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Écriture inclusive, j’écris ton nom

Numéro 2 - 2018 - Ecriture inclusive féminisme Français Langue par Laurence Rosier

avril 2018

Sep­tembre 2017, Le Figa­ro inau­gure la ren­trée en poin­tant la paru­tion, six mois aupa­ra­vant, d’un manuel scolaire[efn_note]Il s’agit d’un manuel sco­laire de CE2, inti­tu­lé Magel­lan et Gali­lée. Ques­tion­ner le monde, publié chez Hatier.[/efn_note] uti­li­sant l’écriture inclu­sive. Depuis, des diners de famille aux pla­teaux de télé­vi­sion, en pas­sant évi­dem­ment par les flux des réseaux sociaux de dis­cus­sion, elle n’a ces­sé d’être soit défen­due, prô­née, pra­ti­quée, soit cri­ti­quée, débou­tée, vouée aux gémo­nies. Retour sur une praxis lan­ga­gière mili­tante. Pour­quoi l’écriture inclu­sive enflamme-t-elle à ce point ? Quels enjeux soulève-t-elle ?

Dossier

« Que cela plaise ou non, il n’est pas seule­ment ques­tion de linguistique,

mais éga­le­ment de politique »

(Bal­last, Que l’Académie tienne sa langue, pas la nôtre, 2017).

« Chan­ger le monde pren­dra un cer­tain temps.

Chan­ger de mots, c’est pos­sible tout de suite »

(Fl. Mon­trey­naud, Quand la langue fran­çaise fait mal aux femmes, 2018).

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Pré­ci­sons-le d’emblée : les débats autour de la langue, par­ti­cu­liè­re­ment pour le fran­çais, sus­citent depuis long­temps des réac­tions qu’on peut qua­li­fier de pas­sion­nelles1 au sens où sont invo­qués des argu­ments qui relèvent, quand ils ne font pas appel à la loi ou la rai­son de la langue, j’y reviens plus avant dans le texte, en grande par­tie des normes dites sub­jec­tives. La lin­guiste A.-M. Hou­de­bine2 y dis­tingue les normes pres­crip­tives, fic­tives, éva­lua­tives et com­mu­ni­ca­tion­nelles. Plus spé­ci­fi­que­ment, les normes fic­tives dési­gnent la ratio­na­li­sa­tion par les sujets « d’attitudes qui s’appuient sur des juge­ments d’ordre esthé­tique, affec­tif ou his­to­rique3 ». Ces atti­tudes relèvent du purisme que l’on peut défi­nir comme une pra­tique méta­lin­guis­tique à ten­dance pres­crip­tive (obli­ger à dire) et pros­crip­tive (inter­dire de dire). Ain­si on va retrou­ver autour de la ques­tion de l’écriture inclu­sive des constantes du dis­cours puriste sur la langue qu’il s’agisse de la réforme de l’orthographe ou de la pos­si­bi­li­té d’introduire la notion de pré­di­cat, comme l’appel à la beau­té ou à la clar­té de la langue.

De même, le lien est constam­ment rap­pe­lé entre les réformes de langue et l’enseignement, les réformes étant géné­ra­le­ment consi­dé­rées comme des entraves à l’apprentissage et une par­ti­ci­pa­tion à l’abaissement géné­ral du niveau, mais para­doxa­le­ment l’orthographe réfor­mée a retrou­vé bonne presse face à l’écriture inclu­sive. On a pu ain­si voir que c’était aus­si une façon de se situer par rap­port à celle-ci en ver­tu de l’argument de la sim­pli­fi­ca­tion ou de la com­plexi­fi­ca­tion de la langue sur le mode : je suis pour l’orthographe réfor­mée et donc contre l’écriture inclu­sive.

Ces dis­cus­sions sont tou­jours vives, voire vio­lentes (voir infra) et s’appuient sur un puis­sant sté­réo­type, telle une mise en abyme de la ques­tion du fémi­nin lan­ga­gier : la langue, de genre fémi­nin est dans l’imaginaire un être de sexe fémi­nin. Comme le rap­pellent les signa­taires de la tri­bune Que l’Académie tienne sa langue, pas la nôtre, « tou­cher à la langue fait res­sur­gir des émo­tions res­sen­ties durant l’enfance, inter­roge le sen­ti­ment d’appartenance à une com­mu­nau­té, le rap­port iden­ti­taire à l’histoire et au patri­moine. Si l’on se penche sur les diverses polé­miques du siècle der­nier, que ce soit au sujet de l’expression du genre, de l’orthographe ou des angli­cismes, l’on retrouve les mêmes argu­ments et les mêmes méta­phores par les­quelles la langue devient une per­sonne de sexe fémi­nin à la fois faible, belle et pure qu’il est urgent de pro­té­ger car elle est “défi­gu­rée”, “enlai­die”, nous dit la Cou­pole. Selon Michael Edwards, elle est même “atteinte d’une mala­die qui couvre la page comme une sorte d’exéma”, sa “chair […] est rongée”.»

Ain­si l’adage selon lequel les écri­vains peuvent vio­ler la langue si c’est pour lui faire de beaux enfants per­pé­tue cette méta­phore et il est inté­res­sant de remar­quer que, dans les dis­cus­sions sur l’écriture inclu­sive, accu­sée de « défi­gu­rer la langue », « d’écorcher les yeux », de la « char­cu­ter », « mal­me­ner » la langue (et non la vio­ler) n’était pas permis.

Ensuite, depuis les pro­po­si­tions de réforme de l’orthographe en 19014, les phi­lo­logues et les lin­guistes ont géné­ra­le­ment éla­bo­ré, por­té et défen­du des amé­na­ge­ments lin­guis­tiques visant à ratio­na­li­ser et à sim­pli­fier les inco­hé­rences des dis­cours gram­ma­ti­caux. La ques­tion de la fémi­ni­sa­tion sur laquelle on trouve dès le début du XXe siècle des pro­po­si­tions inté­res­santes dans les tra­vaux du lin­guiste suisse Charles Bal­ly ou des gram­mai­riens comme Jacques Damou­rette et Edouard Pichon ont peut-être com­men­cé à divi­ser les spé­cia­listes par la suite. D’une part, se super­po­sait à une régu­la­tion mor­pho­lo­gique et syn­taxique une volon­té poli­tique de rendre visibles les femmes à l’encontre pré­ci­sé­ment de cer­taines habi­tudes mor­pho­lo­giques, comme uti­li­ser le fémi­nin en -eure au Qué­bec par exemple, qui n’existait pas en fran­çais et, d’autre part, le neutre lin­guis­tique était dis­cu­té au sein même des lin­guistes5. La réforme por­tée en France dans les années 1980 a d’ailleurs mis davan­tage en avant une écri­vaine comme Benoite Groult plu­tôt que des lin­guistes comme Anne-Marie Hou­de­bine6. Avec l’écriture inclu­sive, il semble que c’est plu­tôt une volon­té issue de cer­taines ins­ti­tu­tions poli­tiques relayées par des com­bats fémi­nistes et LGBTQI++, d’universitaires et/ou de milieux mili­tants. Les polé­miques ou les contro­verses sont donc logiques puisqu’il n’existe pas de consen­sus pure­ment lin­guis­tique sur cette question.

De quoi parle-t-on ? Les marqueurs de la langue versus l’égalité des représentations

Sous l’étiquette d’écri­ture inclu­sive, plu­sieurs ques­tions autour des (non) mar­queurs gram­ma­ti­caux et typo­gra­phiques ont été ras­sem­blées, que j’expliciterai brièvement :

  • la fémi­ni­sa­tion des noms de métiers et de fonctions ;
  • la règle d’accord éri­gée au XVIIe siècle selon laquelle le mas­cu­lin l’emporte sur le féminin ;
  • les abré­via­tions per­met­tant de mar­quer le genre à l’intérieur d’une même séquence gra­phique (tiret, point médian, milieu, bas, parenthèses…);
  • la double flexion ;
  • le neutre (ou la concep­tion d’un mas­cu­lin, forme non mar­quée), la neu­tra­li­sa­tion et l’épicénation de la langue ain­si que la dimen­sion géné­rique du masculin.

L’écriture inclu­sive désigne donc, d’après le Manuel d’écriture inclu­sive (2017), « l’ensemble des atten­tions gra­phiques et syn­taxiques qui per­mettent d’assurer une éga­li­té de repré­sen­ta­tion des deux sexes ». Comme le rap­pelle le socio­lin­guiste Michel Fran­card, « Il s’agit d’une vision “inclu­sive” de la langue, accor­dant une place au fémi­nin sou­vent obli­té­ré en fran­çais par le prin­cipe “le mas­cu­lin l’emporte sur le fémi­nin”».

On devrait d’ailleurs peut-être employer l’expression langue inclu­sive car la ques­tion de l’oralisation déli­cate de ces chan­ge­ments pro­mus est régu­liè­re­ment mise en avant. D’une part, sur le plan encore une fois des normes sub­jec­tives, sur la pré­ten­due lai­deur des mots mis au fémi­nin et, d’autre part, sur l’impossibilité d’oraliser le point médian ou milieu et, plus fon­da­men­tal, sur le fait que l’ajout d’un signe typo­gra­phique ne cor­res­pon­dant pas à une pra­tique orale contre­vien­drait à la loi de la langue.

Pour­tant la ponc­tua­tion n’est pas le reflet strict de la dic­tion, les guille­mets sont « un signe de langue écrite à part entière » (J. Authier), comme les paren­thèses et les cro­chets ; les abré­via­tions sont mon­naie cou­rante et ne se lisent pas lit­té­ra­le­ment ; les adresses mails et les liens url contiennent des signes qui se ver­ba­lisent (slash, point, aro­base); les nou­velles écri­tures du numé­rique ont inté­gré du pho­né­tique avec épe­lure (CKI?), du rébus typo­gra­phique (2M1 pour demain), de l’iconique (smi­leys, émo­ti­cones). Le tech­no­signe # a été ora­li­sé… Cette posi­tion semble oublier que les écrits d’écran et leurs carac­té­ris­tiques poly­sé­mio­tiques ont habi­tué les jeunes scripteur.e.s à la varia­tion oralographique.

On peut rai­son­na­ble­ment éva­cuer rapi­de­ment la ques­tion du neutre, même si elle a été invo­quée par certain.e.s lin­guistes7 : « Du latin au fran­çais, le neutre a péri­cli­té8 ». En fran­çais, cer­tains mots ont un genre indé­ter­mi­né (ou épi­cène). On peut dire « un artiste » ou « une artiste », le mot est indif­fé­ren­cié, mais il n’est pas neutre. Mal­gré quelques excep­tions (ça, rien, tout, pis), le fran­çais moderne ne pos­sède donc pas de neutre, si ce n’est pos­si­ble­ment un neutre séman­tique. La caté­go­rie des inani­més est certes sexuel­le­ment neutre (la porte, le vélo), mais, comme le rap­pelle la lin­guiste Cathe­rine Ker­brat-Orec­chio­ni9, « ce genre gram­ma­ti­cal arbi­traire entraine quand même toutes sortes d’effets conno­ta­tifs comme l’a bien mon­tré Gérard Genette (la “sexuis­sem­blance”: “mort”, “lune” ver­sus “soleil”, etc.) et comme l’illustrent à l’évidence les allé­go­ries (on est bien pla­cé pour le savoir à Lyon, avec les repré­sen­ta­tions très sexuées, voire car­ré­ment éro­tique, du Rhône et de la Saône).»

Ces débats sur le genre sont confus car on amal­game genre gram­ma­ti­cal, genre lexi­cal et genre socio­lin­guis­tique et on confond neu­tra­li­sa­tion et fémi­ni­sa­tion. Le but de l’écriture inclu­sive n’est pas tant de mar­quer le fémi­nin que de neu­tra­li­ser l’alternance entre forme mas­cu­line et fémi­nine. Les partisan·e·s de l’écriture inclu­sive militent d’ailleurs pour une neu­tra­li­sa­tion de la langue et pro­posent de nou­veaux termes épi­cènes, notam­ment pour les pro­noms : illes (pour ils/elles) pro­po­sé par Fran­çoise Marois en 1984, yel ou iel ont aus­si été avan­cés, la ter­mi­nai­son mixte en z ou encore al (pour il/elle) pro­po­sée récem­ment par Alphé­ratz, écri­vaine lin­guiste et gram­mai­rienne auteure d’un tra­vail créa­tif sur un nou­veau genre neutre en fran­çais10. Elle défend éga­le­ment « l’hyperonimisation » qui évite la gen­tri­fi­ca­tion : le corps pro­fes­so­ral, la com­mu­nau­té uni­ver­si­taire, la patien­tèle, etc.

Cette posi­tion fait par ailleurs l’objet de cri­tiques de cer­taines fémi­nistes elles-mêmes (je ne parle pas ici de celles qui refusent de fémi­ni­ser leur titre et dont se sert notam­ment comme argu­ment Marc Fuma­ro­li dans sa tri­bune « La que­relle du neutre » publiée dans Le Monde en juillet 1998), mais d’une cri­tique plus radi­cale qui vise à inver­ser le mar­queur de géné­ri­ci­té : employer géné­ri­que­ment elles au lieu de ils.

(à pro­pos de la fémi­ni­sa­tion) Un aspect lourd et peu esthé­tique est ain­si assi­mi­lé à la démarche poli­ti­que­ment cor­recte d’inclusion et encore une fois les femmes et le fémi­nisme « sem­ble­raient » res­pon­sables d’une muti­la­tion de la langue. En véri­té c’est qu’elles ne veulent pas être accu­sées d’exclusion du sacro­saint mas­cu­lin en uti­li­sant le fémi­nin uni­ver­sel (alter­ner, fluc­tuer, en fonc­tion des contextes, en uti­li­sant elles au lieu de ils)11.

L’argument historique

« Le recours à l’histoire est à double tran­chant. D’abord parce qu’en matière de langue, comme en toute autre matière, l’histoire explique, mais ne jus­ti­fie pas12. »

L’appel à l’histoire, tant du côté des opposant.e.s que des partisan.e.s de l’écriture inclu­sive, per­met cepen­dant d’assoir deux évi­dences : les formes fémi­nines étaient cou­rantes dans l’ancienne langue et ont conti­nué d’être pro­duites mal­gré les règles de l’Académie. Damou­rette et Pichon déjà cités insistent sur « la faci­li­té que pos­sède le Fran­çais de for­mer des fémi­nins dif­fé­ren­ciés » et trouvent les déno­mi­na­tions mas­cu­lines appli­quées aux femmes « écœu­rantes et gro­tesques »13. Ils pointent aus­si le fait que les par­lures popu­laires et « vul­gaires » fémi­nisent natu­rel­le­ment. L’une des hypo­thèses du dédain pour la fémi­ni­sa­tion vient là se ren­for­cer par une concep­tion non plus seule­ment sexiste mais clas­siste : le fémi­nin subi­rait une double peine en fonc­tion de son main­tien (voire de son sur­mar­quage) dans les classes popu­laires et du gout de celles-ci pour le suf­fixe en -esse. Et de citer : une avo­cate, une doc­to­resse, une onclesse, une vainc­que­resse, une pein­tresse, une librai­resse mais aus­si une pro­fes­seuse, une acteuse, etc.

La règle du mas­cu­lin l’emportant sur le mas­cu­lin a été éla­bo­rée en fonc­tion des rôles sociaux dévo­lus aux deux sexes, le mas­cu­lin étant donc plus noble que le féminin.

La langue dit donc le monde pour les spé­cia­listes de la langue au XVIIe, ce qui per­met à Danielle Manesse (qui par ailleurs sou­tient la fémi­ni­sa­tion) d’établir, façon coup de griffe, une équi­va­lence entre l’attitude du siècle clas­sique avec les vel­léi­tés fémi­nistes contem­po­raines : « L’Académie eut au XVIIe pour mis­sion de sta­bi­li­ser le fran­çais fleu­ris­sant en tous sens et l’a fait avec les caté­go­ries de l’époque. Comme notre nou­veau cler­gé fémi­niste de la langue, l’abbé Bou­hours confon­dait la gram­maire et le monde. »

Le lien entre vision du monde et accord a éga­le­ment fait la joie des énon­cés prag­ma­tiques, comme le man­ne­quin est enceint ? Où le terme man­ne­quin tra­di­tion­nel­le­ment dévo­lu à ne dési­gner que des femmes se construit aujourd’hui avec un déter­mi­nant fémi­nin et où enceint au mas­cu­lin semble contraire à l’intuition, certes « juste » gram­ma­ti­ca­le­ment : le mot enceint ne peut être appli­qué dans ce cas comme syno­nyme de por­tant un enfant. Charles Bal­ly pointe des exemples absurdes (« incon­séquences curieuses », dit-il): « Madame L. est une roman­cière magni­fi­que­ment roma­nesque et un conteur infi­ni­ment souple ; Mme X est appe­lée à faire sa dépo­si­tion, le témoin affirme qu’il n’a vu l’inculpé qu’une seule fois ». Dans le cas de l’écriture inclu­sive, écrire Viviane, l’une de mes étudiant.e.s est plus juste que Viviane, l’une de mes étu­diants ou l’une de mes étu­diantes, qui res­treint le groupe aux membres féminins ?

L’accord de proxi­mi­té aujourd’hui reven­di­qué vise à reve­nir à une situa­tion pré­clas­sique où les par­ti­cipes pas­sés et les adjec­tifs s’accordaient en genre et/ou en nombre avec le nom le plus proche. Si la résis­tance est par­fois forte lorsqu’on touche au lexique, elle est démul­ti­pliée lorsqu’on s’attaque à la syn­taxe (voir la sor­tie média­tique du phi­lo­sophe Raphael Entho­ven pour qui l’écriture inclu­sive est une « agres­sion de la syn­taxe par l’égalitarisme »), d’autant que la règle intro­duit des varia­tions pos­sibles dans les usages. Doit-on écrire le soleil et la lune brillante ou brillantes, en ver­tu de l’accord avec le plus proche (l’accord ne se fai­sant plus avec le syn­tagme nomi­nal dans sa tota­li­té)? Ce qui intro­duit une ambigüi­té séman­tique. L’une des astuces pré­co­ni­sées est de pré­sen­ter les syn­tagmes nomi­naux mul­tiples en met­tant d’abord les fémi­nins puis les mas­cu­lins et donc d’accorder par proxi­mi­té… avec ces der­niers… Une sorte de che­val de Troie pour ama­douer les rétif.ve.s

L’usage en marche

« L’écriture inclu­sive est un geste sym­bo­lique qui s’applique à des textes de com­mu­ni­ca­tion courts » (V. Engel).

L’un des argu­ments contre les plus solides semble être l’augmentation des dif­fi­cul­tés d’apprentissage de l’écriture inclu­sive, notam­ment en ver­tu du pos­tu­lat que les élèves défavorisé.e.s le seraient encore plus et que cette écri­ture repro­dui­rait l’exclusion de cer­taines caté­go­ries de popu­la­tion : les dys­lexiques, les aveugles notam­ment. Il n’existe pas encore d’étude qui étaye­rait ce diag­nos­tic pes­si­miste. Sur les liens entre lisi­bi­li­té et fémi­ni­sa­tion, je ren­voie à un article datant de 2007, « Fémi­ni­sa­tion et lour­deur de texte » qui montre que les dif­fi­cul­tés de lisi­bi­li­té se résolvent par l’habitude. Les partisan.e.s d’un « lan­gage clair » sont géné­ra­le­ment remonté.e.s contre le point médian, vu comme un sno­bisme de lettré.e.s (par exemple Sté­pha­nie Guillaume, « L’écriture inclu­sive, d’une exclu­sion à l’autre », 2017, article sur Lin­ke­din)14.

La publi­ca­tion du manuel polé­mique à des­ti­na­tion des enfants de pri­maire a ren­for­cé ce sen­ti­ment. Or, comme beau­coup militent pour un dépla­ce­ment de la réflexion gram­ma­ti­cale à l’âge pré-adulte, il est clair que, si la fémi­ni­sa­tion doit être ensei­gnée dès le plus jeune âge, la réflexion sur l’usage poli­tique, mili­tant de la langue doit être ame­né, selon moi, dans les der­nières années de l’apprentissage, en gui­dant les jeunes vers une réflexion sur la varia­tion, sur le (dé)classement social pro­duit par les manières de par­ler et sur les façons d’user de la langue à des fins persuasives.

Par ailleurs, aujourd’hui, les sites uni­ver­si­taires, les mots d’ordre mili­tants des syn­di­cats et des asso­cia­tions diverses, les appels d’offres pour des emplois se rédigent en écri­ture inclu­sive avec diverses varia­tions. Que faire ? Cen­su­rer, cor­ri­ger ? Ce serait absurde par rap­port à la défense de l’usage comme norme !

Violences des échanges en milieu tempéré

Les débats sur cette ques­tion ont été très hou­leux et très vio­lents (notam­ment sur les réseaux sociaux) et il faut pou­voir le dire, bien plus vio­lents de la part des opposant.e.s que de la part des défenseur.e.s (nor­mal lorsqu’on pro­meut une posi­tion sujette à débats et que l’on veut faire avan­cer la cause, on reste mesuré.e). Outre les inter­ven­tions hyper­bo­liques de per­son­na­li­tés média­tiques (quand le phi­lo­sophe Raphael Entho­ven, encore lui, parle de « lavage de cer­veau digne de 1984 », voire d’un « néga­tion­nisme ver­tueux », l’emploi d’un terme aus­si char­gé pour par­ler d’une pra­tique d’écriture à visée éga­li­taire révèle un manque total d’éthique lan­ga­gière), les vio­lences sur les réseaux et lors d’interventions publiques ont été radi­cales (si je puis me per­mettre ce terme lui aus­si mar­qué). Lors d’une confé­rence où je mon­trais les insultes reçues pour avoir défen­du l’écriture inclu­sive, j’ai reçu cette parole fron­tale : « on n’en a rien à foutre de ces exemples, c’est de la langue qu’il s’agit ». Cette inter­ven­tion véri­fiait en fait ce que je disais : les anti sont violent.e.s. Comme pour l’orthographe réfor­mée que ses détracteur.e.s ridi­cu­lisent en abu­sant de la pho­né­tique (ce que n’a jamais pré­co­ni­sé la réforme), les inter­nautes s’en sont don­né à cœur joie en met­tant des points médians par­tout (on dirait du morse) et fémi­ni­sant n’importe com­ment : bobo.e.s, fe.ho.mme d’ouvrage, simpl.e. Les cri­tiques et les vio­lences ver­bales sont sexistes et clas­sistes, quand elles ne virent pas à la les­bo­pho­bie : les lettrée.e.s, remake des pré­cieuses ridi­cules ou des bas-bleus, les fémi­nistes de salon, les snobs d’élite, les fémi­nistes hys­té­riques, les les­biennes radi­cales, les cas­tra­trices avec des figures de mec…

La vio­lence des réac­tions, issues de per­son­na­li­tés publiques ou d’internautes ano­nymes, s’explique par le fait que j’avais pro­po­sé l’hypothèse sui­vante dans un article, La langue qui fâche : quand la norme qui lâche sus­cite l’insulte[http://bit.ly/2HnPWLp]] coré­di­gé avec une col­lègue de Liège, Debo­rah Meu­nier, que la vio­lence ver­bale extrê­me­ment agres­sive s’appuie sur ce qui est res­sen­ti comme une agres­sion préa­lable. Ceux qui se pré­sentent comme les garants de la norme se sen­ti­raient vic­times d’une vio­lence cau­sée par ceux et celles qui veulent modi­fier la langue et sa gram­maire (res­sen­ties comme autant de coups por­tés à la langue), selon une caté­go­ri­sa­tion spon­ta­née impli­cite (l’outrage à la gram­maire, l’outrage à la langue). Et les lin­guistes, éter­nels grammairien.ne.s, sont tombé.e.s dans ce piège idéologique.

La varia­tion, le point Godwin
de la grammaire ?

« Le fran­çais est une langue d’accueil et s’est consti­tué par les emprunts et les varia­tions. Cette varia­tion intrin­sèque est-elle occul­tée dans l’histoire fan­tas­mée d’une langue homo­gène sur laquelle repose l’idéal puriste ? Non, mais elle est pré­sen­tée comme non consti­tu­tive, comme un élé­ment qui serait venu déré­gler un sys­tème har­mo­nieux, presque une anomalie. »

La varia­tion est la langue, dès son ori­gine. On devrait d’ailleurs aus­si, lorsqu’on convoque les langues anciennes, ren­voyer aux latins et non pas à une langue latine fan­tas­mée : le latin des mar­chés, le latin des élites, le latin par­lé, le latin écrit, le latin chré­tien, le latin païen…

Les points de cris­tal­li­sa­tion des débats sur la langue cor­res­pondent en par­tie à des faits de varia­tion, quand la norme fluc­tue ou pré­sente des pos­si­bi­li­tés de choix mor­pho­lo­giques. C’est bien enten­du le cas de la fémi­ni­sa­tion, pra­tique qui ne peut se réduire à l’ajout d’un simple ‑e (comme pour un élé­phant, une élé­phante). Très tôt dans l’apprentissage, les enfants sont confron­tés à cette diver­si­té du genre : le genre lexi­cal (homme/femme, cochon/truie), le genre mor­pho­lo­gique (avec des rédu­pli­ca­tions de consonnes chatte, chienne), le genre syn­taxique (varia­tion du déter­mi­nant : un ou une juge). Le nœud du fémi­nin est l’accord des mots en ‑eur qui offre trois suf­fixes pos­sibles : eur-euse ; eur-trice ; eur-esse, auquel il faut ajou­ter, depuis les com­bats socio­lin­guis­tiques des années 1980, eur/eure qui, tout en retrou­vant la règle mini­ma­liste, heurte la mor­pho­lo­gie clas­sique de la langue. Ce n’est pas un hasard si le fémi­nin mul­tiple d’auteur, auteure, autrice et auteuse, attire les foudres des puristes. On pour­rait par contre s’étonner de la viru­lence à l’égard du simple écri­vaine, où le fait que ce soit la règle la plus simple qui soit appli­quée ne prime pas, au détri­ment d’arguments s’appuyant sur la rela­ti­vi­té de l’arbitraire (on découpe écrit/vaine et on jus­ti­fie par le fait que dans écri­vaine on entend vaine, comme si on n’entendait pas vain dans écri­vain!) et sur une norme esthé­tique comme quoi le mot serait « moche » (caté­go­rie popu­laire très usi­tée, notam­ment chez les écri­vains, de Beig­be­der à Angot) ou pire, déva­lue­rait les femmes qui écrivent. Rien de tel par contre pour roman­cière qui semble ne pas sus­ci­ter de réac­tions. Est-ce une ques­tion de légi­ti­mi­té de dési­gna­tion, la femme pou­vant écrire des romans, mais pas reven­di­quer le sta­tut social de l’écrivain ?

Créa­tion lit­té­raire et écri­ture inclusive

Dans le sillage des exer­cices ouli­piens par­mi lequel Ray­mond Que­neau pro­po­sait déjà une amu­sante contrainte sur le genre, certain.e.s écrivain.e.s contemporain.e.s se jouent du genre comme Pérec s’en était joué, en sup­pri­mant momen­ta­né­ment la lettre E dans La Dis­pa­ri­tion. Le monde de la fic­tion s’empare ou non de ces pos­si­bi­li­tés de jeux lan­ga­giers et mili­tants. Je ren­voie à l’excellent billet de la roman­cière et essayiste Domi­nique Cos­ter­mans, inti­tu­lé avec un clin d’œil et un pied de nez « Proust.e ma chère ! »: « En fait, per­sonne ne va ré-écrire Proust en écri­ture inclu­sive. Que je sache, mal­gré la réforme de l’orthographe il y a une ving­taine d’années, per­sonne n’a réécrit la Recherche en nou­velle ortho­graphe. On ne réécrit pas les clas­siques. Et Mon­taigne ? Ah oui, Les Essais ont été toi­let­tés, parce que vous l’avouerez, après quatre siècles, ça deve­nait un peu pénible à lire, avec ces v et ces y (« C’est l’vne des rai­sons pour­quoy Epa­mi­non­das…»), ces tz (« les effortz »), et sur­tout cette façon ancienne que l’on avait d’écrire les s comme des f. Bref, Mon­taigne, à ce stade, ce n’est pas de la réécri­ture, c’est de la faci­li­ta­tion qui ne touche jamais ni au sens ni au style. Donc, on se calme : per­sonne ne réécrit les classiques. »

En guise de conclusion

Le débat qui a fait rage rejoint des pré­oc­cu­pa­tions poli­tiques et phi­lo­so­phiques et ne fût-ce qu’en cela déjà les détracteur.e.s de cette écri­ture au motif de sa futi­li­té et de son « fémi­nisme de salon et let­tré » ont tort. S’interroger sur la force de frappe des mots c’est aus­si s’interroger sur la force des dis­cours, leur capa­ci­té à per­sua­der, convaincre, influen­cer. C’est réflé­chir à ce que la langue a per­mis de nom­mer et ce qu’elle ne désigne pas. Pour­quoi devons-nous emprun­ter des mots à d’autres langues ? Pour­quoi devons-nous inven­ter des mots pour dire des sen­ti­ments, des situa­tions, des émo­tions ou des concepts ? Aman­ture, désen­fan­té, dif­fé­rance… un mot-valise inven­té dans un cadre intime, une requête à une dou­leur, un concept phi­lo­so­phique… et la langue per­met l’invention…

Bien sûr la tra­di­tion lin­guis­tique s’est féli­ci­tée de sor­tir de l’appréhension « cra­ty­lique » de la langue et la rup­ture épis­té­mo­lo­gique saus­su­rienne, ins­tau­rant l’arbitrarité du signe comme condi­tion sine qua non d’une concep­tion struc­tu­ra­liste de l’objet langue, a per­mis une approche scien­ti­fique des idiomes. Mais à la même époque, la théo­rie de la sexuis­sem­blance est défen­due par Damou­rette et Pichon, qui sup­pose un lien entre les qua­li­tés de la chose dési­gnée et le genre gram­ma­ti­cal du mot qui les désigne.

La science lin­guis­tique pré­sente la par­ti­cu­la­ri­té d’utiliser son objet même pour sa propre des­crip­tion (dimen­sion méta­lin­guis­tique ou réflexive de la langue) et cette capa­ci­té est com­mune aus­si bien aux expert.e.s qu’aux lin­guistes popu­laires pour qui la langue tan­tôt dit en par­tie ou en tota­li­té le monde, tan­tôt ne pos­sède aucun pou­voir selon l’adage com­mun : tout ça ce n’est que du dis­cours (pas­sage subrep­tice de la langue à l’arène des dis­cours, mais pour tout un.e chacun.e l’opposition est plu­tôt entre la gram­maire, d’une part, et les pro­duc­tions dis­cur­sives, de l’autre).

Certes, les mots ne sont pas magiques, même si l’imaginaire regorge d’exemples de récits où la parole est mira­cu­leuse : for­mules de sor­cières ou Sésame, ouvre-toi. La langue dit en par­tie le monde ; c’est en tout cas de cette façon que les gens la conçoivent. La langue n’est pas sexiste (mais « gen­rée », comme le dit Éliane Vien­not) ni fas­ciste (pour citer Barthes), mais ses usages servent à expri­mer des posi­tions idéo­lo­giques. Le lan­gage pro­voque des émo­tions et la valeur per­for­ma­tive per­lo­cu­toire des mots est avé­rée (les mots nous touchent). On peut ain­si rai­son­na­ble­ment pen­ser qu’augmenter la visi­bi­li­té du fémi­nin dans la langue a per­mis d’ouvrir des pro­fes­sions aux femmes et vice ver­sa, qu’une femme occu­pant un poste tra­di­tion­nel­le­ment mas­cu­lin peut ame­ner un chan­ge­ment dans la langue. Dans le cadre d’un ensei­gne­ment de la gram­maire repor­té aux der­nières années de la sco­la­ri­té obli­ga­toire, on pour­rait ouvrir l’esprit des élèves à l’idéologie por­tée par les usager.e.s, les repré­sen­ta­tions et les sté­réo­types sur la pré­ten­due clar­té, pure­té, de la langue etc., bref ame­ner les élèves à une démarche à la fois cri­tique, méta­lin­guis­tique et politique.

Et les amé­na­ge­ments sont mul­tiples… vu que l’écriture inclu­sive n’est pas une obli­ga­tion, mais une pos­sible appropriation.

Je ter­mi­ne­rai par cette réflexion ouverte et variable du socio­lin­guiste Michel Fran­card : « Toute per­sonne que rebute l’emploi du point milieu dis­pose d’autres pro­cé­dés pour expri­mer l’équivalent fémi­nin. […] Il est des contextes où, à l’écrit, cet usage peut s’avérer très per­ti­nent. Lorsque l’UCL emploie dans un mes­sage “Mes­dames et Mes­sieurs les Professeur∙e∙s”, elle évite, grâce au point milieu, une for­mu­la­tion bien plus lourde (Mes­dames les Pro­fes­seures, Mes­sieurs les Pro­fes­seurs) qui est bien sûr tout aus­si accep­table à l’écrit, et qui serait celle employée à l’oral. Elle évite éga­le­ment le désuet “Mes­dames et Mes­sieurs les Pro­fes­seurs”, qui va à l’encontre du décret sur la fémi­ni­sa­tion des noms de métiers et de fonctions. »

  1. Paveau M.-A et Rosier L., La langue fran­çaise : pas­sions et polé­miques, Paris, Vui­bert, 2008.
  2. Alors qu’elle fut une pion­nière et l’une des che­villes ouvrières de la fémi­ni­sa­tion en France, son nom est étran­ge­ment peu cité dans les débats actuels autour de l’écriture inclusive.
  3. Rey­mis­sem W., L’application du modèle de l’Imaginaire lin­guis­tique à des cor­pus écrits : le cas des chro­niques de lan­gage dans la presse qué­bé­coise, Qué­bec, Édi­tions de la Mai­son des sciences de l’homme, 2011.
  4. L’arrêté du 26 février 1901 (arrê­té Leygues) pro­pose de tolé­rer des ortho­graphes mul­tiples pour les concours et dic­tées offi­ciels en France. Il n’a jamais été appliqué.
  5. Cha­rau­deau P., « L’écriture inclu­sive au défi de la neu­tra­li­sa­tion en fran­çais », Le Débat, à paraitre.
  6. Ce n’est pas le cas en Bel­gique où les che­villes ouvrières de la fémi­ni­sa­tion ont été notam­ment les lin­guistes Marie-Louise Moreau et Anne Dis­ter, Fémi­ni­ser ? Vrai­ment pas sor­cier. La fémi­ni­sa­tion des noms de métiers, fonc­tions, grades et titres, Lou­vain, De Boeck et Ducu­lot, 2009.
  7. L’argument du neutre a été régu­liè­re­ment aus­si invo­qué par des femmes dési­reuses de gar­der leur titre au mas­cu­lin, voir par exemple la posi­tion de la socio­logue Natha­lie Hei­nich sur « le droit au neutre ».
  8. Wil­met M., Gram­maire cri­tique du fran­çais, De Boeck, 4e édi­tion, 2007.
  9. Com­mu­ni­ca­tion per­son­nelle, jan­vier 2018.
  10. Elle est notam­ment l’auteure d’une Gram­maire inclu­sive à paraitre et d’un roman Requiem paru en 2015 et écrit en fran­çais égalitaire.
  11. Robin K., « Au-delà du sexe : le pro­jet uto­pique de Monique Wit­tig », 2011.
  12. Cha­rau­deau P., op. cit.
  13. Essai de gram­maire de la langue fran­çaise : des mots à la pen­sée, sept volumes, 1911 – 1940.
  14. J’ai géné­ra­li­sé abu­si­ve­ment car Anne Ver­vier, pro­fes­sion­nelle de l’écriture et for­ma­trice, défend l’écriture inclu­sive tout en s’interrogeant sur les rap­ports entre l’écriture inclu­sive et la lisi­bi­li­té. C’est elle qui m’a ren­voyé à ces deux articles. Qu’elle en soit remerciée.

Laurence Rosier


Auteur

Née en 1967, Laurence Rosier est licenciée et docteure en philosophie et lettres. Elle est professeure de linguistique, d’analyse du discours et de didactique du français à l’ULB. Auteure de nombreux ouvrages, elle a publié plus de soixante articles dans des revues internationales, a organisé et participé à plus de cinquante colloques internationaux, codirigé de nombreux ouvrages sur des thèmes aussi divers que la ponctuation, le discours comique ou la citation ou encore la langue française sur laquelle elle a coécrit M.A. Paveau, "La langue française passions et polémiques" en 2008. Elle a collaboré au Dictionnaire Colette (Pléiade). Spécialiste de la citation, sa thèse publiée sous le titre "Le discours rapporté : histoire, théories, pratiques" a reçu le prix de l’essai Léopold Rosy de l’Académie belge des langues et lettres. Son "petit traité de l’insulte" (rééd en 2009) a connu un vif succès donnant lieu à un reportage : Espèce de…l’insulte est pas inculte. Elle dirige une revue internationale de linguistique qu’elle a créée avec sa collègue Laura Calabrese : Le discours et la langue. Avec son compagnon Christophe Holemans, elle a organisé deux expositions consacrées aux décrottoirs de Bruxelles : "Décrottoirs !" en 2012. En 2015, elle est commissaire de l’exposition "Salope et autres noms d’oiselles". En novembre 2017 parait son dernier ouvrage intitulé L’insulte … aux femmes (180°), couronné par le prix de l’enseignement et de la formation continue du parlement de la communauté WBI (2019). Elle a été la co-commissaire de l’expo Porno avec Valérie Piette (2018). Laurence Rosier est régulièrement consultée par les médias pour son expertise langagière et féministe. Elle est chroniqueuse du média Les Grenades RTBF et à La Revue nouvelle (Blogue de l’irrégulière). Elle a été élue au comité de gestion de la SCAM en juin 2019.
 Avec le groupe de recherche Ladisco et Striges (études de genres), elle développe des projets autour d’une linguistique « utile » et dans la cité.