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Rationalisation de l’offre universitaire et structuration du paysage
Quel bilan et quelles perspectives peut-on tirer de cinquante ans de débats ? En quelques années, le « paysage universitaire » s’est considérablement simplifié, et les six universités francophones placent la Fédération Wallonie-Bruxelles dans la moyenne européenne par rapport au nombre d’étudiants. En ce qui concerne la rationalisation de l’offre, le maintien de nombreux cursus d’études peu fréquentés et les universités « incomplètes » handicapent le système d’enseignement universitaire. Cet anachronisme devrait être corrigé.
La « rationalisation de l’université » a fait l’objet, au cours des dernières décennies, de multiples débats, lois et décrets. Ce thème comporte, comme on le verra, deux dimensions recouvrant des préoccupations différentes.
Pour illustrer l’évolution des débats, il est instructif de se replonger dans les rapports « Welsch-Troisfontaines » (1976) et « Bodson-Berleur » (1998). Ces rapports sont les deux seuls rapports de « sages » remis, à sa demande, à un ministre de l’Enseignement supérieur au cours des dernières années, respectivement par les recteurs Welsch (ULg) et Troisfontaines (FUNDP) et par les recteurs honoraires Bodson (ULg) et Berleur (FUNDP).
Sans surprise, chacun de ces documents est marqué par le contexte et les préoccupations spécifiques des responsables académiques de l’époque, mais tous deux consacrent une attention soutenue aux thèmes de la « rationalisation de l’offre » universitaire et de la structuration du « paysage » universitaire. Ces deux concepts visent des réalités différentes : le premier, la « rationalisation de l’offre », vise la duplication (ou la multiplication) des « petites sections » (c’est-à-dire des cursus d’études pour lesquels la population étudiante concernée est relativement réduite) et renvoie donc à la question d’une « spécialisation » éventuelle de toutes les universités1 ; le second, la structuration du « paysage » universitaire, porte sur le nombre (et l’opportunité de fusions éventuelles) d’universités en Fédération Wallonie-Bruxelles.
Pour chacun de ces deux thèmes, nous résumerons brièvement l’analyse et les recommandations développées dans les deux rapports, avant d’exposer la situation telle qu’elle se présente aujourd’hui.
Rappelons tout d’abord, afin d’éclairer l’exposé, quelques éléments de base.
Tant en 1976 qu’en 1998, la Communauté française comptait neuf universités : trois universités dites « complètes » car couvrant l’ensemble des domaines d’études et six universités dites « incomplètes » (ou « spécialisées », selon la terminologie internationale en vigueur) car ne couvrant qu’une partie du spectre des domaines d’études.
Les domaines d’études universitaires sont au nombre d’une vingtaine, regroupés en trois grands « secteurs » que sont les sciences humaines et sociales, les sciences et les sciences de la santé.
Un cursus d’études désigne un programme d’études spécifique proposé au sein d’un domaine d’études. Une grande majorité de domaines proposent plusieurs cursus d’études, tant en premier qu’en deuxième cycle, les nombres de cursus proposés étant toutefois nettement supérieurs dans le deuxième cycle. Les populations étudiantes des divers cursus sont d’importance très variable, allant — pour l’ensemble de la FWB — de quelques dizaines pour les cursus les moins fréquentés à plusieurs milliers pour les cursus les plus fréquentés. Dès lors qu’un cursus peu fréquenté est organisé simultanément par plusieurs universités, il donne lieu à l’apparition de « petites sections », dans lesquelles les conditions d’encadrement sont certes favorables pour les étudiants, mais dont l’organisation et le maintien sont couteux pour les universités concernées, d’où l’attention apportée à ces situations dans une perspective de la « rationalisation de l’offre ». Mais la vision d’une « organisation rationnelle de l’offre » doit aussi mener à s’interroger sur les sections situées à l’autre extrémité du spectre des tailles : l’existence de « grandes » sections résulte de l’organisation, dans les cursus très fréquentés, par un nombre (sans doute trop) limité d’universités. Dans ces « grandes » sections, les nombres d’étudiants sont tels que les conditions d’encadrement (et de suivi) des étudiants se trouvent inévitablement dégradées.
Pour des raisons historiques, la toute grande majorité des cursus est proposée simultanément dans les trois universités complètes et seule une minorité de ceux-ci est proposée (en vertu des habilitations octroyées) dans les universités incomplètes.
La « rationalisation de l’offre » universitaire ou la multiplication des « petites sections » : la question de la « spécialisation » des universités
L’analyse du rapport Welsch-Troisfontaines (1976) est superficielle. Certes, les auteurs reconnaissent d’emblée la pertinence d’une éventuelle (et très relative) « spécialisation » des universités complètes, mais pour lui opposer, tout aussitôt, une réponse catégorique « Limiter les initiatives des universités complètes en matière d’enseignement serait revenir sur le principe repris dans la loi d’expansion de 1965 de l’“universalité” des universités ».
Les auteurs plaident donc pour la voie d’une concertation interuniversitaire, mais pour souligner aussitôt l’ampleur des difficultés à surmonter et conclure qu’on ne peut trop attendre d’une telle concertation.
L’analyse du rapport Bodson-Berleur (1998) est un peu plus approfondie car les auteurs se donnent la peine de dresser une liste des « petites sections » en distinguant celles qui, n’étant organisées que par une seule université, méritent un statut privilégié de « protection », sous peine de priver la Communauté française de toute capacité d’enseignement et de recherche dans les domaines concernés. Pour les « petites sections » répliquées par plusieurs universités, les auteurs restent évasifs puis passent à un autre sujet. Il faut attendre le dernier chapitre pour voir apparaitre, dans un paragraphe intitulé « Pas d’utopie », la réponse des auteurs à la question « Ne conviendrait-il pas que les universités “complètes” se spécialisent, fût-ce (très) partiellement ? ». La réponse est aussi catégorique que lapidaire : « Cela n’aurait aucune chance d’être accepté » car, comme le rappellent les auteurs « Nos plus anciennes universités ont été fondées pour se faire contrepoids ».
On aura compris que le sujet est « politiquement délicat ». Il n’est donc pas surprenant que, sur cette question de la « rationalisation de l’offre », les choses n’aient pas évolué depuis la rédaction de ces rapports. Examinons donc la situation actuelle.
Les annuaires du Cref2 permettent d’identifier, pour chaque cursus d’études, tant du premier que du deuxième cycle, les populations étudiantes concernées et les universités organisant effectivement ce cursus. On peut alors, pour chaque cursus, calculer la « taille moyenne » des sections3. On peut alors classer les cursus, selon la « taille moyenne » des sections, dans diverses catégories de tailles, allant des « petites sections » (moins de 50 étudiants pour un cycle d’études) aux « grandes » (entre 200 et 250 étudiants), sinon « très grandes sections » (plus de 250 étudiants).
Cet exercice4 nous apprend quela taille moyenne des sections est nettement plus importante pour les cursus (moins nombreux) du premier cycle que pour ceux (plus nombreux) du deuxième cycle. Au premier cycle, seule une faible minorité de cursus donne lieu à des « petites sections », une proportion importante se retrouvant classée dans les « très grandes sections ».
Au deuxième cycle, la situation se présente très différemment selon les grands secteurs d’études. Le secteur des « sciences » se concentre quasi exclusivement dans les « petites » sections. Dans le secteur des « sciences humaines et sociales », les cursus se répartissent de façon uniforme entre les diverses catégories de tailles tandis que, dans le secteur des « sciences de la santé », on enregistre une concentration aux deux extrémités du spectre des tailles.
On observe que, par le poids de l’histoire et de l’inertie du système, la qualité des conditions d’encadrement (et de suivi) des étudiants se trouve très inégalement répartie selon le « secteur » d’études dont relève l’étudiant, sans qu’aucun argument, de nature pédagogique ou scientifique, ne puisse être invoqué pour justifier que, dans tel secteur d’études, presque tous les étudiants bénéficient de conditions d’encadrement les plus favorables tandis que, dans tel ou tel autre secteur d’études, une majorité des étudiants sont invités à (ou contraints de) s’entasser dans des « grandes », sinon « très grandes », sections.
Comme on le lira plus loin, une des recommandations de cette étude pourrait aboutir à atténuer (tout au moins partiellement) cette disparité des conditions d’étude.
La structuration du « paysage » universitaire
Pendant plus de quarante ans, le « paysage » universitaire a été organisé selon les dispositions de la loi dite d’«expansion universitaire » de 1965.
Avant de rappeler la portée de cette loi, resituons-la dans le contexte de l’époque. Ce contexte était celui d’une véritable « explosion » des populations universitaires5, générée principalement par le « baby boum » de l’après-guerre. Submergées par cet afflux d’étudiants, les universités, tant du nord que du sud du pays, dénoncent la très nette insuffisance des capacités d’accueil et appellent le gouvernement (à l’époque, encore national) à adopter les mesures qui s’imposent.
La « loi d’expansion universitaire » de 1965 visait à répondre à la fois aux besoins budgétaires et aux besoins d’extension des infrastructures, et donc des implantations. Dans le cadre belge, cette réponse devait tenir compte des « équilibres idéologiques » (entre institutions de l’État et institutions libres) ainsi que des équilibres régionaux. Sur le plan budgétaire, la loi de 1965 octroya une aide importante aux universités libres6 tout en accordant de larges compensations aux universités de l’État. Sur le plan des extensions d’infrastructures et d’implantations, la loi de 1965 étendit des « habilitations géographiques » (pour l’université catholique de Louvain, encore unitaire à l’époque, dans le canton de Wavre, sur le territoire de la ville de Courtrai et sur le territoire de la commune de Woluwe Saint-Lambert à Bruxelles ; pour l’université libre de Bruxelles, encore unitaire à l’époque, dans le canton de Nivelles), organisa le renforcement de l’offre universitaire à Anvers et à Mons et attribua la dénomination de « faculté » à l’une ou l’autre école ou institut supérieur7.
Ce rappel est utile pour bien comprendre la teneur — et la tonalité — du rapport Welsch-Troisfontaines (1976), rédigé à un moment où les universités commencent à ressentir les premiers effets des restrictions budgétaires consécutives à la crise de 1974. Les auteurs font, à diverses reprises, allusion aux difficultés budgétaires découlant de l’adoption de la « loi d’expansion universitaire » de 19658. Ils concentrent surtout leur analyse, et leurs critiques, sur trois cas. Le premier cas concerne un projet de loi visant à créer une « université du Hainaut » par le regroupement des trois institutions universitaires montoises (UMH, FPMS et Fucam). Les auteurs se montrent très critiques à l’égard de ce projet, qui sera finalement abandonné. Le deuxième cas concerne la faculté des sciences agronomiques de l’État à Gembloux (Fusagx), dont on se rappellera que la « loi d’expansion universitaire » de 1965 avait prévu la possibilité pour celle-ci de s’intégrer à l’ULg, mais qui tardait à faire le pas (elle ne le fera pas avant… 2008). Le troisième cas concerne la Fondation universitaire luxembourgeoise (Ful), centre de recherche et de formation de troisième cycle (doctorat) créé en 1971, qui avait fait mine, à l’époque, de revendiquer, pour lui-même, une sorte de monopole dans la recherche et la formation de troisième cycle des sciences de l’environnement.
Les auteurs du rapport Bodson-Berleur (1998) consacrent un chapitre entier à « La structuration de l’enseignement universitaire ». Ils focalisent leur attention et leurs critiques sur quelques institutions qu’ils désignent eux-mêmes comme les « institutions « points de mire ». Ces institutions (l’UMH, la FPMS et la Fusagx) sont celles qui, à l’époque, bénéficiaient encore d’un soutien financier préférentiel prévu au travers d’une disposition particulière de la loi de financement de 1971. Les auteurs dénoncent ce soutien financier préférentiel (indu à leurs yeux), développent des considérations mettant en cause l’efficacité et la qualité des formations et de la recherche de ces institutions, pour finalement déboucher sur la recommandation d’une intégration de la Fusagx à l’ULg et d’une fusion de l’UMH, de la FPMS et des Fucam en vue de créer un « pôle montois ». La réaction du Cref à la publication de ce rapport sera très critique, et celui-ci restera sans suite.
La déclaration de Bologne de juin 1999 donnera le coup d’envoi du « processus de Bologne » visant à créer un « espace européen de l’Enseignement supérieur ». En Fédération Wallonie-Bruxelles fut adopté, le 31 mars 2004, le décret dit « de Bologne » qui transposait les recommandations de la Déclaration de 1999, en modifiant la structure des cursus d’études (premier cycle — trois ans — de « bachelier » suivi d’un deuxième cycle — deux ans — de « master ») et en introduisant le système européen de crédits (ECTS).
Le décret Bologne instituait en outre trois « académies universitaires ». Furent ainsi créées l’académie « Wallonie-Bruxelles » associant l’ULB, l’UMH et la FPMS, l’académie « Wallonie-Europe » associant l’ULg et la Fusagx et l’académie « Louvain » associant l’UCL, les FUNDP, les Fusl et les Fucam. Ces académies, au sein desquelles chaque université conservait son autonomie, visaient, selon le décret, à encourager les collaborations entre les membres jusqu’à conduire, le cas échéant, à des fusions (encouragées par le travers d’incitants financiers) au sein d’une même académie.
Avant même l’adoption du décret Bologne, avait eu lieu, par décret du 28 janvier 2004, l’intégration de la FUL à l’ULg.
La dynamique des collaborations engagées au sein des Académies a effectivement abouti à plusieurs fusions et/ou intégrations.
La Fusagx a opté pour une intégration à l’ULg, sanctionnée par décret du 28 novembre 2008. L’UMH et la FPMS ont fusionné, pour donner naissance à l’université de Mons (UMons), en vertu du même décret du 28 novembre 2008. Les Fucam ont opté pour une intégration à l’UCL (devenant le campus UCL-Mons) par convention prenant effet au 14 septembre 2011.
Le mouvement de fusions-absorptions engagé au sein des académies s’est arrêté
là. Au sein de l’académie Wallonie-Bruxelles, l’UMons n’a pas souhaité
fusionner avec l’ULB et, au sein de l’aca-
démie Louvain, les FUNDP et les Fusl, échaudées par l’échec du projet de cons-titution d’une nouvelle « UCLouvain », n’ont pas souhaité — au contraire des Fucam — se voir intégrées dans l’UCL.
Le décret Paysage du 7 novembre 2013, qui a succédé au décret Bologne, organise une structuration du « paysage de l’Enseignement supérieur » dans son ensemble, en vue de répondre à deux objectifs principaux. D’une part, réduire le relatif cloisonnement entre les divers types d’enseignement supérieur par l’instauration d’une « académie de recherche et l’enseignement Supérieur » (Ares), « coupole » associant tous les acteurs pour consultation et débats sur les questions d’intérêt commun. D’autre part, encourager la collaboration entre les établissements d’enseignement supérieur en matière de services et de partage d’infrastructure au profit des étudiants, au sein de « pôles académiques » définis selon un critère géographique.
Ce décret Paysage n’introduit cependant aucune disposition concernant la « rationalisation des universités », selon les deux dimensions examinées ici.
Bilan et perspectives
Quel bilan peut-on tirer quant à la « rationalisation de l’université » à l’issue de notre examen de cinquante ans de débats, rapports, lois et décrets ?
Le contraste est frappant entre la dimension « rationalisation de l’offre » universitaire, qui renvoie à la question d’une (très relative) « spécialisation » éventuelle des universités complètes, et la dimension du « paysage » universitaire, qui renvoie à la question du nombre — et de l’opportunité de fusions éventuelles — d’universités.
Commençons par cette seconde dimension. En l’espace de quelques années, le « paysage » universitaire en Belgique francophone, qui se composait de neuf universités (parmi lesquelles trois universités complètes) auxquelles s’ajoutait une Fondation universitaire, s’est radicalement simplifié, les institutions « monofacultaires » ou « monodisciplinaires » ayant fusionné avec plus grand qu’elles. Ne subsistent plus que les trois universités complètes et trois universités « incomplètes » (ou « spécialisées », selon la terminologie internationale) qui, toutes trois, couvrent un large spectre de domaines d’études. Avec six universités pour quelque 4,6 millions d’habitants, la Fédération Wallonie-Bruxelles dispose d’un système universitaire qui compte désormais un nombre d’universités comparable à celui que comptent (en rapport avec leur population respective) tous nos voisins européens.
Revenons à la première dimension, celle de la « rationalisation de l’offre » universitaire. L’examen révèle que, comme il y a quarante ans, subsistent de nombreux cursus d’études (dont la très grande majorité n’est organisée que par les universités complètes) qui, tout en étant peu (voire très peu) peuplés, sont répliqués par plusieurs universités. Le maintien de ces sections coute cher, en général, aux universités organisatrices. Face à ce constat, les « sages » de 1976 comme ceux de 1998 s’interrogeaient sur l’opportunité d’un éventuel « partage des tâches » entre universités qui, de ce fait, pourraient ne plus demeurer absolument « complètes ». Qu’en penser ? La réponse doit prendre en considération le changement de contexte. L’environnement universitaire d’aujourd’hui se distingue radicalement de celui du siècle écoulé par l’importance majeure prise par la dimension internationale. Que l’on songe au processus de Bologne, à l’arrivée tonitruante des « rankings » internationaux ou à l’émergence d’excellentes universités dans de grands pays nouvellement industrialisés, toutes nos universités sont dorénavant condamnées à conforter leur visibilité et leur crédibilité internationales. Or l’expérience montre que, du point de vue de la visibilité internationale, le caractère « complet » d’une université est un atout, notamment (mais pas seulement) en raison des critères adoptés par les rankings les plus en vue. Il serait donc inopportun de légiférer en vue de réduire d’autorité les réplications, par les universités complètes, de cursus peu fréquentés.
Mais les mêmes contraintes de visibilité et de crédibilité internationales pèsent évidemment sur les universités incomplètes. Ces contraintes commandent de mettre fin à une disposition, reliquat d’un passé ancien, qui n’a aucun équivalent dans le monde, est donc incompréhensible pour des partenaires étrangers potentiels et déforce, dès lors, très sévèrement nos universités incomplètes. Il s’agit de la disposition qui voit ces universités habilitées (pour certains domaines d’études) pour le premier cycle, pour les deuxièmes cycles « de spécialisation » (advanced masters) et pour le troisième cycle (doctorat), sans l’être pour le deuxième cycle initial ! Le maintien de ce qu’il faut bien appeler un anachronisme constitue, pour nos universités incomplètes et leurs étudiants, un handicap structurel qui les déforce et, par là même, déforce notre système universitaire dans son ensemble.
Un examen approfondi montre que la correction de cet anachronisme, tout en confortant la visibilité et la crédibilité internationales de nos universités incomplètes, de même que leur potentiel au service du (re)déploiement régional, n’aurait aucun effet négatif sur les « grands équilibres » de notre système universitaire. On vérifie que, moyennant l’adoption de l’une ou l’autre « balise » pour des formations particulièrement couteuses, le nombre de cursus potentiellement concernés est réduit. Il en est de même pour la population étudiante concernée, qui serait très inférieure à celle des étudiants en architecture qui ont intégré les universités à la rentrée 2010, sans que cette intégration ait alors donné lieu à commentaires sur un quelconque bouleversement des équilibres du système.
Au surplus, cette mesure se présente comme « structurellement justifiée » car on vérifie qu’elle porterait essentiellement sur des cursus très fréquentés, aux sections clairement « surdimensionnées », ce qui permettrait d’améliorer les conditions d’encadrement et de suivi « sous-optimales » dont pâtissent actuellement les étudiants concernés.
- Y compris des universités dites « complètes », les universités dites « incomplètes » étant, de facto, spécialisées.
- Conseil des recteurs francophones, dont la base de données fournit les statistiques universitaires officielles.
- Celle-ci correspond au nombre moyen d’étudiants inscrits à ce cursus, dans chaque université.
- Pour les raisons déjà évoquées dans le rapport Bodson-Berleur, nous ne portons notre attention que sur les cursus organisés par au moins trois universités.
- Durant la décennie des années 1960, la population étudiante des universités francophones a connu un taux de croissance annuel moyen de 7,8%! (10,9% pour les universités flamandes), rythme de croissance qui n’a plus jamais été réédité par la suite.
- Rappelons que, jusqu’à l’adoption de la loi de financement de 1971, les universités libres étaient nettement moins bien financées que leurs consœurs « de l’État ».
- L’École des mines et de la métallurgie de Mons, créée en 1838, se voit dénommer Faculté polytechnique de Mons (FPMS). L’Institut agronomique de l’État à Gembloux et l’École de médecine vétérinaire à Bruxelles (Cureghem) reçoivent également la dénomination de faculté et se voient offrir la possibilité d’être incorporés à l’université de l’État à Liège. Seule l’École de médecine vétérinaire a fait, en 1969, usage de cette possibilité.
- Un des auteurs est alors recteur de l’ULg. La critique de la loi de 1965 se comprend mieux si l’on sait que les compensations octroyées par cette loi aux universités de l’État furent sévèrement rabotées deux ans plus tard, suscitant l’ire légitime des deux universités d’État (ULg et UGent) qui se sont perçues comme ayant été proprement « flouées » par la loi de 1965.