Uri Avnery, mort d’un guerrier hébreu
Le 20 aout dernier, un guerrier hébreu de nonante-quatre ans rendait son dernier souffle dans une chambre de l’hôpital Ikhilov de Tel-Aviv. Oublié des jeunes générations israéliennes et occidentales, Uri Avnery fut, sept décennies durant, l’une des personnalités publiques les plus productives et controversées d’Israël. Sa vie fut longue et mouvementée, le destin le fit […]
Le 20 aout dernier, un guerrier hébreu de nonante-quatre ans rendait son dernier souffle dans une chambre de l’hôpital Ikhilov de Tel-Aviv. Oublié des jeunes générations israéliennes et occidentales, Uri Avnery fut, sept décennies durant, l’une des personnalités publiques les plus productives et controversées d’Israël. Sa vie fut longue et mouvementée, le destin le fit naitre allemand, de confession mosaïque, il fuira l’Allemagne nazie, militera en Palestine dans les rangs de la droite fasciste sioniste, participera activement à la guerre d’indépendance de l’État d’Israël, rénovera (pour le meilleur et pour le pire) les codes du journalisme israélien, embrassera une carrière politique chaotique, comptera parmi les pionniers du dialogue israélo-palestinien, fondera un mouvement pacifiste radical et terminera sa vie publique à l’extrême gauche du spectre politique juif israélien.
Lorsque l’on contemple l’état de déliquescence des champs politiques israélien et palestinien, ainsi que le coma dans lequel végète depuis dix-huit ans le processus diplomatique enclenché en 1993 entre l’État d’Israël et l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), il peut sembler normal, « évident », de ranger Uri Avnery à la gauche du spectre politique israélien. Mais c’est une illusion d’optique. Uri Avnery ne fut jamais un « gauchiste ». Ce fut d’abord et avant tout un électron libre, doté d’un égo certain, qui développa une vision précoce de la paix israélo-palestinienne en assumant la radicalité de son nationalisme hébreu (on reviendra ci-dessous sur cet adjectif). C’est parce qu’il se perçut longtemps comme l’idéaltype du Juif nouveau (haYehoudi hehadash), de l’Hébreu régénéré (pour reprendre le vocabulaire qui fut le sien dans la Palestine des années 1940), et qu’il fut un sioniste convaincu du droit, de la légitimité et de la nécessité d’une indépendance hébraïque en Palestine, qu’il fut l’un des premiers personnages publics israéliens, dès les années 1940, à reconnaitre l’existence d’un peuple arabe de Palestine, le peuple palestinien, et le droit, la légitimité, de ce peuple à revendiquer l’autodétermination.
Contrairement à la majorité de celles et ceux qui allaient constituer les futures élites politiques, économiques et culturelles israéliennes, Uri Avnery n’était pas issu d’Europe orientale, où la judéité était une évidence à la fois confessionnelle et ethnique qui s’imposait à tous, y compris aux pires antisémites, mais de l’Allemagne de l’interbellum, celle de la République de Weimar, âge d’or et chant du cygne du judaïsme allemand1. C’est à Beckum (Westphalie) et sous le nom d’Helmut Ostermann qu’Uri Avnery vit le jour en septembre 1923. Ses parents, Alfred Ostermann et Hilde Engelstein, appartiennent à la bourgeoisie allemande de Hanovre. Comme beaucoup de leurs contemporains, ils ont élevé leurs enfants dans l’idéal de la symbiose judéo-allemande, avant de peu à peu déchanter et, dix mois après l’accession du NSDAP au pouvoir, d’émigrer vers le Foyer national juif en cours de constitution en Palestine sous mandat britannique et de perdre dans l’aventure tout leur capital économique. À son arrivée en Palestine, en signe de rupture avec son passé allemand, l’adolescent Helmut Ostermann choisit un nouveau prénom, Yosef, en mémoire d’un de ses deux grands-pères. D’abord installés en Galilée dans le moshav2 de Nahalal3, les Ostermann s’établissent définitivement dans la nouvelle ville juive de Tel-Aviv, édifiée dans la banlieue de Karm alJabâli, au nord de la vieille Jaffa.
Comment ce jeune Juif allemand opère-t-il sa conversion au nationalisme juif (le sionisme politique), à fortiori, au sionisme dit « révisionniste »4, alors minoritaire et pestiféré au sein de la communauté juive de Palestine ? Helmut Ostermann n’a jamais été très disert sur cette conversion. Les derniers entretiens qu’il a accordés à la télévision israélienne laissent tout au plus deviner une immersion rapide et totale dans un nationalisme romantique et violent qui était plutôt le fait d’Ashkénazes originaires de la Pologne de l’interbellum à une époque où la majorité des Juifs de Palestine originaires d’Allemagne optaient pour le sionisme libéral incarné par le mouvement des Sionistes généraux, faction politique dirigée par le futur premier président de l’État d’Israël, Haïm Weizmann5.
Ainsi, en 1938, âgé de quinze ans, Yosef Ostermann s’engage dans les rangs de l’Etzel6, plus connu sous nos latitudes sous le nom d’Irgoun ou « Organisation ». À cette époque, alors que le mouvement travailliste de David Ben Gourion, bien qu’opposé aux sévères restrictions imposées par Londres à l’immigration de Juifs en Palestine à la suite de la révolte arabe palestinienne de 1936 – 1939, a décidé de ne pas s’en prendre aux forces britanniques, afin de ne pas saboter l’effort de guerre de la Grande-Bretagne contre l’Allemagne nazie, l’Etzel, lui, ne se sent pas lié par ce « pacte avec le diable ». L’Irgoun multiplie les actions d’éclat contre les « forces d’occupation » britanniques et inaugure une campagne d’attentats contre les Arabes palestiniens, responsables politiques, maquisards et civils confondus. En 1941, alors que la Seconde Guerre mondiale est à son apogée, Yosef Ostermann décide de rompre avec l’Irgoun, non par alignement sur la « paix froide » conclue entre sionistes travaillistes et forces britanniques, mais, expliquera-t-il plus tard, par le malaise grandissant que génèrent chez lui les attentats contre les civils arabes. En hommage à son frère Werner, mort en 1941 après s’être engagé dans l’armée britannique pour combattre en Afrique orientale et arrêter la progression des forces de l’Axe, Yosef Ostermann opte pour le patronyme d’Avnery.
S’il rompt avec le Mouvement révisionniste, ses organisations paramilitaires et leur fuite en avant terroriste7, Avnery continue néanmoins d’écrire dans diverses publications révisionnistes, dont le bimensuel Ha-Ḥevra (La Société). À l’époque et à l’instar de certains révisionnistes, Avnery est animé par trois motivations : d’abord, la fascination romantique pour la geste attribuée aux anciens Hébreux ; ensuite, l’adhésion aux idées de « révolution nationale » et de « régénération nationale » telles que formulées par les mouvements fascistes européens de l’entre-deux-guerres8 ; et enfin l’affirmation d’une nation hébraïque en cours de formation en Palestine. Pour Avnery et les siens, la nation hébraïque est radicalement distincte du peuple juif et, surtout, nation autochtone constitutive (au même titre que les nations arabes, syriaques, etc.) d’un espace sémitique (merḥav shemi) anti-impérialiste qui, en englobant les territoires actuels d’Israël/Palestine, de la Jordanie, du Liban, de la Syrie et de l’Irak, n’est pas sans rappeler la revendication fascisante pan-syrienne portée par le PSNS (Parti syrien national social) fondé en 1932 par le Libanais chrétien Antoun Saadé.
Cette triple motivation, l’historiographie juive et israélienne l’a surnommée de façon ironique canaanisme, un mélange de fascisme italien, de volkisme et de conviction que c’étaient tous les peuples du Moyen-Orient sémitique qui, emmenés par la nouvelle nation hébraïque et réconciliés avec leur passé antique, allaient se soulever contre l’impérialisme européen, fût-il anglais, français, américain ou soviétique. Les « Cananéens » (à nouveau, appellation à posteriori et ironique) se regroupent au sein du Conseil pour la Consolidation de la jeunesse hébraïque (HaVa‘ad leGibboush HaNo‘ar ha‘ivri) dirigé par le poète hébreu palestinien Yonatan Ratosh9. On y retrouve plusieurs écrivains de premier plan du futur État d’Israël comme Amos Keinan (1927 – 2009)10, ainsi que certains hommes politiques de la droite la plus romantique et la plus martiale, comme Natan Mor (1913 – 1980)11, un ancien sicaire du Leḥi (acronyme hébreu de Loḥamei Ḥerout Israël ou Combattants de la liberté d’Israël), dissidence de l’Irgoun plus connue sous le nom de « Groupe Stern » et dont l’intraitable chef est Yitzhak Shamir (1915 – 2012)12, futur Premier ministre (Likoud) israélien.
Avnery, quant à lui, se fait plutôt le porte-parole d’un mouvement canaaniste de moindre envergure, Jeune Palestine (Eretz-Israël HaTze‘ira) et publie plusieurs articles dans son organe BaMa’avak (Au Combat), qui, tous, appellent au renversement de « l’ordre juif », à la rupture avec les « tares diasporiques » des Juifs d’Europe, à la restauration du peuple hébreu et au culte des guerriers hébreux des anciens temps. En février 1948, trois mois après le vote du plan de partition de la Palestine par l’assemblée générale de l’ONU (29 novembre 1947), Uri Avnery, en compagnie de deux autres auteurs, publie un pamphlet résolument hostile au principe des deux États juif et arabe, pamphlet intitulé De la défense à la guerre – Vers une guerre totale – Une contribution à la pensée guerrière, le tout édité par l’éphémère Ligue hébraïque pour une guerre totale.
On peut y lire ces lignes incroyables : « Nous devons désintégrer le front arabe de l’intérieur, provoquer un conflit révolutionnaire entre les régimes réactionnaires arabes existants et les forces arabes qui luttent pour le renouveau national et social, créer une alliance nationale et de classe entre ces forces arabes et la nouvelle nation hébraïque, nous appuyer sur cette alliance afin de garantir la sécurité, la liberté d’action et la réalisation de nos objectifs nationaux. Nous ne devons pas contredire les idéaux du nationalisme arabe. Leurs idéaux nationaux sont liés aux nôtres et indiquent une voie pratique pour les réaliser ensemble en créant une large classe d’Arabes dont le statut personnel dépendra d’une victoire hébraïque totale et de l’unification future de l’espace sémitique dans un vaste cadre confédératif. »
Ce pamphlet sera le chant du cygne des « Cananéens ». Sommés de choisir entre un utopique Grand-Israël « néohébreu » et la garantie d’une souveraineté juive/hébraïque sur une partie de la Palestine légitimée par l’ONU, de nombreux « Cananéens », dont Uri Avnery, finiront par s’engager dans la nouvelle armée israélienne, convaincus en cela par certaines atrocités commises contre les civils par les guérillas villageoises arabes palestiniennes et, dans un second temps, par l’intervention militaire des États arabes voisins, auxquels il faut ajouter l’Irak. Avnery participera à deux offensives israéliennes d’envergure : l’Opération Nahshon, face à l’armée transjordanienne (création aux forceps d’un corridor entre le littoral juif et Jérusalem) et l’Opération Pleshet, face à l’armée égyptienne (conquête ou reconquête du sud de la plaine littorale, entre la ville israélienne actuelle d’Ashdod et Gaza), où son unité est surnommée Les Renards de Samson (Shou‘alei Shimshon).
Grièvement blessé lors de la controffensive face à l’armée égyptienne, Avnery est démobilisé et rédige un journal de guerre qui sera publié fin 1948 sous le titre Dans les Champs de Philistie (BiSdot Pleshet) et qui sera un tel bestseller qu’il lui permettra, en 1950, de racheter à bas prix un hebdomadaire moribond, Ha‘Olam HaZeh (Ce Monde) et, dans la foulée, de publier une suite à son journal de guerre, Le Revers de la Médaille (HaTzad hasheni shel haMitzba‘), lequel, en s’étendant sur les opérations d’expulsion menées par l’armée israélienne dans certaines régions conquises, provoquera une onde de choc et transformera Avnery de héros en pestiféré, le livre étant censuré jusqu’en 1976.
Ha‘Olam HaZeh sera la grande affaire d’Uri Avnery. En compagnie d’un ancien camarade de combat rencontré au sein des Renards de Samson, Shalom Cohen (1926 – 1993)13, Avnery va transformer cet hebdomadaire en plateforme radicalement hétérodoxe par rapport au canon sioniste de l’époque. Mélange assez improbable entre le Sun britannique et le Canard enchainé français, Ha‘Olam HaZeh va faire de son travail éditorial et d’investigation une machine de guerre contre l’hégémonie et la corruption du Mapaï14 de David Ben Gourion et de ses alliés politiques, l’absence de séparation claire entre le rabbinat et l’État, l’état d’urgence imposé à la minorité autochtone arabe d’Israël et l’absence d’initiative israélienne pour prendre langue avec ceux qu’Avnery, dès la fin de la guerre d’indépendance, reconnait déjà comme les Arabes palestiniens, les appelant nommément le peuple palestinien.
Officiellement interdit de lecture par l’establishment de l’époque et sentant le soufre dans une large partie de l’opinion juive israélienne, Ha‘Olam HaZeh sera pourtant l’une des lectures favorites de l’état-major militaire et des dirigeants israéliens, à commencer par David Ben Gourion, cible permanente et presque obsessionnelle d’Uri Avnery. Dans certains articles et livres publiés par Avnery, il faut reconnaitre qu’il a bien du mal à masquer le mépris violent du Yekke (terme péjoratif yiddish pour désigner les Juifs allemands) envers un Ben Gourion renvoyé au statut de « plouc » de Płońsk15. La haine entre Ben Gourion et Avnery sera totale et définitive.
En 1956, après la guerre de Suez (opération tripartite anglo-franco-israélienne consécutive à la nationalisation du canal de Suez par le président égyptien Gamal Abdel Nasser), Avnery en revient à son obsession originelle en fondant l’Action sémitique (Pe‘oulla Shemit) avec des figures intellectuelles issues de l’extrême gauche et de l’extrême droite. Désormais, il n’est plus question de faire de la révolution hébraïque le moteur de la régénération du Moyen-Orient mais, plus « modestement », d’œuvrer à l’intégration de l’État d’Israël dans un espace sémitique. En 1957, avec l’appui de l’Action sémitique, Avnery publie un plan de paix baptisé Union du Jourdain (Ihoud haYarden). Il s’agit d’établir une fédération israélo-palestinienne formée de deux États, Israël et la Palestine. L’État palestinien membre de la Fédération serait constitué de la bande de Gaza (alors sous occupation égyptienne), de la Cisjordanie (alors annexée par le royaume hachémite de Jordanie) et, dans le cas où les Palestiniens de Transjordanie seraient intéressés et consultés, de la Transjordanie (la Jordanie actuelle).
Si le projet de l’Action sémitique est plus modeste (et débarrassé de tout romantisme militariste) que ceux caressés dans les années 1940, il ne se situe pas moins en rupture totale avec la culture politique israélienne. Qu’on en juge. Rupture avec l’alliance occidentale et intégration au Mouvement des non-alignés ; reconnaissance du principe du droit au retour des réfugiés palestiniens ; abrogation de la Loi du retour (qui octroie la citoyenneté israélienne automatique à tout Juif de la diaspora émigrant en Israël); abrogation des lois et règlements militaires discriminatoires envers la minorité arabe. L’Union du Jourdain fera long feu. Rappelons-nous simplement que ses principes politiques, qui semblent d’une banalité confondante en 2018, ont été élaborés en 1956, dans un contexte où ni la société juive israélienne ni les sociétés arabes (à commencer par la société palestinienne) n’étaient légitimement prêtes à un tel compromis. Après tout, nous n’étions jamais que treize ans après la fin du génocide nazi et huit ans après la guerre de 1948.
Durant les années 1960, le régime incarné par les successeurs de David Ben Gourion à la tête du Mapaï, aiguillonné par le Mafdal (Parti national religieux), s’apprête à faire voter une loi antidiffamation qui, tout le monde le comprend, est d’abord et avant tout dirigée contre Ha‘Olam HaZeh. Pour échapper à la disparition, Uri Avnery et Shalom Cohen, les deux patrons de l’hebdomadaire, décident de présenter une liste aux élections législatives de 1965 sous le nom de Force nouvelle (Koah Hadash), laquelle franchit le seuil électoral et permet à Avnery de siéger pour la première fois à la Knesset, le Parlement israélien, un Avnery qui y toisera, plutôt deux fois qu’une, son ennemi juré, David Ben Gourion.
En juin 1967 éclate la guerre des Six Jours, au terme de laquelle Israël s’empare des territoires palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, de la péninsule égyptienne du Sinaï et du plateau syrien du Golan. Convaincu comme une majorité de ses compatriotes que cette guerre est un quitte ou double et abasourdi par la propagande antisémite et franchement exterminatrice déversée par la radio égyptienne La Voix des Arabes16, Avnery et les siens soutiennent la guerre préventive décidée par un gouvernement d’union nationale auquel ils ne sont pas conviés. Tout en votant en faveur de l’annexion de Jérusalem-Est (territoire annexé par la Jordanie en 1949 et comprenant la Vieille Ville), Avnery voit dans la situation créée par la guerre des Six Jours l’opportunité de remettre sur la table les idées défendues une décennie auparavant par l’Action sémitique.
Ainsi, il s’oppose vigoureusement aux trois options qui s’offrent aux dirigeants israéliens. Premièrement, la restitution des territoires conquis début juin 1967 ne résoudrait en rien le caractère existentiel du conflit israélo-palestinien, tandis qu’elle ramènerait des armées arabes revanchardes aux frontières israéliennes, armées qui ne donneraient de toute façon aucune suite à une revendication étatique palestinienne. Deuxièmement, l’annexion pure et simple des territoires occupés de Cisjordanie et Gaza transformerait de facto Israël en un État binational au sein duquel les Arabes palestiniens finiraient par représenter une majorité et saper les fondements de toute souveraineté juive et/ou hébraïque. Troisièmement, le maintien du statu quo (pas d’annexion mais lancement d’une colonisation juive de peuplement) aurait tôt fait de transformer Israël en régime de ségrégation. En d’autres mots, la situation que nous connaissons toujours en 2018…
À cela, Avnery, son mouvement politique et des intellectuels palestiniens de Jérusalem-Est et de Cisjordanie opposent le principe d’une solution fédérale territoriale et lancent, toujours en compagnie d’anciens militants de droite ou d’anciens « Cananéens », le Mouvement pour une Fédération israélo-palestinienne. Il va sans dire que cette option fédérale bi-nationaliste ne suscitera que des haussements d’épaules, tant côté israélien que palestinien.
Lors des élections législatives de 1969, Avnery et Cohen refusent de mettre sur pied une liste de cartel avec des transfuges du Mapam (sioniste socialiste), du Maki (communiste juif) et d’autres mouvements trop marqués marxistes et sionistes à leurs yeux. Force nouvelle n’en obtient pas moins un deuxième siège à la Knesset, ce qui permet à Shalom Cohen d’enfin siéger au Parlement. Hélas, Cohen claquera la porte de Force nouvelle et de l’hebdomadaire Ha‘Olam HaZeh, accusant Avnery de comportement individualiste, voire dictatorial. Avnery rebaptise alors le petit parti Meri (acronyme hébreu de Camp radical israélien, Maḥaneh Radikali Yisreëli). Acceptant enfin de s’ouvrir à des transfuges issus de la gauche israélienne, le Meri d’Uri Avnery se situe pour la première fois explicitement à gauche de l’échiquier politique israélien. Mais, lors des législatives anticipées de décembre 1973 (provoquées par le désastre de la guerre d’Octobre), le Meri ne franchit pas le seuil électoral et Avnery perd son siège de député. C’est le début de la fin de la carrière parlementaire d’Avnery. En 1977, il accepte de figurer en ordre éligible sur une nouvelle liste sur laquelle il n’a pas la haute main, le Camp de la gauche israélienne, plus connu sous son acronyme Sheli (Paix pour Israël) et il n’y siège que partiellement en vertu d’un accord de rotation conclu envers ses figures de proue. Enfin, en 1984, il apporte son soutien à la Liste progressiste pour la paix, un parti judéo-arabe emmené par l’ancien général Matti Peled, mais ne siège pas.
Entretemps, délaissant peu à peu l’activisme parlementaire ainsi que son hebdomadaire Ha‘Olam HaZeh (dont le style est désormais copié par les grands quotidiens israéliens émancipés de la censure militaire), Uri Avnery participe à la fondation du Conseil israélien pour la paix israélo-palestinienne (CIPIP), en compagnie de figures publiques comme l’écrivain Amos Keinan, le général Mattityahou « Matti » Peled (1923 – 1995)17, l’économiste libéral Yaakov Arnon (1913 – 1995)18, l’historien Meïr Païl (1926 – 2015)19, l’écrivain David Shaḥam (1923 – 2012)20, etc. Fondé en 1974, le CIPIP ne se présentera jamais en parti politique, mais plutôt en groupe de pression défendant le principe du retrait israélien hors de tous les territoires occupés depuis juin 1967 et, surtout, la reconnaissance de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et l’ouverture de négociations directes avec elle, à une époque où la fédération de mouvements nationalistes palestiniens présidée par Yasser Arafat était considérée comme une organisation terroriste.
En 1982, l’invasion israélienne du Liban fournira à Uri Avnery l’occasion de faire un « coup » politique et médiatique historique. Alors que l’armée israélienne, emmenée par le ministre de la Défense Ariel Sharon et le chef d’état-major Refaël Eitan, traque les responsables de l’OLP et que son aviation pilonne Beyrouth-Ouest, Uri Avnery parvient à franchir la ligne de front et à rencontrer Yasser Arafat. Filmée et photographiée par des journalistes de Ha‘Olam HaZeh, cette rencontre fait l’effet d’une bombe en Israël. Alors que le Parti travailliste (alors dans l’opposition), l’extrême droite et le Likoud demandent l’arrestation d’Avnery, il échappe à la prison grâce au refus discret du Premier ministre Menaḥem Begin d’ordonner des poursuites. Ce n’est pas la première fois que Begin, même s’il est scandalisé par l’initiative d’Avnery, lui permet d’échapper à des déboires judiciaires, et, dans ce cas-ci, à la cour martiale. Begin n’oublie pas le passé de milicien de droite nationaliste du jeune Avnery à l’époque de la lutte contre le mandat britannique en Palestine. Cette rencontre sera suivie d’autres, à Tunis (l’exécutif de l’OLP y a été exfiltré par l’armée française), en compagnie cette fois de tous les membres du CIPIP.
En décembre 1988, l’éclatement du premier soulèvement palestinien (Intifada) contre l’occupation israélienne et l’expression par ses commandants de mots d’ordre axés sur la fin de l’occupation et la résolution du conflit israélo-palestinien sur la base de deux États indépendants ont un impact mitigé sur la société israélienne. Mitigé, mais tenace : les jeunes conscrits israéliens sont petit à petit fatigués de devoir réprimer un soulèvement non armé. Les rencontres publiques se multiplient entre responsables de l’OLP et les membres du CIPIP, tandis que des rencontres secrètes, orchestrées par Avnery, se multiplient entre responsables militaires israéliens et responsables de l’OLP.
Lors des élections législatives de mai 1992, pour la première fois depuis le « renversement » (mahpakh) de 1977, la gauche (Meretz) et le centre-gauche (Avoda travailliste) israéliens remportent le scrutin. Faisant la même analyse que le travailliste Yossi Beilin, Uri Avnery estime qu’il s’agit là d’un « miracle » politique qui ne se reproduira pas : dans les colonies israéliennes dites « économiques » (par opposition aux colonies « idéologiques » du camp nationaliste religieux) et dans les villes pauvres de l’intérieur d’Israël, de nombreux électeurs, traditionnellement acquis au Likoud, ont voté pour le Parti travailliste. C’est en quelque sorte une « anomalie », un défi à la sociologie israélienne de la fin du XXe siècle.
Les « accords d’Oslo » de septembre 1993 ne démentent pas l’analyse d’Avnery. La reconnaissance mutuelle est déséquilibrée. Si l’OLP renonce à la lutte armée et au terrorisme et reconnait le droit à l’existence de l’État d’Israël, ce dernier ne reconnait que la représentativité de l’OLP et l’existence du peuple palestinien (ha‘am hafalastini, pour la première fois en hébreu dans le texte), mais il n’est nulle part fait mention d’un quelconque démantèlement partiel ou total des colonies de peuplement ni de l’exercice du droit à l’autodétermination des Palestiniens dans le cadre d’un État palestinien. Et de fait, rien dans les accords successifs d’application d’Oslo ne vient assombrir l’horizon des implantations israéliennes de peuplement et de leurs habitants. Pis, convaincu qu’il faut à tout prix éviter de mettre des bâtons dans les roues d’un gouvernement pour lequel nombre de ses militants ont voté, le mouvement Shalom Akhshav (La Paix maintenant) se fait de moins en moins entendre.
C’est pourquoi, en 1993, Uri Avnery fonde et devient le porte-parole d’un nouveau mouvement pacifiste, plus radical et à l’agenda indépendant de celui du gouvernement Rabin-Peres : le Goush Shalom (Bloc de la Paix). Mais ce mouvement ne parviendra jamais à dépasser les marges de gauche de la société juive israélienne, ni à peser sur le gouvernement Rabin-Peres et, à fortiori, sur ses successeurs de droite présidés par Ariel Sharon et Benyamin Netanyahou.
C’est donc isolé, mais auréolé du statut de vieux sage sur la montagne, qu’Uri Avnery vit ses dernières années. Entretemps, la seconde Intifada et ses contrecoups sanglants (vagues de plus en plus violentes d’attentats terroristes) ont laissé une marque indélébile dans la conscience collective israélienne. L’idéal de coexistence israélo-palestinienne pacifique, presque tutoyée entre 1990 et 2000, a fait place à l’exigence de la séparation radicale, séparation concrétisée par la « clôture de séparation » édifiée dans les territoires occupés. Dans un contexte où la société israélienne, hantée par le discours de l’éphémère Premier ministre Ehoud Barak, est à nouveau convaincue que la reconnaissance du droit à l’autodétermination du peuple palestinien équivaut à la destruction de l’État d’Israël et à l’extermination de la société juive israélienne, l’attachement répété d’Uri Avnery à l’OLP et à ses dirigeants sonnera au mieux comme un cri dans le désert, au pire comme de la naïveté sénile. Ses prises de position contre le BDS21 ne lui ont pas permis de reprendre pied dans le débat israélien. Son opposition à l’État binational (qu’il considérait comme la promesse de larmes et de sang, pour les Palestiniens d’abord, pour les Juifs israéliens ensuite) ne l’a pas davantage remis en selle. Deux semaines avant son décès, sa dénonciation, « hébraïquement » (ou « israéliennement ») et démocratiquement motivée, de la loi très controversée « Israël, État-nation du peuple juif » a résonné dans le désert22.
Que reste-t-il d’Uri Avnery ? Quelles traces a‑t-il laissées dans la société israélienne ? Qui était Uri Avnery, en fin de compte ? Difficile de le savoir.
Dans un de ces billets furieux et acides dont il a le secret23, le journaliste Gideon Levy24 s’est déchainé contre une sphère publique israélienne soudainement frappée de nostalgie par l’annonce du décès du vieux combattant hébreu. Pour Levy, « Avnery était l’antithèse de Meïr Kahana [fondateur du Kakh, nationaliste suprémaciste juif, assassiné à New York en 1990 par un Palestinien], mais tous deux ont marqué la société israélienne. Là où Kahana a instillé le racisme juif qui a désormais droit de cité au gouvernement, Avnery a tracé les contours d’un camp de la paix israélien. Au point de devenir la figure de proue de l’extrême gauche israélienne, alors qu’il était d’abord et avant tout un sioniste. » Gideon Levy va peut-être trop vite en besogne. Il oublie que, dans tous ses écrits postérieurs à la guerre de 1948, Uri Avnery considère que le sionisme a fait son œuvre et son temps. L’État hébreu est né, le sionisme a atteint son objectif et il s’agit désormais d’inscrire la survie de l’État d’Israël dans une perspective postsioniste (c’est lui l’inventeur de cette expression) fondée sur un enjeu honni par la majorité du spectre politique israélien : l’intégration (hishtalvout) dans un Moyen-Orient pluraliste, pluriethnique et démocratique.
À l’inverse de Gideon Levy, Tom Segev25, un des pionniers de la nouvelle historiographie israélienne, brosse un portrait nettement plus en demi-teinte. Segev avait jadis26 eu des propos très durs à l’encontre d’Uri Avnery, à qui il reprochait un égotisme27, une fascination pour les militaires et un manque total d’empathie pour non seulement les victimes et les rescapés du génocide nazi, mais également pour les premiers dirigeants sionistes (au premier rang desquels David Ben Gourion), décontenancés et tétanisés par le génocide, ainsi que par le poids de ce dernier dans la construction de l’identité collective israélienne. Dans le supplément littéraire de Ha’Aretz, Tom Segev publie un article à charge et à décharge28. S’ils louent le travail pionnier du défunt sur le terrain du conflit israélo-palestinien, les autres compliments de Segev sont, volontairement, à double tranchant : « Il n’a jamais donné la moindre consigne de vote parce que, dans sa conviction d’être l’un des derniers guerriers hébreux, il n’imaginait qu’un seul avenir et un seul chef pour notre nation : lui-même. »
Il n’y a pas ici à départager Levy et Segev. Le paradoxe d’Uri Avnery, c’est que, toute sa vie, il s’est inscrit dans les pas du fondateur de la droite révisionniste israélienne, Vladimir Jabotinsky. Ce dernier, dans « À propos du mur de fer » (« O železnoy stiene »)29, un article publié le 4 novembre 1923 dans Rasviet (L’Aurore), un hebdomadaire sioniste de langue russe édité à Berlin et à Paris, tint un raisonnement aussi décisif que symptomatique : « Tout peuple autochtone lutte contre les colons étrangers. […] C’est ainsi que feront également les Arabes d’Eretz-Israël [Palestine], tant que subsistera dans leur esprit une lueur d’espoir de parvenir à empêcher la transformation d’Eretz-Israël d’un pays arabe en un pays juif. […] [Nous devons faire en sorte] que notre colonisation [de peuplement] puisse se développer sous la protection d’une force qui ne dépende pas de la population locale [arabe] et à l’abri d’un mur de fer que celle-ci ne pourra pas abattre. […] Cela ne signifie pas qu’aucune forme d’accord n’est possible. Mais un accord spontané est inimaginable. Tant que les Arabes conserveront une lueur d’espoir de parvenir à se débarrasser de nous, rien au monde ne pourra les détourner de cet espoir. […] La seule voie vers un accord [futur entre les deux peuples], c’est le mur de fer, c’est-à-dire la création en Eretz-Israël d’une force qui ne puisse subir la pression arabe. […].»
Uri Avnery, héritier de Zeev Jabotinsky ? Oui, franchement oui. À cette différence fondamentale (Jabotinsky est décédé en 1940 en Grande-Bretagne, avant le génocide nazi) que, dès la victoire de 1948 et contrairement aux héritiers orthodoxes de Jabotinsky, Avnery, tout pétri de culture martiale qu’il fut, estima que le sionisme avait accompli son œuvre, que le « mur de fer » était là et que, désormais, il faudrait le franchir pour converser avec les Arabes palestiniens et, dans un second temps, abattre ledit mur. Contrairement à ses collègues sionistes de gauche ou travaillistes, Avnery a précocement reconnu l’identité palestinienne. Ses digressions et ses fantasmes sémitiques ont, paradoxalement, davantage parlé aux Palestiniens que les malaises exprimés par la gauche israélienne. Surtout, Avnery posa des questions dérangeantes tant pour les Juifs israéliens que pour les Arabes palestiniens. La plus importante d’entre elles était : Comment faire société si les couples mixtes (binationaux ou biconfessionnels) étaient mis hors la loi ? Pour Avnery, la victoire de la Révolution hébraïque devait être celle de la Révolution arabe : un Arabe avait le droit de devenir un Hébreu comme un Hébreu avait le droit de devenir un Arabe.
Pour conclure, reposons la question de l’héritage. Avnery n’en laisse aucun. Premièrement, parce qu’il appartient à une génération pratiquement éteinte, la « Génération 5708 », celle du combat pour l’indépendance juive ou hébraïque. Deuxièmement, parce que son individualisme et son égotisme forcenés (il suffit de lire tous ses textes écrits à la première personne du singulier publiés uniquement en hébreu dans Ha’Aretz), semblables en cela à Jabotinsky, n’ont permis à personne de se revendiquer de lui. Bref, une vie extraordinaire et une mort ordinaire.
Il n’y a aucune place à prendre.
- Krutikov M., « Les Juifs ont ramené la civilisation en Allemagne » (Yidn hobn tsurikgebrakht Tsivilizatsye in Daytshland, traduit du yiddish par P. Fenaux), La Revue nouvelle, janvier 2015.
- Village juif semi-collectiviste en Palestine/Israël.
- Nahalal, pépinière de futurs cadres militaires du mouvement travailliste, avait été édifiée en 1921 sur des terres achetées au gros bourg arabe palestinien voisin de Ma‘aloul, détruit durant la guerre de 1948.
- Par « révisionnisme », il faut entendre l’Alliance des Sionistes révisionnistes (Tzohar), une scission de l’Organisation sioniste mondiale, scission emmenée par le tribun sioniste Vladimir Jabotinsky (Odessa) et par son organisation de jeunesse paramilitaire, le Beitar de Menahem Begin, né dans la grande ville juive de Brześć Litewski (Brest, aujourd’hui en Bélarus) sous le nom officiel de Mieczysław Biegun et futur Premier ministre israélien.
- Né en 1874 à Motył (Motaĺ, actuel Bélarus) et décédé en 1952 à Reḥovot (Israël). Les recherches de ce chimiste contribuèrent à l’effort de guerre britannique durant le premier conflit mondial et lui donnèrent un poids politique certain auprès des Conservateurs britanniques.
- Acronyme hébreu de l’Irgoun Tzvaï Léoummi, l’Organisation militaire nationale.
- Pour s’en expliquer, il publie en 1945 (de façon anonyme) un pamphlet intitulé Le Terrorisme, maladie infantile de la Révolution hébraïque, pour le compte des éditions du « Mouvement du Peuple ».
- Ces idées seront exportées jusque dans le monde arabe où les partis baasistes les adopteront de façon pour le moins expéditive (Fenaux P., « La Terreur promise », La Revue nouvelle, octobre 2002).
- Nom de plume d’Uriel Shelaḥ (1908 – 1981), né à Varsovie sous le nom d’Uriel Halperin.
- Né Amos Levin à Tel-Aviv de parents originaires de Vitebsk (aujourd’hui en Bélaruś).
- Né Nathan Yellin dans la ville juive de Grodno (aujourd’hui Hrodna, en Bélaruś).
- Né Iicchak Jaziernićky dans la bourgade juive de Różana (aujourd’hui Ružany, en Bélarus).
- Ce Juif irakien né à Bagdad, élevé en Égypte et émigré en Palestine en 1946, après plusieurs décennies d’activisme politique parlementaire et extra-parlementaire, terminera sa vie comme correspondant permanent des quotidiens français Le Matin et Libération.
- Acronyme hébreu du Parti ouvrier de Palestine (Mifleget Po‘alei Eretz-Israël), ancêtre de l’actuel Parti travailliste israélien.
- Bourgade juive du nord de la Pologne jusqu’au génocide nazi, Płońsk était la ville natale de Ben Gourion, enregistré à l’état civil sous le nom de Dawid Gryn.
- Fenaux P., « Israël-Palestine – 1967 : Six jours et un demi-siècle tous droits dans le mur », e‑Mois, blog de La Revue nouvelle, 6 juin 2017.
- Né Mateusz Ifland, cet ancien responsable de l’état-major militaire israélien durant la guerre des Six Jours était issu d’une famille originaire de la ville juive galicienne de Drohobycz (aujourd’hui en Ukraine).
- Né à Amsterdam sous le nom de Jacob van Amerongen et rescapé du génocide nazi.
- Né Meïer Piliavski à Jérusalem, cet ancien des forces spéciales israéliennes durant la guerre de 1948 était issu d’une famille originaire de la bourgade juive galicienne de Czerwonogród (aujourd’hui Červonohrad, en Ukraine).
- Né David Steinman à Varsovie dans une famille d’écrivains originaires de la métropole majoritairement juive de Kishinev (aujourd’hui Chișinău, en Moldavie).
- Avnery U., « Pourquoi le BDS ne nous sauvera pas », Ha’Aretz, 18 septembre 2017.
- Avnery U., « Juifs ou Israéliens, le temps est venu de décider qui nous sommes », Ha’Aretz, 7 aout 2018.
- Levy G., « Avnery Superstar », Ha’Aretz, 23 aout 2018.
- Né Gedeon Löwy à Tel-Aviv, dans une famille juive germanophone réfugiée des Sudètes (Tchécoslovaquie), originaire de Saaz (aujourd’hui Žatec, en Tchéquie). La virulence éditoriale de Gideon Levy s’explique, sans doute, par le fait qu’il fut longtemps le porte-parole de Shimon Peres et qu’il découvrit (sur le tard) que son mentor, né Szymon Perski dans la bourgade juive polonaise de Wiszniew (aujourd’hui Višnieva, en Bélarus), n’était qu’un politicien dans le sens le plus péjoratif du terme.
- Juif allemand comme Avnery, Tom Segev est né Thomas Schwarz à Jérusalem, dans une famille de réfugiés juifs allemands de Dessau (Saxe-Anhalt, ex-RDA).
- Segev T., Le Septième Million, Liana Levi, 1993.
- Tom Segev ne se trompe pas totalement. Les « rubriques bimensuelles » d’Avnery dans l’édition hébraïque de Ha’Aretz sont édifiantes. Rédigées à la première personne et sans aucune référence à ses compagnons d’armes de 1940 à 2018, elles ont, pour toute personne extérieure, quelque chose d’insupportable.
- Segev T., « La génération sceptique élevée par Avnery a également su dévoiler les mythes de ce dernier », Ha’Aretz, 24 aout 2018.
- Rasviet, n° 42 – 43, 4 novembre 1923, Berlin. Une version française intégrale est proposée dans la somme de Denis Charbit, Sionismes – Textes fondamentaux, Albin Michel, 1998.
