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Des plans pour la planète

Numéro 10 Octobre 2004 par Théo Hachez

octobre 2004

Des guerres d’une extrême vio­lence touchent des popu­la­tions par­mi les plus défa­vo­ri­sées du globe, en Afrique, par exemple. Ici et ailleurs, du mal­heur ajou­té : ce n’est pas seule­ment que les inéga­li­tés se creusent, c’est d’a­bord que la misère de l’ab­so­lu dénue­ment se mul­ti­plie par le nombre crois­sant des humains qui la vivent et qui en […]

Des guerres d’une extrême vio­lence touchent des popu­la­tions par­mi les plus défa­vo­ri­sées du globe, en Afrique, par exemple. Ici et ailleurs, du mal­heur ajou­té : ce n’est pas seule­ment que les inéga­li­tés se creusent, c’est d’a­bord que la misère de l’ab­so­lu dénue­ment se mul­ti­plie par le nombre crois­sant des humains qui la vivent et qui en meurent, tan­dis que la terre rétrécit.

L’ordre poli­tique des États-nations, qui a géné­ra­li­sé son emprise sur le monde au xxe siècle, est loin de tenir ses pro­messes. Certes, il n’a pas pris racine par­tout, et en par­ti­cu­lier à la suite de la déco­lo­ni­sa­tion. Les abus et les conflits qu’il a géné­rés sont innom­brables et il se révèle encore et tou­jours tout à fait capable d’a­bri­ter géné­reu­se­ment les formes les plus odieuses de gou­ver­ne­ment. La moder­ni­té ? Elle se confond sou­vent désor­mais avec le seul visage de l’é­co­no­mie libé­rale qui libère plu­tôt le cynisme des inté­rêts que les hommes qu’elle laisse par­qués dans des fron­tières her­mé­tiques à leur désir de sur­vivre. Car aux révoltes et aux rêves éveillés par la souf­france et les injus­tices, quelles réponses cet enca­dre­ment poli­tique peut-il appor­ter aujourd’­hui ? Le cré­dit des ins­ti­tu­tions s’est effon­dré en même temps que celui des grandes espé­rances poli­tiques, libé­rant ici un indi­vi­dua­lisme sou­vent sté­rile, là des croyances qui volent en éclats ou se déchainent dans une néga­tion destructrice.

Qu’elles soient issues de cette orga­ni­sa­tion poli­tique qu’elles pro­longent (comme, à des titres divers, les Nations unies ou l’U­nion euro­péenne) ou qu’elles plongent leurs racines dans un au-delà qui leur est déjà indif­fé­rent, de nou­velles formes d’ac­tion et de pen­sée émergent en réponse à ce désordre. C’est à ces plans pour la pla­nète que les trois textes réunis dans ce dos­sier sont consa­crés. Non pas qu’ils relèvent d’une logique unique, mais pré­ci­sé­ment que leur confron­ta­tion inha­bi­tuelle révèle une part de leur impli­cite et inter­roge concrè­te­ment leurs évi­dences. C’est ain­si que Jean-Claude Willame dresse un bilan des récentes inter­ven­tions mili­taires aux­quelles l’O.N.U. a appor­té son aval en Afrique. Com­ment les éva­luer ? Quelles sont les causes de ce qui appa­rait plu­tôt comme des échecs répé­tés ? Jean-Pierre Dubois s’in­ter­roge, au moment où Louis Michel s’ap­prête à entrer en fonc­tion, sur la coopé­ra­tion euro­péenne : sur son pas­sé qui n’est déjà plus si jeune, sur ses évo­lu­tions, mais aus­si sur la doc­trine Sola­na qui devrait lui ser­vir de guide pour le futur. Les Euro­péens peuvent-ils entre­te­nir la pré­ten­tion de sou­mettre à leur poli­tique étran­gère et de sécu­ri­té les objec­tifs et les béné­fi­ciaires de leurs efforts de coopé­ra­tion ? Sauf à pré­tendre, comme d’au­cuns de l’autre côté de l’At­lan­tique, qu’en ser­vant d’a­bord ses propres inté­rêts, on ser­vi­ra au mieux aus­si, par le fait, les inté­rêts de l’hu­ma­ni­té. Que cache cette ava­lanche de ratio­na­li­té ? De l’a­veu­gle­ment bien-pen­sant ou du cynisme ? Et si c’é­taient les deux ? Ce n’est en tout cas pas ce que Michael Sin­gle­ton observe dans la mosaïque du der­nier forum social mon­dial. Entre alter­na­tives par­fois nébu­leuses, entre dis­si­dences et mimé­tismes, est-ce le spec­tacle pro­duit par l’autre mon­dia­li­sa­tion, la scène qui l’a­brite ou l’œil déca­pant de l’an­thro­po­logue qui nous rend ce forum si étrange ?

Théo Hachez


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