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Michel Capron, chroniqueur économique et social
Michel Capron est décédé le 25 mai. L’équipe de La Revue nouvelle perd un de ses meilleurs collaborateurs et beaucoup au sein de celle-ci un ami merveilleux. Pendant plusieurs décennies et avec une fidélité jamais prise en défaut, Michel Capron a proposé à La Revue nouvelle de multiples articles et chroniques sur la vie industrielle de notre […]
Michel Capron est décédé le 25 mai. L’équipe de La Revue nouvelle perd un de ses meilleurs collaborateurs et beaucoup au sein de celle-ci un ami merveilleux.
Pendant plusieurs décennies et avec une fidélité jamais prise en défaut, Michel Capron a proposé à La Revue nouvelle de multiples articles et chroniques sur la vie industrielle de notre pays et de ses régions, son évolution, ses transformations et ses conflits1. Économiste de formation, Michel Capron prenait la mesure des enjeux de cette nature se posant aux entreprises et aux secteurs confrontés aux mutations du capitalisme belge et international. L’économie qui l’intéressait était l’économie réelle encastrée dans des paysages, des institutions et de plus en plus dans des réseaux internationaux. Michel était un véritable chroniqueur social. Chaque matin, chez lui ou dans son bureau de la Fopes à Louvain-la-Neuve, il entamait sa journée par un recueil systématique de toutes les informations parues dans la presse tant francophone que flamande. À partir de là, il se constituait des données sur les thèmes qui lui tenaient à cœur : sidérurgie, autres secteurs industriels, transport public, syndicalisme, concertation, conflits sociaux, etc. Les lecteurs de La Revue nouvelle ont ainsi pu lire régulièrement ses articles ou chroniques mensuelles dans « le mois ». Ces derniers temps, Michel sentait le besoin de rassembler ses écrits, de les retravailler, de prendre le recul que permet l’histoire et d’affiner son propos. C’est au Crisp qu’il a trouvé une équipe et un lieu propice à faire ce travail de synthèse. Avant que la maladie se déclare, Michel Capron avait été la cheville ouvrière de l’ouvrage Dynamiques de la concertation sociale et, pour conjurer le mal qui l’affaiblissait, il a continué à produire non seulement pour La Revue nouvelle, mais aussi pour le Crisp, plusieurs articles et courriers hebdomadaires. Parallèlement, il a entamé la rédaction d’un livre d’histoire de la sidérurgie qu’il nous laisse le soin de terminer.
Michel Capron avait le don d’expliquer des situations complexes avec des mots simples. Les médias l’ont vite perçu et le sollicitaient de plus en plus pour recevoir une information, obtenir un commentaire et une analyse. Ce sont les médias qui lui ont conféré le titre de professeur d’université et personne n’a contesté cela — même au sein de l’UCL —, car ce n’était pas lui qui s’était arrogé ce titre et on savait qu’il n’en tirerait aucune gloire, ni profit personnel. Il était respecté de tous, car on savait que ses écrits étaient fondés et son raisonnement bâti sur une rigueur et une honnêteté intellectuelles jamais prises en défaut. Pour autant, Michel ne cachait pas ses sympathies. Elles allaient vers les travailleurs qu’il préférait définir positivement par leurs luttes que négativement par leurs conditions d’exclus ou d’exploités. L’approche privilégiée par Michel Capron est une approche du social par les acteurs. Bien entendu, les institutions comptaient dans ses analyses et, tous les deux ans, on attendait ses commentaires quand un accord interprofessionnel était conclu ou avait échoué. Toujours la stratégie et la position des acteurs étaient prises en compte.
Si Michel ne cachait pas son engagement auprès des travailleurs, il gardait son indépendance d’esprit lorsqu’il s’agissait de réfléchir sur les organisations, les appareils, la concertation et autres modes de décision.
Les sujets traités par Michel Capron étaient souvent austères et graves. La réalité étant ce qu’elle est, ses chroniques sociales portaient surtout sur des transformations sociales marquées par le déclin industriel, les restructurations dures, les reconversions incertaines et la décomposition de certaines formes d’action sociales et politiques. L’homme pourtant avait le soin de laisser dans ses textes des zones d’espoir et des perspectives de progrès. Chez lui, ce sont les acteurs qui ont le dernier mot et qui font l’histoire. À sa manière, avec sérieux et modestie, il fut l’un deux.
- Son dernier article, « Le “capitalisme sauvage” d’ArcelorMittal », est paru dans le numéro de mars 2013 et à consulter sur www.revuenouvelle.be ; dans ce numéro-ci, on pourra relire un texte prémonitoire, « Sidérurgie. Les stratégies en présence », publié en janvier 1979.