Skip to main content
logo
Lancer la vidéo

Fins de carrière

Numéro 3 Mars 2006 par Pierre Reman

mars 2006

« Qu’est-ce qu’il a donc ? chu­cho­ta Leni­na. Elle avait les yeux écar­quillés d’hor­reur et d’étonnement. — Il est vieux, voi­là tout, répon­dit Ber­nard avec tout le déta­che­ment dont il était capable. Il était trou­blé, lui aus­si ; il fit un effort pour ne pas paraitre ému. — Vieux ? répé­­ta-t-elle. Mais le direc­teur est vieux ; il y a des tas […]

Dossier

« Qu’est-ce qu’il a donc ? chu­cho­ta Lenina.
Elle avait les yeux écar­quillés d’hor­reur et d’étonnement.

- Il est vieux, voi­là tout, répon­dit Ber­nard avec tout le déta­che­ment dont il était capable. Il était trou­blé, lui aus­si ; il fit un effort pour ne pas paraitre ému.

- Vieux ? répé­ta-t-elle. Mais le direc­teur est vieux ; il y a des tas de gens qui sont vieux ; ils ne sont pas comme cela.

- C’est parce que nous ne leur per­met­tons pas d’être comme cela. Nous les pré­ser­vons des mala­dies. Nous main­te­nons arti­fi­ciel­le­ment leurs sécré­tions internes au niveau d’é­qui­libre de la jeu­nesse. […] Aus­si, natu­rel­le­ment, n’ont-ils pas cet air-là. En par­tie, ajou­ta-t-il, parce que la plu­part d’entre eux meurent bien avant d’a­voir atteint l’âge de ce vieillard. La jeu­nesse à peu près intacte jus­qu’à soixante ans, et puis, crac ! la fin. »

Aldous Hux­ley, Le meilleur des mondes, Plon, Pocket, 1977, p. 130 – 131 (1932 : A brave new world)

Régu­liè­re­ment l’é­vo­lu­tion de la popu­la­tion et de sa struc­ture appa­rait au cœur du débat public. Il y a plus d’un siècle, Mal­thus affir­mait déjà qu’une loi natu­relle régis­sait la crois­sance de la popu­la­tion ain­si que la quan­ti­té des biens ali­men­taires pro­duits. Il en tirait la conclu­sion que les salaires sont condam­nés à res­ter à un niveau per­met­tant sim­ple­ment de sub­sis­ter et recom­man­dait au gou­ver­ne­ment de ne pas déve­lop­per des poli­tiques d’as­sis­tance au risque de favo­ri­ser la nata­li­té et donc la misère. L’his­toire sociale a heu­reu­se­ment don­né tort à Mal­thus, mais pas au point d’ef­fa­cer les inter­ro­ga­tions sur le rôle de la démo­gra­phie dans le champ de la pro­tec­tion sociale et du déve­lop­pe­ment éco­no­mique. En Bel­gique, ou en Wal­lo­nie, des « rap­ports » ont ali­men­té le débat. Les rap­ports « Sau­vy » et « Del­pé­rée » en 1962, « Poli­wa » en 1977 évoquent la ques­tion démo­gra­phique lorsque la ques­tion sociale se pose. Aujourd’­hui, c’est à tra­vers le « contrat de soli­da­ri­té entre les géné­ra­tions » que la ques­tion rebon­dit. La toile de fond est le vieillis­se­ment démo­gra­phique et la pers­pec­tive de voir arri­ver à l’âge de la pen­sion les enfants du baby-boom de l’im­mé­diat après-guerre. Certes l’en­jeu du débat tient aux impli­ca­tions que ce vieillis­se­ment amène pour la sécu­ri­té sociale en géné­ral, et pour le sys­tème des pen­sions en par­ti­cu­lier, mais il ne se réduit pas à la pro­blé­ma­tique — impor­tante — du finan­ce­ment de la pro­tec­tion sociale. Plus que la simple ques­tion « Qui paye­ra les pen­sions de demain et quel niveau attein­dront les reve­nus de rem­pla­ce­ment ? », ce sont les dif­fi­cul­tés de nos socié­tés à construire ou à habiller ce temps nou­veau entre fin de car­rière et entrée dans la pen­sion qui nous semblent impor­tantes à sou­li­gner dans ce numé­ro. Le socio­logue fran­çais Xavier Gaul­lier (1998) par­lait de la « décen­nie des fins de car­rière » pour décrire cette période de la vie située entre cin­quante et soixante ans, où les per­sonnes sont consi­dé­rées tan­tôt comme « usées » et inaptes à pour­suivre leur acti­vi­té pro­fes­sion­nelle tan­tôt comme étant encore loin du troi­sième âge, celui du repos et de l’inactivité.

Depuis la fin de cette décen­nie, un nou­veau dis­cours s’est déve­lop­pé tant au sein des ins­ti­tu­tions inter­na­tio­nales que dans le monde scien­ti­fique. « Aujourd’­hui, à plus d’un titre, l’in­ser­tion pro­fes­sion­nelle des plus de cin­quante ans repré­sente un enjeu majeur pour l’a­ve­nir des pays déve­lop­pés. Elle consti­tue en effet l’une des réponses prin­ci­pales au défi du vieillis­se­ment démo­gra­phique. […] Hor­mis l’ap­pel mas­sif à une main-d’œuvre immi­grée, ce sont les quin­qua­gé­naires qui consti­tuent, dans la plu­part des pays riches et pour les pro­chaines décen­nies, l’es­sen­tiel de la réserve de main-d’œuvre dis­po­nible. » (Guille­mard, 2003, 23). En d’autres mots, l’en­jeu actuel du finan­ce­ment des pen­sions serait lié au taux d’emploi des tra­vailleurs âgés.

Les réfé­rences au taux d’emploi sup­plantent dans les dis­cours les réfé­rences au taux de pau­vre­té domi­nant dans les années quatre-vingt, comme si l’ef­fi­ca­ci­té de la sécu­ri­té sociale devait non plus se mesu­rer par les indi­ca­teurs de sécu­ri­té d’exis­tence, mais sur­tout par des indi­ca­teurs de par­ti­ci­pa­tion au mar­ché du tra­vail. Ce chan­ge­ment dans les cri­tères d’ef­fi­ca­ci­té des sys­tèmes sociaux modi­fie les repré­sen­ta­tions des modèles sociaux les uns par rap­port aux autres. Le modèle belge de sécu­ri­té sociale répu­té dans les années quatre-vingt pour ses per­for­mances en matière de lutte contre la pau­vre­té est jugé de façon plus cri­tique aujourd’­hui étant don­né ses dif­fi­cul­tés à inté­grer dans l’emploi des franges entières de la popu­la­tion par­mi les­quelles on trouve les tra­vailleurs peu qua­li­fiés, les tra­vailleurs d’o­ri­gine étran­gère, les femmes et… les tra­vailleurs dits âgés.
Dans les années sep­tante, on a vu appa­raitre une série de dis­po­si­tifs publics de sor­tie anti­ci­pée du tra­vail en Bel­gique et en France comme dans la plu­part des pays aux modèles d’É­tat pro­vi­dence de type assu­ran­tiel. L’ob­jec­tif annon­cé était de faire face aux restruc­tu­ra­tions indus­trielles du sec­teur manu­fac­tu­rier en déve­lop­pant des plans sociaux per­met­tant de réduire le volume de la main-d’œuvre dans un cli­mat de paix sociale et de garan­tie des res­sources tout en ouvrant quelques pers­pec­tives pour l’embauche de jeunes tra­vailleurs. « La com­pres­sion de l’offre de tra­vail par réduc­tion de la vie active pre­nant la forme du retrait anti­ci­pé d’ac­ti­vi­té a été le prin­ci­pal ins­tru­ment de répar­ti­tion du tra­vail dis­po­nible au cours de la seconde moi­tié de la décen­nie sep­tante. » (Jamoulle et al., 1997, 203). Ain­si, la mise en place de la pré­pen­sion a été pen­sée dans une double logique, celle de l’ac­com­pa­gne­ment social des restruc­tu­ra­tions et celle de la soli­da­ri­té intergénérationnelle.

Avec le temps, une troi­sième logique s’est impo­sée, celle d’un droit au temps libé­ré sous forme de départ à la retraite avant l’âge légal. La ques­tion n’est donc plus uni­que­ment d’ordre éco­no­mique et indus­triel ni d’ordre social. Elle devient de plus en plus cultu­relle. Et c’est aus­si sous cet angle qu’elle mérite d’être posée.
Notre ambi­tion dans ce numé­ro n’est pas de faire un bilan des poli­tiques d’emploi et de garan­tie des res­sources afin d’en sou­li­gner les résul­tats, et aus­si les limites, mais plu­tôt de com­prendre les enjeux sociaux qui se trament der­rière cette volon­té « d’activer1 » les tra­vailleurs âgés et, dans une cer­taine mesure, les entre­prises. Adop­tant une approche plu­ri­dis­ci­pli­naire, nous allons ques­tion­ner ce qui se passe en amont et en aval d’une réorien­ta­tion des poli­tiques sociales qui se des­sine en Bel­gique et à l’é­tran­ger sous le vocable de l’activation.

Grâce au texte de Marc Debuis­son et Fré­dé­ric Doc­quier, nous abor­de­rons le cadre démo­gra­phique au sein duquel se jouent les ques­tions du vieillis­se­ment dans la Bel­gique fédé­rale. Les com­pa­rai­sons inter­na­tio­nales concernent la Bel­gique comme enti­té et en négligent les réa­li­tés ins­ti­tu­tion­nelles. Non seule­ment la Flandre, Bruxelles et la Wal­lo­nie se dis­tinguent for­te­ment par la situa­tion socioé­co­no­mique de leur mar­ché du tra­vail, mais ne connaissent pas un même degré de vieillis­se­ment. Celui-ci est plus pro­non­cé en Flandre qu’en Wal­lo­nie et à Bruxelles, qui conti­nuent à connaitre un taux de chô­mage très impor­tant par­mi leurs jeunes travailleurs.

La démo­gra­phie ne nie pas que le vieillis­se­ment se pro­duit aus­si en Wal­lo­nie et à Bruxelles, mais elle donne une mesure plus réelle de la situa­tion que ne le laissent habi­tuel­le­ment pen­ser les com­pa­rai­sons inter­na­tio­nales. Cela explique en par­tie pour­quoi les acteurs régio­naux se posi­tionnent dif­fé­rem­ment sur la légi­ti­mi­té des nou­veaux dis­po­si­tifs pro­po­sés sur­tout dans des régions ou sous-régions où ce n’est pas la fin mais le début de la car­rière qui est consi­dé­ré comme le pro­blème majeur.
Pour com­prendre la dyna­mique qui amène la ques­tion des « fins de car­rière » sur le devant de la scène, il convient certes de se pen­cher fine­ment sur les com­por­te­ments des acteurs natio­naux et régio­naux, mais il faut aus­si se tour­ner vers les orien­ta­tions des­si­nées sur le plan euro­péen. Certes, la Stra­té­gie euro­péenne pour l’emploi n’ex­plique pas tout, mais elle consti­tue un cadre cog­ni­tif puis­sant, « une réfé­rence expli­cite pour l’ac­tion publique en Bel­gique et dans ses Régions » (Conter et Mou­laert, 2005).

Par­tant de l’ob­jec­tif quan­ti­ta­tif cen­tral de relè­ve­ment des taux d’emploi des tra­vailleurs âgés, Jean Ver­ly cherche à déco­der la signi­fi­ca­tion de cet indi­ca­teur qui classe la Bel­gique en géné­ral et la Région wal­lonne en par­ti­cu­lier dans une situa­tion peu favo­rable. Il nous invite à prendre un triple recul cri­tique sur la nature des objec­tifs de la Stra­té­gie euro­péenne de l’emploi, sur ce que comp­ta­bi­lise réel­le­ment le taux d’emploi et sur les rai­sons pour les­quelles la Bel­gique serait « à la traine ». Au final, Jean Ver­ly apporte une série de nuances qui invitent non pas à élu­der le pro­blème mais à s’in­ter­ro­ger sur le sens et les limites des indi­ca­teurs sur les­quels se construisent les pro­jets de réforme du mar­ché du travail.

Autre regard en amont de la pro­blé­ma­tique de la fin de car­rière, celui de Natha­lie Bur­nay. Elle nous invite à redé­cou­vrir un constat que des cher­cheurs amé­ri­cains fai­saient dès les années cin­quante : les tra­vailleurs âgés doivent affron­ter des pré­ju­gés. Pas­sant pour ano­dine, cette idée prend tout son sens à l’heure actuelle lorsque, au nom du « vieillis­se­ment actif », on com­mence à entendre qu’il faut « chan­ger les men­ta­li­tés » ou encore « lut­ter contre les dis­cri­mi­na­tions liées à l’âge ». Nous assis­te­rions à une réap­pro­pria­tion idéo­lo­gique des pré­ju­gés liés à l’âge. Plus qu’un phé­no­mène pas­sa­ger, ces pré­ju­gés seraient ancrés pro­fon­dé­ment chez les dif­fé­rents acteurs du mar­ché du tra­vail. Si une action poli­tique a la pré­ten­tion de « chan­ger les men­ta­li­tés », elle devrait prendre conscience qu’il s’a­git d’une action de long terme et qu’elle doit tou­cher l’en­semble des acteurs de l’emploi. Sans oublier les tra­vailleurs eux-mêmes qui, pour cer­tains, pour­raient consi­dé­rer les dis­po­si­tifs choi­sis de pré­pen­sion comme autant de stra­té­gies pour échap­per au stig­mate néga­tif du tra­vailleur âgé (Des­mette, 2004).

Se posi­tion­nant en aval de la pro­blé­ma­tique, Ber­nard Conter et Thi­bauld Mou­laert posent la ques­tion sui­vante : que se passe-t-il concrè­te­ment en Région wal­lonne quand s’im­posent les lignes direc­trices euro­péennes sur le « vieillis­se­ment actif » ? En réa­li­té, on voit bien que la Wal­lo­nie ne s’empresse pas de mettre en œuvre une telle stra­té­gie de main­tien des âgés au tra­vail et ce pour plu­sieurs rai­sons. Outre les aspects démo­gra­phiques et la répar­ti­tion de la popu­la­tion en âge de tra­vailler évo­qués par Marc Debuis­son et Fré­dé­ric Doc­quier, la conscience col­lec­tive conti­nue­rait à consi­dé­rer comme légi­times des dis­po­si­tifs de sor­tie anti­ci­pée pour une région indus­trielle ayant dû affron­ter des restruc­tu­ra­tions mas­sives et qui reste convain­cue que le pro­ces­sus n’est pas encore arri­vé à son terme.

Si le niveau de la poli­tique régio­nale est utile pour mesu­rer la péné­tra­tion du dis­cours sur le « vieillis­se­ment actif » dans le champ poli­tique et de l’ac­tion publique, celui de l’en­tre­prise gagne lui aus­si à être éclai­ré. Pour prendre en compte les réa­li­tés de l’en­tre­prise face au vieillis­se­ment, nous convo­quons deux récits de pro­fes­sion­nels inter­ve­nant régu­liè­re­ment au sein du monde du travail.

Tout d’a­bord, Gil­bert Demez expo­se­ra sa vision de juriste et de spé­cia­liste du droit. C’est à une véri­table plon­gée au cœur de l’en­tre­prise qu’il nous invite avec cette ques­tion per­tur­bante : certes on peut cri­ti­quer les dis­po­si­tifs de fin de car­rière, mais lors­qu’une entre­prise est en restruc­tu­ra­tion, voire en faillite, n’est-ce pas un moyen de limi­ter le cout social et humain ? En évi­tant la cri­tique facile (« c’est l’en­tre­prise qui restruc­ture, c’est elle la res­pon­sable »), l’au­teur montre à quel point s’il existe une « culture du retrait pré­coce » (Guille­mard, 2003), elle est pré­sente chez les dif­fé­rents acteurs du mar­ché de l’emploi. On ne peut alors que se deman­der ce que seront les futures négo­cia­tions en cas de restruc­tu­ra­tion ? Les avo­cats seront-ils invi­tés à déve­lop­per de nou­veaux outils bud­gé­ti­sés dans l’en­tre­prise pour adou­cir les sor­ties de tra­vailleurs âgés ou essaie­ront-ils de pen­ser avec les entre­prises, les syn­di­cats et les tra­vailleurs, des voies alter­na­tives vers un main­tien dans l’emploi, même à temps réduit ?

Bien enten­du, des regards et des ana­lyses venant de la réa­li­té concrète du tra­vail méritent de figu­rer en bonne place dans une réflexion. Le texte de Flo­rence Laigle est lit­té­ra­le­ment ancré dans le réel. Un réel qui met en scène une entre­prise consciente que le tra­vail qu’elle demande à ses tra­vailleurs les use phy­si­que­ment et qui met en place une série de dis­po­si­tifs pour essayer de dimi­nuer l’im­pact néga­tif des condi­tions de tra­vail sur la san­té des tra­vailleurs. Un réel sur la base duquel l’au­teure cherche d’autres voies explo­ra­toires pour main­te­nir les indi­vi­dus au tra­vail et qui invite à prendre en compte une vision ergo­no­mique élar­gie des condi­tions de tra­vail. Si ce texte s’ap­puie sur l’ex­pé­rience d’un métier par­ti­cu­liè­re­ment pénible phy­si­que­ment, il n’en invite pas moins à une réflexion plus large sur les marges de manœuvre que les entre­prises en géné­ral pour­raient déga­ger pour leurs tra­vailleurs âgés, dans le cadre d’ac­cords négo­ciés avec les repré­sen­tants des tra­vailleurs et, lorsque cela touche à la san­té, avec le méde­cin du travail.

Les termes du débat sont les sui­vants. Le vieillis­se­ment de la popu­la­tion va pous­ser les demandes sociales vers le haut ce qui néces­si­te­ra d’ac­croitre la soli­da­ri­té entre les géné­ra­tions, mais aus­si au sein de celles-ci si l’on veut évi­ter que les taux de rem­pla­ce­ment (rap­port entre le niveau des pres­ta­tions sociales et le niveau des salaires) conti­nuent à bais­ser de façon dras­tique, pous­sant les uns à recou­rir aux assu­rances com­plé­men­taires et les autres à se conten­ter de peu et à se tour­ner vers les C.P.A.S. en cas de détresse. Les bilans tra­di­tion­nels de fin d’an­née ont bien révé­lé ce double mou­ve­ment d’ex­plo­sion des plans d’é­pargne pen­sions dopés par des inci­tants fis­caux et, en même temps, la crois­sance expo­nen­tielle de l’en­det­te­ment des ménages. La dimen­sion éco­no­mique du pro­blème a domi­né les débats et a été d’un apport incon­tes­table dans le diag­nos­tic en ce qu’elle a per­mis de nuan­cer des idées toutes faites comme l’ab­sence de cor­ré­la­tion entre le taux d’emploi des jeunes et l’am­pleur des dis­po­si­tifs de fin de car­rière ou la com­pa­ti­bi­li­té entre des taux de pré­lè­ve­ment impor­tants et des taux d’emploi éle­vés comme dans les pays nor­diques. Cela étant, les solu­tions pour faire face au vieillis­se­ment démo­gra­phique ne pas­se­ront pas uni­que­ment par des inci­tants de nature finan­cière si l’en­jeu est de sor­tir d’une « culture du retrait pré­coce » consi­dé­rée comme légi­time au nom du par­tage du tra­vail, de l’ac­com­pa­gne­ment des restruc­tu­ra­tions ou du droit au temps libé­ré. Com­ment ins­crire une poli­tique de vieillis­se­ment actif dans une pers­pec­tive de pro­grès social est sans doute la ques­tion la plus impor­tante qui deman­de­ra des inno­va­tions non seule­ment éco­no­miques, mais aus­si ins­ti­tu­tion­nelles et culturelles

Pierre Reman


Auteur

Pierre Reman est économiste et licencié en sciences du Travail. Il a été directeur de la faculté ouverte de politique économique et sociale et titulaire de la Chaire Max Bastin à l’UCL. Il a consacré son enseignement et ses travaux de recherche à la sécurité sociale, les politiques sociales et les politiques de l’emploi. Il est également administrateur au CRISP et membre du Groupe d’analyse des conflits sociaux (GRACOS). Parmi ces récentes publications, citons « La sécurité sociale inachevée », entretien avec Philippe Defeyt, Daniel Dumont et François Perl, Revue Politique, octobre 2020, « L’Avenir, un journal au futur suspendu », in Grèves et conflictualités sociale en 2018, Courrier hebdomadaire du CRISP, n° 2024-2025, 1999 (en collaboration avec Gérard Lambert), « Le paysage syndical : un pluralisme dépilarisé », in Piliers, dépilarisation et clivage philosophique en Belgique, CRISP, 2019 (en collaboration avec Jean Faniel). « Entre construction et déconstruction de l’Etat social : la place de l’aide alimentaire », in Aide alimentaire : les protections sociales en jeu, Académia, 2017 (en collaboration avec Philippe Defeyt) et « Analyse scientifique et jugement de valeurs. Une expérience singulière de partenariat entre le monde universitaire et le monde ouvrier », in Former des adultes à l’université, Presse universitaires de Louvain, 2017 en collaboration avec Pierre de Saint-Georges et Georges Liénard).