Skip to main content
logo
Lancer la vidéo

Penser le pouvoir en réseau

Numéro 12 Décembre 2009 par Luc Van Campenhoudt

décembre 2009

La notion de réseau social appa­raît aujourd’­hui comme un outil théo­rique indis­pen­sable pour pen­ser le pou­voir. La prin­ci­pale rai­son en est la mul­ti­pli­ca­tion et l’ex­ten­sion des échanges entre par­te­naires du pro­ces­sus de déci­sion qui ne sont pas liés par des rap­ports hié­rar­chiques. C’est à l’é­chelle mon­diale (la glo­ba­li­sa­tion) et euro­péenne que le phé­no­mène a prin­ci­pa­le­ment été sou­li­gné. Mais l’ob­ser­va­tion vaut tout autant à l’é­chelle des socié­tés natio­nales et de leurs com­po­santes. En Bel­gique, tout par­ti­cu­liè­re­ment, l’É­tat « fédé­ral » a per­du sa cen­tra­li­té au pro­fit des enti­tés fédé­rées avec les­quelles il doit com­po­ser sur pied d’é­ga­li­té. En même temps, les poli­tiques publiques sont deve­nues moins seg­men­tées et mobi­lisent de plus en plus des acteurs ins­ti­tu­tion­nels et pri­vés qui relèvent au départ d’ins­ti­tu­tions dif­fé­rentes (éco­no­miques, scien­ti­fiques, sociales, édu­ca­tives…) dans des dis­po­si­tifs inter­dis­ci­pli­naires (comme le Fonds social euro­péen, la média­tion de dettes, les agences de sti­mu­la­tion tech­no­lo­giques ou les contrats de sécu­ri­té et de quar­tier). Certes, à tous les niveaux de la vie poli­tique, éco­no­mique, sociale et cultu­relle, les échanges hori­zon­taux, trans­ver­saux par rap­port aux fron­tières ins­ti­tu­tion­nelles, ont tou­jours exis­té mais, sous l’im­pact des inno­va­tions tech­no­lo­giques, ils ont pris aujourd’­hui une ampleur et une inten­si­té telles que des caté­go­ries concep­tuelles plus adé­quates sont néces­saires pour en rendre compte et pour agir effi­ca­ce­ment dans ces condi­tions nou­velles. C’est ce qui explique le suc­cès actuel, à la fois scien­ti­fique et nor­ma­tif, de notions comme glo­ba­li­sa­tion, gou­ver­nance, com­mu­ni­ca­tion et régu­la­tion. Évi­dem­ment, ce n’est pas parce que les échanges hori­zon­taux se mul­ti­plient que les rap­ports de pou­voir dis­pa­raissent, bien au contraire. « Plus le pou­voir est caché, plus il est effi­cient », écri­vait Fou­cault. Rai­son néces­saire et suf­fi­sante pour s’in­ter­ro­ger sur la manière dont il fonc­tionne lors­qu’il reste discret.

C’est dans ce contexte que la notion de réseau social paraît aujourd’hui par­ti­cu­liè­re­ment pré­cieuse. Pré­sente dès les années cin­quante dans les sciences sociales, elle est le plus sou­vent asso­ciée à une métho­do­lo­gie dite l’«analyse des réseaux sociaux » (social net­work ana­ly­sis) qui a pour objet de décrire et de for­ma­li­ser la struc­ture de réseaux concrets, à l’aide notam­ment de la théo­rie mathé­ma­tique des graphes. Volon­tai­re­ment, la théo­ri­sa­tion socio­lo­gique pro­pre­ment dite est res­tée rela­ti­ve­ment modeste : il s’agissait de rendre compte rigou­reu­se­ment de la réa­li­té des échanges sans se lan­cer trop vite dans des expli­ca­tions hasar­deuses. Il est tou­te­fois dom­mage que cet excès de modes­tie ait pri­vé les cher­cheurs eux-mêmes, mais aus­si les acteurs poli­tiques et sociaux, de clés d’explication utiles pour la com­pré­hen­sion de ques­tions aus­si impor­tantes aujourd’hui que celles des nou­velles formes de l’inégalité sociale et du pouvoir.

Ce texte a pour objet de pro­po­ser quelques-unes de ces clés. Il vise à ce que les acteurs poli­tiques et sociaux puissent s’en sai­sir et juger de sa per­ti­nence et de sa jus­tesse à par­tir de leurs propres connais­sances et de leur regard réflexif sur leur propre expé­rience des rela­tions de pou­voir. Cinq hypo­thèses de tra­vail, ins­pi­rées de nom­breux tra­vaux socio­lo­giques, théo­riques et empi­riques, sont pro­po­sées et seront cha­cune illus­trées. Aucune d’entre elles n’est suf­fi­sante ; com­plé­men­taires, elles com­posent ensemble une matrice théo­rique qui s’élaborera pro­gres­si­ve­ment et pro­cu­re­ra au final une vision plus com­plète du pou­voir1.

Un réseau social consiste en un ensemble de rela­tions entre un ensemble d’individus ou d’entités col­lec­tives (groupes, orga­ni­sa­tions, entre­prises…) inter­con­nec­tés qu’on appelle géné­ra­le­ment les pôles ou les nœuds du réseau. Ces pôles s’échangent des « objets » de diverses natures comme des mes­sages, des docu­ments, des biens, des ser­vices, y com­pris des per­sonnes elles-mêmes qui cir­culent d’un pôle à l’autre, comme des experts que se par­tagent plu­sieurs orga­ni­sa­tions ou des diplo­mates qui voyagent d’un pays à l’autre. Un réseau est sus­cep­tible de s’ouvrir à tout nou­veau pôle (par exemple une entre­prise, un acteur poli­tique ou un inter­naute) pour­vu qu’il par­tage les mêmes codes de com­mu­ni­ca­tion et les mêmes stan­dards (par exemple l’euro comme mon­naie euro­péenne, l’anglais comme langue inter­na­tio­nale ou un stan­dard infor­ma­tique). La notion de réseau com­bine donc les idées d’entrelacement de rela­tions (comme un tis­su dont les mailles sont plus ou moins ser­rées), de flux ou de mobi­li­té, de cohé­rence interne (il est struc­tu­ré) et d’ouverture (il per­met notam­ment de pen­ser les arti­cu­la­tions entre le local et le global).

Uti­li­ser la notion de réseau social comme grille d’analyse du pou­voir dans la socié­té moderne n’implique pas qu’on la consi­dère comme la pana­cée théo­rique, capable de rendre compte du pou­voir dans toute sa com­plexi­té, toutes ses dimen­sions et toutes ses moda­li­tés. Les logiques hié­rar­chiques, ver­ti­cales et éta­tiques sont loin d’avoir dis­pa­ru et se ren­forcent même dans cer­tains domaines et dans cer­tains coins de la pla­nète. Dans ce texte, le réseau est un concept, c’est-à-dire un outil intel­lec­tuel pour rendre plus intel­li­gible un ensemble com­plexe de phé­no­mènes. Il ne faut donc pas le consi­dé­rer comme une pho­to­gra­phie de la réa­li­té, mais plu­tôt comme l’appareil pho­to­gra­phique uti­li­sé pour sai­sir cette réa­li­té. La ques­tion est alors de savoir si c’est une bonne idée d’utiliser ce genre d’appareil ou, pour reve­nir sur le ter­rain du pou­voir, si le concept de réseau per­met de bien sai­sir au moins une bonne par­tie de la réa­li­té du pouvoir.

La ques­tion posée est très simple : qu’est-ce qui pro­cure aujourd’hui du pou­voir ? L’exercice consiste donc à y appor­ter une réponse cohé­rente à l’aide de la notion de réseau social.

Faire réseau, en être

Notre pre­mière hypo­thèse est une sorte de préa­lable : dans un sys­tème poli­tique où le pro­ces­sus de déci­sion pro­cède, pour une large part, d’échanges mul­tiples entre acteurs qui doivent se mettre d’accord sans être dans des rap­ports hié­rar­chiques où les ordres se suc­cèdent en cas­cade, il importe tout d’abord d’être capable de faire réseau, d’être par­tie pre­nante des réseaux qui comptent. Ceux qui veulent peser sur les déci­sions et en recueillir les béné­fices (pour leur pays, leur région ou leur par­ti) doivent se pla­cer le plus en amont pos­sible du moment de la déci­sion pro­pre­ment dite, dans la phase où les struc­tures de sens et les réfé­ren­tiels de l’action poli­tique se défi­nissent. Il leur faut par­ti­ci­per à un inces­sant échange d’informations et d’idées avec les autres inter­ve­nants, au fil duquel les uns et les autres apprennent à se connaître, éla­borent ensemble le cadre même de la défi­ni­tion des pro­blèmes et testent auprès de leurs par­te­naires les pistes sus­cep­tibles d’être rete­nues. Comme les choses se déter­minent pro­gres­si­ve­ment, au fil d’une mul­ti­tude d’interactions et de jeux stra­té­giques com­plexes et instables, cha­cun doit res­ter dans le coup, « proac­tif »2. Car, au moment où vient l’heure de la déci­sion for­melle, presque tout est dit et géné­ra­le­ment joué, et il est donc déjà trop tard. Si, dans une série de domaines, tant de res­pon­sables ou d’hommes et de femmes « de pou­voir » consacrent tant de temps à de mul­tiples ren­contres et réunions, plus ou moins for­melles ou infor­melles, c’est d’a­bord pour être au cœur même des échanges où s’é­la­borent rela­tion­nel­le­ment les cadres cog­ni­tifs et sym­bo­liques des déci­sions, où les contacts déci­sifs se prennent et où les alliances utiles se nouent, où les confi­dences s’é­changent et où quelque chose d’in­té­res­sant est tou­jours sus­cep­tible de se pas­ser, qu’il ne faut sur­tout pas rater.

La position structurelle dans le réseau

Dans les théo­ries clas­siques du pou­voir, celui-ci est vu comme une rela­tion binaire entre deux par­ties. Le pou­voir de A sur B est alors la capa­ci­té de A d’ob­te­nir de B qu’il agisse contre son propre inté­rêt ou encore qu’il effec­tue une action qu’il n’au­rait pas effec­tuée sans l’in­ter­ven­tion de A. Dans une ana­lyse en réseau, A et B (par exemple, deux res­pon­sables poli­tiques ou ins­ti­tu­tion­nels) sont pris avec C, D, F (par exemple, d’autres res­pon­sables poli­tiques ou ins­ti­tu­tion­nels) dans un sys­tème d’é­changes (le réseau R) où ils occupent cha­cun une posi­tion plus ou moins avan­ta­geuse ou désa­van­ta­geuse. Le pou­voir réside moins dans l’in­fluence directe et immé­diate qu’un acteur peut exer­cer sur un autre (ce qui n’est évi­dem­ment pas à exclure) que dans les inter­dé­pen­dances et échanges dans les­quels ils sont tous plus ou moins impli­qués. Pour sai­sir les rela­tions de pou­voir, il faut alors sai­sir la manière dont est agen­cé l’en­semble des inter­ac­tions entre elles, ce qu’on appelle la struc­ture du réseau, et com­pa­rer les posi­tions res­pec­tives des uns et des autres dans cette structure.

Un acteur est en posi­tion de pou­voir forte lors­qu’il occupe une posi­tion de cen­tra­li­té dans le réseau. Cela signi­fie qu’il a de nom­breux contacts dont il est rela­ti­ve­ment proche et qu’il est un pas­sage obli­gé entre plu­sieurs d’entre eux (ce qu’on appelle l’in­ter­mé­dia­ri­té)3. Par exemple, dans une approche en termes de réseau, le pou­voir d’un pré­sident de par­ti réside moins dans sa posi­tion hié­rar­chi­que­ment supé­rieure que dans le grand nombre de contacts qu’il y entre­tient du fait de sa posi­tion, dans sa proxi­mi­té avec ces contacts qui gagnent à être par­mi ses proches et dans le fait que, pour une série de pro­blèmes qui impliquent plu­sieurs autres membres du par­ti, les membres en ques­tion sont obli­gés de pas­ser par le pré­sident pour se com­mu­ni­quer et avoir accès à cer­tains dos­siers ou à cer­taines informations.

Des acteurs poli­tiques ou ins­ti­tu­tion­nels peuvent béné­fi­cier d’une posi­tion de cen­tra­li­té et la culti­ver effi­ca­ce­ment sans occu­per pour autant une posi­tion hié­rar­chique pres­ti­gieuse et/ou visible du grand public. En Bel­gique, les prin­ci­paux piliers ont tous connu ces grandes per­son­na­li­tés ins­ti­tu­tion­nelles de l’ombre, mais au pou­voir effec­tif direc­te­ment pro­por­tion­nel à leur capa­ci­té de faire des ponts tant entre les per­sonnes qu’entre les ins­ti­tu­tions. Fré­quentes bien qu’i­gno­rées du grand public sont les situa­tions dif­fi­ciles où les déci­deurs poli­tiques ont dû faire appel à elles pour faci­li­ter les alliances néces­saires à la réso­lu­tion d’une crise déli­cate. Ces per­son­na­li­tés incarnent bien une moda­li­té par­ti­cu­liè­re­ment impor­tante de la cen­tra­li­té, à savoir la capa­ci­té de faire le lien entre des réseaux dif­fé­rents, comme un réseau poli­tique lié à un par­ti, un autre lié à une fédé­ra­tion syn­di­cale, un troi­sième lié au monde des affaires, etc.

De mul­tiples cas de figure illus­trent l’ex­pli­ca­tion struc­tu­relle du pou­voir dans le réseau. À une échelle locale, c’est par exemple le cas, loin d’être rare, d’un pro­fes­seur d’une école com­mu­nale qui est en même temps délé­gué syn­di­cal dans cette école et mili­tant du par­ti au pou­voir dans cette com­mune. Jouant sur plu­sieurs tableaux, il peut exploi­ter, dans cha­cun de ses sous-réseaux, les res­sources acquises dans les deux autres et se poser comme inter­mé­diaire pour trai­ter une série de ques­tions. À l’é­chelle inter­na­tio­nale et des rap­ports de force entre États, le pou­voir des États-Unis réside essen­tiel­le­ment dans leur posi­tion de cen­tra­li­té dans un ensemble de réseaux éco­no­miques (les mar­chés), mais aus­si poli­tiques, scien­ti­fiques et cultu­rels. Le mul­ti­la­té­ra­lisme de Barack Oba­ma repré­sente une vision de la place de son pays dans le monde davan­tage en adé­qua­tion avec la réa­li­té struc­tu­relle de sa posi­tion dominante.

L’hy­po­thèse de la cen­tra­li­té comme source de pou­voir n’im­plique pas que le réseau ait un centre unique. Cela peut être le cas, mais la situa­tion la plus cou­rante est celle où, dans un réseau com­plexe, cer­tains pôles béné­fi­cient d’une cen­tra­li­té locale ou par­tielle par rap­port à ceux avec les­quels ils sont en connexion et au regard de cer­tains enjeux spé­ci­fiques. Ce sont celles et ceux qu’on appelle les « per­sonnes clés », les « hommes forts », les « per­son­na­li­tés influentes », les « émi­nences grises », les « incon­tour­nables », les « relais obli­ga­toires » avec qui il faut savoir y faire et qu’il vaut mieux, si pos­sible, « avoir de son côté ». Dans une négo­cia­tion poli­tique, l’homme de pou­voir avi­sé sait les repé­rer pour opti­mi­ser ses contacts car en tou­chant cha­cun des centres, il touche en même temps leur périphérie.

L’ap­proche struc­tu­relle du pou­voir dans le réseau est par­ti­cu­liè­re­ment inté­res­sante au niveau euro­péen. Les nou­veaux espaces de l’ex­pé­rience poli­tique euro­péenne cor­res­pondent en effet de moins en moins à des ter­ri­toires fixes liés aux États-nations et à des lieux bien déli­mi­tés, mais de plus en plus à des zones dyna­miques où cir­cule et inter­agit constam­ment une mul­ti­pli­ci­té d’ac­teurs indé­pen­dants du contrôle natio­nal des fron­tières. Par­le­men­taires euro­péens, fonc­tion­naires euro­péens et natio­naux en charge de dos­siers à dimen­sion euro­péenne, lob­byistes, mili­tants de « mou­ve­ments sociaux trans­na­tio­naux » (MST), membres d’«organisations inter­na­tio­nales non gou­ver­ne­men­tales » (OING) com­mu­niquent constam­ment et se retrouvent régu­liè­re­ment dans des groupes de tra­vail et réunions diverses, for­melles et infor­melles. Ces « réseaux trans­na­tio­naux euro­péens » consti­tuent des struc­tures infor­melles chan­geantes et flexibles (selon les dos­siers à trai­ter) dont un trait carac­té­ris­tique est l’im­pli­ca­tion conjointe d’ac­teurs ins­ti­tu­tion­nels et non ins­ti­tu­tion­nels entre les­quels les rela­tions sont, dès lors, moins conflic­tuelles qu’elles ne l’ont été au niveau natio­nal4.

En conju­guant les idées de connec­ti­vi­té (ou de mul­ti­pli­ci­té des connexions) et de mobi­li­té, d’ar­ti­cu­la­tion de nœuds et d’en­semble de nœuds (ou sous-réseaux) en posi­tions struc­tu­relles inégales, de cohé­rence interne et d’in­ter­face entre le local et le glo­bal, l’i­dée de réseau per­met de bien sai­sir l’es­pace poli­tique euro­péen5 et, en par­ti­cu­lier, la manière dont les jeux de pou­voir s’ins­crivent dans la struc­ture même des réseaux.

Dans une pers­pec­tive struc­tu­relle, la cen­tra­li­té de A est d’au­tant plus grande que B et C avec qui il est en contact ne le sont pas entre eux. On par­le­ra alors de trou struc­tu­ral, l’hy­po­thèse étant que plus les contacts d’un indi­vi­du ou d’une enti­té col­lec­tive sont iso­lés les uns des autres, plus son pou­voir est grand. En pour­chas­sant les ententes illé­gales entre entre­prises, la direc­tion géné­rale de la Concur­rence ne fait rien d’autre que de res­tau­rer au béné­fice des clients (A) des trous struc­tu­raux (entre deux entre­prises B et C) là où ils n’au­raient jamais dû être bou­chés. Lors­qu’un Pre­mier ministre dis­cute sépa­ré­ment avec cha­cun de ses vice-Pre­miers ministres en vue de déga­ger des solu­tions bud­gé­taires qui seraient plus dif­fi­ciles à trou­ver s’ils devaient s’af­fron­ter direc­te­ment dans des dis­cus­sions col­lec­tives6, non seule­ment il se place dans une posi­tion de cen­tra­li­té comme pas­sage obli­gé, mais il béné­fi­cie en outre d’un trou struc­tu­ral entre ses prin­ci­paux ministres. Dès lors, il peut faci­li­ter la déci­sion et peser per­son­nel­le­ment plus for­te­ment sur les solu­tions fina­le­ment retenues.

« Les rela­tions de pou­voir s’en­ra­cinent dans l’en­semble du réseau social7 », écri­vait bien Michel Fou­cault qui en dédui­sait : « On ne résiste pas au pou­voir, on résiste dans le pouvoir. »

Mobiliser sans se laisser mobiliser

Lais­ser dor­mir un dos­sier ou l’at­ta­quer sans délai, pres­ser un par­te­naire à inter­ve­nir rapi­de­ment et à contac­ter qui de droit, gar­der pour soi une infor­ma­tion stra­té­gique, la trans­mettre dis­crè­te­ment aux supé­rieurs ou la réper­cu­ter lar­ge­ment, mena­cer expli­ci­te­ment ou non un autre acteur de pro­blèmes s’il ne fait pas ce qu’on attend de lui, « faire jouer son réseau » ou s’en abs­te­nir… Dans sa dimen­sion actan­cielle, com­plé­men­taire à sa dimen­sion struc­tu­relle, le pou­voir dans le réseau appa­raît comme une double capa­ci­té : celle de mobi­li­ser les autres dans le réseau, de les entraî­ner dans ses flux et donc de mobi­li­ser le réseau lui-même ; et, inver­se­ment, celle d’éviter d’être soi-même mobi­li­sé par d’autres et donc de s’affranchir des demandes du réseau, lorsque celles-ci sont contraires à ses inté­rêts ou à ses convictions.

L’hypothèse s’inscrit ici dans une concep­tion « posi­tive » du pou­voir, conçu non comme ce qui inter­dit (« Tu ne peux pas »), mais comme ce qui mobi­lise et fait faire. Le pou­voir n’est pas une action directe sur l’autre, mais plu­tôt une action sur son action, pense encore Fou­cault en s’inspirant ici de Marx. Car inter­dire n’a guère d’intérêt si cela n’aide pas à faire pro­duire des richesses, des déci­sions ou des actions. Le puis­sant est ici le « mobile » qui peut choi­sir et diver­si­fier ses mobi­li­sa­tions et les orien­ter vers les actions les plus déci­sives et les plus ren­tables ; qui a la pos­si­bi­li­té de mobi­li­ser les autres, les « immo­biles » pour les tâches ancil­laires, encom­brantes et peu pro­fi­tables8. Par­fois, il s’agira de se débar­ras­ser de la « patate chaude » : un dos­sier « pour­ri », un déte­nu dont on ne sait plus quoi faire, une déci­sion qui sera de toute manière impo­pu­laire ou qui com­porte un risque important.

L’ap­proche réti­cu­laire du pou­voir met ici à mal une hypo­thèse naïve selon laquelle les dif­fi­cul­tés à col­la­bo­rer dans ce qu’on appelle le « tra­vail en réseau » seraient d’a­bord et avant tout liées à des pro­blèmes de com­mu­ni­ca­tion. Si des pro­fes­sion­nels ou des acteurs ins­ti­tu­tion­nels com­mu­niquent par­fois dif­fi­ci­le­ment (par exemple des tra­vailleurs du social et de la jus­tice dans le domaine de l’aide à la jeu­nesse)9, ce n’est pas for­cé­ment parce qu’ils ignorent le lexique de l’autre et ne savent pas com­mu­ni­quer ; c’est sou­vent parce qu’ils ne veulent pas com­mu­ni­quer pour des rai­sons mul­tiples et enche­vê­trées, liées à des enjeux de pou­voir où ils engagent l’image de leur fonc­tion, leur sys­tème de valeurs et leurs inté­rêts ins­ti­tu­tion­nels ou personnels.

La défi­ni­tion du pou­voir comme capa­ci­té de mobi­li­ser autrui, de « faire faire » rejoint ici la concep­tion consa­crée de Weber et de Dahl. À une dif­fé­rence près tou­te­fois : c’est moins une autre per­sonne pré­cise (B), en tant que telle, qui est mobi­li­sée que le réseau lui-même, com­pre­nant B, mais aus­si, der­rière lui, C, D, etc. Les mobi­li­sa­tions s’en­chaînent dans des séquences plus ou moins longues, avec des impasses (lors­qu’un acteur ne se laisse pas mobi­li­ser), des dévia­tions et des réorien­ta­tions mul­tiples. Le pou­voir ne cir­cule pas seule­ment de A à B ; il cir­cule dans le réseau en pas­sant, à cer­tains moments, entre A et B.

Le pouvoir institutionnel du réseau

Mieux vaut être pre­mier en Gaule que deuxième à Rome, pen­sait César. Dans un monde pyra­mi­dal où l’empereur règne seul, tout puis­sant au centre de son empire, c’é­tait peut-être vrai. Mais ce ne l’est plus dans un monde en réseau sans som­met ni même centre unique. Mieux vaut, assu­ré­ment, être dans une posi­tion struc­tu­relle rela­ti­ve­ment faible dans un réseau fort (par exemple membre d’un cabi­net minis­té­riel ou expert d’un puis­sant lob­by euro­péen) que dans une posi­tion struc­tu­relle rela­ti­ve­ment forte dans un réseau faible (par exemple pré­sident d’une sec­tion locale d’un par­ti poli­tique dans une petite com­mune). Mieux vaut être un cadre dis­cret, mais écou­té d’une grande banque que pré­sident direc­teur géné­ral d’une petite entreprise.

Ce qui compte ici, c’est la valeur (d’u­sage et d’é­change) des res­sources (les infor­ma­tions, les ser­vices ren­dus, l’argent, les connais­sances, les rela­tions…) que les pôles du réseau sont en mesure de mettre en cir­cu­la­tion. Le pou­voir du réseau dépend en effet de sa capa­ci­té de mettre en connexion des per­sonnes (ou enti­tés col­lec­tives) en posi­tion éle­vée dans leur propre champ10, déten­trices de res­sources (éco­no­miques, sociales, cultu­relles ou sym­bo­liques) impor­tantes propres à ce champ, et qu’elles sont sus­cep­tibles de faire cir­cu­ler dans le réseau et/ou d’u­ti­li­ser au béné­fice du réseau.

Le « sys­tème des piliers » carac­té­ris­tique de la Bel­gique illustre bien ce pro­ces­sus : chaque pilier (chré­tien, socia­liste ou libé­ral) consiste en une constel­la­tion d’ins­ti­tu­tions (par­ti poli­tique, mutua­li­té, orga­ni­sa­tions syn­di­cales, mou­ve­ments mili­tants, écoles, hôpi­taux, asso­cia­tions volon­taires…) for­mel­le­ment ou infor­mel­le­ment reliées entre elles en familles idéo­lo­giques. Des ins­ti­tu­tions non for­mel­le­ment liées à un pilier, comme les uni­ver­si­tés non catho­liques, n’en sont pas moins tra­ver­sées, elles aus­si, par la puis­sante logique des piliers. De la base au som­met de l’é­chelle ins­ti­tu­tion­nelle et poli­tique, les res­pon­sables de ces dif­fé­rentes ins­ti­tu­tions se ren­contrent inévi­ta­ble­ment et sont sus­cep­tibles de mobi­li­ser, quand c’est néces­saire, le réseau qu’ils consti­tuent avec leurs par­te­naires des ins­ti­tu­tions voi­sines. Une série de déci­sions impor­tantes (légis­la­tives et bud­gé­taires notam­ment) résultent de cette logique néo­cor­po­ra­tiste des piliers ou d’une trac­ta­tion entre eux. S’il est aujourd’­hui en déclin11, le sys­tème des piliers illustre, jus­qu’à la cari­ca­ture, la per­ti­nence d’une ana­lyse des phé­no­mènes sociaux en termes de réseaux sociaux puis­qu’il réus­sit la per­for­mance para­doxale de qua­si­ment ins­ti­tu­tion­na­li­ser un pro­ces­sus infor­mel, carac­té­ris­tique de la logique du réseau.

Cou­vrant tout l’é­ven­tail des objets sociaux (cari­ta­tifs, sani­taires, spor­tifs, cultu­rels, reli­gieux autant qu’é­co­no­miques, poli­tiques et sociaux), de mul­tiples cercles, asso­cia­tions, fon­da­tions, loges, clubs plus ou moins sélec­tifs fonc­tionnent selon le prin­cipe de la coop­ta­tion (« Qui se res­semble s’as­semble »). Ces réseaux de puis­sances variables peuvent fonc­tion­ner à l’in­té­rieur d’un champ par­ti­cu­lier et être dès lors consti­tués autour du seul type de capi­tal propre à ce champ, comme un réseau de déci­deurs poli­tiques en posi­tion haute qui se retrouvent sou­vent entre eux, offi­ciel­le­ment ou non, dis­crè­te­ment ou publi­que­ment (comme sur les pla­teaux de télé­vi­sion). Mais ces réseaux peuvent aus­si — et c’est un autre inté­rêt d’un concept qui sup­pose l’ou­ver­ture du sys­tème de rela­tions — mettre en connexion des per­sonnes en posi­tion plus ou moins haute dans des champs dif­fé­rents. Ce sont alors des res­sources diverses qui peuvent cir­cu­ler dans un même réseau avec des effets multiplicateurs.

Les réseaux ont donc ten­dance à mettre en rela­tion et à mobi­li­ser des per­sonnes ayant des capi­taux de poids com­pa­rables ou, encore, qui occupent des posi­tions com­pa­rables ou struc­tu­rel­le­ment ana­logues dans leurs champs res­pec­tifs. À ces capi­taux sont liées des manières spé­ci­fiques de faire réseau. Tra­di­tion­nel­le­ment cos­mo­po­lites, les classes supé­rieures, et en par­ti­cu­lier les hauts diri­geants du pri­vé, sont par­ti­cu­liè­re­ment bien pré­pa­rées à s’im­pli­quer dans des réseaux glo­baux et euro­péens et à en tirer tout le béné­fice pos­sible. Leur aisance (notam­ment cultu­relle et lin­guis­tique) contraste avec la dif­fi­cile inter­na­tio­na­li­sa­tion du mou­ve­ment ouvrier et la pré­gnance des liens au ter­ri­toire dans la culture popu­laire12. On voit ici com­ment les rap­ports de pou­voir entre les réseaux sociaux s’ins­crivent dans des struc­tures de domi­na­tion et d’i­né­ga­li­té, que l’a­na­lyse des réseaux sociaux per­met de conceptualiser.

La capacité du réseau de se mobiliser et de politiser ses enjeux

Un réseau ne pèse sur les déci­sions qui engagent la socié­té que s’il est capable de se mobi­li­ser et de poli­ti­ser ses enjeux, c’est-à-dire de les faire valoir comme des ques­tions à débattre et à pro­pos des­quelles des déci­sions poli­tiques sont à prendre. Les orga­ni­sa­tions poli­tiques, les groupes de pres­sion et les lob­bys les plus effi­caces sont ceux qui ont le mieux pro­fes­sion­na­li­sé cette capa­ci­té de s’automobiliser et en ont fait leur rai­son d’être. Les par­tis poli­tiques, par exemple, ont leurs mili­tants locaux et leurs mul­tiples contacts qui prennent le pouls de la popu­la­tion, leurs bureaux d’études qui anti­cipent les pro­blèmes et éva­luent la pos­si­bi­li­té de les trans­for­mer en nou­velles causes sus­cep­tibles de séduire l’électeur. Leurs membres savent par quelles filières pas­ser pour qu’une infor­ma­tion ou une demande abou­tisse où il faut. Leurs cadres savent éla­bo­rer la manière de les mettre en forme. Au bout du compte, les diri­geants savent quand et com­ment en faire une ques­tion publique. Par­fois, c’est l’événement inat­ten­du qui oblige à réagir et tout l’art est alors de trans­for­mer rapi­de­ment la contrainte en opportunité.

Les pro­ces­sus qui conduisent à une poli­ti­sa­tion des enjeux, à leur expres­sion publique et à l’enclenchement d’une action effi­cace sont com­plexes. Mais, que l’on ait affaire à des groupes infor­mels qui se consti­tuent à peine ou à des orga­ni­sa­tions très expé­ri­men­tées qui béné­fi­cient d’un haut degré d’institutionnalisation, le cœur de la mobi­li­sa­tion reste tou­jours le même : des micro­ré­seaux de quelques per­sonnes très actives et en étroite connexion, qui construisent une repré­sen­ta­tion com­mune du pro­blème, qui savent ou découvrent à qui faire confiance et de qui se méfier, et font « avan­cer le dos­sier » avec toute l’efficacité d’un groupe de « com­plices » (sans aucune conno­ta­tion néga­tive) entre les­quels se déve­loppe une étroite conni­vence. Ce n’est pas un hasard si les caté­go­ries de l’amitié et de la tra­hi­son sont si pré­sentes dans le monde poli­tique et si les plus grands — son­geons à un Fran­çois Mit­ter­rand ou, à notre échelle belge, à un Elio Di Rupo — sont sou­vent, déli­bé­ré­ment et/ou du fait de leur vision de leur fonc­tion, des per­son­na­li­tés plu­tôt soli­taires, qui peuvent se per­mettre de ne pas s’impliquer dans des conni­vences trop appuyées.

S’investir dans ces micro­ré­seaux est la condi­tion sine qua non de toute action poli­tique effi­cace, y com­pris et peut-être même sur­tout lorsque le pro­ces­sus de déci­sion est com­plexe dans un sys­tème poli­tique de grande taille. Tout euro­dé­pu­té pour­rait en témoi­gner. Il sait que la seule manière d’être un peu effi­cace dans cet énorme appa­reil que consti­tuent les ins­ti­tu­tions euro­péennes consiste à concen­trer toute son éner­gie sur un petit nombre de dos­siers avec un petit nombre de com­plices d’autres pays et, si pos­sible, d’autres groupes parlementaires.

C’est prin­ci­pa­le­ment dans ces micro­ré­seaux que se dis­tinguent, par leur fia­bi­li­té, leur effi­ca­ci­té, leur intel­li­gence et/ou leur élo­quence, les futurs lea­ders ou les émi­nences grises qui sont géné­ra­le­ment pas­sés maîtres dans l’art de jouer avec et du réseau et, en par­ti­cu­lier, d’en mobi­li­ser les dif­fé­rents pôles. Cela explique qu’émergent par­fois à des fonc­tions poli­tiques ou ins­ti­tu­tion­nelles pres­ti­gieuses des noms jusqu’alors incon­nus du grand public.

Conclusion : une matrice théorique

[*Pou­voir et réseau social*]

En être
Hyp.1 : Le pou­voir dépend de la capa­ci­té de faire réseau

Dimen­sion structurelle Dimen­sion actancielle
Le pou­voir dans le réseau
Enjeu : contrôle des flux internes
Hyp. 2 : Le pou­voir dépend de la posi­tion struc­tu­relle dans le réseau (cen­tra­li­té…). Hyp. 3 : Le pou­voir dépend de la capa­ci­té de mobi­li­ser les autres dans le réseau, et d’é­vi­ter de l’être soi-même.
Le pou­voir du réseau
Enjeux de société
Hyp. 4 : Le pou­voir dépend de la posi­tion et des res­sources des pôles du réseau dans leurs champs respectifs.  Hyp. 5 : Le pou­voir dépend de la capa­ci­té du réseau de se mobi­li­ser et de poli­ti­ser ses enjeux.

Les hypo­thèses pré­sen­tées dans les points 2 et 3 portent sur le pou­voir dans le réseau tan­dis que les hypo­thèses 4 et 5 portent sur le pou­voir du réseau par rap­port aux réseaux voi­sins ou concur­rents. Les hypo­thèses 2 et 4 portent sur les posi­tions struc­tu­relles rela­tives des pôles du réseau dans le réseau lui-même ou dans le champ social en géné­ral tan­dis que les hypo­thèses 3 et 5 portent sur les pro­ces­sus de mobi­li­sa­tion réci­proques dans le réseau ou du réseau lui-même dans l’espace social. La pre­mière hypo­thèse étant, comme nous l’avons pré­ci­sé, une sorte de préa­lable. À par­tir de ces dis­tinc­tions, il est pos­sible de regrou­per ces hypo­thèses dans la matrice théo­rique suivante.

Aucune des hypo­thèses n’est suf­fi­sante à elle seule pour rendre compte de la réa­li­té com­plexe du pou­voir. Cha­cune n’est qu’un pro­jec­teur qui éclaire le pou­voir sous un cer­tain angle seule­ment. Quand on les allume ensemble, les cinq pro­jec­teurs donnent du pou­voir une image plus claire et plus glo­bale. Mais des zones d’ombre sub­sistent car aucune approche théo­rique ne peut embras­ser l’en­semble des dimen­sions du social.

Dire qu’un par­ti poli­tique ou qu’un ensemble d’é­changes entre acteurs poli­tiques natio­naux ou euro­péens est un réseau social n’est pas une affir­ma­tion sur la nature sub­stan­tielle de ce par­ti ou de cet ensemble ; c’est seule­ment pen­ser qu’il se prête à une obser­va­tion sous l’angle théo­rique de la notion de réseau social, qu’il y a une adé­qua­tion entre son fonc­tion­ne­ment réel et cette notion, et que l’ex­plo­ra­tion de cette adé­qua­tion, comme nous l’a­vons esquis­sée ici, est éclai­rante. La notion de réseau social pré­sente en effet l’a­van­tage d’ar­ti­cu­ler de manière cohé­rente les dimen­sions macro- (glo­ba­li­sa­tion, rap­ports de classes, domi­na­tion, euro­péa­ni­sa­tion), meso- (ins­ti­tu­tions et orga­ni­sa­tions ins­ti­tuées) et micro­so­ciales (rela­tions inter­per­son­nelles) du pou­voir, ses dimen­sions struc­tu­relle et actan­cielle, indi­vi­duelles (les moti­va­tions et inté­rêts notam­ment) et col­lec­tives. Le réseau social n’est pas pour autant une pana­cée théo­rique, seule­ment un concept qui peut contri­buer à rendre intel­li­gible une réa­li­té qui ne se laisse plus cap­tu­rer par les caté­go­ries concep­tuelles liées à l’i­ma­gi­naire de l’État-nation.

  1. Cette matrice théo­rique et les hypo­thèses qui la consti­tuent sont expo­sées de manière plus déve­lop­pée dans : Van Cam­pen­houdt L., 2009, « Pou­voir et réseau social : une matrice théo­rique », Cahiers du Cirtes, n° 2, Presses uni­ver­si­taires de Lou­vain, dont le pré­sent texte reprend cer­tains extraits.
  2. Ces phé­no­mènes sont très bien étu­diés dans une recherche récente sur la poli­tique euro­péenne de la Région bruxel­loise : Hubert G., 2008, Pen­ser l’Europe en action. Les Fonds struc­tu­rels euro­péens à l’appui de poli­tiques régio­nales bruxel­loises, thèse de doc­to­rat en sciences poli­tiques et sociales, facul­tés uni­ver­si­taires Saint-Louis.
  3. La notion de cen­tra­li­té a été concep­tua­li­sée par Free­man L.C. et celle de trou struc­tu­ral, vue plus bas, par Burt R.S. On en trou­ve­ra un expo­sé plus pré­cis dans Mer­ck­lé, 2004, Socio­lo­gie des réseaux sociaux, La Décou­verte, coll. « Repères ».
  4. Sur ces ques­tions, voir notam­ment le numé­ro spé­cial de la revue Culture et conflits sur la socio­lo­gie de l’Europe. Mobi­li­sa­tions, élites et confi­gu­ra­tions ins­ti­tu­tion­nelles, n° 38 – 39, 2000.
  5. Voir notam­ment Delan­ty G., Rum­ford Ch., 2005, Rethin­king Europe. Social theo­ry and the impli­ca­tions of Euro­pea­ni­za­tion, Rout­ledge, Tay­lor & Fran­cis Group, p. 123 – 124, dont un résu­mé sub­stan­tiel est paru dans le numé­ro de jan­vier 2009 de La Revue nou­velle, sous la rubrique « Un Livre ».
  6. Comme Her­man Van Rom­puy en début octobre 2009.
  7. Fou­cault M., 1994b, « Le sujet et le pou­voir », Dits et écrits, IV, 1980 – 1988, Gal­li­mard, p. 240.
  8. Concep­tion du pou­voir déve­lop­pée par Bol­tans­ki L. et Chia­pel­lo E., 1999, Le nou­vel esprit du capi­ta­lisme, Gal­li­mard.
  9. On trou­ve­ra de nom­breux exemples et une ana­lyse fouillée de ces « pro­blèmes de com­mu­ni­ca­tion » dans : de Coninck Fr., Car­tuy­vels Y., Frans­sen A., Kamins­ki D., Mary Ph., Rea A., Van Cam­pen­houdt L., 2005, avec la col­la­bo­ra­tion de Toro F., Hubert G., Hubert H.-O., Schaut Chr., Aux fron­tières de la jus­tice, aux marges de la socié­té. Une ana­lyse en groupe d’acteurs et de cher­cheurs, Poli­tique scien­ti­fique fédé­rale, Aca­de­mia Press.
  10. On fait réfé­rence ici à la théo­rie des champs de Pierre Bourdieu.
  11. Voir le récent dos­sier de La Revue nou­velle de novembre 2009 sur « Les cli­vages à l’épreuve de la socié­té », coor­don­né par D. Car­lier et M. Moli­tor, avec des contri­bu­tions de V. de Coore­by­ter, J. De Munck, D. Sinar­det, L. Van Cam­pen­houdt et J.-Cl. Willame.
  12. Wag­ner A.-C., 2007, Les classes sociales dans la mon­dia­li­sa­tion, La Décou­verte, coll. « Repères ».

Luc Van Campenhoudt


Auteur

Docteur en sociologie. Professeur émérite de l’Université Saint-Louis – Bruxelles et de l’Université catholique de Louvain. Principaux enseignements : sociologie générale, sociologie politique et méthodologie. Directeur du Centre d’études sociologiques de l’Université Saint-Louis durant une quinzaine d’années, jusqu’en 2006, il a dirigé ou codirigé une quarantaine de recherches, notamment sur l’enseignement, les effets des politiques sécuritaires, les comportements face au risque de contamination par le VIH et les transformations des frontières de la Justice pénale. Ces travaux ont fait l’objet de plusieurs dizaines d’articles publiés dans des revues scientifiques, de nombreux ouvrages, et de plusieurs invitations et chaires dans des universités belges et étrangères. À travers ces travaux, il s’est intéressé plus particulièrement ces dernières années aux problématiques des relations entre champs (par exemple la justice et la médecine), du pouvoir dans un système d’action dit « en réseau » et du malentendu. Dans le cadre de ces recherches il a notamment développé la « méthode d’analyse en groupe » (MAG) exposée dans son ouvrage La méthode d’analyse en groupe. Applications aux phénomènes sociaux, coécrit avec J.-M. Chaumont J. et A. Franssen (Paris, Dunod, 2005). Le plus connu de ses ouvrages, traduit en plusieurs langues, est le Manuel de recherche en sciences sociales, avec Jacques Marquet et Raymond Quivy (Paris, Dunod, 2017, 5e édition). De 2007 à 2013, il a été directeur de La Revue Nouvelle.