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Donbass, des siècles de cohabitation pacifique

Numéro 4 - 2015 par Perri

juin 2015

Si l’Ukraine est une terre de fron­tière, comme le sug­gè­re­rait l’étymologie de son nom et comme le montre sa posi­tion au car­re­four des peuples, des civi­li­sa­tions et des reli­gions, le Don­bass est la fron­tière de la fron­tière. Aujourd’hui, il est deve­nu le champ de bataille entre la Rus­sie et l’Ukraine, entre l’Occident et l’Eurasie.

Articles

L’héritage cosaque, l’immigration mas­sive de la seconde moi­tié du XIXe siècle, l’industrialisation, l’urbanisation des pay­sans, les troubles sociaux et les pogromes anti­juifs de la période pré­cé­dant la Révo­lu­tion de 1917, ont répan­du l’idée encore vive aujourd’hui d’une socié­té non struc­tu­rée et vio­lente. Région par­ti­cu­lière, en révolte face au pou­voir cen­tral qu’il soit impé­rial, sovié­tique, russe ou ukrai­nien, elle a, en même temps, réus­si à jouer un rôle poli­tique qui va au-delà de ses fron­tières : deux secré­taires géné­raux du Par­ti com­mu­niste de l’Union sovié­tique, Khroucht­chev et Bre­j­nev, étaient fils de tra­vailleurs russes immi­grés dans le Don­bass ; quelques-uns des prin­ci­paux repré­sen­tants poli­tiques de l’Ukraine post­so­vié­tique sont éga­le­ment ori­gi­naires du Don­bass et de la région proche de Dnipropetrovsk.

La frontière de la frontière

La région du Don­bass tire son nom de la rivière Donets (qui ter­mine son cours dans le Don, actuel­le­ment sur le ter­ri­toire russe). Ces steppes, à l’extrémité orien­tale de l’espace ukrai­nien, fai­saient par­tie des dyke pole ou « terres sau­vages », c’est-à-dire des régions qui, peu peu­plées dans les pre­miers siècles de l’ère moderne, étaient une zone de tran­si­tion entre la Rzecz­pos­po­li­ta (le grand État polo­no-litua­nien), la mer Noire et le monde tata­ro-musul­man ; elles étaient, à l’époque, habi­tées prin­ci­pa­le­ment par des Cosaques, ces pay­sans-sol­dats qui s’y étaient ins­tal­lés à par­tir de la seconde moi­tié du XVe siècle, sur­tout pour échap­per à la servitude.

Les Cosaques défen­daient ces terres et, en échange, jouis­saient d’une cer­taine liber­té accor­dée par la Pologne. Ils n’étaient pas seule­ment des guer­riers diri­gés par des chefs mili­taires for­més dans les meilleures écoles ; ils étaient aus­si l’expression de la renais­sance d’une nation ukrai­nienne et d’une réac­tion popu­laire de masse, envers la dure domi­na­tion sociale impo­sée par les Polo­nais. La grande insur­rec­tion cosaque de 1648, diri­gée par Boh­dan Khmel­nits­ki (dont la sta­tue équestre se trouve aujourd’hui dans la ville haute de Kiev, en face de la cathé­drale Sainte-Sophie) fut une véri­table guerre de libé­ra­tion de l’Ukraine et don­na lieu à l’alliance, bien qu’incertaine, entre les insur­gés et l’ennemi « héré­di­taire » tatar, tant les rela­tions avec les sei­gneurs polo­nais s’étaient dété­rio­rées. Ce tour­nant dans l’histoire de l’Europe, mérite aujourd’hui une grande atten­tion pour au moins deux impor­tantes rai­sons : d’un côté, elle fait par­tie des révoltes du XVIIe siècles qui ont secoué toute l’Europe ; cer­tains ont même com­pa­ré Khmel­nits­ki à Crom­well (ils ont d’ailleurs eu des échanges épis­to­laires), en consi­dé­rant la révolte cosaque dans le cadre d’un jeu poli­tique conti­nen­tal anti­ca­tho­lique ; d’un autre côté, cette révolte a ouvert le début de la crise polo­naise et de l’hégémonie russe sur l’Europe orientale.

Le Don­bass, qui cor­res­pond aux ter­ri­toires actuels des oblasts (pro­vinces) ukrai­niennes de Donetsk et Lou­hansk (et aus­si à une par­tie de la pro­vince russe de Ros­tov-sur-le-Don), n’était cepen­dant pas l’épicentre de la vie des cosaques, qui se dérou­lait prin­ci­pa­le­ment dans le dyke pole de l’ouest (zone actuelle des villes indus­trielles de Zapo­ri­jia et de Dni­pro­pe­trovsk). Res­té peu habi­té jusqu’à la moi­tié du XIXe siècle, le Don­bass s’est peu­plé prin­ci­pa­le­ment grâce à la décou­verte et au début de l’exploitation des gise­ments de char­bon ; c’est pour­quoi la région a été la pre­mière, en Ukraine, à connaitre un flux d’immigration consi­dé­rable en pro­ve­nance de la Rus­sie. Avant la deuxième moi­tié du XIXe siècle, il n’y avait en Ukraine presque aucune pré­sence russe, mais le pays était peu­plé prin­ci­pa­le­ment d’Ukrainiens, de Juifs et de Polo­nais, ain­si que par de nom­breuses autres mino­ri­tés eth­niques (Alle­mands, Tchèques, Bul­gares, Grecs, Tatars, etc.).

Le cli­mat rigou­reux et insa­lubre (« plus chaud qu’en Pales­tine en été et plus froid que l’hiver de Saint-Péters­bourg », avait affir­mé en 1908 un ingé­nieur fran­çais), l’approvisionnement insuf­fi­sant en eau, les conflits entre Ukrai­niens et Russes ont tou­jours carac­té­ri­sé la région, qui a, d’ailleurs, une his­toire poli­tique tout à fait par­ti­cu­lière : non seule­ment elle est la terre d’origine d’hommes poli­tiques sovié­tiques de pre­mier plan, mais Ianou­ko­vitch, le pré­sident ren­ver­sé par la révolte d’Euromaïdan est ori­gi­naire de Donetsk et avait été gou­ver­neur de l’oblast ; d’autre part, Iou­lia Timo­chen­ko et l’ancien pré­sident ukrai­nien Leo­nid Koutch­ma sont ori­gi­naires de Dni­pro­pe­trovsk. Le fait que l’histoire poli­tique de l’Ukraine post­so­vié­tique ait été domi­née par des gens de ces régions du sud-est alors que l’homme poli­tique plé­bis­ci­té par les régions de l’ouest, le Gali­cien Tchor­no­vyl, un ancien dis­si­dent sovié­tique, est mort dans un « acci­dent » de voi­ture à la veille des élec­tions pré­si­den­tielles de 1999, four­nit une clé impor­tante pour com­prendre les évè­ne­ments des der­niers mois en Ukraine.

Le Donbass impérial et stalinien

Le recen­se­ment impé­rial de 1897 incluait le Don­bass dans la gou­ber­nia (le gou­ver­ne­ment) d’Ekaterinoslav (aujourd’hui Dni­pro­pe­trovsk); on comp­tait 365.000 Russes, 1.456.000 Ukrai­niens, plus de 14.000 Bié­lo­russes, 12.000 Polo­nais et 100.000 Juifs. L’historien ukrai­nien Petro Lavriv a esti­mé que le Don­bass comp­tait au total 700.000 habi­tants en 1897, puis 2 mil­lions en 1920 et 7 mil­lions en 1959. L’immigration russe dans le sud-est de l’Ukraine explique la struc­ture démo­gra­phique actuelle : une légère majo­ri­té de rus­so­phones dans les moyennes et les grandes villes et des ukrai­no­phones dans les petites villes et dans les cam­pagnes. En 1926, les Russes consti­tuaient 31,4% des habi­tants du Don­bass et les deux tiers d’entre eux vivaient dans les villes.

La pré­sence juive dans le Don­bass a tou­jours été limi­tée par rap­port à d’autres régions d’Ukraine : ils repré­sen­taient envi­ron 2% de la popu­la­tion en 1926 qui ont été presque entiè­re­ment exter­mi­nés pen­dant l’occupation alle­mande de 1941 – 1943, et aujourd’hui, ils ne repré­sentent plus que 0,2%.

À l’époque, il exis­tait un cer­tain nombre de colo­nies rurales alle­mandes, datant du XVIIIe siècle, mais pen­dant les purges des années trente et pen­dant la Seconde Guerre mon­diale, Sta­line ordon­na l’expulsion de toutes les com­mu­nau­tés alle­mandes, qui ont donc dis­pa­ru. D’autres groupes eth­niques (Bul­gares, Grecs, Bié­lo­russes, Polo­nais, etc.) étaient pré­sents dans la région ; Khroucht­chev, par exemple, qui, jeune homme, avait émi­gré de Rus­sie, rap­pelle dans ses mémoires l’habileté des agri­cul­teurs bulgares.

Au total, en 1897, les Russes (y com­pris les Ukrai­niens rus­si­fiés ou rus­so­phones) repré­sen­taient 11,7% de l’ensemble de la popu­la­tion de l’Ukraine tsa­riste, c’est-à-dire les régions ukrai­niennes que l’État russe avait pro­gres­si­ve­ment annexées pen­dant son expan­sion vers l’Occident. Des autres régions (la Galice, la Buco­vine sep­ten­trio­nale, la Trans­car­pa­tie) avaient été attri­buées à l’Empire autri­chien à l’époque des par­tages de la Pologne, dans la seconde moi­tié du XVIIIe siècle.

Avec l’effondrement de l’empire tsa­riste, une Répu­blique ukrai­nienne indé­pen­dante fut pro­cla­mée, mais elle ne fut pas recon­nue par les bol­ché­viques qui lui firent la guerre. L’existence d’une Ukraine auto­nome ou indé­pen­dante ne fai­sait pas par­tie de leur vision : comme l’avait décla­ré en juin 1917 un des diri­geants bol­ché­viques de l’Ukraine, Gueor­gui Pia­ta­kov : « La Rus­sie ne peut pas exis­ter sans l’industrie ukrai­nienne du sucre, du char­bon (le Don­bass), du blé (les terres noires), etc. Ces indus­tries sont étroi­te­ment liées au reste de l’industrie de la Rus­sie. En effet, l’Ukraine ne consti­tue pas une région éco­no­mique dis­tincte. » En fait, outre le sucre, la région pro­duit 43% de la pro­duc­tion mon­diale d’orge, 20% de celle de blé, 10% du maïs, tan­dis que le déve­lop­pe­ment indus­triel du Don­bass en avait fait la région impé­riale la plus riche en pro­duc­tion minière et métal­lur­gique. En 1913, 15% seule­ment des pro­duits finis de l’industrie impé­riale étaient pro­duits en Ukraine, ce qui ren­dait son éco­no­mie plus proche de l’exploitation colo­niale que de l’interconnexion évo­quée par Pia­ta­kov. D’autre part, le sta­tut de l’Ukraine à l’époque tsa­riste était celle d’un ensemble de pro­vinces impé­riales (les pro­vinces du sud-ouest), gou­ver­né de Kiev par un repré­sen­tant du tsar et dont l’identité natio­nale était déniée, parce qu’on par­lait d’elle comme de la Petit Rus­sie ; la langue ukrai­nienne était consi­dé­rée comme un dia­lecte et, après la révolte polo­naise de 1863, son usage subit plu­sieurs interdictions.

En der­nier recours, le chef mili­taire de la Répu­blique ukrai­nienne de 1918, Simon Pet­liou­ra, fit alliance avec la Pologne pour répondre à l’attaque des bol­ché­viques. Mais les Polo­nais pré­fé­rèrent fina­le­ment un accord avec les bol­ché­viques, qui condui­sit à la paix de Riga en 1921 et qui attri­bua une grande par­tie de l’Ukraine aux bol­ché­viques, tan­dis que la Pologne obtint la Gali­cie et l’ouest de la Volhynie.

La politique des nationalités

Afin d’attirer les natio­na­li­tés qui fai­saient par­tie de l’empire russe et confor­mé­ment au prin­cipe énon­cé par Lénine selon lequel cet empire était une « pri­son des peuples », une poli­tique ambigüe des natio­na­li­tés, appe­lée kore­ni­zat­sia (ou indi­gé­ni­sa­tion), fut adop­tée pen­dant la pre­mière décen­nie du pou­voir sovié­tique ; ambigüe, parce que le but était aus­si de cata­lo­guer et de gérer la popu­la­tion, selon une pers­pec­tive typique des puis­sances colo­niales. La Consti­tu­tion sovié­tique de 1924 finit par don­ner au pou­voir cen­tral plus de pou­voirs que pré­vu, de sorte que les Répu­bliques de l’Union avaient les mêmes pou­voirs que les régions russes, alors que le Par­ti res­tait cen­tra­li­sé ; l’utilisation des langues natio­nales dans le sys­tème édu­ca­tif fut déve­lop­pée, sauf dans l’enseignement uni­ver­si­taire, qui conti­nua à être don­né en russe.

Le Par­ti bol­ché­vique ukrai­nien était domi­né par les Russes (dont beau­coup étaient ori­gi­naires du Don­bass), et Lénine reje­ta la créa­tion d’une répu­blique auto­nome dans le Don­bass. Sta­line, quant à lui, favo­ri­sa la kore­ni­zat­sia en par­ti­cu­lier pour ses alliances avec les prin­ci­paux bol­ché­viques locaux, compte tenu éga­le­ment des ten­dances cen­tra­li­sa­trices de Trots­ki et de ses autres adver­saires. La direc­tion du Par­ti com­mu­niste ukrai­nien, diri­gé par l’Allemand Emma­nuel Kvi­ring (favo­rable à la séces­sion du Don­bass) et par son adjoint Lebed (un Russe), était hos­tile à la kore­ni­zat­sia ; par­mi les employés du gou­ver­ne­ment qui étaient membres du Par­ti, seuls 18% connais­saient l’ukrainien. Seule­ment 10 à 15% de la docu­men­ta­tion du gou­ver­ne­ment ukrai­nien étaient en ukrainien.

Dès 1923, une poli­tique en faveur de la langue ukrai­nienne fut donc enta­mée : en 1926, 30% des jour­naux et 50% des livres étaient publiés en ukrai­nien, une langue dont l’utilisation, on l’a dit, avait été décou­ra­gée ou inter­dite par des mesures prises par les auto­ri­tés tsa­ristes au cours du XIXe siècle.

En 1927, le pour­cen­tage d’Ukrainiens rési­dant à Kiev était pas­sé de 27 à 42%. Le nombre d’immigrants ukrai­niens dans les villes indus­trielles du Don­bass et d’Ukraine du sud-est aug­men­tait éga­le­ment : à Lou­hansk, Zapo­ri­jia, Khar­kiv et à Dni­pro­pe­trovsk en 1933, les Ukrai­niens repré­sen­taient près de la moi­tié des habi­tants ; à Sta­li­no (l’actuelle Donetsk), ils repré­sen­taient 31% de la popu­la­tion (en 1923, seule­ment 7% de la popu­la­tion de la capi­tale du Don­bass était ukrai­nienne); les habi­tants ukrai­niens de Lou­hansk aug­men­tèrent de 21 à 60%, tan­dis que les Ukrai­niens repré­sen­taient désor­mais 36% de la main‑d’œuvre de l’industrie minière et métal­lur­gique du Don­bass, et 60% du total ukrai­nien. En aout 1929, il fut pos­sible d’«ukrainiser » le jour­nal d’Odessa et la ville même, l’une des plus rus­si­fiées avant la guerre.

Le russe, cepen­dant, conti­nuait à être d’usage cou­rant dans les usines. Pour les tra­vailleurs, il n’existait pas de cours obli­ga­toires d’ukrainien (Sta­line crai­gnait de perdre le consen­te­ment de la classe ouvrière rus­so­phone du Don­bass), et les immi­grants ukrai­niens de la cam­pagne accep­taient la domi­na­tion du russe dans les usines : le pour­cen­tage de tra­vailleurs de l’industrie qui uti­li­saient la langue ukrai­nienne cou­ram­ment en 1929, n’était que de 32%.

La kore­ni­zat­sia a repré­sen­té dans les villes du Don­bass un phé­no­mène com­plexe : les rus­so­phones ont subi une sorte de choc lin­guis­tique lié à l’ukrainisation de l’administration (une par­tie des Russes s’est réso­lue à apprendre l’ukrainien); de nom­breux pay­sans et les tra­vailleurs ukrai­niens rus­si­fiés sont entrés pour la pre­mière fois en contact avec leur culture et ont pris conscience de leur propre natio­na­li­té, alors que la langue russe res­tait domi­nante et que le pro­ces­sus de rus­si­fi­ca­tion des Ukrai­niens urba­ni­sés se pour­sui­vait. Cette com­plexi­té explique pour­quoi, encore aujourd’hui, à côté des patriotes des deux côtés, nom­breux sont ceux qui res­tent étran­gers à la cris­tal­li­sa­tion natio­nale et linguistique.

En 1928, Kosior (un Polo­nais du Don­bass, qui n’a jamais appris l’ukrainien) a été nom­mé pre­mier secré­taire du Par­ti bol­ché­vique ukrai­nien, dont la per­son­na­li­té plus impor­tante était cepen­dant Myko­la Skryp­nyk, un Ukrai­nien, qui défen­dait l’indépendance des répu­bliques et l’ukrainisation ; il sera pous­sé au sui­cide en 1934, quand Sta­line ter­mi­ne­ra la kore­ni­zat­sia. La demande d’étendre l’ukrainisation aux nom­breuses mino­ri­tés ukrai­niennes en Rus­sie et dans le Kou­ban (plus de huit mil­lions de per­sonnes selon le recen­se­ment de 1926), et la reven­di­ca­tion de modi­fi­ca­tions ter­ri­to­riales en faveur de la Répu­blique d’Ukraine1 occa­sion­nèrent une crise de la kore­ni­zat­sia. Ensuite a com­men­cé une vaste cam­pagne d’ukrainisation des Ukrai­niens de Rus­sie inci­tée par le Soviet des natio­na­li­tés. Cette poli­tique, dont le pro­ta­go­niste était Skryp­nyk, finit par irri­ter Staline.

L’obsession éta­tiste, la volon­té d’affaiblir de façon per­ma­nente l’opposition pay­sanne au pou­voir bol­ché­vique, à laquelle s’ajoute une « ukrai­no­pho­bie2 » que Sakha­rov attri­buait à Sta­line, ont conduit à la famine catas­tro­phique de 1932 – 1933 en Ukraine3. En 1931, une cir­cu­laire de Mikoyan (ins­pi­rée par Sta­line) adres­sée aux secré­taires du Par­ti affir­mait que « La ques­tion de ce qui reste à man­ger n’est pas impor­tante. […] Tout d’abord, il faut rem­plir le plan ». Le 29 décembre 1932, le Polit­bu­ro ukrai­nien fut contraint d’émettre un ordre de réqui­si­tion des réserves de blé appar­te­nant aux familles : c’était le début de la famine, qui a impli­qué au moins 30 mil­lions de per­sonnes et entrai­né la mort de 3.000.000 à 7.000.000 d’entre elles en 1932 et 1933, selon les dif­fé­rentes esti­ma­tions des cher­cheurs (tous les démo­graphes sovié­tiques ont dis­pa­ru dans les purges sta­li­niennes et les don­nées des recen­se­ments des années trente n’ont jamais été publiées)4.

Pen­dant la famine, les expor­ta­tions de blé ont conti­nué : en 1932, 1.730.000 tonnes de blé et 1,68 mil­lion en 1933. Au début de 1933, les réserves de l’État étaient de plus de 1,8 mil­lion de tonnes, mais elles n’ont pas été uti­li­sées pour nour­rir les pay­sans affa­més. Le 22 jan­vier 1933, Sta­line émit une direc­tive secrète pour empê­cher l’exode des pay­sans des zones de famine. Le len­de­main, il fut inter­dit de vendre des billets de train aux pay­sans, les condam­nant à une mort cer­taine. En deux mois, 225.000 per­sonnes ont été blo­quées. À par­tir de novembre 1932, le pas­se­port interne, qui devint une ins­ti­tu­tion impor­tante de l’URSS et qui a sur­vé­cu même à Sta­line, fut ins­ti­tué ; les kol­kho­ziens n’avaient pas le droit d’en jouir, et ils se sont trou­vés confi­nés pen­dant des décen­nies dans leurs domaines, à l’instar des serfs. Et pour fil­trer davan­tage la popu­la­tion urbaine, un per­mis de rési­dence (ou pro­pis­ka) fut ajouté.

La récolte de 1932 n’était que de 12% infé­rieure à la moyenne des années pré­cé­dentes ; en 1936, la récolte était de quan­ti­té égale à celle de 1932, mais l’État ne l’a pas confis­quée, ce qui a per­mis d’éviter la famine. Le grand écri­vain juif rus­so­phone Vas­si­li Gross­man, dans Tout passe, a des mots bou­le­ver­sants : « Le vil­lage s’est mis à hur­ler lorsqu’il a vu sa propre mort. […] Ils gémis­saient comme les feuilles sous le vent, comme la paille qui craque. […] J’allais plus loin […] et, de nou­veau, j’entendais mais, cette fois, c’était le vil­lage voi­sin qui hur­lait. Et j’avais l’impression que toute la terre hur­lait en même temps que les hommes5. »

Les villes aus­si ont été tou­chées et Khar­kiv per­dit envi­ron 120000 habi­tants. Fina­le­ment, des régions entières de l’Ukraine périrent, sur­tout en Ukraine de l’est, en Ukraine cen­trale et dans le Kou­ban. Le Holo­do­mor (lit­té­ra­le­ment l’extermination par la faim) a éga­le­ment déci­mé la région de Lou­hansk (rebap­ti­sée depuis 1935 Voro­chi­lov­grad); la région de Donetsk fut moins dure­ment tou­chée. L’émigration de nom­breuses familles russes en Ukraine fut favo­ri­sée, ce qui allait modi­fier l’équilibre démo­gra­phique de ces régions.

La grande famine n’a pas frap­pé seule­ment l’Ukraine ; néan­moins, sa forte conno­ta­tion natio­nale est mani­feste ; par exemple, la Pro­le­tars­ka Prav­da du 22 jan­vier 1930 décla­rait que « la col­lec­ti­vi­sa­tion en Ukraine a pour tâche par­ti­cu­lière […] de détruire les bases sociales du natio­na­lisme ukrai­nien, à savoir l’agriculture menée par les agri­cul­teurs indi­vi­duels6. » Une lettre de Sta­line à Kaga­no­vitch, le 11 aout 1932, se ter­mine ain­si : « Si nous n’agissons pas immé­dia­te­ment pour résoudre la situa­tion, nous ris­quons de perdre l’Ukraine » est déci­sive. Pour Gross­man, les res­pon­sa­bi­li­tés sont claires : « Jamais les tsars, ni les Tatars, ni les occu­pants alle­mands n’avaient don­né un tel ordre : l’ordre de tuer les pay­sans par la famine en Ukraine, sur le Don, au Kou­ban, de les tuer eux et leurs enfants. »

Sous Khrouchtchev et Brejnev : la russification

Le Holo­do­mor et la Seconde Guerre mon­diale ont été une double catas­trophe démo­gra­phique pour les Ukrai­niens. Dans la décen­nie 1933 – 1945, les Russes sont pas­sés de 78 mil­lions à 100 mil­lions, tan­dis que les Ukrai­niens de 31,2 à 28, dont 25 mil­lions par­laient ukrai­nien. Pour affai­blir le natio­na­lisme ukrai­nien après la Seconde Guerre mon­diale, l’immigration russe a été favo­ri­sée : le nombre de Russes pré­sents en Ukraine est pas­sé de 4 mil­lions en 1939 (12% de la popu­la­tion) à 7 mil­lions en 1959 (16% du total, comme aujourd’hui) et à 21,1% en 1979. Dans le Don­bass, le nombre d’Ukrainiens pas­sa de 65,4% en 1926 à 53,7% en 1979, tan­dis que le nombre de Russes a crû de 25,7% à 43,4%. Dans l’ouest de l’Ukraine, les Russes ont aug­men­té jusqu’à 5% de la popu­la­tion. Pour la pre­mière fois de son his­toire, le ter­ri­toire de l’Ukraine s’est trans­for­mé : de mul­ti­na­tio­nal, il est deve­nu bina­tio­nal. Il convient éga­le­ment de noter que par­mi les citoyens sovié­tiques qui ont pré­fé­ré ne pas retour­ner en URSS à la fin de la guerre, plus de 50% étaient des Ukrai­niens. Ils fai­saient par­tie des Ostar­bei­ter (les tra­vailleurs for­cés uti­li­sés en Alle­magne) ou des pri­son­niers dans les camps nazis ; il y avait aus­si un nombre plus res­treint de ceux qui avait com­bat­tu dans les for­ma­tions russe (l’armée de Vla­sov) et ukrai­nienne anti­so­vié­tiques, alliées des Allemands.

La cam­pagne de rus­si­fi­ca­tion sous Bre­j­nev a eu des résul­tats impor­tants : les pério­diques publiés en ukrai­nien qui repré­sen­taient 46% sont tom­bés à 19% entre 1969 et 1980, tan­dis que les livres ont bais­sé de 60 à 24%, entre 1958 et 1980. Au cours de la mpeme période, le nombre d’Ukrainiens rus­so­phones et le nombre de bilingues ont connu une aug­men­ta­tion. équi­va­lente. Un fait inté­res­sant à remar­quer est l’utilisation de la langue par rap­port à l’âge et le rôle de l’école dans la rus­si­fi­ca­tion : en 1970, 81% des enfants (jusque dix ans) ne par­laient que l’ukrainien, tan­dis que le pour­cen­tage bais­sait à 22% par­mi les élèves du secon­daire (entre seize et dix-neuf ans).

D’autres don­nées témoignent de la crois­sante rus­si­fi­ca­tion, entre 1959 et 1979, des Ukrai­niens du Don­bass, où les Ukrai­niens non rus­so­phones sont pas­sés, durant les années 1970, d’environ 30 à 20%, alors que les Ukrai­niens rus­si­fiés ont aug­men­té de 13,8% à 17,4%; le nombre d’Ukrainiens bilingues de langue mater­nelle ukrai­nienne est res­té stable autour de 44%, tan­dis que les Ukrai­niens bilingues qui disaient être de langue mater­nelle russe ont aug­men­té de 12,8% à 16,8. Dans le Don­bass, l’absence d’université jusqu’à la seconde moi­tié des années 1960 a contri­bué à ce phé­no­mène car il n’y avait pas de milieu intel­lec­tuel en mesure de gar­der la culture natio­nale. C’est pour­quoi, la rus­si­fi­ca­tion des Ukrai­niens était en 1979 cinq fois plus éle­vée que la moyenne natio­nale (don­nées com­pa­rables seule­ment à celles de la ville de Kiev et de la Cri­mée)7.

[*Pour­cen­tage de Russes en Ukraine par région en 2001*]
[*Recen­se­ment ukrainien*]
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Une situation complexe

Cepen­dant, il n’existe actuel­le­ment aucune région de l’Ukraine où les Ukrai­niens ne sont pas la majo­ri­té de la popu­la­tion, à l’exception de la Cri­mée. Et toutes les régions, en 1991, ont voté en majeure par­tie pour l’indépendance de l’Ukraine (54% en Cri­mée), attei­gnant tou­jours des taux plus éle­vés que le nombre de rési­dents d’appartenance eth­nique ukrai­nienne : grâce au vote favo­rable de nom­breux Russes : 77% des habi­tants étaient pour l’indépendance dans la région de Donetsk, 84% dans celle de Lou­hansk et 85% à Odes­sa. Le recen­se­ment ukrai­nien de 2001 atteste que dans l’oblast de Lou­hansk, les régions ukrai­no­phones (dans les­quelles la pro­por­tion des habi­tants de langue mater­nelle ukrai­nienne est en moyenne de 80%) sont un peu moins nom­breuses, tan­dis qu’à Lou­hansk et dans les régions les plus den­sé­ment peu­plées pré­valent les rus­so­phones, dont le nombre total s’élevait à 87% des habi­tants de l’ensemble de l’oblast. On a, à peu près, la même situa­tion dans l’oblast de Donetsk.

Du point de vue eth­nique, la situa­tion est beau­coup plus équi­li­brée : en 1989, les Russes du Don­bass avaient atteint 44% de la popu­la­tion ; mais, en rai­son du mou­ve­ment de retour en Rus­sie qui a tou­ché toutes les anciennes Répu­bliques sovié­tiques et de la mobi­li­té vers la capi­tale Kiev, les der­niers recen­se­ments montrent que, dans le Don­bass, les Russes repré­sentent main­te­nant 38 – 39% de la popu­la­tion. Dans les villes, par exemple, à Donetsk, ils repré­sentent 48,15% des habi­tants et les Ukrai­niens 46,65%. D’autres natio­na­li­tés sont peu pré­sentes : il y a envi­ron 80.000 Grecs concen­trés dans l’oblast de Donetsk (1,6% de la popu­la­tion), en par­ti­cu­lier dans la région de Mariou­pol, la ville indus­trielle don­nant sur la mer d’Azov. Ils ont été dure­ment per­sé­cu­tés par Sta­line pen­dant la guerre. On compte éga­le­ment 60.000 Bié­lo­russes, 30.000 Tatars, 25.000 Armé­niens, 9.000 Juifs et 8.000 Azer­baïd­ja­nais (les deux der­niers groupes sont pré­sents seule­ment dans l’oblast de Donetsk).

Dans le reste de l’Ukraine sud-orien­tale, ces rela­tions se modi­fient en faveur des ukrai­no­phones, avec un ter­ri­toire plus vaste habi­té par les citoyens de langue ukrai­nienne et une majo­ri­té du total des rus­so­phones moins impor­tante que les pour­cen­tages de Don­bass. Toutes ces don­nées font com­prendre que la ques­tion natio­nale et lin­guis­tique dans l’Ukraine sud-orien­tale n’a pas un carac­tère vrai­ment ter­ri­to­rial, puisqu’on ne peut pas stric­te­ment par­ler de « régions rus­so­phones » ou encore moins de « régions russes» ; et cela s’applique éga­le­ment au Don­bass, bien que le pour­cen­tage total de rus­so­phones y soit très large. Ce phé­no­mène affai­blit consi­dé­ra­ble­ment, non seule­ment le séces­sion­nisme (qui, déjà faible en soi, mène des actions illé­gales et vio­lentes), mais aus­si le soi-disant fédéralisme.

Le fédé­ra­lisme a été sou­vent agi­té, en effet, par les auto­ri­tés russes et par leurs par­ti­sans pour contrô­ler et éven­tuel­le­ment blo­quer le pro­ces­sus de prise de déci­sion de l’État ukrai­nien. Il est pos­sible d’interpréter cela comme une façon de nier le carac­tère ukrai­nien des régions avec une majo­ri­té de rus­so­phones, comme le Don­bass ; il s’agit de régions dans les­quelles la langue ukrai­nienne, déjà en grande dif­fi­cul­té, pour­rait suc­com­ber et dis­pa­raitre sous le poids d’une admi­nis­tra­tion locale tota­le­ment russifiée.

Des enquêtes menées chaque année par l’Institut de socio­lo­gie de l’Académie des sciences à Kiev, montrent que le pour­cen­tage des Ukrai­niens rus­so­phones qui se plaignent de dis­cri­mi­na­tion lin­guis­tique a chu­té de 8,6% en 1994 à 3,7% en 2012, tan­dis que le nombre des Ukrai­no­phones qui se sen­taient dis­cri­mi­nés a aug­men­té (de 6,8% à 8,4%); il s’agit en tout cas de pour­cen­tages mini­maux qui réfutent de façon spec­ta­cu­laire les dan­gers pré­su­més de dis­cri­mi­na­tion lin­guis­tique en Ukraine. Une recherche de 2007 rela­tive à l’utilisation de la langue, menée par le même ins­ti­tut, a éta­bli qu’en Cri­mée et dans le Don­bass le pour­cen­tage de locu­teurs qui uti­lisent seule­ment l’ukrainien dans la vie pri­vée est de 11,8%, une don­née qui des­cend à 8,6% si on se réfère à l’usage public ; et, presque cer­tai­ne­ment, ces chiffres sont encore plus bas pour le seul Don­bass, où le pour­cen­tage d’Ukrainophones était infé­rieur à celui de la Cri­mée avant son annexion à la Russie.

De sur­croit, dans toute l’Ukraine, le pour­cen­tage de ceux qui uti­lisent uni­que­ment l’ukrainien ou le sur­jyk (un dia­lecte qui mélange l’ukrainien et le russe) cor­res­pond seule­ment à 57,2% des familles (53,6% en public); si l’on sous­trait à cette don­née l’utilisation du sur­jyk, l’ukrainien semble être une langue uti­li­sée seule­ment par une mino­ri­té de la popu­la­tion totale. Pour com­prendre le sur­di­men­sion­ne­ment de l’utilisation de la langue russe, cette don­née doit être com­pa­rée à la don­née rela­tive aux Ukrai­niens de langue mater­nelle russe, qui s’élève à 29% de la popu­la­tion, tan­dis que les Russes eth­niques en Ukraine sont à envi­ron 17%. Par consé­quent, la force inhé­rente à la langue russe est encore très puis­sante, bien que les écoles don­nant les cours uni­que­ment en russe soient en dimi­nu­tion consi­dé­rable en Ukraine (sauf dans le Donbass).

Toutes ces don­nées font réflé­chir sur le carac­tère sou­vent ins­tru­men­tal des pré­ten­dues attaques à la liber­té lin­guis­tique en Ukraine. Ain­si, le carac­tère unique de l’ukrainien comme langue natio­nale, adop­té en 1989 par l’Ukraine sovié­tique et confir­mé par le nou­vel État indé­pen­dant, dont la Consti­tu­tion pré­voit éga­le­ment la « pro­tec­tion de la langue russe », est en fait une sorte de « dis­cri­mi­na­tion posi­tive » en faveur d’une enti­té désa­van­ta­gée. À for­tio­ri, cela s’applique au Don­bass. Cepen­dant, la loi de 2012, Koles­ni­chen­ko-Kiva­lov, vou­lue par le Par­ti des régions de Ianou­ko­vitch, a accor­dé le sta­tut de langue régio­nale à chaque langue par­lée par plus de 10% des habi­tants des dif­fé­rentes régions. Le Par­le­ment cen­tral avait voté pour l’abrogation de cette loi immé­dia­te­ment après la fuite de Ianou­ko­vitch, en février 2014, mais elle n’a pas été pro­mul­guée par le chef d’État par inté­rim, Tur­chi­nov. Elle est donc tou­jours en vigueur.

En ce qui concerne l’économie et la pro­duc­tion, le Don­bass (en par­ti­cu­lier l’oblast de Donetsk) apporte une contri­bu­tion impor­tante (12,1%) au pro­duit inté­rieur brut de l’Ukraine, plus éle­vé que celle des régions de l’Ouest, mais c’est une éco­no­mie sub­ven­tion­née en rai­son de l’obsolescence tech­no­lo­gique de ses indus­tries et de ses mines : ain­si l’oblast de Donetsk a reçu en 2013 un tiers de tous les trans­ferts du pou­voir cen­tral aux régions, tan­dis que les entre­prises pri­vées ont reçu des sub­ven­tions et des rem­bour­se­ments d’un tiers supé­rieur aux impôts payés.

Sur le front poli­tique, le Don­bass a joué un rôle impor­tant dans la vie de l’État ukrai­nien indé­pen­dant, contri­buant de manière signi­fi­ca­tive à l’élection du pré­sident Koutch­ma et de Ianou­ko­vitch. Le Don­bass est aus­si la patrie et le centre d’activités éco­no­miques de l’homme le plus riche d’Ukraine, Rinat Akh­me­tov, l’oligarque des oli­garques, dont les pro­fits pro­viennent presque entiè­re­ment de la ges­tion des indus­tries du char­bon et de la métal­lur­gie de la région, pri­va­ti­sées, mais for­te­ment sub­ven­tion­nées par l’État.

Un son­dage effec­tué peu après l’annexion de la Cri­mée en mars 2014 par le Pew Research Cen­ter montre que 70% de la popu­la­tion ukrai­nienne s’oppose à la séces­sion de l’est ; même la majo­ri­té des rus­so­phones s’y oppose (58%, alors que 27% d’entre eux sont favo­rables). En revanche, 61% des citoyens de la Fédé­ra­tion de Rus­sie sont désor­mais convain­cus qu’il y a des régions d’Ukraine qui appar­tiennent à la Russie.

Ce sont des don­nées qui mettent aus­si en évi­dence les graves res­pon­sa­bi­li­tés des diri­geants russes qui ont vou­lu semer le conflit dans cette réa­li­té très imbri­quée ; une réa­li­té qui, sur­tout, avait su gérer elle-même de manière paci­fique, pen­dant des siècles, tout en assu­rant une coha­bi­ta­tion à tous les groupes eth­niques du Don­bass. Par contre, la désta­bi­li­sa­tion du Don­bass a conduit à une guerre ter­rible et san­glante au cœur de l’Europe ; une guerre qui risque de se trans­for­mer en un conflit de longue durée.

La plu­part des Ukrai­niens veulent main­te­nir les fron­tières actuelles. Pour­cen­tage d’U­krai­niens qui pensent qu’il faut
res­ter unis per­mettre aux régions de faire sécession ne sait pas
Ukraine 77 14 9
Ouest 93 4 2
Est 70 18 13
Rus­so­phone 58 27 15
Cri­mée 12 54 34
  1. Peu de temps après la créa­tion de l’URSS, l’Ukraine avait dû céder à la Rus­sie la région du Don­bass orien­tal et celle de Tagan­rog, sur la mer d’Azov, en obte­nant au nord (dans les régions de Koursk et Voro­nej) seule­ment la moi­tié du ter­ri­toire russe habi­tée par des Ukrainiens.
  2. A.D. Sakha­rov, « Pro­gress, coexis­tence and intel­lec­tual free­dom », New York, 1968, p. 54.
  3. Donat Car­lier, « Holo­do­mor 1933 : le cime­tière de la rude école », La Revue nou­velle, octobre 2006 ; Ber­nard De Backer, « Ukraine. Holo­do­mor, les enjeux d’une recon­nais­sance tar­dive », La Revue nou­velle, décembre 2008.
  4. Andrea Gra­zio­si et Nico­las Werth parlent de 5 mil­lions de morts, dont 3,5 en Ukraine.
  5. V. Gross­man, Tout passe, 1984, p. 154.
  6. Cité par O. Sub­tel­ny, Ukraine. A His­to­ry, Toron­to 2012, p. 416.
  7. Voir B. Kraw­chen­ko, « Eth­no-Demo­gra­phic Trends in Ukraine in the 1970s », dans B. Kraw­chen­ko (dir.), Ukraine After She­lest, 1983, p. 103 – 113.

Perri


Auteur

Chercheur au Centre interdisciplinaire d'étude des religions et de la laïcité (ULB)