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La liberté (néolibérale), c’est l’esclavage

Numéro 2 - 2017 par Christophe Mincke Renaud Maes

mars 2017

Le néo­li­bé­ra­lisme tire une part de son effi­ca­ci­té de l’association liber­té-mobi­li­té. Com­prendre l’origine et les muta­tions de l’idéologie mobi­li­taire est dès lors indis­pen­sable pour construire un contre­pro­jet politique.

Dossier

Cha­cun connait le slo­gan répé­té par Big Bro­ther dans 1984 : « la liber­té, c’est l’esclavage1 ». Cette for­mu­la­tion peut être com­prise comme une ten­ta­tive de convaincre que la sou­mis­sion à l’ordre éta­bli offre la liber­té, l’authentique. Il est cepen­dant pos­sible de lire cette maxime en sens contraire ; et si, au lieu de faire adve­nir le monde que cau­che­mar­dait Orwell, dans lequel une forme par­faite de tota­li­ta­risme convain­quait les indi­vi­dus de se sou­mettre, l’évolution de la socié­té d’après-guerre avait abou­ti à user d’un des sym­boles les plus incon­tes­tés de la liber­té, la mobi­li­té, pour faire adve­nir un escla­vage d’un genre nouveau ?

Depuis long­temps, nous asso­cions, sans même y son­ger, mobi­li­té et liber­té. « Ma voi­ture, ma liber­té » n’est que l’avatar contem­po­rain d’un lien éta­bli voi­ci plu­sieurs siècles. Tim Cress­well2 note ain­si que Tho­mas Hobbes, s’emparant de la mobi­li­té gali­léenne, en fit un prin­cipe phi­lo­so­phique fon­da­men­tal. Dans Le Lévia­than, il affirme en effet que la liber­té consiste à pou­voir jouir d’une mobi­li­té sans entrave. Ain­si, Hobbes inau­gure-t-il le rap­port moderne à la mobilité.

Il faut à cet égard recon­naitre que nous conti­nuons mas­si­ve­ment de par­ta­ger la vision de Hobbes. C’est ain­si que les repré­sen­ta­tions sociales domi­nantes de « la mobi­li­té » la consi­dèrent comme un bien, voire une béné­dic­tion, à tel point que les objets qui la per­mettent ou la sym­bo­lisent sont sujets à un culte par­ti­cu­lier. La Citroën DS n’était-elle pas un mythe pour Barthes ? De même, Tho­mas Fried­man ne fait-il pas de la Lexus (du groupe Toyo­ta) l’objet sym­bo­li­sant le mieux la pros­pé­ri­té per­mise par le capi­ta­lisme3 et n’indique-t-il pas en outre que cette thèse a pris forme dans un train à grande vitesse japo­nais, un « bul­let train » reliant Toyo­ta City à Tokyo à 180 miles par heure ?

Nous oublions cepen­dant trop sou­vent que, des siècles durant, la mobi­li­té fut vue majo­ri­tai­re­ment comme un dan­ger, même par les élites. Par exemple, au Moyen-Âge, les popu­la­tions en mou­ve­ment — mar­chands, vaga­bonds, artistes iti­né­rants et éru­dits — trou­vaient dans leur errance le moyen d’échapper aux contraintes sociales qui atta­chaient les indi­vi­dus à leur terre, à leur ordre et aux sys­tèmes nor­ma­tifs qui en décou­laient. En retour, et dans le meilleur des cas, ils étaient consi­dé­rés avec méfiance.

Lorsque, pour légi­ti­mer les pro­grammes de type Eras­mus, on sug­gère que la mobi­li­té des uni­ver­si­taires est une vieille tra­di­tion médié­vale, on oublie qu’en réa­li­té, les uni­ver­si­taires mobiles consti­tuaient une excep­tion, et que leurs moti­va­tions devaient beau­coup au sou­ci d’éviter, qui la ques­tion, qui le bucher4 ! Ain­si, en 1277, dans l’acte d’excommunication de Siger de Bra­bant et Boèce de Dacie, deux de ses col­lègues de l’Université de Paris, l’évêque Étienne Tem­pier indique-t-il que « leurs fré­quents voyages sont signe d’esprits fragiles ».

Cette méfiance pour les « mobiles » per­dure d’ailleurs bien au-delà du Moyen-Âge. De fait, tout le sys­tème d’assistance sociale aux pauvres mis en place en Angle­terre à par­tir du XVIe siècle, qui abou­tit aux Poor Laws, vise avant tout à lut­ter contre le vaga­bon­dage. John Locke pro­pose ain­si dans son Report on the Poor de 1697, que celui qui choi­sit le vaga­bon­dage appar­tient à la sinistre caté­go­rie des « pauvres pro­fes­sion­nels » — par oppo­si­tion aux « pauvres méri­tants » — qui doivent leur condi­tion à un vice ou une impré­voyance. S’il envi­sage d’orienter la cha­ri­té vers la caté­go­rie des pauvres méri­tants, Locke pré­co­nise de cor­ri­ger vio­lem­ment les « pauvres pro­fes­sion­nels » au moyen de coups de fouet, d’amputations des oreilles et de tra­vaux for­cés, ain­si que de leur confis­quer leur pro­gé­ni­ture. L’émergence de la pri­son-hos­pice anglaise du XVIe siècle s’inscrit dans ce contexte et connai­tra de nom­breux ava­tars en Europe, dont les hôpi­taux géné­raux fran­çais5.

Modernes mobiles

Il ne faut pas se pré­ci­pi­ter de conclure que la moder­ni­té indus­trielle et poli­tique, parce qu’elle rom­pit avec l’Ancien Régime, se carac­té­ri­sa par la pro­mo­tion d’une mobi­li­té débri­dée. De la même manière que les liber­tés éco­no­miques, sociales, poli­tiques ou cultu­relles furent très par­ci­mo­nieu­se­ment dis­tri­buées par des élites sou­cieuses de s’en réser­ver la jouis­sance, celle de se dépla­cer fut for­te­ment contrainte.

Ain­si, au XIXe siècle, voit-on les États nations en pleine révo­lu­tion indus­trielle s’alarmer de l’exode rural qui jette sur les routes des mil­liers de pay­sans à la recherche d’un tra­vail dans l’industrie. Les figures du dés­œu­vré, du vaga­bond et, plus tard, du bol­che­vik inter­na­tio­na­liste seront alors invo­quées pour jus­ti­fier l’instauration de contrôles stricts des dépla­ce­ments. Les États montent la garde à leurs fron­tières et qua­drillent leur ter­ri­toire qu’ils maillent de fron­tières inté­rieures : octrois, limites com­mu­nales, pro­vin­ciales ou dépar­te­men­tales, etc. Les ouvriers ne peuvent se dépla­cer qu’à la condi­tion que leur car­net d’ouvrier prouve qu’ils le font afin de gagner l’établissement d’un nou­vel employeur. Dans le cadre du déploie­ment des empires colo­niaux, les popu­la­tions nomades se voient contraintes de par­ti­ci­per à leur loca­li­sa­tion sys­té­ma­tique. Les nou­veaux pro­jets urba­nis­tiques — dont les plans d’Hausman pour Paris sont l’exemple par excel­lence — ont pour objec­tif de construire des quar­tiers socia­le­ment homo­gènes, encer­clés par des ave­nues per­met­tant leur sépa­ra­tion, dont les croi­se­ments sont ponc­tués des sym­boles du pou­voir natio­nal et de l’ordre social qu’il orga­nise, même si, dans le même temps, ces ave­nues per­mettent le déve­lop­pe­ment de la flâ­ne­rie urbaine et ano­nyme6. Au XXe siècle, pour­tant, la mobi­li­té favo­ri­sée par la ville reste consi­dé­rée par la socio­lo­gie comme une source de patho­lo­gies sociales7.

À la même époque, il est frap­pant de consta­ter que les démo­cra­ties nais­santes, qui ont pro­cla­mé la liber­té, dont celle de cir­cu­ler, comme valeur car­di­nale, arti­culent leurs sys­tèmes pénaux autour d’une peine emblé­ma­tique : la pri­va­tion de liber­té. La pri­son est au centre de l’attention, consa­crant l’immobilisation des délin­quants à l’écart de la socié­té, mais éga­le­ment, au sein des éta­blis­se­ments, dans des cel­lules indi­vi­duelles8. Le mou­ve­ment est ain­si pro­hi­bé entre la pri­son et la socié­té, mais éga­le­ment au sein de la pre­mière. Le spec­ta­cu­laire des bâti­ments car­cé­raux indique d’ailleurs l’importance de cette peine. La situa­tion est fort logique : dans une socié­té valo­ri­sant la liber­té, sa confis­ca­tion est un cruel châ­ti­ment. Voi­là donc la pri­son, une ins­ti­tu­tion lar­ge­ment fon­dée sur l’identification de la mobi­li­té à la liber­té9.

Faut-il s’étonner, dans ce contexte, que la mobi­li­té demeure asso­ciée à la liber­té ? Lorsque la facul­té de se dépla­cer est un pri­vi­lège rare, limi­té par des contraintes éco­no­miques, poli­cières et légales, lorsque l’action des ins­ti­tu­tions répres­sives par­ti­cipe de l’instauration de mesures d’immobilisation, il est logique que le mou­ve­ment appa­raisse comme l’expression même de la liber­té10.

Ce lien moderne entre mobi­li­té et liber­té trou­ve­ra à s’exprimer de mille manières. Par exemple, le déve­lop­pe­ment des tech­no­lo­gies d’impression per­met­tra le déploie­ment d’une presse où s’étalent des récits ins­pi­rés des chro­niques aris­to­cra­tiques alle­mandes décri­vant « le Grand Tour » et met­tant en scène des repor­teurs en glo­be­trot­teurs, héros mobiles de la moder­ni­té. Est-ce un hasard si Tin­tin est un repor­ter qui s’affranchit des fron­tières ? En paral­lèle émerge la figure de l’auteur génial, puis du savant d’exception, dont une bonne par­tie du pres­tige est liée à leur capa­ci­té à se dépla­cer. La moder­ni­té est aus­si inti­me­ment asso­ciée aux récits d’exploration, aux inno­va­tions tech­no­lo­giques dans le sec­teur des trans­ports, aux légendes de l’Orient Express, des trans­at­lan­tiques, de l’Aéropostale, de la Croi­sière jaune et autres vic­toires rem­por­tées sur l’espace et le temps. De Ruban bleu en courses auto­mo­biles, de records de l’heure en tra­ver­sée de la Manche en avion, l’homme moderne n’a ces­sé de déi­fier ceux qui se dépla­çaient tou­jours plus vite. Fran­chis­sant le mur du son, attei­gnant la vitesse de libé­ra­tion pour conqué­rir l’espace, il s’est construit une geste de la conquête, un pan­théon réunis­sant Ber­lioz et Gaga­rine, des temples aéro­por­tuaires, des palaces flot­tants, des Concorde et des voi­tures de légende.

Mobiles organisés

La mobi­li­té ain­si valo­ri­sée n’est d’ailleurs pas seule­ment phy­sique. C’est ain­si que, bri­sant les ordres sociaux et les cor­po­ra­tions qui entra­vaient les indi­vi­dus, les régimes poli­tiques démo­cra­tiques consa­crèrent la mobi­li­té sociale comme une aspi­ra­tion légi­time, voire une ver­tu. Que la repro­duc­tion sociale soit demeu­rée d’une puis­sance consi­dé­rable ne change rien à la valo­ri­sa­tion dis­cur­sive de ce prin­cipe, laquelle ne se fit pas sans heurts, elle qui fut en butte à des réac­tions d’une vio­lence inouïe, du fait de mou­ve­ments fas­cistes et réac­tion­naires abhor­rant les mobi­li­tés géo­gra­phiques et sociales, ain­si que toutes les figures sociales qui pou­vaient en consti­tuer l’incarnation.

À la cir­cu­la­tion des capi­taux et des mar­chan­dises, à celle des pro­duits cultu­rels, cor­res­pond la mobi­li­té sociale conquise par l’éducation, la méri­to­cra­tie et le plan de car­rière. Quit­ter la cam­pagne pour accé­der à un nou­veau sta­tut social, colo­ni­ser le monde pour offrir des débou­chés com­mer­ciaux, s’éduquer pour gra­vir les éche­lons, conqué­rir la tech­nique pour s’affranchir des obs­tacles : les mobi­li­tés façon­nèrent l’imaginaire la moder­ni­té, et par­fois aus­si sa réalité.

On aurait pour­tant tort de croire que cette mobi­li­té moderne est désor­ga­ni­sée. Elle prend place dans un monde infi­ni­ment plus fine­ment struc­tu­ré qu’auparavant, par l’industrie, par l’État et les infra­struc­tures qu’il met en place, par les fron­tières, par les normes sociales (morales, tech­niques, sani­taires, etc.)11, par l’organisation hié­rar­chique des ins­ti­tu­tions (poli­tiques, éco­no­miques, scien­ti­fiques, sociales, etc.). La mobi­li­té y est accep­tée et encou­ra­gée à la stricte condi­tion d’être mai­tri­sée. Ni flâ­ne­rie ni impro­vi­sa­tion, il s’agit de viser un but pré­cis. Dans une socié­té qui valo­rise l’ancrage12, l’inscription dans un lieu fixe est pri­mor­diale. La « méta­phy­sique séden­taire13 » qui a cours se fonde sur l’idée que la digni­té humaine découle de la sta­bi­li­té. S’établir en un lieu, se fixer des limites (géo­gra­phiques, légales, morales, etc.), abo­lir l’anarchique état de nature par la contrainte cultu­relle sont ain­si des « condi­tions de la digni­té humaine ».

Dans un tel contexte, la mobi­li­té ne peut qu’être seconde, tou­jours pré­cé­dée d’un ancrage. Elle est donc aus­si libé­ra­tion parce qu’elle revient à s’affranchir, pour un moment et à condi­tion d’avoir un but pré­éta­bli, de l’enracinement qui fait obs­tacle au mou­ve­ment. Ain­si la car­rière pro­gresse-t-elle non au hasard des pro­jets, mais selon le plan rigou­reux d’une mon­tée dans la hié­rar­chie au gré des exa­mens et pro­mo­tions. De même les conquêtes s’entendent-elles d’un dépas­se­ment de limites clai­re­ment et objec­ti­ve­ment éta­blies par le chro­no­mètre, la car­to­gra­phie ou les fron­tières de l’ennemi.

Ceux qui sont sans ancrage sont les vaga­bonds, les nomades voleurs de poules, les révo­lu­tion­naires inter­na­tio­na­listes ou les Juifs cos­mo­po­lites. Autant d’ennemis de la socié­té qu’il convient de trai­ter avec la plus impi­toyable dure­té. Ce qui fut fait.

C’est donc bien à une socié­té fon­dée sur l’ancrage que res­sor­tit la mobi­li­té-liber­té, consi­dé­rée comme un affran­chis­se­ment, une vic­toire sur l’obstacle et l’inertie du monde. Voi­là l’imaginaire que nous conti­nuons lar­ge­ment de partager.

Mobiles fré­né­tiques

Pour­tant, quelque chose a changé.

Ce que des auteurs ont par­tiel­le­ment décrit comme « méta­phy­sique nomade14 », « moder­ni­té liquide15 » ou encore « alié­na­tion par l’accélération16 » a pro­fon­dé­ment chan­gé la donne. Ce n’est en fait pas tant que nous bou­geons de plus en plus qui frappe. C’est plu­tôt que nous bou­geons dif­fé­rem­ment et que ce que l’on appelle « bou­ger » a chan­gé17.

La notion de mobi­li­té fait réfé­rence à un dépla­ce­ment dans un espace, phy­sique ou non, au cours du temps. Or, il se fait que la manière dont nous vivons l’espace-temps a pro­fon­dé­ment chan­gé. Plu­tôt qu’un temps clai­re­ment orga­ni­sé, for­te­ment syn­chro­ni­sé (temps de tra­vail, rythmes de la vie, régu­la­ri­té des évè­ne­ments sociaux, cycli­ci­té des temps forts de la vie col­lec­tive), nous sommes de plus en plus confron­tés à un flux per­ma­nent néces­si­tant des adap­ta­tions constantes. Les âges, les époques, les ères tech­no­lo­giques, les moments col­lec­tifs essen­tiels se font moins mar­qués. Pour ne prendre que cet exemple, la car­rière pro­fes­sion­nelle n’est plus mar­quée par le pas­sage de l’enfance à l’âge adulte, l’acquisition d’un métier et l’entrée au ser­vice d’un employeur four­nis­sant un tra­vail stable pour l’ensemble de la vie active, avant de pou­voir gou­ter à une retraite pai­sible. De plus en plus, la période sco­laire se pour­suit jusque tard à l’âge adulte, elle se pro­longe en une « for­ma­tion tout au long de la vie » qui fait la part belle aux recon­ver­sions, épou­sant les méandres d’une car­rière faite d’emplois suc­ces­sifs, de chan­ge­ments de fonc­tions et d’environnements, de sec­teurs et de pro­jets, elle s’achève de manière confuse par le licen­cie­ment des tra­vailleurs âgés ou une retraite active cen­sée pro­lon­ger l’implication dans le monde du tra­vail. Ce par­cours heur­té rend très impro­bable une syn­chro­ni­sa­tion stable avec nos sem­blables. Cha­cun vit des étapes dif­fé­rentes à des moments dif­fé­rents et les syn­chro­ni­sa­tions sont le fait de rares hasards ou d’intenses efforts de coordination.

Dans ce monde dif­fé­rent, on est de moins en moins mobile pour pas­ser d’un ancrage à l’autre, pour fran­chir la dis­tance sépa­rant deux posi­tions stables (sociales, géo­gra­phiques, pro­fes­sion­nelles, fami­liales). Contraints de s’adapter en per­ma­nence, régu­liè­re­ment confron­tés à l’imprévu, sou­mis aux aléas de l’obsolescence (des objets, des for­ma­tions, des métiers), nous nous mou­vons en permanence.

La mobi­li­té, autre­fois mou­ve­ment téléo­lo­gique et ponc­tuel, devient de plus en plus une dérive per­ma­nente. Il s’agit moins de fendre les flots adverses pour gagner un nou­veau mouillage que de se lais­ser por­ter par eux, tirant par­ti des cou­rants avec oppor­tu­nisme plu­tôt que tra­çant sa voie. Nous pas­sons ain­si d’un monde du but à un monde de l’opportunité.

Le hic est que cette mobi­li­té n’est plus un affran­chis­se­ment des obs­tacles ou une vic­toire sur les élé­ments. Elle est un don­né, une réa­li­té qui s’impose à nous. Le vou­drions-nous que nous ne pour­rions conser­ver une posi­tion stable et sure dans un monde qui évo­lue constam­ment. Dès lors, mal­gré notre impré­gna­tion de l’idéal d’une mobi­li­té-liber­té, force est de consta­ter que la contrainte a, en bonne par­tie, chan­gé de camp. Sou­dain, l’ancrage, la sta­bi­li­té, la constance, en un mot, la sécu­ri­té, appa­raissent comme bien dési­rables, comme des condi­tions d’émancipation, des pro­tec­tions pour les plus faibles18. Autre­fois immo­bi­li­sés par les puis­sants, ces der­niers sont aujourd’hui bal­lo­tés de for­ma­tion en acti­va­tion, d’aide à l’emploi en gui­dance, de coa­ching en sta­tut pré­caire, de situa­tion tem­po­raire en prise en charge de soi. Leur mobi­li­té se mue en souf­france et en contrainte19.

Tou­jours sous les atours du dis­cours d’une mobi­li­té-liber­té pro­met­tant l’émancipation par la libé­ra­tion de l’assistanat, l’autonomie par l’empowerment, le bon­heur par la proac­ti­vi­té et le pro­jet indi­vi­duel, c’est à une alié­na­tion mobi­li­taire que nous sommes confrontés.

Mobiles cal­cu­la­teurs

La jonc­tion avec le néo­li­bé­ra­lisme est ici immé­diate : parce que le néo­li­bé­ra­lisme repose sur l’idée d’une adap­ta­tion per­ma­nente, héri­tée du Dar­wi­nisme social, et une cer­taine croyance en un « équi­libre dyna­mique » héri­tée des théo­ries de Wal­ras et Paret­to, il décrit l’individu cal­cu­la­teur et labile seul à même de sub­sis­ter dans un monde en per­pé­tuel changement.

Le néo­li­bé­ra­lisme vise en effet à fabri­quer un « néo­su­jet » « dont toute la sub­jec­ti­vi­té doit être impli­quée dans l’activité qu’il est requis d’accomplir », un « sujet actif qui doit par­ti­ci­per tota­le­ment, s’engager plei­ne­ment, se livrer tout entier dans son acti­vi­té pro­fes­sion­nelle »20. Il s’agit non seule­ment de garan­tir que chaque indi­vi­du par­ti­cipe au déve­lop­pe­ment de l’entreprise, seul modèle d’organisation valo­ri­sé par les néo­li­bé­raux, mais en outre qu’il en ait le désir. Cette logique du désir s’oppose for­te­ment à celle d’appartenance struc­tu­relle qui pré­va­lait sous le règne du capi­ta­lisme « lourd »21, celui de la deuxième révo­lu­tion indus­trielle qui culmi­na avec le for­disme, lorsqu’il s’agissait d’incorporer les indi­vi­dus au corps pro­duc­tif de l’entreprise : cette incor­po­ra­tion régie par la dis­ci­pline a fait place, dans la logique néo­li­bé­rale, à un enrô­le­ment sous la ban­nière du désir. Il n’est donc plus ques­tion d’un ancrage dans des struc­tures, mais bien du déve­lop­pe­ment d’un désir, par essence sus­cep­tible de chan­ger d’objet.

Parce qu’ils rejettent défi­ni­ti­ve­ment tout « esprit du col­lec­tif » au pro­fit de cette logique libi­di­nale, les théo­ri­ciens néo­li­bé­raux, et sin­gu­liè­re­ment l’école du capi­tal humain, ne conçoivent la com­pé­ti­ti­vi­té entre­pre­neu­riale que comme l’agrégat des per­for­mances indi­vi­duelles22. Celles-ci étant par essence variables et repo­sant sur une mul­ti­tude de déci­sions per­son­nelles, elles consti­tuent un ensemble mou­vant, en per­ma­nente évo­lu­tion dont l’image cor­res­pond à celle du monde en muta­tion per­ma­nente que nous venons de décrire.

Cela n’empêche pas les pères fon­da­teurs du néo­li­bé­ra­lisme de croire dans des « enti­tés » dépas­sant les indi­vi­dus : ain­si, Hayek s’oppose à l’intervention de l’État dans « l’ordre du mar­ché ». Il le fait au nom de la pré­ser­va­tion d’un « ordre spon­ta­né » dont la com­plexi­té est propre à le faire échap­per à l’entendement humain23. Si ces enti­tés « trans­cen­dan­tales » existent, elles appa­raissent donc hors d’atteinte et, sur­tout, elles ne sont pas des « construc­tions sociales », mais bien le résul­tat de pro­ces­sus « natu­rels » de type évo­lu­tion­niste. Par là même, elles ne sont pas des struc­tures stables, pro­duites de la ratio­na­li­té humaine, dans les­quelles sont incor­po­rés et immo­bi­li­sés les indi­vi­dus, mais bien un milieu en constante évo­lu­tion sous l’effet d’un prin­cipe de concur­rence géné­ra­li­sée, un contexte don­né auquel il convient de s’adapter plu­tôt que de rêver le chan­ger. L’ordre dont il s’agit n’est pas un ordre dis­ci­pli­naire, mais un ordre des choses dont le prin­cipe moteur est la concur­rence généralisée.

Face à ses col­lègues, aux autres dépar­te­ments de son entre­prise, aux firmes concur­rentes, aux autres groupes éco­no­miques, il incombe à l’individu de « res­ter dans la course ». Il s’agit non pas de faire bien, de se confor­mer à des normes, de res­pec­ter un ordre éta­bli, mais de faire mieux que les concur­rents pour les supplanter.

Dans cette logique, il n’y a donc pas de stan­dard pré­exis­tant, d’étalon, de point d’ancrage per­met­tant l’évaluation : le stan­dard appa­rait par un effet d’accumulation sta­tis­tique, dans le cadre d’une com­pa­rai­son des per­for­mances des acteurs. On éva­lue, non plus sur la base d’objectifs, mais sur celle des per­for­mances rela­tives des indi­vi­dus. Pour prendre deux exemples : il ne faut pas atteindre un h index fixé à prio­ri pour être enga­gé dans un dépar­te­ment uni­ver­si­taire, il faut avoir un h index supé­rieur à celui des autres can­di­dats ; de même, il ne suf­fit pas d’atteindre un volume don­né de ventes d’actifs pour res­ter employé d’un hedge fund, il faut géné­rer plus de béné­fices que tous les autres.

Le propre de la théo­rie néo­li­bé­rale et de sa décli­nai­son néo­ma­na­gé­riale, c’est de faire en sorte que « les mêmes ins­ti­tu­tions qui dis­tri­buent les places, fixent les iden­ti­tés, sta­bi­lisent les rela­tions, imposent des limites, [soient] de plus en plus régies par un prin­cipe de dépas­se­ment conti­nu des limites24 ». Les ins­ti­tu­tions elles-mêmes sont donc prises dans un méca­nisme per­ma­nent de redé­fi­ni­tion par l’effet du cadre concur­ren­tiel, dans un pro­ces­sus qui va en s’accélérant à mesure que la concur­rence s’intensifie.

La limite sans cesse repous­sée ne peut plus être cette fron­tière qui enfer­mait et que cha­cun rêvait de trans­gres­ser, elle est ce qu’il faut dépas­ser, cet objec­tif qui recule sans cesse. Elle devient une balise après laquelle cha­cun court, plu­tôt qu’un mur sur lequel il bute et qu’il ambi­tionne d’enjamber.

Il se pro­duit un véri­table effet de rem­plis­sage stra­té­gique : toute orga­ni­sa­tion se doit de mettre en place des dis­po­si­tifs de moni­to­ring visant à per­mettre une com­pa­rai­son per­ma­nente avec les concur­rents et l’établissement d’un état du contexte d’action. Le seul but étant de « res­ter dans la course » et de ne pas se désyn­chro­ni­ser du contexte, ces ins­tru­ments sont néces­saires, en même temps qu’ils ren­forcent ce tro­pisme et contri­buent à l’oubli des tâches ini­tiales et des objec­tifs vers les­quels l’organisation était cen­sée tendre.

Ce pro­ces­sus est bien visible dans les uni­ver­si­tés où, fina­le­ment, la réfé­rence à la com­plé­men­ta­ri­té entre recherche et ensei­gne­ment (sou­vent lié au mythe de la fon­da­tion de l’université « moderne » par Whi­lelm von Hum­boldt) devient soit un argu­ment mar­ke­ting pour vendre des ensei­gne­ments — décon­nec­té d’une réflexion appro­fon­die sur les fina­li­tés de la recherche fon­da­men­tale —, soit un argu­ment pour jus­ti­fier une plus faible per­for­mance dans les ran­kings : « nous avons une bonne qua­li­té d’enseignement, mais du coup nous per­for­mons moins bien en recherche ». Elle cesse en tout état de cause d’être au cœur de la défi­ni­tion de l’agir universitaire.

Le néo­li­bé­ra­lisme relève donc bien d’une logique mobi­li­taire de sup­pres­sion des ancrages au pro­fit d’une dyna­mique d’ajustement conti­nu des indi­vi­dus, des groupes, des orga­ni­sa­tions… C’est pré­ci­sé­ment pour pou­voir s’y adon­ner que l’individu doit se trans­for­mer en cal­cu­la­teur per­ma­nent, sai­sis­sant sans cesse les oppor­tu­ni­tés per­met­tant de se dépas­ser et de dépas­ser les autres, dans un pro­ces­sus qui n’a d’autre fina­li­té que sa propre per­pé­tua­tion. La logique mobi­li­taire décrite ci-des­sus s’est donc incar­née dans le néo­li­bé­ra­lisme qui l’a faite sienne. Ce n’est certes pas la seule appli­ca­tion de ce que nous appe­lons « l’idéologie mobi­li­taire », mais c’en est une par­ti­cu­liè­re­ment puis­sante, et qui œuvre à l’aliénation des per­sonnes dont elle s’empare.

Mobiles aliénés

En effet, nous conti­nuons col­lec­ti­ve­ment de pen­ser la mobi­li­té comme une liber­té alors même que ce lien, pour n’avoir pas tota­le­ment dis­pa­ru, ne s’en est pas moins consi­dé­ra­ble­ment affai­bli, à mesure qu’émergeait une mobi­li­té asservissante.

La contrainte est de moins en moins la fron­tière, cet obs­tacle qui nous empêche de prendre des ini­tia­tives, de faire évo­luer nos com­por­te­ments, de nous dépla­cer phy­si­que­ment, de nous construire une tra­jec­toire, sociale et géo­gra­phique, propre. De plus en plus, au contraire, l’ordre nous est inti­mé de nous affran­chir des limi­ta­tions, de nous adap­ter constam­ment, de pous­ser tou­jours plus loin, de renon­cer à tout repos, à tout retrait pour nous consa­crer corps et âme à la satis­fac­tion de nos dési­rs. Nous sommes enjoints de deve­nir nous-mêmes… même si ce « nous-mêmes » ne peut être notre pure créa­tion25. Il doit être le fruit de notre désir, mais s’incarner en une forme qui satis­fe­ra aux contraintes du contexte dans lequel nous évo­luons. La mobi­li­té constante doit donc prendre la forme d’une adap­ta­tion conti­nue au contexte. Se for­mer toute la vie ? Certes, mais pour doper son employa­bi­li­té ! Être flexible ? Bien enten­du, mais pour satis­faire la demande de son patron ! Per­son­na­li­ser la pro­duc­tion ? Évi­dem­ment, mais au ser­vice des fluc­tua­tions d’une demande.

La mobi­li­té qui s’impose à nous n’est donc pas l’errance du poète vaga­bond, encore moins la visée d’un but éloi­gné appe­lant irré­sis­ti­ble­ment le conqué­rant, elle est l’adaptation constante à un envi­ron­ne­ment dont les contraintes ont rem­pla­cé celles de la fron­tière. Elle est donc un asser­vis­se­ment aux fluc­tua­tions du contexte paré des atours de l’habileté à sai­sir les opportunités.

C’est sans doute là un des plus effi­caces tours de pas­se­passe du néo­li­bé­ra­lisme : bâtir une mobi­li­té alié­nante en la camou­flant sous le rêve d’une époque où la mobi­li­té était éman­ci­pa­trice. Ce hia­tus entre mobi­li­té vécue et mobi­li­té rêvée est, à notre sens, une des rai­sons pour les­quelles les forces pro­gres­sistes peinent à lut­ter : dépour­vues de caté­go­ries pour pen­ser l’aliénation mobi­li­taire néo­li­bé­rale, elles échouent à nom­mer ce à quoi il faut aujourd’hui résis­ter et, par consé­quent, à pro­po­ser un modèle de socié­té fon­dé sur un autre rap­port col­lec­tif à l’espace-temps que celui qu’impose la décli­nai­son néo­li­bé­rale de l’idéologie mobilitaire.

Cer­tai­ne­ment, il est illu­soire de se cris­per sur des fron­tières d’un ordre éta­bli déjà lar­ge­ment éro­dé, de se faire por­teur d’un dis­cours d’ordre appe­lant à la réac­ti­va­tion réac­tion­naire des cli­vages et limites d’autrefois, des vieilles logiques dis­ci­pli­naires visant à mieux « ancrer » les indi­vi­dus ; mais il importe d’interroger la valo­ri­sa­tion contem­po­raine des mobi­li­tés pour en dis­tin­guer les décli­nai­sons éman­ci­pa­trices des appli­ca­tions alié­nantes. Sans doute la solu­tion est-elle à cet égard moins à cher­cher dans le rejet de l’idéologie mobi­li­taire et des muta­tions du rap­port à l’espace-temps dont elle est por­teuse que dans le refus de son iden­ti­fi­ca­tion ins­tru­men­tale à un néo­li­bé­ra­lisme pré­da­teur. Qui regret­te­ra l’époque où l’homme était enchai­né à la machine, à sa famille, à son État, à sa culture, voire à la race et au sexe qui lui avait été assi­gnée à la nais­sance ? Qui pleu­re­ra l’interdiction de la créa­ti­vi­té et de l’initiative, la ségré­ga­tion sociale des classes et des genres, la mono­to­nie des gestes pro­fes­sion­nels, la longue lita­nie des leçons apprises par cœur ? Faut-il pour autant que la contes­ta­tion des fron­tières abou­tisse à l’asservissement des per­sonnes à un nou­vel ordre natu­rel, celui du contexte et de sa pres­sion dar­wi­niste ? Faut-il abso­lu­ment que l’adaptation ser­vile à l’environnement soit le cri­tère de per­ti­nence de l’agir humain ? Est-il néces­saire que l’initiative indi­vi­duelle pro­duise un ali­gne­ment, plu­tôt qu’une rup­ture, une confron­ta­tion, un désac­cord, un hia­tus, un refus ?

On l’aura com­pris, c’est d’une com­pré­hen­sion des res­sorts du hol­dup néo­li­bé­ral que devra par­tir une inter­ro­ga­tion des gauches sur les rup­tures néces­saires avec ses lec­tures clas­sistes, mais aus­si avec des figures de l’évidence telle l’identification de la mobi­li­té à la liber­té. « La liber­té, c’est l’esclavage », au terme de ce texte, n’apparait plus comme l’affirmation de ce que l’esclavage libère — en un écho au gla­çant Arbeit macht frei —, mais comme l’indication de ce que la liber­té même, vue sous les traits clas­siques de la mobi­li­té, peut asser­vir l’être humain. Pour faire men­tir l’adage, il fau­dra donc refu­ser de conti­nuer de confondre liber­té et mobi­li­té et oser à nou­veau nous inter­ro­ger sur ce qu’est l’émancipation.

  1. Dans 1984 de G. Orwell, le par­ti INGSOC a trois slo­gans : « War is peace ; Free­dom is sla­ve­ry ; Igno­rance is strenght ». Ils consti­tuent des exemples du « double thin­king », méthode de contrôle des esprits.
  2. T. Cress­well, On the Move : Mobi­li­ty in the Modern Wes­tern World, New York, Rout­ledge, 2006, p. 14.
  3. Th.L. Fried­man, The Lexus and the olive tree : unders­tan­ding glo­ba­li­za­tion, New York, Pica­dor : Far­rar, Straus and Giroux, 2012.
  4. R. Maes, L’action sociale des uni­ver­si­tés à l’épreuve des muta­tions de l’enseignement supé­rieur en Europe, thèse de doc­to­rat, ULB, 2014.
  5. O. Mil­haud, Sépa­rer et punir. Les pri­sons fran­çaises : mise à dis­tance et puni­tion par l’espace, thèse de doc­to­rat, Uni­ver­si­té Michel de Mon­taigne-Bor­deaux III, 2009, p. 19‑20.
  6. J. Urry, Mobi­li­ties, Cam­bridge, CB, Mal­den, MA, Poli­ty Press, 2007, p. 68.
  7. T. Cress­well, On the Move, op. cit., p. 36.
  8. O. Mil­haud, Sépa­rer et punir. Les pri­sons fran­çaises, op. cit., p. 47.
  9. Chr. Mincke, « Une loi péni­ten­tiaire en Bel­gique, pour quoi faire ? », La Revue nou­velle, n° 6/2015, p. 32 – 38 ; Chr. Mincke et A. Lemonne, « Pri­son and (Im)mobility. What about Fou­cault ? », Mobi­li­ties, vol. 9 (2 octobre 2014), n° 4, p. 528 – 549.
  10. O. Mil­haud, Sépa­rer et punir. Les pri­sons fran­çaises, op. cit., p. 78.
  11. Les­quelles sont loin de se relâ­cher au XIXe, comme pour­rait le faire pen­ser la vision sim­pliste d’un Ancien Régime obs­cur et oppresseur.
  12. Z. Bau­man, Liquid moder­ni­ty, Cam­bridge, UK Mal­den, MA, Poli­ty Press Bla­ck­well, 2000.
  13. T. Cress­well, On the Move, op. cit.
  14. Ibid.
  15. Z. Bau­man, Liquid moder­ni­ty, op. cit.
  16. H. Rosa, Alié­na­tion et accé­lé­ra­tion. Vers une théo­rie cri­tique de la moder­ni­té tar­dive, Paris, La Décou­verte, 2012.
  17. Chr. Mincke, « From mobi­li­ty to its ideo­lo­gy : when mobi­li­ty becomes an impe­ra­tive », dans Endres M., Man­der­scheid K. et Mincke Chr. (dir.), The Mobi­li­ties Para­digm : Dis­courses and Ideo­lo­gies, Lon­don, Rout­ledge, Tay­lor & Fran­cis Group, 2016, p. 11‑33.
  18. Chr. Mincke, « Dis­cours mobi­li­taire, dési­rs d’insécurités et rhé­to­rique sécu­ri­taire », dans L’(in)sécurité en ques­tion. Défi­ni­tion, enjeux et pers­pec­tives, Liège, Presses uni­ver­si­taires de Liège, 2015, p. 133‑157.
  19. Chr. Mincke et B. Mon­tu­let, « Immo­bi­li­tés éprou­vées et mobi­li­tés éprou­vantes. Quelques consi­dé­ra­tions à pro­pos de l’idéologie mobilitaire ».
  20. P. Dar­dot et Chr. Laval, La nou­velle rai­son du monde, Paris, La Décou­verte, p. 408.
  21. Z. Bau­man, Liquid moder­ni­ty, op. cit., p. 57.
  22. R. Maes, « Contrôle, per­for­mances et gou­ver­nance », 16 octobre 2013.
  23. Voir F. Hayek, Droit, légis­la­tion et liber­té, Paris, PUF, 2013, p. 127 sq.
  24. P. Dar­dot et Chr. Laval, op. cit., p. 459.
  25. Voir le texte de John Pit­seys et Géral­dine Thi­ry dans ce dossier.

Christophe Mincke


Auteur

Christophe Mincke est codirecteur de La Revue nouvelle, directeur du département de criminologie de l’Institut national de criminalistique et de criminologie et professeur à l’Université Saint-Louis à Bruxelles. Il a étudié le droit et la sociologie et s’est intéressé, à titre scientifique, au ministère public, à la médiation pénale et, aujourd’hui, à la mobilité et à ses rapports avec la prison. Au travers de ses travaux récents, il interroge notre rapport collectif au changement et la frénésie de notre époque.

Renaud Maes


Auteur

Renaud Maes est docteur en Sciences (Physique, 2010) et docteur en Sciences sociales et politiques (Sciences du Travail, 2014) de l’université libre de Bruxelles (ULB). Il a rejoint le comité de rédaction en 2014 et, après avoir coordonné la rubrique « Le Mois » à partir de 2015, il était devenu rédacteur en chef de La Revue nouvelle de 2016 à 2022. Il est également professeur invité à l’université Saint-Louis (Bruxelles) et à l’ULB, et mène des travaux de recherche portant notamment sur l’action sociale de l’enseignement supérieur, la prostitution, le porno et les comportements sexuels, ainsi que sur le travail du corps. Depuis juillet 2019, il est président du comité belge de la Société civile des auteurs multimédia (Scam.be).