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Des scientifiques dans la tempête Covid-19

Numéro 3 – 2020 - Covid-19 crise pandémie recherche science université par José Halloy

avril 2020

Le coro­na­vi­rus est un virus sur­li­gneur : il montre les brèches des sys­tèmes sociaux et éco­no­miques, de notre manière de faire de la recherche, de nos ensei­gne­ments. Il ques­tionne en pro­fon­deur le rôle des scien­ti­fiques dans le débat public, leur inter­ac­tion avec les médias, sur les réseaux sociaux. Cet article prend la forme d’un jour­nal de bord de la crise, il se fait ain­si chro­nique de ma grande proxi­mi­té sociale avec les collègues.

Dossier

Dis­tan­cia­tion phy­sique et rap­pro­che­ment social, voi­là les néces­si­tés qu’impose la pan­dé­mie de Covid-19 (coro­na­vi­rus disease 2019). Cette pan­dé­mie est la consé­quence des infec­tions au virus SRAS-CoV‑2 décou­vert, ou plu­tôt sur­gis­sant pour l’humanité, à Wuhan en Chine sur un mar­ché et ses étals de pois­sons et de viandes, sai­gnantes sur­ement, j’imagine. Entrée fra­cas­sante d’un nou­veau coro­na­vi­rus sur la scène mon­diale, dont le nom fait réfé­rence aux pro­téines de fusion mem­bra­naires du virus qui lui donne un aspect de cou­ronne en micro­sco­pie élec­tro­nique, car très vite, nous avons fait la pho­to du der­nier arri­vé, colo­ri­sée ou non, les scien­ti­fiques sont au travail.

L’acteur majeur des évè­ne­ments actuels est donc un « Severe acute res­pi­ra­to­ry syn­drome coro­na­vi­rus 2 » ou SRAS-CoV‑2. Petit être de 100 à 200 nano­mètres (soit 0,0002 mil­li­mètre), petite cap­sule com­po­sée d’une bicouche lipi­dique ponc­tuée de pro­téines qui ser­vi­ront de point d’ancrage et d’infiltration dans nos cel­lules, petit génome, ARN, de 29903 nucléo­tides, alors que nos amies les levures (15 micro­mètres soit 0,015 mil­li­mètre) ont un génome, ADN, de 12 mil­lions de paires de nucléo­tides, mis à l’œuvre pour faire du pain, de la bière, du vin ou du kom­bu­cha si vous pré­fé­rez. Tou­te­fois, dans sa caté­go­rie des Coro­na­vi­ri­dae, le génome du SRAS-CoV‑2 est plu­tôt grand.

Les microbes, et les virus aus­si, sont par­mi nous, par­tout et tout le temps, ils sont très nom­breux dans les océans, là où cer­tains fabriquent l’oxygène que nous res­pi­rons. Ils sont en dehors, sur et dans notre corps. Notre micro­biome intes­ti­nal parle à notre cer­veau, décou­verte invrai­sem­blable. Pour le meilleur et, par­fois, pour le pire, le socle de la vie sur Terre est micro­bien, depuis l’origine de la vie, il y a près de 3,5 mil­liards d’années. Nous ne sommes pas des indi­vi­dus, nous sommes, cha­cun d’entre nous, des colo­nies d’organismes connec­tés à d’autres colo­nies d’organismes et, de proche en proche, à la bio­sphère entière. C’est comme ça, nous sommes une par­tie d’un tout que l’on appelle le vivant sur Terre, quand on l’oublie on détruit la bio­sphère et on se détruit. Les socié­tés humaines ne sont pas qu’humaine, elles englobent des orga­nismes et se frottent aux éco­sys­tèmes, par­tout et tout le temps. Nous l’avons négli­gé, car on ne peut plus dire « on ne savait pas ». Au tra­vers des crises éco­lo­giques, nous construi­sons un sui­cide col­lec­tif de l’humanité, cer­tains humains étant, bien sûr, net­te­ment plus res­pon­sables que d’autres. Nous le savons, nous le docu­men­tons, nous l’étudions scien­ti­fi­que­ment. Notre com­pré­hen­sion du vivant, de l’écologie et du sys­tème Terre a beau­coup pro­gres­sé depuis cin­quante ans. Les scien­ti­fiques tra­vaillent, les savoirs s’accumulent, ils redé­fi­nissent le monde, l’univers. Nous ne pou­vons plus nous per­mettre l’ignorant enthou­siasme des Lumières et de la révo­lu­tion indus­trielle et scien­ti­fique du XIXe siècle, relan­cé avec fré­né­sie après la Seconde Guerre mon­diale. La science, oui, l’industrie, oui, mais plus comme avant. Du moins, cela ne devrait plus être comme cet avant qui per­dure et nous place dans une impasse mortifère.

Le virus SRAS-CoV‑2 est venu nous le rap­pe­ler avec force et bru­ta­li­té. C’est un virus sur­li­gneur. Il vient sur­li­gner ce que nous savons déjà, mais que nous ne pre­nons pas encore suf­fi­sam­ment en compte. Le temps d’une pan­dé­mie, il vient chan­ger la police des carac­tères en gras et la taille passe de douze à sep­tante-deux points. Les dix gènes bien encap­su­lés du SRAS-CoV‑2 font trem­bler et chan­ce­ler l’humanité, les éco­no­mies ralen­tissent ou s’arrêtent, les mar­chés finan­ciers en pro­fitent pour construire ou assu­mer des krachs, la souf­france humaine s’accumule, les drames humains enva­hissent les hôpi­taux. La peur, l’angoisse, la tris­tesse, l’accablement nous envahissent.

Les scien­ti­fiques sont au tra­vail et, dès jan­vier 2020, nous avons le séquen­çage des virus pré­le­vés sur les malades. Les équipes chi­noises, en pre­mière ligne, ont vite fait d’isoler les virus et de séquen­cer leur génome sur les malades qui s’accumulent dans les hôpi­taux chi­nois depuis le pre­mier cas réper­to­rié le 12 décembre 2019. Le 26 décembre 2019, qua­rante-et-un cas de per­sonnes hos­pi­ta­li­sées sont ana­ly­sés et des souches virales extraites et carac­té­ri­sées. Les publi­ca­tions scien­ti­fiques com­mencent à cir­cu­ler, d’abord sous forme de « pre­print », c’est-à-dire avant revue par les pairs et publi­ca­tion dans un jour­nal savant et ensuite sous forme d’articles savants pas­sés par la révi­sion par les pairs puis publiés dans un journal.

L’article de Rou­jian Lu et col­la­bo­ra­teurs1 appa­rait en ligne le 29 jan­vier 2020 dans le jour­nal The Lan­cet qui est une revue savante de pre­mier plan et de réfé­rence en méde­cine. Cette équipe séquence dix génomes viraux à par­tir de neuf patients sur les envi­ron deux-mille réper­to­riés le 26 jan­vier 2020. Les com­pa­rai­sons de ces dix génomes montrent qu’ils sont très sem­blables à 99,98 %. Un nou­veau coro­na­vi­rus est iden­ti­fié et nom­mé, pro­vi­soi­re­ment, 2019-nCoV. Il est sem­blable à 88 % à deux virus, bat-SL-CoVZC45 et bat-SL-CoVZXC2, trou­vés en 2018 chez des chau­ve­sou­ris dans la région de Zhou­shan, en Chine de l’Est. Le virus 2019-nCoV est dis­tant du virus SRAS-CoV, 79 % de res­sem­blance, et du virus MERS-CoV, 50 % de res­sem­blance. Les cher­cheurs en concluent que le 2019-nCoV est donc un nou­veau virus et donc un nou­vel agent infec­tieux pour les humains. Les conclu­sions sont donc inquié­tantes, car qui dit nou­veau virus dit aus­si aucune immu­ni­té dans les popu­la­tions humaines et pas de trai­te­ment ni de vaccin.

L’article de Fan Wu et col­la­bo­ra­teurs2, est sou­mis le 7 jan­vier 2020 et publié en ligne le 3 février 2020 dans la revue Nature, consi­dé­rée aus­si comme pres­ti­gieuse et de réfé­rence. Cette équipe chi­noise étu­die un patient qui est un tra­vailleur du mar­ché de Wuhan en Chine, admis le 26 décembre 2019 à l’hôpital Cen­tral de Wuhan pour un syn­drome res­pi­ra­toire aigu. L’équipe iden­ti­fie un virus de la famille des Coro­na­vi­ri­dae qu’ils nomment WH-Human 1 et signalent qu’il est sem­blable au 2019-nCoV. Ils signalent éga­le­ment que la séquence des nucléo­tides du virus est sem­blable à 89,1 % au groupe des virus SARS trou­vé chez des chau­ve­sou­ris. Ils confirment donc les résul­tats de l’équipe Rou­jian Lu. Ils signalent éga­le­ment que l’on en est face à une épi­dé­mie de pro­pa­ga­tion d’un virus ani­mal qui pro­voque des mala­dies graves chez l’humain.

L’infection par débor­de­ment (spillo­ver infec­tion)3 se pro­duit lorsqu’une popu­la­tion réser­voir à forte pré­va­lence d’agents patho­gènes entre en contact avec une nou­velle popu­la­tion hôte. L’agent patho­gène est trans­mis à par­tir de la popu­la­tion réser­voir et peut, ou non, être trans­mis au sein de la popu­la­tion hôte. C’est un phé­no­mène bien décrit depuis les années 2000. Ici la popu­la­tion réser­voir semble être com­po­sée de chau­ve­sou­ris et la popu­la­tion hôte finale les humains.

L’Organisation mon­diale pour la san­té (OMS) fait une confé­rence de presse le 11 février 2020 pour faire le point sur le virus 2019-nCoV et nomme la mala­die le Covid-19, le virus sera renom­mé SRAS-CoV‑2. « En ver­tu de direc­tives conve­nues entre l’OMS, l’Organisation mon­diale de la san­té ani­male et l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, nous devions trou­ver une appel­la­tion qui ne fai­sait pas réfé­rence à un lieu géo­gra­phique, à un ani­mal, à une per­sonne ou à un groupe de per­sonnes, et qui est par ailleurs facile à pro­non­cer et liée à la mala­die. Avoir un nom est quelque chose de très impor­tant, pour évi­ter que d’autres noms qui pour­raient être impré­cis ou sus­cep­tibles de stig­ma­ti­ser soient uti­li­sés. Cette appel­la­tion nous donne éga­le­ment un for­mat stan­dard uti­li­sable pour toute future flam­bée de coro­na­vi­rus4. »

Au moment de ce com­mu­ni­qué, on recense 42708 cas et 1017 décès, dont 393 cas et 1 décès en dehors de la Chine. Le com­mu­ni­qué annonce la mobi­li­sa­tion de l’OMS sur ce qui est appe­lé une pos­si­bi­li­té de « future flam­bée » pour se concen­trer sur la « riposte », quatre-cents scien­ti­fiques du monde entier sont réunis en per­sonne et vir­tuel­le­ment dans un forum pour éta­blir « une feuille de route sur les ques­tions que nous devons nous poser, et sur la manière dont nous allons y répondre ». À noter, que le com­mu­ni­qué com­mence par rap­pe­ler qu’il ne fau­drait pas oublier l’épidémie Ebo­la tou­jours en cours en Afrique centrale…

Du bruit de fond au confinement

Tout cela pour moi était un petit bruit de fond à peine per­cep­tible. Je suis pro­fes­seur de phy­sique à l’université et spé­cia­li­sé dans la modé­li­sa­tion des sys­tèmes com­plexes à l’interface avec les sciences du vivant et la science de la sou­te­na­bi­li­té. Les ques­tions médi­cales sont éloi­gnées de mes recherches. Sauf que dans les sys­tèmes com­plexes, il y a aus­si les modèles mathé­ma­tiques uti­li­sés en épi­dé­mio­lo­gie. Les modèles les plus simples sont des cas d’école que nous ensei­gnons dans les cours de modé­li­sa­tion mathé­ma­tique. Ce sont les modèles appe­lés SIR, SIS ou encore SEIRS, c’est-à-dire des modèles com­par­ti­men­taux uti­li­sé en épi­dé­mio­lo­gie5. Des ver­sions de ces modèles prennent en compte la pyra­mide des âges, les réseaux de contacts entre per­sonnes et une spa­tia­li­sa­tion géo­gra­phique. Donc, je connais des col­lègues phy­si­ciens qui sont spé­cia­listes de ces modèles en épi­dé­mio­lo­gie, ils sont sur le front de la pan­dé­mie Covid-19. Tra­vaillant à l’interface avec les sciences du vivant, j’ai aus­si des col­lègues bio­lo­gistes ou viro­logues qui, pour cer­tains, sont concer­nés par le Covid-19. Les réseaux sociaux de scien­ti­fiques, sur Face­book, Twit­ter, mes­sa­ge­ries et par cour­riel com­mencent à bruis­ser, d’abord en mur­mure puis pro­gres­si­ve­ment en fan­fare et enfin en vacarme pour finir en caco­pho­nie où le public en géné­ral, les médias en par­ti­cu­lier et les scien­ti­fiques, tous com­mu­niquent dans tous les sens. Comme disent les phy­si­ciens, ou les ingé­nieurs, le rap­port signal sur bruit, qui com­pare le niveau d’un signal sou­hai­té au niveau du bruit de fond, se dégrade rapidement.

L’affaire est grave, la pan­dé­mie se répand et les règles de confi­ne­ment se mettent en place. Me voi­là chez moi face à mon ordi­na­teur pour les cours qui sont sup­po­sés pas­ser en ligne, du jour au len­de­main, une farce du fonc­tion­ne­ment de plus en plus pro­blé­ma­tique de notre socié­té néo­li­bé­rale. De mon ordi­na­teur, sur­git aus­si le vacarme des réseaux sociaux.

Dis­tan­cia­tion phy­sique et rap­pro­che­ment social. Nous devons évi­ter les contacts phy­siques pour endi­guer l’épidémie, mais aus­si mettre en place des soli­da­ri­tés et faire un rap­pro­che­ment social, même vir­tuel, pour main­te­nir notre bateau face à la tem­pête, évi­ter que les membres d’équipages ou les pas­sa­gers ne tombent à la mer et dis­pa­raissent à jamais. Rap­pro­che­ment social sur les réseaux où le brou­ha­ha à pro­pos de l’épidémie com­mence à deve­nir assour­dis­sant. Je reçois de plus en plus de mes­sages, des col­lègues qui sentent le besoin de « gar­der l’église au milieu du vil­lage », main­te­nir « une infor­ma­tion de qua­li­té », une cer­taine « ratio­na­li­té » et un contact avec le réel face à l’adversité qui frappe fort.

Le virus SRAS-CoV‑2 sur­ligne la farce de res­ter en ligne et d’assurer la conti­nui­té du tra­vail aca­dé­mique, les cours et la recherche. Comme si nous étions tous, ensei­gnants et étu­diants, bien équi­pés pour faire cela du jour au len­de­main. Le virus sur­ligne les sou­haits de la machine mana­gé­riale de l’université qui agit sou­dai­ne­ment beau­coup et pense de moins en moins. Car l’université est mal en point, les réformes s’accumulent depuis des années, toutes gui­dées par l’idéologie néo­li­bé­rale et ses ava­tars managériaux.

Tout juste avant la pan­dé­mie, l’université fran­çaise est en ébul­li­tion, elle mani­feste, péti­tionne, écrit tri­bune sur tri­bune, fait grève contre les nou­velles réformes de l’université et de la recherche qui vont se mettre en place. La nou­velle loi de pro­gram­ma­tion plu­ri­an­nuelle de la recherche pré­voit d’approfondir ce que beau­coup consi­dèrent comme l’aggravation des dys­fonc­tion­ne­ments de la recherche et de l’enseignement supé­rieur, des condi­tions de tra­vail et de ser­vice public. Les cher­cheurs passent un temps consi­dé­rable à écrire et sou­mettre des pro­jets de recherche pour obte­nir des finan­ce­ments avec des taux de réus­site infé­rieurs à 10%. La recherche sur pro­jet défa­vo­rise dras­ti­que­ment l’interdisciplinarité, favo­rise les pro­jets consen­suels et les effets de mode, péna­lise le long terme. Cette méthode sou­met les cher­cheurs à une concur­rence exa­cer­bée et délé­tère vu qu’ils sont juges et par­ties de ces concours qui deviennent pipés. La nou­velle loi veut ren­for­cer l’évaluation des cher­cheurs, en péna­li­sant les sup­po­sés mau­vais, et des ins­ti­tu­tions, en péna­li­sant les sup­po­sées mau­vaises. Pour ce faire, des cri­tères biblio­mé­triques seront uti­li­sés. Plus que jamais, les publi­ca­tions scien­ti­fiques servent plus comme outil pour se faire valoir dans les éva­lua­tions que pour com­mu­ni­quer et par­ta­ger des résul­tats scien­ti­fiques. Les dys­fonc­tion­ne­ments de la science s’accumulent, dévoie­ment du sys­tème d’évaluation par les pairs, mau­vaise foi des éva­lua­teurs, réten­tions de don­nées, vol d’idées et de sujets de recherche, tri­che­ries et fal­si­fi­ca­tions des résul­tats, publi­ca­tions plé­tho­riques aux résul­tats faibles ou encore sau­cis­son­nages des résul­tats en de mul­tiples publi­ca­tions. Le virus va sur­li­gner tous ces défauts.

Sou­dain, le SRAS-CoV‑2 sur­ligne que nous avons besoin de science pour faire face à l’urgence, que nous avons besoin de la recherche publique, de col­la­bo­rer, de par­ta­ger ouver­te­ment les résul­tats, les don­nées, les méthodes. Le dogme de la concur­rence est sou­dain malade du virus qui prend plai­sir à sur­li­gner l’intérêt majeur de la coopé­ra­tion et du par­tage. Les scien­ti­fiques tra­vaillent et pro­duisent sou­dai­ne­ment beau­coup de publi­ca­tions, d’une part, car c’est néces­saire et, d’autre part, car c’est une oppor­tu­ni­té à sai­sir pour avoir des publi­ca­tions qui sont très valo­ri­santes. On remarque ceux qui jouent des coudes, l’empressement à pro­duire, les don­nées qui manquent, les études ban­cales et l’information à géo­mé­trie variable. La science néo­li­bé­rale et ses tur­pi­tudes se font en direct sur la place publique et les que­relles entre scien­ti­fiques pour se pla­cer aus­si. Tout cela est connu, le virus ne vient que le sur­li­gner et l’amplifier, on pour­ra suivre ce type de tur­pi­tudes sur un site comme Retrac­tion Watch6.

Virus, mélanges et modes de vie humains

Cepen­dant, tout n’est pas mau­vais, une large majo­ri­té de scien­ti­fiques conti­nuent de tra­vailler cor­rec­te­ment, tant bien que mal, mal­gré l’adversité et la dété­rio­ra­tion du sys­tème de la recherche publique. Par ailleurs, les médias grand public semblent être deve­nus une caisse de réso­nance de ma boite e‑mail, c’est qu’il y a de l’info scien­ti­fique qui se fabrique en direct, c’est impor­tant vu la pan­dé­mie, et les jour­na­listes suivent cela, à juste titre, comme le lait sur le feu. Ma boite e‑mail tinte avec les mes­sages qui arrivent : alors chau­ve­sou­ris ou pangolin ?

Les tech­niques de bio­lo­gie molé­cu­laire sont au point, pour l’essentiel, et les équipes chi­noises en pre­mière ligne sont équi­pées et com­pé­tentes. Une ana­lyse ren­due publique sur bioRxiv, un site de col­lecte et publi­ca­tion de pre­prints en bio­lo­gie, le 20 février 2020, fait état de l’isolation et la carac­té­ri­sa­tion d’un virus 2019-nCov dans des pan­go­lins de Malai­sie7. L’équipe Kang­peng Xiao et col­la­bo­ra­teurs fait état de res­sem­blance de 90,4 à 100% pour les gènes E, M, N et S entre les virus iso­lés chez les pan­go­lins et le 2019-nCov (SRAS-CoV‑2 en déno­mi­na­tion actuelle). En par­ti­cu­lier, le gène S code pour une pro­téine Spike8, qui est celle qui fait la « cou­ronne » du virus, avec un domaine d’environ 193 acides ami­nés, qui est res­pon­sable de la recon­nais­sance et de la liai­son à des récep­teurs de sur­face cel­lu­laire et contri­bue à l’entrée du virus dans les cel­lules hôtes. Ces études montrent que le coro­na­vi­rus iso­lé du pan­go­lin est simi­laire à 99% dans une région spé­ci­fique de la pro­téine S, qui cor­res­pond au domaine de liai­son du récep­teur de l’ECA (enzyme de conver­sion de l’angiotensine 2), celui qui per­met au virus de péné­trer dans les cel­lules humaines pour les infec­ter. Par contre, le virus RaTG13 iso­lé de la chau­ve­sou­ris R. affi­nis est très divergent dans cette région spé­ci­fique (seule­ment 77 % de simi­la­ri­té). Cela signi­fie que le coro­na­vi­rus iso­lé du pan­go­lin est capable de péné­trer dans les cel­lules humaines alors que celui iso­lé de la chau­ve­sou­ris R. affi­nis pénè­tre­rait très dif­fi­ci­le­ment. Ces com­pa­rai­sons géno­miques sug­gèrent que le virus SRAS-CoV‑2 est le résul­tat d’une recom­bi­nai­son entre deux virus dif­fé­rents, l’un proche de RaTG13 et l’autre plus proche du virus pan­go­lin. En d’autres termes, il s’agit d’une chi­mère entre deux virus pré­exis­tants. En 2010, ce méca­nisme de recom­bi­nai­son avait déjà été décrit dans les coro­na­vi­rus, en par­ti­cu­lier pour expli­quer l’origine du SRAS-CoV res­pon­sable de l’épidémie de SRAS en 20109. Il est impor­tant de savoir quelle recom­bi­nai­son donne nais­sance à un nou­veau virus poten­tiel­le­ment capable d’infecter une nou­velle espèce hôte. Pour que la recom­bi­nai­son ait lieu, les deux virus diver­gents doivent avoir infec­té le même orga­nisme simul­ta­né­ment. Des ques­tions res­tent sans réponse : dans quel orga­nisme cette recom­bi­nai­son a‑t-elle eu lieu ? Une chau­ve­sou­ris, un pan­go­lin ou une autre espèce ? Et sur­tout, dans quelles condi­tions cette recom­bi­nai­son a‑t-elle eu lieu ? Com­ment tout cela est ensuite pas­sé à l’humain ?

En quelques semaines après le début de l’épidémie, les scien­ti­fiques ont mon­tré qu’une invrai­sem­blable ména­ge­rie d’animaux sau­vages, qui s’échangent des virus qui se recom­binent et passent ensuite aux humains, est la cause de l’apparition de cette pan­dé­mie humaine de Covid-19. L’humanité se frotte de trop près et trop mal à des espèces sau­vages, c’est le cas pour le Covid-19 et c’est aus­si le cas pour les épi­dé­mies Ebo­la en cours en Afrique cen­trale. Ce n’est pas nou­veau nous le savons scien­ti­fi­que­ment, avec pré­ci­sion, depuis le début des années 2000. Le virus sur­li­gneur vient nous deman­der de ne plus l’oublier, ou alors, cela sera encore à nos risques et périls. Car les épi­dé­mio­lo­gistes qui suivent les inter­ac­tions entre épi­zoo­ties (épi­dé­mies qui frappent les ani­maux) et épi­dé­mies humaines montrent qu’il existe deux sources impor­tantes de fabri­ca­tion de nou­veaux patho­gènes humains, l’élevage inten­sif et les nou­veaux contacts avec la nature sau­vage10.

Les orga­nismes infec­tieux qui se pro­pagent avec suc­cès dépendent des bar­rières et des oppor­tu­ni­tés qu’une socié­té humaine pré­sente à ces agents patho­gènes cir­cu­lants. Il semble, d’après les études phy­lo­gé­né­tiques, que pen­dant la plus grande par­tie de son his­toire, Vibrio cho­le­rae a vécu avec le planc­ton dans le del­ta du Gange. Ce n’est que lorsque l’humanité est pas­sée à la séden­ta­ri­té urbaine, à la tran­si­tion du Néo­li­thique avec l’établissement des popu­la­tions agraires dans la val­lée de l’Indus, que la bac­té­rie du cho­lé­ra a déve­lop­pé un éco­type explo­sif spé­ci­fique à l’homme. Plus tard, au XIXe siècle, lorsque le com­merce inter­na­tio­nal et les trans­ports se sont inten­si­fiés, le cho­lé­ra est deve­nu pan­dé­mique. À la fin des années 1960 et au cours des années 1970, les virus de l’immunodéficience simienne n’ont émer­gé de leurs réser­voirs cata­rhi­niens (clade de pri­mates regrou­pant les espèces tra­di­tion­nel­le­ment dési­gnées comme étant les « singes ») sous forme de VIH que lorsque l’expropriation (néo)coloniale a trans­for­mé la viande de brousse de sub­sis­tance et le com­merce sexuel urbain en mar­chan­dises à l’échelle indus­trielle. Les stocks d’animaux domes­tiques ont ser­vi de sources pour la diph­té­rie, la grippe, la rou­geole, les oreillons, la peste, la coque­luche, le rota­vi­rus A, la tuber­cu­lose, la mala­die du som­meil et la leish­ma­niose vis­cé­rale. Les chan­ge­ments éco­lo­giques résul­tant de l’intervention humaine ont sélec­tion­né, par conta­gion de débor­de­ment, le palu­disme et la fièvre jaune.

Des inno­va­tions dans les méthodes agri­coles et indus­trielles, l’accélération des chan­ge­ments démo­gra­phiques et des nou­velles implan­ta­tions, fabriquent de nou­velles séries de conta­gions par débor­de­ment. Les socié­tés humaines actuelles conti­nuent à fabri­quer des pan­dé­mies parce qu’elles négligent, ce que la science nous apprend, le fait que les humains ne sont pas que des indi­vi­dus, mais sont des colo­nies hété­ro­gènes d’organismes en contact avec d’autres éco­sys­tèmes. Si ces contacts, qui résultent des modes de fonc­tion­ne­ment socioé­co­no­miques, sont trop directs, trop bru­taux, mal pré­pa­rés alors le pire est à craindre. Les socié­tés humaines ne sont pas seule­ment humaines, elles sont des maillons du sys­tème Terre. Quand elles n’en tiennent pas compte, elles favo­risent des crises éco­lo­giques qui les détruisent. Le Covid-19, ce n’est pas seule­ment l’apparition natu­relle du coro­na­vi­rus SRAS-CoV‑2, c’est aus­si une fabri­ca­tion sociale d’un sys­tème éco­no­mique pla­né­taire qui tra­vaille en flux ten­dus et rapides. Les mar­chan­dises et les humains en quelques heures ou jours tra­versent le monde, accom­pa­gnés par les virus.

Des modèles et de l’approximation

Pen­dant ce temps, du côté des modèles mathé­ma­tiques, les articles et les vidéos expli­ca­tives grand public se mul­ti­plient, le public (re)découvre d’abord la fonc­tion expo­nen­tielle et ensuite sa repré­sen­ta­tion en échelle loga­rith­mique. Ce qui est éton­nant, c’est la caco­pho­nie qui s’installe et le fait que cer­tains mes­sages, pas néces­sai­re­ment les plus per­ti­nents, s’imposent.

Car, une autre épi­dé­mie se déve­loppe, celle de cer­tains phy­si­ciens, ou autres scien­ti­fiques capables d’utiliser des outils mathé­ma­tiques, qui construisent une petite indus­trie arti­sa­nale de blogs, de publi­ca­tions Lin­ke­dIn et même d’articles arXiv11 avec leurs meilleures ten­ta­tives de modé­li­sa­tion de la pro­pa­ga­tion de la mala­die, avec peu ou pas de com­pré­hen­sion de la dyna­mique sous-jacente à la pro­pa­ga­tion d’une épi­dé­mie. Cer­taines publi­ca­tions de phy­si­ciens sont mises en exergue et moquées par d’autres phy­si­ciens spé­cia­listes pour dénon­cer leur inep­tie fri­sant la cari­ca­ture ou étant l’égale d’une publi­ca­tion paro­dique. Il y a de l’ambiance dans la com­mu­nau­té des modé­li­sa­teurs et cela pétille sur les réseaux sociaux. Tout cela serait insi­gni­fiant, ou comique, si ce n’est que ces bruits pro­ve­nant de la com­mu­nau­té scien­ti­fique peuvent avoir d’importantes réper­cus­sions dans le grand public pen­dant une grave épidémie.

Un sché­ma et un concept vont s’imposer, au point de deve­nir un mème de la pan­dé­mie Covid-19 : « apla­tir la courbe » (flat­te­ning the curve)12, ce sché­ma sera repris par pra­ti­que­ment tous les médias et nombre de per­son­na­li­tés. Le mes­sage est simple, la pan­dé­mie est repré­sen­tée par l’évolution du nombre d’infectés au cours du temps qui forme une grande courbe en forme de cloche avec une très forte crois­sance au début (« expo­nen­tielle »). Si le maxi­mum d’infectés, le pic de la courbe, dépasse lar­ge­ment la capa­ci­té d’accueil des ser­vices des urgences médi­cales alors le sys­tème hos­pi­ta­lier ne peut plus répondre à la demande, voire s’effondre. Il est donc pri­mor­dial de faire bais­ser ce maxi­mum donc « d’aplatir la courbe » pour ne pas atteindre la satu­ra­tion des hôpi­taux et donc une catas­trophe sani­taire. Ce mes­sage est tout à fait impor­tant et cor­rect, le sché­ma est simple à comprendre.

Tou­te­fois, il y a une ambigüi­té dans le sché­ma et dans cer­tains dis­cours qui arrivent à la conclu­sion que le nombre d’infectés reste le même, car « la sur­face sous la courbe est la même », mais le pic est plus bas car le total est plus éta­lé dans le temps. Cet étrange argu­ment mathé­ma­tique devient pour beau­coup une véri­té et une fata­li­té pour cer­tains : quoi que l’on fasse le nombre d’infectés reste le même. Or, rien n’est moins sûr et rien ne per­met de l’affirmer comme étant une fata­li­té. Il est impor­tant de com­prendre que l’on peut lut­ter contre l’épidémie pour dimi­nuer le nombre de per­sonnes infec­tées, et donc apla­tir la courbe, mais aus­si dimi­nuer le nombre total de per­sonnes infec­tées et donc le nombre de victimes.

Les modé­li­sa­tions approxi­ma­tives ou à l’emporte-pièce peuvent avoir des impli­ca­tions non négli­geables. Ce qui m’étonne dans cette caco­pho­nie scien­ti­fique ambiante c’est que le bon, le moins bon, le mau­vais, voire le très mau­vais, se mélangent et finissent par fil­trer dans les médias grand public. Mon autre éton­ne­ment est que beau­coup de ce qui est dis­cu­té sont des résul­tats des modèles les plus simples, ceux que j’enseigne. Non pas que l’on ne puisse pas en tirer d’importants ensei­gne­ments sur les épi­dé­mies, mais je me gar­de­rais bien de géné­ra­li­ser ces résul­tats à un cas réel et com­pli­qué d’épidémie avec un nou­veau virus que l’on découvre au fur et à mesure. Un tra­vail plus sérieux et indis­pen­sable est réa­li­sé par les spé­cia­listes avec des ana­lyses de don­nées et des modèles plus éla­bo­rés. Les spé­cia­listes sont satu­rés de tra­vail vu le dérou­le­ment de l’épidémie et les demandes d’explications soit pour des ins­tances offi­cielles soit pour cer­tains médias. Ils n’ont pas le temps d’assurer l’intendance d’une bonne com­mu­ni­ca­tion scien­ti­fique en par­ti­cu­lier sur les réseaux sociaux.

L’idée, fausse, que de toute façon le nombre d’infectés serait le même est aus­si indi­rec­te­ment liée au concept « d’immunité de groupe ou col­lec­tive » (herd immu­ni­ty) qui devient un point du débat public. Cer­tains États, dont le Royaume Uni ou la Suède, pensent que plu­tôt que de confi­ner les gens et donc de for­te­ment ralen­tir l’activité éco­no­mique, il faut lais­ser la vague de conta­mi­na­tion pas­ser et lais­ser la popu­la­tion dans son ensemble acqué­rir une immu­ni­té de groupe. Ce qui veut dire qu’un nombre impor­tant de gens auraient été infec­tés, se seraient réta­blis et pré­sen­te­raient ensuite une immu­ni­té natu­relle face à la mala­die. Les gens immu­ni­sés, quand ils sont très nom­breux, vont for­te­ment ralen­tir voire arrê­ter la pro­pa­ga­tion du virus. Mais ce que montrent les modèles, c’est que pour atteindre cette « immu­ni­té de groupe », cela dépend du taux de conta­gion du virus. Comme ce taux de conta­gion est entre deux et quatre pour le SRAS-CoV‑2, il se peut qu’il soit néces­saire que près de 70 % de la popu­la­tion soit infec­tée. Consi­dé­rant que le taux de mor­ta­li­té du Covid-19 est plus éle­vé que celui de la grippe cela repré­sente poten­tiel­le­ment des dizaines de mil­liers de décès et une satu­ra­tion catas­tro­phique des hôpi­taux. Cette stra­té­gie est donc une folie en termes de risque de vic­times. Indé­pen­dam­ment de cela, il est pos­sible de construire une immu­ni­té col­lec­tive par des cam­pagnes de vac­ci­na­tion, si un vac­cin est dis­po­nible, ce qui n’est pas le cas quand le virus est nou­veau. Pour ce faire, il fau­dra attendre la décou­verte d’un vac­cin pour le SRAS-CoV‑2.

Les résul­tats des modé­li­sa­teurs sont inter­pré­tés de manière dif­fé­rente en fonc­tion des sen­si­bi­li­tés poli­tiques des acteurs et des lec­teurs. Nous le savions déjà, mais le virus vient sur­li­gner que la science n’est pas néces­sai­re­ment neutre ni apo­li­tique. Le groupe de Neil Fer­gu­son à l’Imperial Col­lege de Londres publie sur le site de l’université un rap­port13 qui a beau­coup d’influence para­doxa­le­ment à la fois sur les défen­seurs de « l’immunité de groupe » et sur ceux qui recom­mandent des mesures dras­tiques de dis­tan­cia­tion sociale. On remar­que­ra aus­si que les modé­li­sa­teurs de la sphère anglo­phone (Royaume-Uni et États-Unis) ont plus d’influence, au moins média­tique, que les modé­li­sa­teurs fran­çais, belges ou ita­liens qui font aus­si un excellent tra­vail. Or ces pays ont une culture poli­tique plus libé­rale que les autres, ils sont plus enclins au lais­ser-faire et à une cer­taine concep­tion de la « Nature » sou­vent influen­cée par des inter­pré­ta­tions dis­cu­tables du dar­wi­nisme. Cela me donne aus­si l’occasion de me dis­pu­ter sur les réseaux avec les col­lègues sur l’influence qui est faite des concep­tions poli­tiques et cultu­relles sur la science qui est faite. Ce n’est pas nou­veau, c’est bien docu­men­té en his­toire et phi­lo­so­phie des sciences, le virus vient le sur­li­gner, de même qu’il met en évi­dence la naï­ve­té qui per­dure chez beau­coup de scien­ti­fiques sur ces sujets.

Le rap­port de Fer­gu­son s’appuie sur des modé­li­sa­tions mathé­ma­tiques, ce sont des tra­vaux non pas de pré­vi­sion, mais de pros­pec­tive basée sur des scé­na­rios qua­li­ta­tifs et quan­ti­ta­tifs. Cette nuance échappe encore à beau­coup de scien­ti­fiques. Ce n’est pas spé­ci­fique à l’épidémiologie, dans mes tra­vaux de recherche sur la tran­si­tion éner­gie-cli­mat cette dis­cus­sion est aus­si vive. Les modèles cli­ma­tiques servent-ils à faire des pré­dic­tions ou servent-ils à faire des scé­na­rios de pros­pec­tive ? Cette nuance pour­rait paraitre ano­dine au pro­fane, mais d’un côté on risque de tom­ber dans la fata­li­té et donc le lais­ser-faire et d’un autre côté l’avenir est ouvert et à construire et dépend for­te­ment de nos décisions.

Une polé­mique sur les réseaux s’engage entre modé­li­sa­teurs spé­cia­listes sur la for­mu­la­tion des hypo­thèses prises en compte par Fer­gu­son. Un groupe diri­gé par Nas­sim Taleb (auteur du livre Black Swan) note le refus de l’équipe de Fer­gus­son d’enquêter sur les condi­tions dans les­quelles le virus peut être conduit à l’extinction. Une telle extinc­tion ne signi­fie pas zéro cas, mais un iso­le­ment suf­fi­sant pour que des cas iso­lés ne pro­duisent pas de nou­velles chaines d’infection. Taleb et ses col­la­bo­ra­teurs sou­lignent que le modèle qu’ils uti­lisent semble appar­te­nir à la classe géné­rale des modèles simples SIR et n’est donc pas bien adap­té à l’intégration des condi­tions du monde réel à petite ou grande échelle. Ces condi­tions com­prennent des dyna­miques locales inter­ac­tives signi­fi­ca­tives et des res­tric­tions de voyage qui ne peuvent pas être vues à par­tir de quan­ti­tés ou de moyennes agré­gées entre des lieux géo­gra­phiques, des dis­tri­bu­tions non gaus­siennes du nombre d’infections par per­sonne (évè­ne­ments de super pro­pa­ga­tion) ain­si que la période d’infection, et des valeurs dyna­miques ou sto­chas­tiques de para­mètres qui pro­viennent de varia­tions dans l’échantillonnage des dis­tri­bu­tions ain­si que l’impact des efforts de réponse sociale chan­geants. L’équipe de Taleb estime que bien que le modèle Fer­gus­son com­prenne des détails sur la conta­gion et les options de réponse, il est à plu­sieurs degrés d’abstraction de ce qui est jus­ti­fié par la situa­tion. Le groupe de Fer­gus­son est pour­tant très influent. Il influence le gou­ver­ne­ment du Royaume-Uni et d’autres pays. La dis­cus­sion au sujet du rap­port Fer­gu­son est en plein dans ces débats sur les liens entre science, poli­tique et pré­sup­po­sés cultu­rels. Au-delà des hypo­thèses dis­cu­tables faites dans la modé­li­sa­tion pré­sen­tée, il n’est donc pas sur­pre­nant que le même rap­port puisse être uti­li­sé pour défendre des points de vue opposés.

Enrayer l’épidémie

Tou­te­fois, avec quelques col­lègues, nous concluons qu’il faut ren­for­cer le mes­sage que des actions peuvent et doivent être prises non pas pour seule­ment « apla­tir la courbe », mais enrayer l’épidémie et dimi­nuer le nombre de conta­gions et de vic­times. Des tri­bunes14 seront écrites à ce sujet sur les réseaux sociaux ou dans des jour­naux. Le para­mètre clé est le taux de conta­gion qui est tech­ni­que­ment appe­lé R0 par les spécialistes.

Le taux R0 indique com­bien de per­sonnes sont, en moyenne, conta­mi­nées par un malade du Covid-19. Si ce taux R0 est infé­rieur à 1, l’épidémie se dis­sipe, au contraire si R0 est supé­rieur à 1 l’épidémie pour­suit selon une pro­gres­sion « expo­nen­tielle » plus ou moins rapide. Le R0 du SRAS-CoV‑2 est esti­mé être entre deux et quatre en Europe. Un R0 de quatre signi­fie, qu’en moyenne, chaque infec­té conta­mine quatre per­sonnes, qui elles-mêmes conta­minent quatre per­sonnes et ain­si de suite. Or il ne faut que douze à seize jours pour avoir quatre cycles de conta­mi­na­tion pour le SRAS-CoV‑2. La conta­mi­na­tion est donc explo­sive et le nombre d’infectés croît de manière dite « expo­nen­tielle ». Ici je n’ai pas la place de dis­cu­ter tech­ni­que­ment si c’est vrai­ment une fonc­tion mathé­ma­tique expo­nen­tielle ou pas, la réponse courte est non. La fonc­tion expo­nen­tielle n’est qu’une approxi­ma­tion sous cer­taines condi­tions et seule­ment pen­dant la phase de début.

Mais si ce coef­fi­cient R0 est infé­rieur à un : chaque infec­té ne trans­met­tant en moyenne la mala­die qu’à moins d’une per­sonne, le nombre total de malades dimi­nue­ra à chaque cycle de conta­mi­na­tion et pro­gres­si­ve­ment l’épidémie s’éteindra avec un nombre moins éle­vé de malades au total et donc de décès asso­ciés. Le taux de trans­mis­sion R0 d’un virus n’est pas une pro­prié­té uni­que­ment bio­lo­gique. Ce taux dépend de dif­fé­rents fac­teurs phy­siques et bio­lo­giques que nous ne pou­vons pas contrô­ler. Cepen­dant, il dépend aus­si de fac­teurs sociaux que nous pou­vons contrô­ler par des mesures comme l’hygiène, la dis­tan­cia­tion phy­sique (« sociale ») et notre capa­ci­té à iso­ler les per­sonnes infec­tées par le SRAS-CoV‑2. Il varie donc d’une socié­té à l’autre en fonc­tion des normes sociales. Il est pos­sible de chan­ger l’issue de l’épidémie en pre­nant des mesures sociales limi­tant suf­fi­sam­ment la transmission.

L’enjeu est donc de frap­per vite et fort pour bais­ser le niveau de trans­mis­sion d’un nou­veau virus pour lequel il n’existe aucune immu­ni­té natu­relle chez les humains. Tout cela est connu et dans la caco­pho­nie ambiante l’important est que ce mes­sage s’impose à la fois chez les diri­geants et dans la population.

Que m’apprend, à chaud, cette pan­dé­mie ? Fina­le­ment, du point de vue scien­ti­fique, je ne suis pas sur­pris. Je constate que ce qui est dit dans la lit­té­ra­ture scien­ti­fique depuis des années, par­fois depuis ma thèse de doc­to­rat dans les années 1990, est cor­rect. Ce qui se passe est atten­du et pré­vi­sible. Ce qui n’est pas pré­vi­sible c’est le moment où l’épidémie arrive et la viru­lence du patho­gène, pour le reste j’ai l’impression de lire un scé­na­rio écrit de longue date dans la lit­té­ra­ture scien­ti­fique. C’est en par­tie ras­su­rant, car du côté des savoirs scien­ti­fiques, nous ne sommes pas com­plè­te­ment pris au dépour­vu et les labo­ra­toires com­pé­tents sont immé­dia­te­ment et inten­sé­ment au tra­vail. Du point de vue géo­po­li­tique, c’est une autre affaire, il faut apprendre à prendre des déci­sions à l’échelle pla­né­taire et sur des échelles de temps très diverses qui vont du très court terme à la longue durée. La grande dif­fi­cul­té pro­vient de l’impact signi­fi­ca­tif des déci­sions sur le fonc­tion­ne­ment socioé­co­no­mique de nos sociétés.

Le virus vient sur­li­gner notre grande impré­pa­ra­tion poli­tique à gérer ces grands risques connus et bien docu­men­tés, pas seule­ment du côté du pou­voir poli­tique, mais aus­si du côté scien­ti­fique. Cette invrai­sem­blable caco­pho­nie des scien­ti­fiques m’étonne d’autant qu’elle est for­te­ment ampli­fiée par les moyens de com­mu­ni­ca­tion rapides tels que les réseaux sociaux et autres mes­sa­ge­ries en tout genre. Nous avons aus­si été pris de court et il aurait fal­lu pré­pa­rer des outils d’analyse, mais aus­si des outils effi­caces de com­mu­ni­ca­tion scien­ti­fique. Pen­dant que les spé­cia­listes sont satu­rés de tra­vail et ont peu de temps, d’autres scien­ti­fiques envoient des mes­sages contra­dic­toires, par­fois même faux, qui brouillent la com­mu­ni­ca­tion et favo­risent toutes les dérives et fantasmes.

D’ailleurs je reçois un nou­veau cour­riel, ce virus ne se serait-il pas échap­pé d’un labo­ra­toire de haute sécu­ri­té qui tra­vaille sur les patho­gènes très viru­lents ? Le SRAS-CoV‑2 serait-il une fabri­ca­tion de labo­ra­toire ? L’institut de viro­lo­gie de Wuhan est proche du mar­ché des fruits de mer et a mené des recherches sur les virus, y com­pris les coro­na­vi­rus, trou­vés chez les chau­ve­sou­ris et sus­cep­tibles de pro­vo­quer des mala­dies chez l’homme. En 2013, nous avions déjà aler­té sur la pro­li­fé­ra­tion de ce genre de labo­ra­toire dans des zones den­sé­ment peu­plées et des risques asso­ciés15. Notre publi­ca­tion fai­sait suite aux tra­vaux, très polé­miques, de l’équipe de Ron Fou­chier (centre médi­cal Érasme, Rot­ter­dam) et de Yoshi­hi­ro Kawao­ka (uni­ver­si­té du Wis­con­sin) en 2012 et por­tant sur la réa­li­sa­tion de muta­tions arti­fi­cielles en labo­ra­toire pour tes­ter les gains de fonc­tion du virus de la grippe H1N1. Le Natio­nal Science Advi­so­ry Board for Bio­se­cu­ri­ty (NSABB) du minis­tère de la San­té des États-Unis avait sou­le­vé la polé­mique en décembre 2011, sur fond de bio­ter­ro­risme, en deman­dant aux revues Nature et Science de ne pas divul­guer les résul­tats des tra­vaux au nom des risques qu’ils fai­saient encou­rir à la popu­la­tion. Le NSABB avait fina­le­ment accep­té la publi­ca­tion des deux articles polé­miques. Déjà en 2008, l’équipe de Mark R. Deni­son, un cher­cheur phare des coro­na­vi­ri­dae aux États-Unis, avait réa­li­sé des tra­vaux pour tes­ter une éven­tuelle voie d’émergence du Bat-SCoV (chau­ve­sou­ris) vers le SARS-CoV humain16. Ils ont conçu une construc­tion à par­tir du génome du Bat-SCoV et rem­pla­cé le Bat-SCoV Spike recep­tor-bin­ding domain (RBD) par le SARS-CoV RBD (Bat-SRBD). Ils pré­sentent la concep­tion et la syn­thèse d’un coro­na­vi­rus (Bat-SCoV) sem­blable à celui du syn­drome res­pi­ra­toire aigu sévère (SRAS) chez la chau­ve­sou­ris, un pré­cur­seur pro­bable de l’épidémie humaine de SARS-CoV.

Ces tra­vaux font écho aux dis­cus­sions actuelles concer­nant l’origine des pro­téines Spike du SRAS-CoV‑2. L’hypothèse de sor­tie d’un labo­ra­toire n’est donc pas si far­fe­lue même si ces recherches très contro­ver­sées sont décou­ra­gées voire par­fois inter­dites de nos jours car elles sont consi­dé­rées comme trop dangereuses.

Les ana­lyses géno­miques per­mettent de répondre à cette ques­tion par com­pa­rai­son du génome du virus avec tous les virus connus dans les bases de don­nées et, par ailleurs, la struc­ture elle-même du génome donne des indi­ca­tions sur l’origine natu­relle des muta­tions ou du génie géné­tique. Des équipes de bio­lo­gistes et de viro­logues évo­lu­tion­nistes, de plu­sieurs pays, ont ana­ly­sé le virus à la recherche d’indices indi­quant s’il pou­vait avoir été créé par l’homme, ou culti­vé dans un labo­ra­toire et libé­ré acci­den­tel­le­ment. Leur conclu­sion sou­ligne l’origine natu­relle du génome du virus qui n’est donc pas le résul­tat d’une construc­tion de labo­ra­toire17. Cette ana­lyse a mon­tré que la par­tie « cro­chet » de la pro­téine Spike qui sert au virus à s’ancrer sur les cel­lules hôtes avait évo­lué pour cibler un récep­teur à l’extérieur des cel­lules humaines appe­lé ACE2, qui est impli­qué dans la régu­la­tion de la pres­sion arté­rielle. Il est si effi­cace pour s’attacher aux cel­lules humaines que les cher­cheurs ont décla­ré que les pro­téines du pic étaient le résul­tat de la sélec­tion natu­relle et non du génie génétique.

Pen­dant tout ce temps, une intense acti­vi­té de pro­duc­ti­visme scien­ti­fique est en cours. Au 4 avril 2020, je recense 1229 articles à pro­pos du Covid-19 ou du SARS-CoV‑2 sur les archives d’articles « pre­prints » de medRxiv and bioRxiv (872 medRxiv, 257 bioRxiv). Une simple recherche « Covid-19 » sur la base de don­nées biblio­gra­phique PubMed.gov de la US Natio­nal Libra­ry of Medi­cine donne deux-mille-cinq-cent-sep­tante-trois résul­tats pour Covid-19 et neuf-cent-quatre-vingt-trois résul­tats pour SRAS-CoV‑2. Je n’ai pas véri­fié s’il y avait des dou­blons entre les deux mots-clés. Cette acti­vi­té de publi­ca­tion est à la fois une néces­si­té de recherche pour faire face à la pan­dé­mie, mais aus­si le signe d’un oppor­tu­nisme effa­rant. C’est l’occasion de faire des publi­ca­tions, bonnes ou mau­vaises, très valo­ri­santes pour les éva­lua­tions18.

(Re)faire la science, l’enseigner autrement

Fina­le­ment, toutes les inquié­tudes et les cri­tiques du fonc­tion­ne­ment actuel­le­ment délé­tère de l’enseignement supé­rieur et de la recherche prennent tout leur sens à l’aune du Covid-19. Le nou­veau virus vient sur­li­gner que ces cri­tiques sont non seule­ment fon­dées, on les voit à l’œuvre en direct, mais que conti­nuer à les igno­rer peut cou­ter cher, y com­pris en vies humaines. Il n’est pas cer­tain que cela sera pris en compte poli­ti­que­ment par la suite, un retour à la nor­male dans la conti­nui­té est même pro­bable. En France, la machine des réformes uni­ver­si­taires conti­nue sur sa lan­cée pen­dant l’épidémie. La com­mu­nau­té scien­ti­fique est secouée par cette nou­velle pan­dé­mie et Le Jour­nal du CNRS s’interroge déjà de savoir si le Covid-19 altère la confiance en la science19. On pour­rait dire altère plus encore une confiance déjà bien ébran­lée par les dérives du fonc­tion­ne­ment de la recherche. Ce n’est pas l’affaire Didier Raoult, qui a pris une ampleur sidé­rante et qui est un conden­sé inouï des tra­vers actuels du monde de la recherche, qui va apai­ser la situation.

Il se passe beau­coup de choses excep­tion­nelles au cours de cette pan­dé­mie, même dans la com­mu­nau­té scien­ti­fique, que l’on n’a ni la place ni le temps d’aborder ici. Bien­tôt, le temps de l’analyse et de l’action poli­tique s’imposeront. Cela pour­rait com­men­cer par éta­blir et par­ta­ger un constat scien­ti­fique des fon­de­ments des crises éco­lo­giques à l’aune du sys­tème Terre (cli­mat, bio­di­ver­si­té, graves per­tur­ba­tions des cycles de l’azote et de l’eau, épui­se­ment des res­sources halieu­tiques, pol­lu­tions pla­né­taires diverses…). Même si nous en savons beau­coup, les fon­de­ments ne sont pas encore clai­re­ment éta­blis. Sur­tout que ce que l’on en sait n’est pas clai­re­ment par­ta­gé au sein des com­mu­nau­tés scien­ti­fiques. La pen­sée des « sys­tèmes com­plexes » et la notion « d’émergence » sont cen­trales pour avoir une vision du fonc­tion­ne­ment du sys­tème Terre. Les scien­ti­fiques tra­vaillent tou­jours en silos dis­ci­pli­naires et manquent de com­pré­hen­sion glo­bale et de vision systémique.

Le décès de Phi­lip Waren Ander­son le 29 mars 2020, phy­si­cien extra­or­di­naire et prix Nobel en 1977, est venu ren­for­cer mon impres­sion. Ander­son a aus­si appor­té des contri­bu­tions concep­tuelles par ses expli­ca­tions des phé­no­mènes émer­gents, qui sont deve­nues une source d’inspiration pour la science des sys­tèmes com­plexes. En 1972, dans le jour­nal Science, il a publié un article très influent inti­tu­lé « More is Dif­ferent », dans lequel il sou­li­gnait cer­taines limites du réduc­tion­nisme et la pos­si­bi­li­té de niveaux hié­rar­chiques expli­ca­tifs de la science, dont cha­cun exige ses propres prin­cipes fon­da­men­taux pour pro­gres­ser. C’est aus­si en 1972, qu’est publié le livre des Mae­dows et col­la­bo­ra­teurs sur « Les limites à la crois­sance » (The Limits To Growth) et le début d’une pre­mière vague de prise de conscience pla­né­taire des ques­tions écologiques.

Pen­ser aux échelles du sys­tème Terre néces­site peut-être de fabri­quer de nou­velles ins­ti­tu­tions et de nou­velles manières de faire et d’enseigner la science. Accu­mu­ler les savoirs dis­ci­pli­naires ne suf­fi­ra pas, il fau­dra faire autrement.

  1. Lu R., Zhao X., Li J., Niu P., Yang B., Wu H. et Bi Y. (2020), « Geno­mic cha­rac­te­ri­sa­tion and epi­de­mio­lo­gy of 2019 novel coro­na­vi­rus : impli­ca­tions for virus ori­gins and recep­tor bin­ding », The Lan­cet, 395(10224), 565 – 574.
  2. Wu F., Zhao S., Yu B., Chen Y. M., Wang W., Song Z. G. et Yuan M. L. (2020), « A new coro­na­vi­rus asso­cia­ted with human res­pi­ra­to­ry disease in Chi­na », Nature, 579 (7798), 265 – 269.
  3. Power A. G. et Mit­chell C. E. (2004), « Patho­gen spillo­ver in disease epi­de­mics », The ame­ri­can natu­ra­list, 164(S5), S79-S89.
  4. Allo­cu­tion limi­naire du direc­teur géné­ral de l’OMS lors du point presse sur le 2019-nCoV du 11 février 2020.
  5. Juste pour avoir une petite idée : « Modèles com­par­ti­men­taux en épi­dé­mio­lo­gie ».
  6. Retrac­tion Watch, « Wee­kend reads : Coro­na­vi­rus meets scien­ti­fic publi­shing ».
  7. Kang­peng X. et al., « Iso­la­tion and cha­rac­te­ri­za­tion of 2019-nCoV-like coro­na­vi­rus from Malayan pan­go­lins », bioRxiv (2020).
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José Halloy


Auteur

professeur des universités en physique, université Paris Diderot