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Scrutin européen : la défaite social-démocrate
Le 8 juin, la social-démocratie européenne s’est réveillée avec une méchante gueule de bois. Les élections européennes ont fait fondre le groupe du PSE de trente-cinq députés (voir graphique). À la différence du PPE et des Verts, grands vainqueurs du scrutin, les sociaux-démocrates n’ont pas convaincu une partie importante de leurs anciens électeurs que leur réponse à la […]
Le 8 juin, la social-démocratie européenne s’est réveillée avec une méchante gueule de bois. Les élections européennes ont fait fondre le groupe du PSE de trente-cinq députés (voir graphique). À la différence du PPE et des Verts, grands vainqueurs du scrutin, les sociaux-démocrates n’ont pas convaincu une partie importante de leurs anciens électeurs que leur réponse à la crise était la bonne. À moins que celle-ci ne soit pas encore réellement perçue dans toute son amplitude et que les votes des Européens aient été davantage dictés par d’autres considérations comme l’insécurité, l’immigration ou l’environnement, comme le laissent entendre les résultats des eurobaromètres publiés avant le scrutin…
Quoi qu’il en soit, dans les deux pays centraux que sont la France et l’Allemagne, le PSE a enregistré une défaite sans précédent ou presque. Avec 16,8%, les socialistes français paient autant leurs divisions que leur absence de message fort par rapport à l’Europe comme par rapport à la crise. En Allemagne, le SPD réédite, lui, à 20,08% le très mauvais score de 2004 quand, en coalition avec les Verts, il menait les réformes « Harz IV » très inspirées de la philosophie de l’État social actif. Son virage à gauche accéléré depuis le déclenchement de la crise qui commence à frapper fortement le cœur de l’activité industrielle allemande ne semble pas lui réussir. Une enquête effectuée à la sortie des urnes citée par la chaîne de télévision ARD indique que seul un ouvrier allemand sur cinq est allé voter pour lui le 7 juin. La CDU de la chancelière Merkel est parvenue, elle, à convaincre 35% d’entre eux. La même analyse rapporte que près de 40% des électeurs du SPD éprouvent un certain malaise à propos des soutiens publics préconisés par le parti pour les entreprises mises en difficulté par la crise. Quant à l’extrême gauche, elle ne bénéficie pas de ce recul et elle régresse même de quatre sièges (trente-quatre au total) dans l’ensemble de l’Europe, même si en RFA les anciens communistes de Die Linke progressent par rapport à leurs résultats de 2004.
Nouvelles germinations vertes
Avec le PPE, les Verts sont les autres grands vainqueurs, leur groupe passant de quarante à cinquante-trois députés, si on y intègre les régionalistes. La nouvelle baisse du taux global de participation de 2,6% par rapport au scrutin de 2004 (à 43,5%) semble leur bénéficier, dans la mesure où les électeurs verts sont réputés avoir un engagement européen plus important. On voit ainsi que les écologistes continuent de relativement mieux se comporter aux élections européennes que dans les scrutins nationaux, régionaux, voire locaux qui ont été organisés le 7 juin. Dans un certain nombre de grandes villes européennes, leurs scores sont très importants. Ils dépassent régulièrement les socialistes, voire les chrétiens-démocrates, franchissant souvent la barre des 20%, et même une fois ou l’autre, celle des 30% dans les quartiers les plus centraux des grandes agglomérations de Suède, Belgique, Pays-Bas, Allemagne et en France. En France, Daniel Cohn-Bendit aura réussi au-delà de toutes ses espérances son pari de relever l’écologie politique qui avait tant souffert des déchirements des Verts, en parvenant à arracher quatorze sièges, à égalité avec le PS et loin devant le Modem de François Bayrou qui a commis l’erreur de concentrer sa campagne sur des enjeux franco-français. Les prochaines élections régionales de 2010 verront dans quelle mesure le résultat d’Europe Écologie sera ou non confirmé, mais pour l’écologie politique française, il s’agit quasiment d’une résurrection.
Barroso, souffle au cœur de l’Europe
Le paradoxe du succès des Verts est qu’il n’est pas certain que leur travail soit plus facile au Parlement européen au cours de la législature qui s’ouvre. Le recul du PSE les prive d’alliés habituels dans une série de dossiers cruciaux, qu’ils s’agissent de l’environnement ou du social. Ils devront sans doute élargir le cercle de leurs recherches pour forger des alliances ponctuelles sur la reconversion écologique comme sur leurs priorités sociales. Quant à la social-démocratie européenne, elle doit s’interroger sur sa réorientation. Après s’être longtemps compromise dans l’application de solutions de type libéral, elle ne peut se contenter d’un retour nostalgique aux origines du compromis fordiste et aux heures fastes des États-providence des Trente glorieuses. La relance de l’économie par la consommation, le soutien à des secteurs hautement consommateurs d’énergies fossiles ne semblent plus constituer une perspective réellement mobilisatrice, d’autant plus que sur ce plan les partis de droite semblent plus crédibles pour l’électorat traditionnel social-démocrate. Quoi qu’il en soit, c’est un euphémisme de dire que le projet d’une Europe plus forte, capable d’imposer une réponse commune à la crise n’est pas sorti véritablement renforcé du scrutin. En témoigne la reconduction de l’insipide Barroso soutenu inconditionnellement par le PPE vainqueur. Pourtant, depuis sa désignation en 2004, il a surtout brillé par son incapacité à mobiliser les institutions européennes et par son refus de faire pièce aux replis nationaux encouragés par la plupart des dirigeants européens, comme par ses propres commissaires. Une partie du succès des Verts est sans doute imputable à la campagne « Stop Barroso » qu’ils ont animée contre celui qui incarne tellement bien le souffle au cœur dont souffre aujourd’hui le projet européen. À la fin juin, sa désignation est temporairement suspendue, mais c’est sans doute une manière de mieux s’assurer de son entière soumission aux gouvernements nationaux.