington et du Caillou modernisés, les monuments de la N5 restaurés (Gordon, Victor Hugo, Brunswick…). Voilà le bilan des réalisations principales, pour partie éphémères (même si les deux reconstitutions « marqueront à jamais l’esprit du public », comme l’affirme le dossier de presse…), pour partie durables. La teneur mémorielle du site en sortira renforcée et infléchie. Bien sûr, toute médaille a son revers : le prix d’entrée aux spectacles est élevé, alors que durant la décennie écoulée plusieurs reconstitutions ont été accessibles gratuitement. Le contraste pourra faire grincer des dents. Le public familial de proximité, habitué des rendez-vous annuels, ne va-t-il pas se sentir floué ? Un autre risque existe : vu l’ampleur de l’évènement et la présence massive de touristes internationaux, la population et les associations locales ne se sentiront-elles pas dépouillées de « leur » bataille ? L’avenir nous le dira. Mais ceci est déjà une autre histoire…
Officiellement local
En 1911, un comité national — belgicain et patriote — avait été mis sur place, on l’a vu. Rien de tel ou d’équivalent, désormais. Le programme officiel du bicentenaire a été conçu à l’échelle de quatre communes et d’un site paysager. Il n’y a donc pas de prise en charge de la commémoration au niveau des gouvernements fédéral ou fédérés, ou de comités mis sur pied par ceux-ci, contrairement à ce qui se pratique pour le centenaire de la Grande Guerre13. Il n’y a donc aucun lieu de centralisation de l’information relative aux multiples initiatives suscitées ailleurs en Belgique par les deux-cents ans. Il n’y a pas non plus de labellisation des initiatives. Parmi ces « oubliées » de la communication, rien de moins qu’une exposition au Musée royal de l’Armée et d’Histoire militaire à Bruxelles. À cela s’ajoutent un colloque scientifique et d’autres expositions, dont une au musée de Nivelles, où Wellington logea le 20 juin 1815. Un concours de nouvelles est organisé par la province pour les élèves des établissements d’enseignement secondaire. Un séminaire de formation pour professeurs d’histoire est organisé les 13 et 14 février à Braine‑l’Alleud (tiens, tiens…) par l’European Association of History Educators, sur le thème « Enseigner 1815. Repenser la Bataille de Waterloo à partir de perspectives multiples ». Seule l’exposition temporaire du musée Wellington, confrontant les destins de Napoléon et du duc, est indiquée par le site web du bicentenaire. Faisant pour un mieux, l’organisme officiel Wallonie-Bruxelles Tourisme propose un calendrier, incomplet, des évènements Napoléon 2015 sur son site web, mais y intègre les marches folkloriques d’Entre-Sambre-et-Meuse. Voilà à quelle confusion des registres mène l’absence de vue d’ensemble. C’est évidemment une occasion perdue en termes de sensibilisation du public et de médiation d’un savoir historique.
Et qu’en est-il des autres champs de bataille de la campagne de 1815 ? La focalisation médiatique et touristique s’attache, de manière peu surprenante, à la bataille dite de Waterloo, en négligeant Wavre, les Quatre-Bras et Ligny, sans parler des affrontements mineurs qui ont précédé et suivi les quatre batailles belges. La bataille de Ligny aura toutefois également son propre bicentenaire. Située en province de Namur, la localité commémore l’affrontement franco-prussien depuis 1965 et accueillera quinze-cents reconstituteurs le 14 juin 1815, produira un son et lumière et espère attirer vingt-mille visiteurs. Soit un « dixième de Waterloo»… Rien par contre aux Quatre-Bras, car ce carrefour est situé sur le territoire de la commune de Genappe qui concentre ses énergies dans le partenariat à quatre communes, centré sur le champ de bataille dit de Waterloo. Capitale de la province du Brabant wallon, Wavre commémorera pour la huitième fois d’affilée les combats des 18 et 19 juin, qui virent Grouchy affronter les Prussiens. Pour le bicentenaire wavrien, mille reconstituteurs sont annoncés. Ceux-ci tiendront deux jours de bivouacs, feront deux reconstitutions de bataille et défileront en ville. Durant le défilé, la plaque commémorative sur le parapet du pont disputé en 1815 sera fleurie. Concurrence et réalisme obligent, cette manifestation est toutefois décalée au mois de juillet. Enfin, la mise en place d’une « route Napoléon en Wallonie » permet la mise en évidence touristique des localités traversées depuis la frontière par l’armée française durant la brève campagne de 1815. Plus modeste, mais plus durable que les grandes manifestations organisées à proximité du Lion, ce parcours participe d’une démarche de recontextualisation, mais aussi de redécouverte mémorielle. Quelque deux-cents panneaux signalétiques équipent un itinéraire de nonante-quatre kilomètres. Et, de cette manière, Waterloo sort de Waterloo. Ou du moins le bicentenaire a‑t-il des retombées larges, touchant aussi les provinces de Hainaut et de Namur. Volonté politique ? Oui, mais aussi une opportunité bienvenue.
Deux euros qui fâchent…
Alors que la coopération internationale est excellente, aux dires des organisateurs, la France se trompe sans doute de siècle et de partition lorsqu’elle s’oppose officiellement en mars 2015 à la mise en circulation d’une pièce belge de deux euros arborant la butte du Lion à l’occasion du bicentenaire. Il faut éviter, avance-t-on, de mettre en circulation des pièces commémorant un fait qui peut heurter une partie de l’opinion dans un pays de l’Union. Recevable sur le principe (et pourtant personne ne s’était opposé à la pièce de deux euros belge commémorant le centenaire de la Grande Guerre en 2014), l’argument est risible dans le cas d’espèce, en décalage total avec la réalité du bicentenaire. Plus bien riche et européenne est l’attitude de ce jeune Français rencontré l’an dernier : venu de région parisienne, il revêt l’uniforme gris des Jäger du Brunswick au sein d’un groupe de reconstituants carolos, parce qu’on y recherchait, m’expliqua-t-il, des francophones sachant parler allemand… Ou encore l’expérience de cette association française qui, en collaboration avec la classe menuiserie d’un lycée, a construit la réplique d’une ambulance volante, modèle mis au point par le chirurgien Larrey des armées révolutionnaires et impériales : l’attelage va parcourir la France avant de rejoindre Waterloo pour les journées du bicentenaire14.
Et de quoi lire…
Le bicentenaire, « star des librairies », titrait un journaliste fin 2014, et c’est vrai. Dans certains cas, la récupération est quelque peu saumâtre. Les prolifiques éditions Jourdan n’hésitent pas à publier en 2014 une biographie du duc de Wellington, qui paraît fort neuve (« pour la première fois en langue française » lit-on en quatrième de couverture)15 alors que l’auteur, décédé depuis 1987, avait publié cet ouvrage à Bruxelles en 1973, sous le titre Le duc de Wellington et la Belgique. Inutile de dire que l’actualité des débats ou des perspectives n’est pas le point fort de cette réimpression décontextualisée et non avouée…! Sans compter que le scannage a été sordide : ainsi, parmi des dizaines d’erreurs de reconnaissance de caractère, le philosophe allemand Fichte devient-il Fiente… D’autres rééditions sont toutefois plus claires dans leurs intentions et sans défaut matériel. Les organes de la presse hebdomadaire et quotidienne publient depuis mars 2015 divers encarts (Le Soir, La Libre, La DH) et numéros spéciaux (La Libre, La DH, Le Vif/L’Express, Paris-Match). Enfin, des ouvrages neufs voient le jour : du côté de la fondation Napoléon, Thierry Lentz propose un ouvrage grand public et sérieux sur la bataille, servi par une belle mise en page (Waterloo 1815, Perrin, 2015, 317 p.); du côté des auteurs locaux, Y. Vander Cruysen rassemble les mille-et-une anecdotes bonnes à savoir (Waterloo démythifié, préf. par Th. Lentz, éditions Jourdan, 2014); chez Gallimard, une anthologie rassemble écrits littéraires, témoignages et extraits d’historiens (où l’auteur, français, a tenu à expliquer que « commémorer » n’est pas « célébrer » une défaite…); à la Renaissance du livre, un « beau livre » propose un récit en anglais et en français de la bataille, illustré de magnifiques photographies de reconstituteurs en action. Et ce ne sont que quelques exemples…
Conclusion
Le bicentenaire, exploitation commerciale sans âme ? Le jugement serait trop facile. Certes, les enjeux économiques et budgétaires sont considérables et la grande machine mise en place implique le recours à des opérateurs du secteur privé. Mais les acteurs qui portent le site et son animation sont avant tout des passionnés, qu’ils soient bénévoles ou échevin : c’est le gout du Premier Empire et le sens donné à la bataille, chevillés dans le terroir qui est lui-même un lieu de mémoire (pour soi, pour autrui et à géométrie variable), qui anime ces acteurs de la base, ancrés dans le milieu associatif, les musées locaux et la politique locale. Ce n’est pas le gouvernement fédéral belge, ni la Région wallonne, ni telle ou telle ambassade qui a pris l’initiative de la commémoration. C’est la communauté locale qui a porté le mouvement (au sens américain du terme community). Juste retour des choses ? En un sens, oui. Là où, il y a deux-cents ans, avaient convergé des armées largement étrangères, détruisant habitat, cultures et infrastructures à l’occasion de pluvieux bivouacs et de sanglants combats16, c’est aujourd’hui la communauté locale qui donne rendez-vous à un vaste public international pour un voyage dans le temps… Une fois le bicentenaire passé, le Lion, monument apatride réapproprié par les municipalistes, continuera de veiller sur le site, ses morts et son message de paix retrouvée…
- Sur le concept, voir Les lieux de mémoire, dir. P. Nora, 3 t. en 7 vol., Gallimard, 1984 – 1992.
- Sur cette distinction, voir J. Assmann, La mémoire culturelle [1992], trad. de l’allemand, Aubier, 2010.
- Sur ces deux points, voir Ph. Raxhon, Centenaire sanglant. La bataille de Waterloo dans la Première Guerre mondiale, éd. Marot, 2015.
- Sur ces concepts de tourisme de pèlerinage et de tourisme de mémoire, voir A. Hertzog, « Tourisme de mémoire et imaginaire touristique des champs de bataille », dans Via. Revue internationale interdisciplinaire de tourisme, n°1, 2012, [en ligne], portant en l’espèce sur les sites de la Grande Guerre.
- v
- J.-M. Largeaud, Napoléon et Waterloo : la défaite glorieuse de 1815 à nos jours, 2006, p. 223 – 229. Quoi qu’il en soit, la contre-enquête dans les archives britanniques, néerlandaises et belges, notamment, n’a pas encore été menée et pourrait réserver des surprises.
- Voir par exemple M.-Th. Bitsch, Histoire de la construction européenne, nouvelle éd., Bruxelles, 2006, p. 154 et 168 – 9.
- C. Bouchat, «“Le village magique”. Pluralité des engagements dans les Marches de l’Entre-Sambre-et-Meuse », in Uzance, vol. 1, 2011, p. 107 – 127 [en ligne].
- Voir Le Vif/L’Express, 24 avril 2015. Cet hebdomadaire a accordé une attention soutenue à l’évolution du dossier, durant plusieurs années.
- Le Vif/L’Express, 7 février 2013, 13 juin 2013, 21 juin 2013, 2 octobre 2013, 19 décembre 2013. L’article du 21 juin était intitulé Waterloo 2015 : c’est la Bérézina, avec un esprit caustique bien à propos.
- L’Avenir, édition Brabant wallon, 25 avril 2015, cahier régional, p. 7 et 11 ; La Libre Belgique, 25 avril 2015, édition Brabant wallon, p. 15.
- La Dernière Heure, 1er mai 2015.
- La Région flamande se désintéresse de Waterloo, dont, il est vrai, les retombées touristiques n’intéressent que la Wallonie, au profit d’une commémoration des débuts du règne de Guillaume Ier, dans une optique quelque peu flandro-néerlandaise (1815 – 1830). Trop vite décriée dans les médias francophones courant 2014, cette approche aurait pourtant permis aussi de rappeler l’essor de la Révolution industrielle en Wallonie durant la période dite hollandaise.
- La Dépêche du Midi (Toulouse), 29 octobre 2014 (en ligne).
- Henri Bernard, Le duc de Wellington. Pourquoi Napoléon ne pouvait que perdre, éditions Jourdan, 2014, 388 p. Le colonel H. Bernard (1900 – 1987) fut professeur d’histoire à l’École royale militaire, après une carrière d’officier et de résistant
- Nombreux exemples dans A. Barbero, Waterloo, trad. de l’italien, Flammarion, 2005, rééd. 2015.