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En Belgique… Le service citoyen ?

Numéro 1 Janvier 2012 par Plateforme pour le Service Citoyen

janvier 2012

En Bel­gique, il n’existe pas (encore) de cadre légal ins­ti­tué même si une pro­po­si­tion de loi « créant un sta­tut social pour un ser­vice citoyen » a été dépo­sée au Sénat en septembre;2010 et est actuel­le­ment à l’exa­men en com­mis­sion des Affaires sociales. Une pla­te­forme consti­tuée autour des béné­fices d’une ins­ti­tu­tion­na­li­sa­tion du ser­vice citoyen a mis en œuvre un pro­jet pilote en 2011 qu’elle opti­mi­se­ra en 2012.

Dossier

Depuis 2008, la Pla­te­forme pour le Ser­vice Citoyen/Platform Jon­ge­ren voor de Samen­le­ving1 ras­semble et fédère en Bel­gique un nombre crois­sant de par­te­naires (une cin­quan­taine actuel­le­ment), asso­cia­tifs et ins­ti­tu­tion­nels, publics et pri­vés, autour de l’instauration d’un cadre légal défi­nis­sant un véri­table sta­tut social pour les jeunes de dix-huit à vingt-cinq ans enga­gés, de six mois à un an, dans un ser­vice citoyen. Cette ins­ti­tu­tion­na­li­sa­tion à venir devrait per­mettre au ser­vice citoyen d’atteindre les objec­tifs suivants :

  • consti­tuer une étape de vie, un nou­veau temps social, per­met­tant de ren­for­cer le déve­lop­pe­ment per­son­nel et l’implication socié­tale des jeunes ;
  • être acces­sible à tous les jeunes en leur assu­rant les moyens de sub­ve­nir à leurs besoins pen­dant cette période ;
  • offrir aux jeunes une expé­rience col­lec­tive et un temps de bras­sage social et culturel ;
  • pro­po­ser la réa­li­sa­tion de mis­sions répon­dant à de réels enjeux de socié­té (envi­ron­ne­men­taux, sociaux, cultu­rels, etc.) et qui consti­tuent une contri­bu­tion utile pour les orga­nismes qui les accueillent ;
  • aider les jeunes à avan­cer dans leur pro­jet per­son­nel en leur per­met­tant, grâce à des temps de for­ma­tion, d’échange et de matu­ra­tion, de mobi­li­ser et d’acquérir des com­pé­tences diverses (géné­rales, manuelles, intel­lec­tuelles, rela­tion­nelles, etc.);
  • recon­naitre et valo­ri­ser, sym­bo­li­que­ment et juri­di­que­ment, ce temps don­né à la collectivité ;
  • consti­tuer un dis­po­si­tif fédé­ra­teur, coor­don­né par les auto­ri­tés fédé­rales, asso­ciant dans la mise en œuvre de ce pro­jet de socié­té les ins­ti­tu­tions publiques, les col­lec­ti­vi­tés locales, les asso­cia­tions, les mou­ve­ments et orga­ni­sa­tions de jeu­nesse, les syn­di­cats, les entre­prises, etc.

Dans l’attente de ce dis­po­si­tif juri­dique et de cette recon­nais­sance ins­ti­tu­tion­nelle, la Pla­te­forme pour le Ser­vice Citoyen a mis en œuvre en 2011 un pro­jet pilote cou­vrant les Régions wal­lonne et bruxel­loise, et s’apprête à coor­don­ner un nou­veau pro­jet pilote en 2012 éten­du à tout le ter­ri­toire natio­nal (voir ci-après).

Pays Déno­mi­na­tion Recon­nais­sance institutionnelle Nombre de jeunes Âge requis Durée en mois Indem­ni­té
France Ser­vice civique Loi n°2010 – 241 du 10 mars 2010 rela­tive au ser­vice civique 10.141 en 2011, 40.000 ins­crits pour 2012 16 à 25 ans 6 à 12 entre 548 et 650 €
Ita­lie Ser­vi­zio Civile Nazionale Loi no64 du 6 mars 2001 rela­tive au ser­vice civil national 20.524 en 2010 18 à 28 ans 12 433,80 €
Alle­magne BFD (Bun­des­frei­willi­gen­dienst)2
FSJ & FÖJ (Frei­williges Soziales Jahr frei­willige öko­lo­gisches Jahr)
Loi du 24 mars 2011 rela­tive au ser­vice volon­taire fédéral 40.000 en 20113 16 à 27 ans4 7 à 12 330 €
Suisse Ser­vice civil Loi fédé­rale du 6 octobre 1995 sur le ser­vice civil 6.826 en 2010 à par­tir de 18 ans 13 120 €5
Luxem­bourg Ser­vice volon­taire pour les jeunes Loi du 31 octobre 2007 RS 824.0 sur le ser­vice volon­taire des jeunes 10.000 entre 2008 et 2010 16 à 30 ans 3 à 12 300 €
Bel­gique6 Ser­vice citoyen Pro­po­si­tion de loi de ser­vice citoyen actuel­le­ment débat­tue en com­mis­sion des Affaires sociales 32 en 2011 (pro­jet pilote) 18 à 25 ans 6 à 12 300 € (pro­jet pilote)

Entre février et aout 2011, la Pla­te­forme pour le Ser­vice Citoyen a expé­ri­men­té un pre­mier pro­jet pilote per­met­tant à trente-deux jeunes de tous hori­zons âgés entre dix-huit et vingt-cinq ans de s’engager pen­dant cinq mois7 dans des mis­sions utiles à la col­lec­ti­vi­té (répar­ties en trois sec­teurs : envi­ron­ne­ment, édu­ca­tion rela­tive à l’environnement et déve­lop­pe­ment durable ; aide aux per­sonnes et soli­da­ri­té ; accès à la culture et à l’éducation).

Sou­te­nu par les auto­ri­tés publiques8 et des par­te­naires asso­cia­tifs, et coor­don­né par la pla­te­forme, ce pro­jet pilote a pris appui sur ses asso­cia­tions membres et sur des orga­nismes par­te­naires pour accueillir, enca­drer et for­mer les jeunes participants.

Sché­ma­ti­que­ment, voi­ci les mis­sions et les enga­ge­ments rem­plis par cha­cun des trois acteurs du ser­vice citoyen :

Les orga­nismes d’accueil :

– ont accom­pa­gné et sui­vi les jeunes dans la réa­li­sa­tion de leurs mis­sions (un tuteur a été dési­gné au sein de chaque orga­nisme d’accueil pour veiller au bon dérou­le­ment de la mission);

– ont for­mé les jeunes à la réa­li­sa­tion de leurs mis­sions dans une pers­pec­tive citoyenne et d’intérêt général ;

– ont veillé à ce que les mis­sions ne se confondent pas avec des emplois, mais consti­tuent un ren­fort d’utilité sociale et une réelle plus-value par rap­port au pro­jet existant.

Le jeune en ser­vice citoyen :

– a réa­li­sé sa mis­sion « prin­ci­pale » au sein de l’organisme d’accueil (70% du temps total d’activités);

– s’est inves­ti dans une seconde mis­sion, « com­plé­men­taire », dans un sec­teur dif­fé­rent (10% du temps total d’activités);

– a par­ti­ci­pé à des for­ma­tions, à des temps d’échanges et à un temps de matu­ra­tion orga­ni­sés par la pla­te­forme (20% du temps total d’activités).

La pla­te­forme a, quant à elle, assuré :

– la coor­di­na­tion géné­rale du projet ;

– le sui­vi et le contrôle des jeunes en mis­sion et de leurs tuteurs ;

– l’organisation des for­ma­tions9, des temps d’échanges et du temps de maturation ;

– l’évaluation conti­nue et finale du dispositif ;

– l’indemnisation du jeune, sa sous­crip­tion à une assu­rance et le main­tien de ses droits sociaux par un sou­tien logis­tique et administratif.

Dis­pen­sés par la pla­te­forme, les temps de for­ma­tion, d’échange et de matu­ra­tion ont été adap­tés aux expé­riences vécues sur le ter­rain. L’alternance de périodes d’engagement dans des mis­sions et de périodes de recul en for­ma­tion a contri­bué à l’émergence chez les jeunes d’une conscience citoyenne, res­pon­sable et soli­daire. Les élé­ments consti­tu­tifs de ce pro­ces­sus de for­ma­tion se sont décli­nés en cinq modules principaux :

  1. une « for­ma­tion géné­rale » (35% du temps total de for­ma­tion) com­pre­nant un « séjour d’intégration » ini­tial de trois jours et des « for­ma­tions géné­rales thé­ma­tiques » d’une jour­née consa­crées à des enjeux socié­taux (citoyen­ne­té belge et euro­péenne, fonc­tion­ne­ment poli­tique, consom­ma­tion res­pon­sable, rela­tions Nord-Sud, ana­lyse cri­tique des médias);
  2. des « temps d’échange » (30% du temps total de for­ma­tion), ras­sem­blant tous les jeunes pour des moments de par­tages for­ma­li­sés, déve­lop­pant la réflexi­vi­té autour des expé­riences vécues ;
  3. des « temps de matu­ra­tion » (15% du temps total de for­ma­tion) cen­trés sur le déve­lop­pe­ment per­son­nel des jeunes et sur leurs pro­jets d’orientation ;
  4. une « for­ma­tion sec­to­rielle » (15% du temps total de for­ma­tion). Exemple : bre­vet euro­péen de pre­miers secours (BEPS) auprès de la Croix-Rouge.
  5. des « jour­nées éva­lua­tion » (5% du temps total de for­ma­tion) sur le pro­gramme de ser­vice citoyen en milieu et en fin de parcours.

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Le bilan de cette expé­rience pilote s’avère lar­ge­ment posi­tif. Sur le plan quan­ti­ta­tif, les jeunes avaient en moyenne vingt-deux ans avec des niveaux d’études très variés allant du diplôme pri­maire à l’universitaire. Trois quarts d’entre eux avaient un sta­tut de deman­deur d’emploi (un tiers en stage d’attente et un tiers indem­ni­sé) ou béné­fi­ciaient du CPAS. La pla­te­forme a réus­si à rele­ver dans cette pre­mière édi­tion le défi de la mixi­té sociale et de l’accès pour tous au ser­vice citoyen. Enfin, sur les trente-deux jeunes entrés en ser­vice citoyen, vingt-cinq sont arri­vés au terme de l’expérience. Quatre de ces aban­dons peuvent tou­te­fois être qua­li­fiés de « ver­tueux » puisqu’ils furent liés à la concré­ti­sa­tion d’un contrat de tra­vail ou au choix de reprendre des études. Sur un plan plus qua­li­ta­tif, on constate que le ser­vice citoyen leur a per­mis de retrou­ver un rythme, d’avoir plus de confiance et sur­tout d’estime d’eux-mêmes, d’éclaircir leurs pro­jets d’avenir, de mettre leur éner­gie dans un pro­jet qui a du sens et pour lequel ils sont reconnus.

En 2012, grâce au sou­tien renou­ve­lé de la Région wal­lonne et à un nou­veau finan­ce­ment appor­té par la Com­mu­nau­té fla­mande, un deuxième pro­jet pilote10 de six mois se déve­lop­pe­ra à l’échelle du ter­ri­toire natio­nal. Par­mi les nou­veau­tés, signa­lons des « mis­sions d’échange com­mu­nau­taire » qui offri­ront aux jeunes la pos­si­bi­li­té de réa­li­ser des mis­sions dans une autre Com­mu­nau­té du pays ain­si que des « jour­nées de chan­tiers com­muns » qui ras­sem­ble­ront dans cha­cune des trois Régions (Wal­lo­nie, Bruxelles et Flandre) tous les jeunes des dif­fé­rentes Com­mu­nau­tés autour d’évènements com­muns (sociaux, cultu­rels, asso­cia­tifs, etc.). La pla­te­forme déve­lop­pe­ra éga­le­ment deux pro­jets phares direc­te­ment ins­pi­rés des expé­riences fran­çaises de ser­vice civique (Unis-Cité): le pro­jet « Média­terre » (pro­gramme de sen­si­bi­li­sa­tion envi­ron­ne­men­tale de familles rési­dant dans des quar­tiers popu­laires visant à réduire la f®acture verte à tra­vers l’adoption d’éco-gestes) et le pro­gramme « Pas­seurs de mémoire » (lutte contre l’isolement des per­sonnes âgées et déve­lop­pe­ment de liens inter­gé­né­ra­tion­nels à tra­vers la ren­contre et la mise en récit du par­cours de vie des ainés). Dans ce cadre, des échanges de jeunes avec le ser­vice civique fran­çais sont éga­le­ment prévus.

  1. www.service-citoyen.be — www.jongeren-samenleving.be.
  2. Ouvert le 1er juillet 2011.
  3. Les 45.000 jeunes cor­res­pondent à 20.000 jeunes ayant par­ti­ci­pé au Frei­williges Soziales Jahr, frei­williges et öko­lo­gisches Jahr, et 20.000 jeunes entre 16 et 27 ans ayant par­ti­ci­pé au Bun­des­frei­willi­gen­dienst. Récep­tion de 1.500 can­di­da­tures par semaine !
  4. Le Bun­des­frei­willi­gen­dienst est néan­moins ouvert aux plus de 27 ans, mais les sta­tis­tiques montrent que seule­ment 20% des volon­taires ont au-des­sus de cet âge.
  5. Mini­mum légal, cal­cu­lé selon la situa­tion per­son­nelle du civi­liste. Si pas de pos­si­bi­li­té de loge­ment dans l’organisme d’accueil, une indem­ni­té pour le loge­ment sera perçue.
  6. Il n’existe pas encore de cadre légal ins­ti­tué. Les chiffres et les indem­ni­tés sont ceux du pre­mier pro­jet pilote mis en œuvre par la Pla­te­forme pour le Ser­vice Citoyen.
  7. Pré­ci­sons ici que ce pro­jet pilote a connu deux pro­mo­tions : les pre­miers jeunes ont effec­tué leur ser­vice citoyen de février à juin inclus tan­dis que les seconds ont débu­té en avril pour ter­mi­ner fin aout.
  8. Le pro­jet pilote de ser­vice citoyen a été essen­tiel­le­ment sou­te­nu par le cabi­net du ministre du gou­ver­ne­ment wal­lon char­gé de l’Environnement, de l’Aménagement du ter­ri­toire et de la Mobi­li­té, mais aus­si par la Fon­da­tion Benoît, la Croix-Rouge de Bel­gique et Unis-Cité (France).
  9. Les for­ma­tions direc­te­ment liées aux mis­sions du jeune sont prises en charge par la struc­ture d’accueil. En outre, cer­taines for­ma­tions thé­ma­tiques plus spé­ci­fiques sont orga­ni­sées par des asso­cia­tions spécialisées.
  10. www.service-citoyen.be/projet-pilote.

Plateforme pour le Service Citoyen


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