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Mon trésor
Je me languis de nous. Seul, couché dans le noir, mon esprit ne cesse de s’envoler vers toi. Mon corps réclame la caresse de ton regard. Ton effeuillage minutieux. Il n’aspire qu’à retrouver le balayage de tes yeux perçants. Sans ta lecture atten- tive, je me sens m’empoussiérer, me vider, me dessécher. J’ai besoin de ton […]
Je me languis de nous. Seul, couché dans le noir, mon esprit ne cesse de s’envoler vers toi. Mon corps réclame la caresse de ton regard. Ton effeuillage minutieux. Il n’aspire qu’à retrouver le balayage de tes yeux perçants. Sans ta lecture atten-
tive, je me sens m’empoussiérer, me vider, me dessécher. J’ai besoin de ton cœur, de ton imagination, de ta fantaisie pour me déployer. Pour toi, je suis prêt à revêtir toutes les formes du mystère, je veux bien me parer de métaphores ou me travestir en métonymies. Ma seule peur, au fond, est de ne plus être fécond et d’être jeté au rebut. Je m’effraie de vieillir avant l’heure de ton abandon. Je redoute de devenir sec et de m’effriter. De m’éparpiller au vent de l’indifférence. Je crains d’oublier qui je suis à mesure que tu m’effaces de tes préoccupations. J’espère ne pas devenir un vague souvenir d’un instant de bonheur. Je prie pour ne pas me réduire au passage éphémère d’une étoile filante dans un ciel de minuit dont la faible lumière s’éteint sans bruit. Ne m’abandonne pas dans le cimetière de ta mémoire.
Je ne souhaite en effet que m’enliser dans l’osmose envoutante de tes allers-retours en moi, retrouver l’enivrante sensation de ta paume me parcourant. Frémir à l’unisson de ton souffle, dans la diffuse harmonie de nos corps qui se parlent. Laisse-moi palpiter au rythme de tes battements de cils et de ton doigté agile ! Je suis avide de l’effleurement de deux peaux qui se cherchent, qui se découvrent, qui se reconnaissent. J’ai hâte d’aller à la rencontre de ton toucher, doux ou rugueux, moelleux ou envieux. J’aspire à ressentir de nouveau le transpercement du plaisir quand tu plonges en moi. Quand tes doigts de feu communiquent leur énergie à mes fibres et les font s’embraser. Quand ton esprit s’unit à mon cœur et à mes palabres pour dessiner un nouveau monde. J’espère recréer cette bulle d’ivresse que nous forgeons par la tendresse de tes gestes. Réchauffe-moi à nouveau de ta candeur, de ta voracité, de ton ardeur ! Enveloppe-nous de ton illusion flamboyante, sans plus réfléchir aux conséquences de notre union.
Tu es parti parce que mon silence t’agaçait. Tu aurais voulu plus de répondant. Pourtant j’ai toujours été ainsi. À l’écoute et te parlant de tous mes signes. Mon mutisme n’est que d’apparence. Je foisonne de mots, je ne désire que te les livrer. Ils m’étouffent, ils m’encombrent, ils me façonnent. Mes mots me figurent alors même qu’ils t’appartiennent. Ils affleurent à la surface de mes pages, ils dessinent des arabesques sur mon cuir, ils me construisent dans une farandole de symboles. Ne les dédaigne pas… En ne sortant pas, ils me blessent, pourtant je n’ai pas le choix. C’est mon prix à payer pour grandir dans l’ombre de ton esprit et nous fortifier dans le jour de tes sentiments. Et c’est à toi de venir les cueillir. Alors ne laisse pas mon champ en friche, quand il a tant à t’offrir. Mes syllabes continuent de chercher ton oreille pour lui murmurer les plus mystérieuses histoires. Les plus envoutants récits. Les plus merveilleuses vérités cachées. Viens donc, viens chercher
l’or de mes paroles pour reprendre
ton envol !
Je le sais, je ne suis pas parfait. J’ai une apparence plutôt carrée sans avoir la musculature que tu souhaites. Je n’ai pas choisi d’avoir une couverture glacée, un peu austère, un peu aride. Mais dans ce désert des apparences, je veux être ton mirage, ton oasis. Ce sont les aléas de la vie qui m’ont fait comme je suis. En suis-je moins attachant, en suis-je moins aimable ? Rien ne vaut pourtant la richesse de mes pages, la qualité de mon papier, la cambrure de mes lettrines. Alors je t’en prie, respire avec moi, respire pour moi à chacune de mes virgules. Ne refuse pas de tourner la page parce qu’une imperfection vient troubler ta vue. J’accepte bien ton regard qu’il soit bleu envie, vert jalousie, ou brun inassouvi. Je me donne tout à toi, je ne retiens rien de ce que tu peux vouloir de moi. Sois donc à la hauteur de notre intrigue !
Je te l’ai déjà prouvé : je sais garder tes secrets. Je peux prendre soin de toutes tes passions, de tous tes élans. J’ai la place pour accueillir en mon sein tous tes desseins. Le silence qui te pesait sera ici ma force. Aucun mot de trop, aucun mot de toi ne s’échappera de moi. Pour tout autre esprit, je serai oublieux de notre histoire. Je me ferai caméléon. Je ne révèlerai rien qu’ils ne savaient déjà de toi, je ne révèlerai que ce qu’ils ne savaient d’eux-mêmes. Laisse-moi donc incarner de tes noirs désirs à tes fiers plaisirs. Je ne te décevrai pas. Je saurai me faire le reflet de ton âme, la catharsis de tes émotions. Permets-moi de me fondre en toi, de t’habiter, de te guider, de m’oublier.
Alors s’il te plait, serre-moi entre tes mains, contre ton torse, hors de toute pensée cartésienne. Reviens. Reviens animer mes soirées et fleurir mes nuits. Reviens enflammer le ciel de nos rêves. Reviens me posséder entièrement, complètement, définitivement. J’espère notre réunion pour chasser la mélancolie des moments lunaires. J’aspire à nos retrouvailles plus qu’à tout autre chose, mon très cher lecteur.
Ton livre,
Qui t’attend passionnément.