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Ukraine. Holodomor, les enjeux d’une reconnaissance tardive

Numéro 12 Décembre 2008 par Bernard De Backer

décembre 2008

« Si nous n’en­tre­pre­nons pas immé­dia­te­ment le redres­se­ment de la situa­tion en Ukraine, nous pou­vons perdre l’U­kraine. […] Il faut trans­for­mer l’U­kraine, dans les plus brefs délais, en véri­table for­te­resse de l’URSS, en répu­blique véri­ta­ble­ment exem­plaire. Ne pas lési­ner sur les moyens. » Lettre de Sta­line à Kaga­no­vitch, 11 aout 1932 (citée par Werth, 2007) En 1933, des […]

« Si nous n’en­tre­pre­nons pas immé­dia­te­ment le redres­se­ment de la situa­tion en Ukraine, nous pou­vons perdre l’U­kraine. […] Il faut trans­for­mer l’U­kraine, dans les plus brefs délais, en véri­table for­te­resse de l’URSS, en répu­blique véri­ta­ble­ment exem­plaire. Ne pas lési­ner sur les moyens. »

Lettre de Sta­line à Kaga­no­vitch, 11 aout 1932 (citée par Werth, 2007)

En 1933, des mil­lions de pay­sans d’Ukraine et à majo­ri­té ukrai­nienne de la région du Kou­ban (Cau­case du Nord) sont affa­més par le pou­voir sovié­tique puis — pour les sur­vi­vants réchap­pés de l’invasion nazie et de la « grande guerre patrio­tique » — contraints de faire l’omerta sur ce qui leur était arri­vé. Aujourd’hui, trois-quarts de siècle plus tard, la recon­nais­sance des faits semble encore timide en Europe. La presse s’attarde davan­tage sur l’instrumentalisation des évé­ne­ments et sur les polé­miques rus­so-ukrai­niennes que sur la famine elle-même. En atten­dant, ce pas­sé « ne passe pas », comme en atteste la lente, mais inexo­rable remon­tée des archives et des témoi­gnages après un silence abso­lu de près de soixante ans.

Holo­do­mor fait pen­ser à holo­causte, par l’identité de la pre­mière syl­labe et le fait de dési­gner des crimes de masse atroces et presque contem­po­rains. L’origine du pre­mier terme est cepen­dant très dif­fé­rente de celle du second1. Le mot ukrai­nien « holod » (« golod » en russe) signi­fie « faim », mais aus­si « famine ». Une des pre­mières expres­sions asso­ciées à « golod », que l’on trouve dans un dic­tion­naire fran­çais-russe usuel (Larousse, 1989) est étran­ge­ment « mory­ty golo­dom », soit « faire mou­rir de faim ». C’est cette expres­sion qui a four­ni, par contrac­tion, « holo­do­mor », nom don­né à la famine pro­vo­quée par le régime sta­li­nien en Ukraine.

Punir par la faim

Si 1933 évoque pour nous la prise de pou­voir de Hit­ler, pour les Ukrai­niens, c’est l’année de l’un des épi­sodes les plus hor­ribles de leur his­toire, tabou jusqu’en 1987 : la mort de quatre à dix mil­lions2 de pay­sans affa­més puis confi­nés de force dans leurs vil­lages, à la suite de la sai­sie de leurs récoltes et de leurs réserves par les « acti­vistes » du régime, après la col­lec­ti­vi­sa­tion et la dékou­la­ki­sa­tion (1929 – 1930). La par­ti­cu­la­ri­té de la situa­tion en Ukraine, com­pa­rée à celle du Kaza­khs­tan où la famine a déci­mé une pro­por­tion plus impor­tante de la popu­la­tion, est que la famine s’est dérou­lée après la col­lec­ti­vi­sa­tion et n’en est donc pas un effet direct.

Holo­do­mor est un mot lourd de sens. Il ne véhi­cule pas la même signi­fi­ca­tion que « grande famine de 1933 » ou « famine en Ukraine ». Le carac­tère non acci­den­tel de l’événement est conte­nu dans l’appellation. Sur ce point, si après une longue période de mécon­nais­sance — voire de néga­tion idéo­lo­gique — la majo­ri­té des his­to­riens recon­naît à la fois l’ampleur de la famine et son carac­tère non acci­den­tel dans le cadre de la « guerre contre les pay­sans », livrée par le pou­voir sovié­tique, le qua­li­fi­ca­tif de « géno­cide » ne fait pas l’unanimité. Cepen­dant, dans un texte3 dense et très docu­men­té sur la base d’archives deve­nues acces­sibles, un his­to­rien spé­cia­liste de l’URSS comme Nico­las Werth — jusque-là réser­vé sur la qua­li­fi­ca­tion de géno­cide — finit par affir­mer en conclu­sion : « Le terme de géno­cide paraît s’imposer pour qua­li­fier l’ensemble des actions poli­tiques menées inten­tion­nel­le­ment, à par­tir de la fin de l’été 1932, par le régime sta­li­nien pour punir par la faim et par la ter­reur la pay­san­ne­rie ukrai­nienne, actions qui eurent pour consé­quence la mort de plus de quatre mil­lions de per­sonnes en Ukraine et au Cau­case du Nord. »

La qua­li­fi­ca­tion de géno­cide, de famine invo­lon­taire induite par les poli­tiques sovié­tiques ou de famine acci­den­telle — voire de « sérieuse disette » ou de « puni­tion divine pour apos­ta­sie » — est un enjeu fon­da­men­tal, non seule­ment pour les popu­la­tions concer­nées, pour les inter­pré­ta­tions de l’histoire par les pou­voirs ukrai­nien et russe, mais aus­si pour notre propre com­pré­hen­sion du XXe siècle. Sur ce point, la com­mé­mo­ra­tion du sep­tante-cin­quième anni­ver­saire de la famine a don­né lieu à une série de décla­ra­tions qui montrent bien la nature des enjeux et la que­relle des inter­pré­ta­tions, sans comp­ter la mécon­nais­sance encore criante des faits.

Tout affamé est un cannibale

Pour mesu­rer un tant soit peu ce dont il est ques­tion au-delà de la que­relle des chiffres et des inter­pré­ta­tions, il convient d’abord de dire un mot sur ce que signi­fie « mou­rir de faim ». Dans ces vil­lages pillés par des « extor­queurs » armés de barres de fer qui fouillent granges, caves et gre­niers pour empor­ter bétail, récoltes et semences, puis orga­nisent un blo­cus pour empê­cher les pay­sans d’aller men­dier en ville ou ten­ter de trou­ver de la nour­ri­ture dans d’autres régions, que se passe-t-il ? Que devient un homme, une femme, des enfants qui n’ont plus rien à man­ger pen­dant quelques jours, une semaine, un mois ?

Les témoi­gnages des sur­vi­vants4, sou­vent insou­te­nables, nous livrent de mul­tiples récits des évé­ne­ments et de leurs consé­quences sur la popu­la­tion affa­mée : recherche déses­pé­rée de nour­ri­ture (chiens, chats, rats, vers, racines, orties, bour­geons, cadavres…), hydro­pi­sie, som­no­lence, typhus, vio­lences entre affa­més, meurtres, can­ni­ba­lisme, folie, fosses com­munes. Vas­si­li Gross­man a décrit ce pro­ces­sus dans son roman Tout passe qui contient la nar­ra­tion de la famine par une acti­viste repen­tie, Anna Ser­gueiev­na. Celle-ci, après avoir racon­té l’enchaînement des faits depuis la col­lec­ti­vi­sa­tion et la dékou­la­ki­sa­tion de 1929 – 1930, décrit le des­tin des familles pri­son­nières de leurs vil­lages, puis la faim qui dévore la chair et l’âme des hommes : « J’ai com­pris que tout affa­mé était, en son genre, un can­ni­bale. Il consomme sa propre chair, il n’y a que les os qui res­tent. Il vit sur sa graisse jusqu’au der­nier gramme. Ensuite sa rai­son s’obscurcit : il a man­gé sa cer­velle. L’affamé s’est man­gé tout entier. »

La situa­tion est d’autant plus ter­ri­fiante que les mêmes vil­lages ont déjà subi les vio­lences de la col­lec­ti­vi­sa­tion, puis celle de la « dékou­la­ki­sa­tion » et de la dépor­ta­tion-aban­don de mil­liers de per­sonnes en Sibé­rie, dans l’Oural et au Kaza­khs­tan, accom­pa­gnées de la des­truc­tion du patri­moine rural tra­di­tion­nel, notam­ment reli­gieux. Des églises ont été brû­lées, des sanc­tuaires vio­lés. Comme le raconte un sur­vi­vant, il convient désor­mais d’adorer Sta­line et « Lazare le noir », sur­nom de Lazare Kaga­no­vitch, adjoint de Sta­line envoyé comme « plé­ni­po­ten­tiaire », avec Molo­tov, pour diri­ger les opé­ra­tions dans le Kou­ban et en Ukraine.

Les motifs d’une telle vio­lence d’État, dans le cadre d’une dif­fi­cul­té crois­sante à atteindre les objec­tifs fixés par le Pre­mier plan quin­quen­nal, sont à situer dans une double ten­sion qui s’exaspère depuis la fin de la NEP en 1927 : d’un côté, entre le pou­voir bol­che­vique et les pay­sans, de l’autre, entre le « centre » et les marches occi­den­tales de l’URSS. La pay­san­ne­rie ukrai­nienne, vivant dans la RSS d’Ukraine ou dans le Kou­ban, incarne à la fois une popu­la­tion rurale rétive à la col­lec­ti­vi­sa­tion per­çue comme « un nou­veau ser­vage » et le ter­reau d’une iden­ti­té natio­nale jugée peu fiable. Il faut donc la punir, « trans­for­mer l’Ukraine en véri­table for­te­resse de l’URSS » sans « lési­ner sur les moyens » comme l’ordonnait Sta­line à Kaga­no­vitch, mais aus­si pré­le­ver les récoltes pour nour­rir les villes et les ouvriers de l’industrie, sans oublier les expor­ta­tions (1,7 mil­lion de tonnes de céréales expor­tées en 1933). L’exaltation révo­lu­tion­naire des acti­vistes « chauf­fés » par la dékou­la­ki­sa­tion, les règle­ments de comptes locaux et la vio­lence induite par la situa­tion chez les pay­sans eux-mêmes (rapines, meurtres, can­ni­ba­lisme) mène­ront au comble de l’horreur.

Combat pour l’indépendance ou tragédie commune

Il fau­dra attendre près de soixante ans pour que le sujet ne soit plus tabou en URSS5, alors qu’à l’Ouest, l’historien bri­tan­nique et ancien com­mu­niste Robert Conquest publie en 1986 un ouvrage pion­nier, The Har­vest of Sor­row : Soviet Col­lec­ti­vi­sa­tion and the Ter­ror-Famine. Comme pour les autres crimes du com­mu­nisme sovié­tique, la révé­la­tion pro­gres­sive (accès aux archives, témoi­gnages de sur­vi­vants) de l’ampleur des faits et du carac­tère pro­vo­qué de la famine par le pou­voir bol­che­vique se heur­te­ra bien sou­vent à une levée de bou­cliers ou à un silence de plomb. Les argu­ments déployés contre les don­nées issues de l’historiographie contem­po­raine vont de « l’anti-communisme pri­maire » au « natio­na­lisme ukrai­nien », en pas­sant par « la pro­pa­gande alle­mande, polo­naise et vaticane ».

La dis­so­lu­tion de l’URSS et l’indépendance de l’Ukraine en 1991 vont accroître les ten­sions autour du carac­tère inten­tion­nel de la famine. En effet, les évé­ne­ments de 1933 — renom­més Holo­do­mor — vont occu­per une bonne par­tie du débat poli­tique et cultu­rel en Ukraine. Des enquêtes sont menées auprès des sur­vi­vants, des ins­ti­tuts de recherche tra­vaillent sur les archives, un « mémo­rial » est éri­gé au cœur de Kiev et des com­mé­mo­ra­tions ont lieu dans dif­fé­rentes régions. La famine devient un enjeu fon­da­men­tal dans un pays qui cherche à conso­li­der son iden­ti­té natio­nale. Les évé­ne­ments de 1933 sont non seule­ment un trau­ma­tisme d’une ampleur inouïe, mais leur dimen­sion inten­tion­nelle est en elle-même la preuve de cette iden­ti­té que Sta­line (et le pou­voir russe par exten­sion) aurait vou­lu détruire et dont les résis­tances pay­sannes furent l’expression. Ce qu’affirme le pré­sident ukrai­nien Ioucht­chen­ko : « Ce fut une des pages sombres de notre com­bat pour l’indépendance, notre culture et notre identité. »

En novembre 2006, le Par­le­ment ukrai­nien a recon­nu offi­ciel­le­ment la famine comme un géno­cide per­pé­tré par le régime de Sta­line contre le peuple ukrai­nien. Fin juillet 2008, les archives du SBU (héri­tier du KGB ukrai­nien) ont été ouvertes6 au public, ceci pour toute la période de 1917 à 1990. Quant au Par­le­ment euro­péen, il a, le 23 octobre der­nier, rete­nu le terme de « crime contre l’humanité » pour qua­li­fier la grande famine. Cette année, la com­mé­mo­ra­tion du sep­tante-cin­quième anni­ver­saire le 22 novembre 2008 aura été d’une ampleur excep­tion­nelle, avec une « sty­lis­tique sovié­tique » selon cer­tains obser­va­teurs. De nom­breux évé­ne­ments ont été orga­ni­sés dans le pays et des chefs d’États étran­gers de nations proches ayant été vic­times du sta­li­nisme (Pologne, Pays baltes…) étaient pré­sents. Le pré­sident russe Med­ve­dev, quant à lui, a décli­né l’invitation en arguant que la famine était une « tra­gé­die com­mune » aux peuples sovié­tiques. Dès lors, dire qu’il visait à la des­truc­tion des Ukrai­niens « signi­fie aller contre les faits et essayer de don­ner un sous-texte nationaliste ».

Entre mauvais caculs et apostasie

Nou­velle pomme de dis­corde entre la Rus­sie et l’Ukraine, l’interprétation de la famine a don­né lieu à de vifs échanges. La thèse géné­ra­le­ment défen­due du côté russe est que la famine de 1932 – 1933 en Ukraine n’a rien de spé­ci­fique, mais « n’est » qu’une consé­quence de la col­lec­ti­vi­sa­tion « mus­clée » des terres, un effet col­la­té­ral de la moder­ni­sa­tion qui a tou­ché tous les pay­sans sovié­tiques. On pou­vait ain­si lire sous la plume d’un his­to­rien russe, Vik­tor Kon­dra­chine7 : «[…] il convient de consi­dé­rer cette famine comme le résul­tat des mau­vais cal­culs de la poli­tique sta­li­nienne, étroi­te­ment liée au pro­blème — plus géné­ral — de la moder­ni­sa­tion indus­trielle de l’URSS, menée à bien par des méthodes mus­clées à la fin des années vingt et au début des années trente. » Par ailleurs, tou­jours selon Kon­dra­chine, si la famine fut par­ti­cu­liè­re­ment meur­trière en Ukraine, c’est la faute des Ukrai­niens qui n’ont pas aver­ti leurs supé­rieurs : « Concer­nant la situa­tion en Ukraine en 1932, il convient de sou­li­gner que les diri­geants ukrai­niens n’informèrent pas leurs supé­rieurs hié­rar­chiques de l’étendue de la famine consta­tée dans leurs régions. Ils assument donc dans une grande mesure la res­pon­sa­bi­li­té de l’envergure de cette famine et de la réac­tion tar­dive du centre8. »

Selon le pré­sident Med­ve­dev, « au cours des der­nières années, ce thème, tout comme les ten­ta­tives de Kiev d’intégrer la « classe pré­pa­ra­toire » à l’Otan, est au cœur de la poli­tique exté­rieure de l’Ukraine […] Nous esti­mons que les évé­ne­ments tra­giques du début des années trente sont uti­li­sés à des fins poli­tiques », indique le Krem­lin. Pour le pré­sident russe, les efforts du gou­ver­ne­ment ukrai­nien « visent plu­tôt la dés­union maxi­male des peuples russe et ukrai­nien, qui ont des liens his­to­riques, cultu­rels et spi­ri­tuels sécu­laires dans une atmo­sphère d’amitié et de confiance mutuelle9 ».

Quant au métro­po­lite Onu­fry de Tcher­nivt­si et Buko­vine (église ortho­doxe d’Ukraine liée au Patriar­cat de Mos­cou), il consi­dère que la famine est une puni­tion de Dieu pour apos­ta­sie. C’est parce que les hommes se sont éloi­gnés de Dieu que celui-ci les a frap­pés, autant en Rus­sie qu’en Ukraine, en les fai­sant mou­rir de faim. En outre, pour­suit le métro­po­lite, « il y a cer­taines forces qui uti­lisent Holo­do­mor pour divi­ser la Rus­sie et l’Ukraine, disant que les Russes ont oppri­mé les Ukrai­niens, alors que la famine a tué plus de per­sonnes en Rus­sie10 ».

Au-delà de la recon­nais­sance de la famine elle-même, lon­gue­ment niée par Mos­cou, et du devoir de mémoire à l’égard des vic­times, son carac­tère éven­tuel­le­ment géno­ci­daire recèle un enjeu géo­po­li­tique majeur. Pour les Ukrai­niens, il est la preuve de leur exis­tence en tant que nation dis­tincte de la Rus­sie, et la mort de mil­lions de pay­sans une « des pages sombres du com­bat pour l’indépendance ». Pour la Rus­sie, le carac­tère non spé­ci­fique de la famine en Ukraine est le signe que les deux peuples demeurent unis. Vic­times d’un mau­vais cal­cul de Sta­line ou de la ven­geance de Dieu, les Slaves orien­taux auraient par­ta­gé le même mal­heur. Unis dans le pas­sé, ils devraient l’être aus­si dans l’avenir.

  1. « Holo­causte » est un terme reli­gieux qui désigne le sacri­fice d’un ani­mal par le feu. Il est emprun­té au latin holo­caus­tum, lui-même tiré du grec hólos « en entier » et kaús­tos « brûlé ».
  2. Chiffre avan­cé par le pré­sident ukrai­nien Ioucht­chen­ko, sur la base d’une sous­trac­tion entre le recen­se­ment de 1937 et de 1926, et en se réfé­rant au taux de crois­sance qu’aurait dû connaître la popu­la­tion. Il n’y a pas d’accord entre his­to­riens et démo­graphes sur le nombre exact de vic­times, qui a éga­le­ment frap­pé beau­coup de pay­sans russes. Pour une ana­lyse syn­thé­tique du pro­ces­sus qui a pro­vo­qué la famine de 1933 et des causes invo­quées par les his­to­riens, voir Donat Car­lier, « Holo­do­mor 1933 : le cime­tière de la rude école », La Revue nou­velle, octobre 2006.
  3. Nico­las Werth, La grande famine ukrai­nienne de 1932 – 1933, 2007. Ce texte est publié en ligne dans sa ver­sion anglaise, The Great Ukrai­nian Famine of 1932 – 33, April 2008, Online Ency­clo­pe­dia of Mass Vio­lence, www.massviolence.org/The-1932 – 1933-Great-Famine-in-Ukraine?artpage=5.
  4. Voir Soko­loff G., 1933, l’année noire. Témoi­gnages sur la famine en Ukraine, Albin Michel, 2000. Ce livre est une pré­sen­ta­tion et une tra­duc­tion d’extraits de l’ouvrage des jour­na­listes ukrai­niens Kova­len­ko L., Maniak V., 33‑i Golod. Narod­na kni­ga memo­rial, A. Maniak, 1991. Les deux jour­na­listes avaient recueilli près de six mille témoi­gnages de sur­vi­vants de la famine. Ils sont décé­dés peu de temps après la publi­ca­tion de leur « livre-mémo­rial ». D’autres récits avaient été col­lec­tés dans les années cin­quante auprès de migrants ukrai­niens au Canada.
  5. Le récit de Gross­man, Tout passe (1963), d’une extra­or­di­naire jus­tesse au regard de ce qui nous est aujourd’hui connu, a été inter­dit de publi­ca­tion au début des années soixante. La pré­sen­ta­tion de la ver­sion fran­çaise ne men­tionne pas une seule fois la famine qui consti­tue pour­tant un des sujets cen­traux du livre. Cette pré­sen­ta­tion, écrite pour la pre­mière édi­tion fran­çaise de 1984, est anté­rieure au livre de Conquest et de la levée du silence (la réa­li­té de la famine ne sera recon­nue offi­ciel­le­ment, en Ukraine, qu’en décembre 1987).
  6. Deux thèmes sont au centre de l’ouverture des archives : la famine de 1933 et l’UPA (armée insur­rec­tion­nelle ukrai­nienne fon­dée en 1942). L’UPA est une éma­na­tion de l’Organisation ukrai­nienne natio­na­liste qui fut alliée des nazis avant-guerre, sur­tout dans sa fac­tion diri­gée par Ste­pan Ban­de­ra. L’UPA lut­ta contre les nazis à par­tir de 1942 et contre les Sovié­tiques, mais aus­si contre les résis­tants et les civils polonais.
  7. L’Holodomor de 1932 – 1933, une tra­gé­die par­ta­gée, Novos­ti, 25 novembre 2008.
  8. Réunis à Khar­kov (ville d’Ukraine orien­tale qui sera par­ti­cu­liè­re­ment tou­chée par la famine) en juillet 1932 pour la IIIe confé­rence du PC ukrai­nien, les res­pon­sables com­mu­nistes locaux mani­festent leur oppo­si­tion au plan de col­lecte impo­sé par Mos­cou, déclen­chant la colère de Sta­line. Celui-ci délé­gue­ra Kaga­no­vitch et Molo­tov pour diri­ger les « com­mis­sions plé­ni­po­ten­tiaires » char­gées du contrôle des opé­ra­tions (Werth, 2007).
  9. Holo­do­mor : Kiev cherche à dés­unir les peuples, Novos­ti, 14 novembre 2008.
  10. Ukrai­nian Ortho­dox Hie­rarch consi­ders holo­do­mor a God’s punish­ment for apos­ta­sy, dépêche Inter­fax, 24 novembre 2008.

Bernard De Backer


Auteur

sociologue et chercheur