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Conquérir le désert. De l’actualité du colonialisme

Numéro 1 - 2018 par Guillermo Kozlowski

février 2018

Il existe une image archaïque de la colo­ni­sa­tion, qui la fait pas­ser pour une réa­li­té d’un autre temps : c’est une image char­gée d’inquisition, de reli­gion, de baroque, de lourdes admi­nis­tra­tions. Elle en éclipse, avec ses cou­leurs criardes, une autre plus terne, qui ne demande d’ailleurs qu’à pas­ser inaper­çue. Une image moderne, fabri­quée par des savants, des huma­nistes, des artistes, qui s’est par­ti­cu­liè­re­ment déve­lop­pée à la fin du XIXe siècle dans les conquêtes du désert, pro­li­fé­rant ensuite dans toutes sortes de ter­ri­toires. C’est peut-être en la regar­dant de plus près qu’apparaitra la conti­nui­té du colonialisme.

Dossier

Pour­quoi insis­ter ? Le colo­nia­lisme semble une vieille ques­tion. On ne voit plus ces fana­tiques, san­gui­naires, ignares et ridi­cules conquis­ta­dors espa­gnols se pro­me­ner avec leur croix et leurs épées. Les pays du tiers-monde sont indé­pen­dants. Ne res­tons pas esclaves du pas­sé alors, vivons dans le pré­sent, regar­dons le futur…

Déjà au XIXe siècle, la colo­ni­sa­tion com­mence à se pré­sen­ter elle-même comme l’instant pen­dant lequel a eu lieu une rup­ture. Elle pré­tend être le point d’inflexion entre l’épuisement d’un monde archaïque et le début du monde moderne, se défend de plus en plus d’être une moda­li­té du pou­voir et c’est peut-être pour cela qu’elle semble tou­jours une pro­blé­ma­tique du pas­sé, un débat déjà clos. C’est pro­ba­ble­ment pour cela aus­si qu’il faut aller cher­cher la pré­sence du colo­nia­lisme dans une image para­doxale. Non pas les images dépas­sées de l’évangélisation for­cée du XVIe siècle ou de la lourde admi­nis­tra­tion colo­niale du XIXe siècle, mais la « conquête du désert » qu’il n’a ces­sé de reven­di­quer à par­tir du der­nier quart du XIXe siècle. Une image qui encore aujourd’hui, peut-être plus qu’à ses débuts, sert de modèle pour la poli­tique « d’aménagement » des ter­ri­toires et de « ges­tion » des populations.

D’où cette invi­ta­tion au voyage, d’un désert à l’autre. La Pam­pa (sur laquelle je m’étendrai un peu plus, dans la mesure où son his­toire est moins fami­lière), le Sinaï, le Saha­ra, le Far-West, qui lui font écho. Non pas une étude métho­dique de ces faits his­to­riques, mais l’exposé d’un cer­tain nombre de motifs, de tona­li­tés qui reviennent avec insis­tance. On ver­ra quel type d’images cela pro­duit, quel sché­ma de pen­sée on trouve et sur­tout quelle est sa manière d’exister aujourd’hui.

Quelques images d’un rêve de la raison

« La sup­pres­sion du Saha­ra qui est le rêve d’aujourd’hui sera la pos­si­bi­li­té de demain et la réa­li­té du jour sui­vant », affir­mait le pou­voir colo­nial fran­çais, par la voix de son gou­ver­ne­ment géné­ral d’Algérie, dans un rap­port au Conseil daté de 18811.

« Tout se passe comme si le Saha­ra était l’espace de tous les pos­sibles. C’est ce que sug­gère le capi­taine Fran­çois Rou­daire (1836 – 1885) en 1874, pro­po­sant de noyer une par­tie du désert dans la région des chotts, pour faire (re)surgir une mer dans les bas­sins lacustres et reliés à la Médi­ter­ra­née par des canaux. Cette mer per­met­trait de modi­fier le cli­mat, de ren­ta­bi­li­ser les sols en les culti­vant et d’isoler des popu­la­tions hos­tiles du (vrai) désert.2 » Grâce à la tech­nique moderne, le désert est l’espace des pos­sibles. Désor­mais colo­ni­ser le désert ne signi­fie pas seule­ment en acqué­rir la mai­trise mili­taire, c’est sur­tout y ame­ner la vie, le civi­li­ser : une ques­tion d’aménagement ration­nel du territoire.

Ce n’est pas l’ignorance qui est à l’œuvre dans cette colo­ni­sa­tion, c’est à par­tir du moment où un savoir scien­ti­fique est pro­duit sur le ter­ri­toire du désert qu’il est ques­tion de le colo­ni­ser. « La ques­tion saha­rienne est alors direc­te­ment liée à l’élaboration d’un pro­jet colo­nial dans le nord de l’Afrique. Carette publie en 1844, dans le cadre de la com­mis­sion scien­ti­fique de l’Algérie, un volume sur le com­merce saha­rien, il sou­ligne la mécon­nais­sance de l’espace déser­tique […] Carette est le pre­mier, dans cette des­crip­tion du Saha­ra, à don­ner une ver­sion géo­gra­phique de ce qui doit, selon lui, s’appeler Algé­rie. Il y inclut une par­tie du désert…3 »

Voi­ci le compte ren­du offi­ciel du débat à l’Assemblée natio­nale fran­çaise du 28 juillet 1885 sur la pour­suite de la poli­tique de colo­ni­sa­tion à appli­quer à de nou­veaux ter­ri­toires ; il y est tou­jours ques­tion de savoir ration­nel, cette fois-ci à pro­pos des popu­la­tions, l’acteur prin­ci­pal est le cham­pion du déve­lop­pe­ment de l’école publique en France, Jules Ferry.

« M. Jules Fer­ry. Je répète qu’il y a pour les races supé­rieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civi­li­ser les races infé­rieures… (Marques d’ap­pro­ba­tion sur les mêmes bancs à gauche, nou­velles inter­rup­tions à l’ex­trême gauche et à droite.)

M. Joseph Fabre. C’est exces­sif ! Vous abou­tis­sez ain­si à l’abdication des prin­cipes de 1789 et de 1848… (Bruit), à la consé­cra­tion de la loi de grâce rem­pla­çant la loi de justice.

M. Vernhes. Alors les mis­sion­naires ont aus­si leur droit ! Ne leur repro­chez donc pas d’en user ! (Bruit)

M. le pré­sident. N’interrompez pas, mon­sieur Vernhes !

M. Jules Fer­ry. Je dis que les races supérieures…

M. Vernhes. Pro­té­gez les mis­sion­naires, alors ! (Très bien!, à droite.)

Voix à gauche. N’interrompez donc pas !

M. Jules Fer­ry. Je dis que les races supé­rieures ont des devoirs…

M. Vernhes. Allons donc !

M. Jules Fer­ry. Ces devoirs, mes­sieurs, ont été sou­vent mécon­nus dans l’histoire des siècles pré­cé­dents, et cer­tai­ne­ment, quand les sol­dats et les explo­ra­teurs espa­gnols intro­dui­saient l’esclavage dans l’Amérique cen­trale, ils n’accomplissaient pas leur devoir d’hommes de race supé­rieure. (Très bien ! Très bien!) Mais, de nos jours, je sou­tiens que les nations euro­péennes s’acquittent avec lar­geur, avec gran­deur et hon­nê­te­té, de ce devoir supé­rieur de civi­li­sa­tion.4 »

Pour Fer­ry, qui est un homme de centre gauche, l’image des conquis­ta­dors et, dans une moindre mesure, celle des mis­sion­naires, sont inac­cep­tables, mais la colo­ni­sa­tion est un devoir, à la fois pour le rêve et la rai­son. Il se veut membre d’une race supé­rieure qui doit civi­li­ser les races infé­rieures, c’est le rôle qu’il attri­bue à l’institution scolaire.

Le désert, un mélange confus de désert réel et d’image du désert pro­je­tée sur des ter­ri­toires, deve­nu lieu de tous les pos­sibles, sera le sché­ma de base de cette colo­ni­sa­tion, du par­tage entre civi­li­sés et bar­bares. L’exemple argen­tin est très inté­res­sant à cet égard, il offre par ailleurs l’avantage d’être peu connu en Europe.

Quelques images du raisonnement du rêve

Selon le rap­port offi­ciel de la com­mis­sion scien­ti­fique atta­chée à l’expédition mili­taire dénom­mée Cam­pagne du désert, publié en 1881 : « Elle [la cam­pagne mili­taire] a lais­sé [les Indiens] en fuite, errant dans des cam­pagnes sté­riles, sans che­vaux, sans vivres, domi­nés de par­tout, délo­gés de leurs meilleurs quar­tiers d’hiver, punis pour leurs ten­ta­tives déses­pé­rées d’invasion, trem­blants dans leurs propres huttes à chaque rafale de vent. Frap­pés dans cha­cun de leurs abris impro­vi­sés où ils ten­taient de se réfu­gier, par les forces de la nou­velle fron­tière. Ceux qui étaient pré­sents lors des rapides évè­ne­ments de la guerre du désert à cette période, diront si nous exa­gé­rons un seul trait de ce tableau rapide des résul­tats obte­nus en trois années grâce à la robuste intel­li­gence, à l’action ardente et au patrio­tisme pur du Dr Alsi­na. Son inter­ven­tion dans les affaires rela­tives à la fron­tière marque, dans l’histoire de la fron­tière, quelque chose d’encore plus impor­tant qu’un moment déci­sif, une nou­velle ère.5 »

Une pho­to­gra­phie sur­an­née ? L’instant tra­gique (« le moment déci­sif ») de l’écroulement iné­luc­table (ce qui explique la « rapi­di­té ») d’un monde péri­mé ? C’est peut-être ce qu’on peut pen­ser en Europe, au XXIe siècle. Mais c’est aus­si le sens que les vain­queurs vou­laient lui don­ner à l’époque, la colo­ni­sa­tion étant pré­sen­tée par les Blancs comme le début de la vie… « une nou­velle ère », à par­tir du désert. D’ailleurs, pour eux, il n’est pas ques­tion de colo­ni­sa­tion, puisque c’est un désert qu’ils disent avoir conquis : «… sup­pri­mer les Indiens et occu­per les fron­tières n’implique, en d’autres termes, que le peu­ple­ment du désert »6, affir­mait le pré­sident de la Répu­blique argen­tine, Nico­las Avel­la­ne­da, en 1875, au début de la guerre.

Une démarche moderne

Pour com­prendre l’actualité de cette « cam­pagne du désert » il faut déjà ne pas se trom­per d’image : la Répu­blique argen­tine est née d’une révo­lu­tion contre le colo­ni­sa­teur espa­gnol qui abou­ti­ra à son indé­pen­dance en 1816. Son modèle est clai­re­ment la Révo­lu­tion fran­çaise. Le pré­sident Avel­la­ne­da (tout comme son ministre Alsi­na) est un démo­crate, ancien jour­na­liste et pro­fes­seur d’économie poli­tique. Avant de deve­nir pré­sident, il a été ministre de l’Éducation de son pré­dé­ces­seur et men­tor, Domin­go Faus­ti­no Sar­mien­to, une pré­oc­cu­pa­tion cen­trale pour tous les deux. Ayant à son actif la créa­tion de 800 écoles dans l’ensemble du ter­ri­toire de la répu­blique, il a presque dou­blé le nombre d’écoles publiques, et celui des élèves est pas­sé de 30000 à 100000 (sur une popu­la­tion totale esti­mée autour de deux mil­lions d’habitants). Sous sa pré­si­dence, Charles Dar­win sera nom­mé membre hono­raire de la Socié­té scien­ti­fique argen­tine. Geste signi­fi­ca­tif au regard des réti­cences et des posi­tion­ne­ments qu’entraine la théo­rie de l’évolution des espèces. Ce sont ces hommes modernes et libé­raux, des hommes de notre monde, qui ont mené, sui­vant leurs convic­tions, la san­glante et inique conquête du désert.

La « cam­pagne du désert » engendre des assas­sins san­gui­naires comme le géné­ral Roca, mais aus­si une com­mis­sion scien­ti­fique de pre­mier ordre qui étu­die­ra la faune, la flore, la géo­lo­gie, les fleuves… du désert. L’analyse zoo­lo­gique de cette com­mis­sion, par exemple, compte 168 pages et réper­to­rie avec pré­ci­sion des cen­taines d’espèces animales.

La recherche scien­ti­fique, notam­ment sur la topo­gra­phie, pré­cède et pré­pare cette cam­pagne. Ain­si, «[…] basée sur l’accumulation de connais­sances qui ser­vaient de véri­fi­ca­tion les unes aux autres, pos­sé­dant dans l’esprit toutes les par­ti­cu­la­ri­tés de son champ d’action, il a été pos­sible d’établir un plan, vaste dans son ensemble, minu­tieux dans les détails, éla­bo­ré avec tel­le­ment de pré­ci­sion que la cam­pagne fut réa­li­sée plu­tôt avec la tran­quille régu­la­ri­té d’une expé­rience de phy­sique, orga­ni­sée dans un labo­ra­toire, afin de mettre en évi­dence des lois connues, qu’avec les contin­gences d’une entre­prise guer­rière »7. La manière de conce­voir la guerre est au dia­pa­son des per­son­nages : éclai­rée, tis­sée de connais­sances scientifiques.

Les rai­sons de la colo­ni­sa­tion sont tout aus­si modernes : « Il était néces­saire de conqué­rir réel­le­ment et effi­ca­ce­ment ces 15000 lieues, les net­toyer des Indiens d’une manière à ce point abso­lue, à ce point incon­tes­table, que la plus peu­reuse par­mi les choses peu­reuses du monde (le capi­tal des­ti­né à don­ner vie aux entre­prises d’élevage et d’agriculture) se doit elle-même de se rendre à l’évidence et de se lan­cer sans peur sur les traces de cette expé­di­tion mili­taire, scel­lant ain­si la prise de contrôle par l’homme civi­li­sé de ces énormes parages »8. La ques­tion ici est celle du déve­lop­pe­ment, de l’aménagement du ter­ri­toire. En outre, il y a une ques­tion de ges­tion de popu­la­tions, l’insécurité géné­rée par les Indiens « contri­buait à dimi­nuer ou, après leur entrée, à blo­quer inuti­le­ment dans les villes les flux d’immigration euro­péenne »9.

Résu­mant sa posi­tion lors d’une allo­cu­tion à l’Assemblée natio­nale, Avel­la­ne­da dira : « 15.000 lieues gagnées pour la civi­li­sa­tion et le tra­vail pro­duc­tif »10.

Qu’est-ce que le désert ?

« Il est évident que dans une grande par­tie des plaines récem­ment ouvertes au tra­vail humain, la nature ne fait pas tout, la tech­nique et la science doivent inter­ve­nir dans son ense­men­ce­ment, assu­mant leur part de la conquête. Mais, nous devons consi­dé­rer, d’une part, que les efforts qu’il fau­drait faire pour trans­for­mer ces champs en pré­cieux élé­ments de richesse et de pro­grès, ne dépassent pas les pos­si­bi­li­tés d’une race jeune et entre­pre­nante ; d’autre part, la supé­rio­ri­té intel­lec­tuelle, l’activité et les lumières de la connais­sance, élar­gis­sant les hori­zons de l’avenir et fai­sant émer­ger de nou­velles sources de pro­duc­tion pour l’humanité, sont les meilleurs titres pour l’appropriation de nou­velles terres. Pré­ci­sé­ment, sous la pro­tec­tion de ces prin­cipes, nous les avons enle­vées à la race sté­rile qui les occu­pait »11.

Le ter­ri­toire du « désert » n’est pas sté­rile, les colons le savaient bien, ce sont ses habi­tants qui sont à leurs yeux une race sté­rile. Encore une image para­doxale car, par défi­ni­tion, une race est capable de se repro­duire. Dans son ouvrage prin­ci­pal, Facun­do, Sar­mien­to pos­tu­lait une alter­na­tive qui est à la fois un plan de bataille et un pro­gramme poli­tique : civi­li­sa­tion ou bar­ba­rie. Quelque part, autour d’un nou­veau mode de pou­voir qui s’applique au vivant : vie, civi­li­sa­tion, déve­lop­pe­ment éco­no­mique sont deve­nus des syno­nymes lorsqu’ils s’appliquent à un ter­ri­toire. C’est ici qu’est engen­dré le para­doxe de la conquête du désert, dans ce che­vau­che­ment entre le déve­lop­pe­ment bio­lo­gique et éco­no­mique. Les habi­tants du désert sont une race sté­rile parce qu’ils ne lui donnent pas une vie éco­no­mique. C’est la même moda­li­té de racisme que défen­dait Fer­ry, lorsqu’il par­lait lui aus­si de civi­li­sa­tion et barbarie.

La Magie de la technique

« Déjà le mot « impos­sible » semble avoir dis­pa­ru du voca­bu­laire de la tech­nique. Si un homme du siècle pas­sé reve­nait sur terre, il trou­ve­rait dans notre vie toutes sortes de mani­fes­ta­tions magiques incon­ce­vables. Par­tout où nous les modernes appa­rais­sons avec les moyens dont nous dis­po­sons, nous trans­for­mons le désert en jar­din… L’exemple amé­ri­cain le montre abon­dam­ment »12. Ce texte, extrait de L’État des Juifs : une solu­tion moderne de la ques­tion juive de Théo­dore Herzl date de 1896, dix ans après la fin de la cam­pagne du désert en Argen­tine, un an après le dis­cours de Fer­ry. Sans ren­trer dans l’analyse détaillée du texte, on y retrouve beau­coup d’échos : la pos­si­bi­li­té, la néces­si­té, presque la mis­sion, de don­ner vie au désert, la manière de faire (la science et la tech­nique), l’acteur de ce chan­ge­ment, « nous, les modernes ». L’exemple amé­ri­cain qu’Herzl a en tête est celui des États-Unis, qui avait déjà ser­vi d’inspiration en Argen­tine. Mais Herzl connait aus­si l’expérience de colo­ni­sa­tion en Argen­tine, puisqu’il a envi­sa­gé d’y ins­tal­ler le futur État des juifs.

Théo­dore Hertzl, comme Avel­la­ne­da, était un jour­na­liste et uni­ver­si­taire (doc­teur en droit), pro­fon­dé­ment enra­ci­né dans la culture euro­péenne moderne. D’ailleurs, l’État qu’il veut fon­der est tota­le­ment défi­ni par les valeurs euro­péennes libé­rales qu’il reven­dique sans aucune réserve. « L’Europe nous a ensei­gné la tolé­rance. Je dis cela sans iro­nie aucune. Ce n’est qu’à de très rares endroits que l’on peut tenir l’antisémitisme actuel pour une sur­vi­vance de l’ancienne into­lé­rance reli­gieuse. Chez les peuples civi­li­sés, il appa­rait sur­tout comme un mou­ve­ment des­ti­né à chas­ser les spectres de leur propre pas­sé »13. Fuir un anti­sé­mi­tisme qui ne pou­vait exis­ter en Europe, voi­là encore un para­doxe qu’on vou­lait résoudre dans le désert. Herzl, pour­tant direc­te­ment confron­té à l’antisémitisme (c’est ce qui jus­ti­fie à ses yeux l’émigration mas­sive qu’il prône), juge impos­sible que les modernes soient into­lé­rants autre­ment que comme une sur­vi­vance du pas­sé. Plus tard on nie­ra que l’État d’Israël puisse com­mettre des crimes, puisqu’il s’agit d’un État moderne et démo­cra­tique, de la même manière que cer­tains nie­ront aus­si la pos­si­bi­li­té des mas­sacres per­pé­trés par des huma­nistes lors de la conquête du désert argen­tin. Et il sem­ble­ra à d’autres impos­sible d’établir un lien entre Jules Fer­ry et les crimes fran­çais en Algé­rie ou la concep­tion du monde raciste qui les sous-tend. Cette étrange idée qu’une posi­tion moderne serait incom­pa­tible avec l’injustice devient, à par­tir du XIXe siècle, une sorte d’invariance du dis­cours colo­nial. Dans tous ces cas, des contes­ta­tions ont déjà eu lieu au moment des faits. Le dis­cours de Fer­ry a été cha­hu­té. Les mili­tants anar­chistes avaient mani­fes­té leur sou­tien aux Indiens en Argen­tine, sous le mot d’ordre « les bar­bares sont ceux qui en enchainent d’autres ». Le mou­ve­ment révo­lu­tion­naire juif s’est oppo­sé au sio­nisme. Mais la défense res­te­ra inal­té­rable : elle ne dira pas que le crime n’a pas eu lieu, mais que son exis­tence même est inconcevable.

« La nou­velle migra­tion juive doit s’effectuer sur des bases scien­ti­fiques… Ils [les diri­geants du futur pays] auront trois tâches : d’abord, l’étude pré­cise et scien­ti­fique de toutes les carac­té­ris­tiques natu­relles du pays, ensuite la mise en place d’une admi­nis­tra­tion cen­tra­li­sée et pour finir la répar­ti­tion des terres »14. On retrouve les mêmes impé­ra­tifs que dans la com­mis­sion scien­ti­fique argen­tine : connais­sance scien­ti­fique du ter­rain, appro­pria­tion des terres… Herzl sait par ailleurs très bien que le désert est peu­plé, don­ner vie au désert impli­quant pour lui d’y ame­ner aus­si une autre popu­la­tion. Et il fait la même lec­ture du rôle poli­tique de cette occu­pa­tion dans la « ges­tion » des popu­la­tions que les autres pro­jets colo­niaux de son époque. « Pour l’Europe, nous for­me­rions là-bas un élé­ment du mur contre l’Asie ain­si que l’avant-poste de la civi­li­sa­tion contre la bar­ba­rie »15.

La technique de la magie

Aux États-Unis, l’étendue du ter­ri­toire colo­ni­sé, son rayon­ne­ment inter­na­tio­nal et sa puis­sance éco­no­mique sont hors du com­mun. Il est donc assez natu­rel que ce pays, dont la conquête de l’Ouest a ser­vi de modèle à d’autres colo­ni­sa­tions un peu par­tout dans le monde, pro­duise la mytho­lo­gie de la conquête du désert, avec de nou­velles méthodes (indus­trielles) dans un nou­veau média : le cinéma.

L’image des conquis­ta­dors n’est pas valo­ri­sable, elle était déjà dépas­sée à l’époque de Nico­las Avel­la­ne­da ou de Jules Fer­ry. Mais les images de la conquête du désert, dont le décor sera la bande de ter­ri­toire qui va du Dako­ta du Nord au Texas, n’ont ces­sé d’être glo­ri­fiées tout au long du XXe siècle.

Des grands espaces vides, inex­ploi­tés, des colons rudes, mais valeu­reux qui veulent leur don­ner vie, des autoch­tones gênants et inca­pables de faire fruc­ti­fier ce ter­ri­toire par manque de connais­sances, par paresse congé­ni­tale, par manque d’ambition ou de « vision » à long terme. Un genre ciné­ma­to­gra­phique qui parle beau­coup de méta­phy­sique et peu d’histoire. Une concep­tion for­te­ment raci­sée du droit et de la capa­ci­té à se défendre (il est abso­lu chez les Blancs, rela­tif chez les Mexi­cains, inexis­tant chez les Indiens). Le résu­mé est bien enten­du trop som­maire, mais le wes­tern fait lar­ge­ment par­tie du sens com­mun. Les images de la colo­ni­sa­tion sont ain­si omni­pré­sentes et valo­ri­santes dans l’imaginaire mon­dial, mais sous une forme abs­traite, liées à des pro­blé­ma­tiques hors du temps, satu­rées de sym­boles, une « expé­ri­men­ta­tion réa­li­sée dans un labo­ra­toire afin de mettre en évi­dence des lois connues », comme le disait le rap­port scien­ti­fique de la cam­pagne du désert. Le genre est tel­le­ment épu­ré que la colo­ni­sa­tion appa­rait comme l’essence même de l’homme seul face à son destin.

Dans son étude sur L’Orientalisme, Edward Said remar­quait que, vu par les orien­ta­listes du XIXe siècle, «… le désert d’A­ra­bie est ain­si consi­dé­ré comme un décor sur lequel on peut affir­mer des choses concer­nant le pas­sé sous la même forme exac­te­ment (et avec le même conte­nu) qu’on le fait concer­nant le pré­sent »16. Le désert du wes­tern est vu avec ce même regard, il n’est pas l’histoire mal racon­tée ou par­tiale, c’est un mythe des ori­gines, hors du temps. Plu­tôt qu’insister sur les conti­nui­tés his­to­riques, ce ciné­ma met en scène des per­son­nages arché­ty­paux, et des types de rela­tions sché­ma­ti­sés. Le désert réel est pro­pice à cette abs­trac­tion, mais ce n’est pas tout, il y a un choix de réa­li­sa­tion qui déploie cette poten­tia­li­té, qui la pro­jette sur d’autres décors très éloi­gnés du désert. Lorsqu’on dit par exemple qu’un quar­tier res­semble au Far-West, on com­prend bien quel type d’aménagement du ter­ri­toire, quelle ges­tion de la popu­la­tion sont envisagés.

La jus­ti­fi­ca­tion du colo­nia­lisme, à par­tir du XIXe siècle, est la néces­si­té de don­ner une vie éco­no­mique aux ter­ri­toires grâce à la tech­nique moderne. L’image mytho­lo­gique mas­si­ve­ment dif­fu­sée est celle de braves gens inno­cents et dému­nis dans le désert. Dans le wes­tern on a rare­ment confron­té ces deux visions. Tout le monde y est armé, mais on ne ver­ra jamais à quoi res­semble l’usine qui pro­duit les balles et les révol­vers. Les per­son­nages signi­fient par­fois, qu’un jour : « ceci devien­dra une grande Nation » (dans La pri­son­nière du désert, par exemple), mais on ne ver­ra pas le devenir.

Ain­si, l’un des plus illustres modes de récit épique du XXe siècle parle de la colo­ni­sa­tion du point de vue des colons, il raconte le mythe, la conquête du désert et non l’histoire de la colo­ni­sa­tion. Il ne montre pas le pas­sé, ce qui est mon­tré se passe « avant l’histoire » mais, comme tout mythe des ori­gines, il se recrée quo­ti­dien­ne­ment, se rejoue sans cesse aujourd’hui. D’autant plus que, vue depuis les États-Unis, la colo­ni­sa­tion est une pro­blé­ma­tique d’enne­mi inté­rieur. C’est ain­si que l’analysait l’historien amé­ri­cain Fre­de­ric Tur­ner en 1884 : « Dans cette avan­cée [celle des colons vers l’ouest] la fron­tière est le bord exté­rieur de la vague, le point de ren­contre entre la sau­va­ge­rie et la civi­li­sa­tion »17.

Le bruit ou le modèle

«… la ten­ta­tion inter­ven­tion­niste dans le désert du Saha­ra, qui doit être repla­cée aus­si dans le contexte du per­ce­ment du canal de Suez inau­gu­ré en 1869, est signi­fi­ca­tive des ima­gi­naires qu’inspire cet espace natu­rel. Il s’agit bien d’essayer de trans­for­mer le désert pour le rendre utile, dans une logique colo­niale mani­feste : l’espace est mal­léable, trans­for­mable et apte à être amé­lio­ré. Le désert du Saha­ra se prête par­ti­cu­liè­re­ment à des pro­jets de ce type…»18. Quelque part au XIXe siècle, dans la pers­pec­tive d’une colo­ni­sa­tion du monde, le désert devient un lieu de tous les pos­sibles, non pas mal­gré, mais pré­ci­sé­ment parce qu’il est désert. Un ter­ri­toire homo­gène, mal­léable, acces­sible, mais aus­si dis­po­nible, hors de toute juri­dic­tion, de toute éthique et de toute tra­di­tion. Un ter­ri­toire idéal pour l’aménagement…

Le désert ne résulte pas d’une igno­rance, il est construit, il faut opé­rer une réduc­tion de tout ce qui s’y trouve à des com­po­sants de base, pour voir dans un ter­ri­toire le désert. Réduire un ter­ri­toire aux élé­ments dont on peut se ser­vir, cet étrange type de désert, a une grande affi­ni­té avec l’utilitarisme. D’ailleurs, dans les exemples que nous avons évo­qués, ce qu’il est ques­tion de s’approprier n’est pas le désert au sens propre, mais des ter­ri­toires au voi­si­nage du désert. Il s’agit plu­tôt d’une pro­jec­tion du désert sur d’autres ter­ri­toires, une sorte de déser­ti­fi­ca­tion, d’une abs­trac­tion qui per­met de modé­li­ser un ter­ri­toire, un point de vue qui peut donc pro­li­fé­rer partout.

Ces déserts doivent être « conquis » par­tout où des enne­mis inté­rieurs empêchent le déve­lop­pe­ment d’un ter­ri­toire. Le « désert » n’est pas vu comme vide ou hos­tile, mais comme une pure pos­si­bi­li­té où tout serait « posé » et non orga­ni­sé, un lieu pri­vi­lé­gié pour le rêve moderne d’organiser les choses idéa­le­ment : les struc­tures sociales, poli­tiques, éco­no­miques peuvent être des­si­nées en amont, en labo­ra­toire. Le désert c’est un ter­ri­toire miné­ral, parce qu’on ne prend pas en compte ce qui est orga­nique. S’il y a des fonc­tion­ne­ments orga­niques, une orga­ni­sa­tion trop com­plexe pour un désert, ça ne peut être que du bruit dans le modèle.

En 1876, le bateau fran­çais Le Fri­go­ri­fique, le pre­mier navire fri­go­ri­fique de l’histoire, par­tait de Bue­nos Aires avec une car­gai­son de viande pour l’Europe. Le « désert », les 15.000 ha conquis deve­nait un ter­ri­toire à amé­na­ger. Dans le regard des tech­ni­ciens qui veulent « don­ner vie » au désert, il ne peut être peu­plé que de bar­bares, ceux qui ne donnent pas vie aux poten­tia­li­tés éco­no­miques que la tech­nique est capable de faire éclore. Ceux qui ne construisent pas de routes et de che­mins de fer pour expor­ter le bétail.

Le modèle d’agriculture pré­sent aujourd’hui en Argen­tine, et dans une grande par­tie du monde, reven­di­qué par toutes sortes d’organismes inter­na­tio­naux à la pointe de la moder­ni­té, consiste à trans­for­mer les plaines et les forêts en désert, à plan­ter du soja trans­gé­nique (exclu­si­ve­ment des­ti­né à l’exportation) et à répandre des pes­ti­cides qui empêchent toute autre forme de vie. Son com­pa­gnon insé­pa­rable est le modèle éco­no­mique extrac­ti­viste qui régit l’ensemble du tiers-monde ; rien de vivant n’est visible, tout est miné­ral, tout est désert. Sou­vent il faut une tech­no­lo­gie ultra­mo­derne pour voir le « désert » miné­ral qui existe quelque part et igno­rer le reste (détec­ter ce qu’on peut extraire) et trans­for­mer ensuite une région entière en mine à ciel ouvert. Puis, une vio­lente « ges­tion » des popu­la­tions pour civi­li­ser les bar­bares qui s’y trouvaient.

Trans­po­sé dans un autre contexte, il s’agit, par exemple, du modèle urba­nis­tique qui veut « revi­ta­li­ser » (lit­té­ra­le­ment redon­ner vie) à des quar­tiers entiers en les recons­trui­sant. Peu importe qu’il soit ques­tion d’«enquêtes par­ti­ci­pa­tives », lorsqu’on veut ame­ner la vie quelque part on ne prend pas en compte que la vie y existe déjà (comme dans la Pam­pa où il était ques­tion de tuer les Mapuches pour peu­pler le désert, ou en Pales­tine). Ceux qui par­ti­cipent de l’enquête ne par­ti­cipent pas en tant que vivants, ce n’est pas leur vie qui est prise en compte, mais leur uti­li­té poten­tielle ou l’impossibilité à les rendre utiles. De la même manière, dans un contexte rural, revi­ta­li­ser l’ouest de la France devait pas­ser par la construc­tion d’un aéro­port (à Notre-Dames-des-Landes) qui néces­si­tait de trans­for­mer en désert miné­ral 1600 ha de terre fertile.

Sar­mien­to ou Fer­ry étaient déjà inté­res­sés par l’école comme fer de lance pour com­battre la bar­ba­rie dans le désert. Le modèle d’école par com­pé­tences conçoit les enfants comme une série de poten­tia­li­tés, de com­pé­tences abs­traites, elles aus­si au croi­se­ment du bio­lo­gique et de l’utilité éco­no­mique. Dans l’approche neu­ro­bio­lo­gique qui l’accompagne de plus en plus, il n’est pas ques­tion du vivant, mais du fonc­tion­ne­ment chimique.

On peut mul­ti­plier les exemples, mais d’une manière géné­rale, chaque fois qu’une modé­li­sa­tion rem­place le ter­ri­toire réel, se repro­duit le sché­ma de cette conquête du désert.

Néan­moins ce mode de colo­nia­lisme s’exerce d’une deuxième manière, jus­ti­fiant que là où le désert a été conquis les « bar­bares » n’existent plus. L’exemple des « Indiens » d’Amérique est pro­ba­ble­ment le plus illus­tra­tif ; l’idée qu’ils ont dis­pa­ru est très lar­ge­ment répan­due, elle est pour­tant fausse. Rien qu’en Argen­tine il y a 500.000 « Indiens », selon les esti­ma­tions les plus basses. Par­tout où ce colo­nia­lisme moderne s’est déve­lop­pé, il nie la pos­si­bi­li­té même qu’il puisse com­mettre des crimes, la moder­ni­té se vou­lant inno­cente par essence. Sui­vant la même logique il nie la pos­si­bi­li­té même d’existence ulté­rieure de ceux qui ne devaient plus exister.

Comme si le colo­nia­lisme était une rup­ture tel­le­ment radi­cale que rien n’y pour­rait sur­vivre, qu’aucun lien ne pour­rait la tra­ver­ser. Les des­cen­dants des Indiens dans les ban­lieues sont ain­si cen­sés ne plus être des Indiens, à la fois pour ceux qui méprisent les Indiens par igno­rance et pour les savants qui ne peuvent pas voir des Mapuches, des Onas ou des Tehuelches « purs » dans les ban­lieues de Bue­nos Aires. Comme si cette pure­té avait exis­té autre part que dans les modèles des modernes19.

Aujourd’hui, le per­son­nage prin­ci­pal, l’acteur de cette conquête du désert n’est plus l’humaniste culti­vé, il a lais­sé peu à peu sa place à un per­son­nage encore plus irré­pro­chable, encore plus inno­cent : le tech­ni­cien expert. Il y a désor­mais moins de grands dis­cours sur la néces­si­té de civi­li­ser les bar­bares, ils sont rem­pla­cés par des pré­sen­ta­tions Power­Point autour des contraintes impo­sées par les modé­li­sa­tions, la néces­si­té de se débar­ras­ser du bruit pour rendre les choses pré­vi­sibles, gou­ver­nables. Au final, lorsque le dis­cours, le corps, ou l’existence même d’un indi­vi­du ou d’un groupe, appa­rait comme du bruit dans un modèle, le sort que lui est pro­mis est assez sem­blable à celui que la civi­li­sa­tion vou­lait faire aux bar­bares. Modèle ou bruit est d’une cer­taine manière une actua­li­sa­tion de civi­li­sa­tion ou barbarie.

La vision d’un monde dans lequel la vie se déve­lop­pe­rait sous une forme par­faite à par­tir du désert, du vide, de l’homogène, du sans his­toire, du sans qua­li­té, est tou­jours aus­si étran­ge­ment présente.

  1. Cité en exergue dans Hélène Blais, Les mirages de la carte, Fayard, 2014, p. 237.
  2. Ibid., p. 251.
  3. Ibid., p. 252.
  4. Jules Fer­ry, dis­cours à l’assemblée du 28 juillet 1885. Dis­po­nible sur le site offi­ciel de l’ANF.
  5. Informe ofi­cial de la Comi­sión cientí­fi­ca agre­ga­da al Esta­do Mayor gene­ral de la expe­di­cion al Rio Negro (Pata­go­nia) rea­li­za­da en los meses de Abril, Mayo y Junio de 1879, bajo las órdenes del gene­ral d. Julio A. Roca (con 16 lámi­nas), Bue­nos Aires, Impren­ta de Ost­wald y Mar­ti­nez, 1881-[82].
  6. Cité par Miguel Alber­to Bar­to­lo­mé, « Los pobla­dores del “desier­to”», Amé­rique latine, his­toire et mémoire. Les Cahiers ALHIM, 10|2004, publié le 21 février 2005, consul­té le 3 jan­vier. Tra­duc­tion personnelle.
  7. Informe ofi­cial de la Comi­sión cientí­fi­ca agre­ga­da al Esta­do Mayor, op. cit.
  8. Ibid.
  9. Ibid.
  10. Mes­sage, au Congrès natio­nal, de Nicolás Avel­la­ne­da sur la « conquête du désert », tra­duc­tion personnelle.
  11. Informe ofi­cial de la Comi­sión cientí­fi­ca agre­ga­da al Esta­do Mayor, op cit.
  12. Herzl Th., L’État des Juifs, 1896, pour l’édition citée : La décou­verte, 1990, p. 100.
  13. Ibid., p. 95.
  14. Ibid., p. 89 – 90.
  15. Ibid., p. 44.
  16. Said E., L’Orientalisme, 1978 (réédi­tion 2005), p. 270.
  17. Tur­ner Fr., The Signi­fi­cance of the Fron­tier in Ame­ri­can His­to­ry, 1884, http://bit.ly/2zPNrhC. Tra­duc­tion personnelle.
  18. Blais H., op. cit., p. 252.
  19. À ce sujet voir l’article très inté­res­sant de Miguel Alber­to Bar­to­lo­mé cité plus haut, par rap­port à l’Argentine et l’analyse fon­da­men­tale d’Edward Said sur l’orientalisme.

Guillermo Kozlowski


Auteur

Né à Buenos Aires en 1974. DEA en Philosophie à Paris 1 en 1999. Chercheur au collectif Malgré tout entre 1995 et 2001. Il travaille depuis 2009 comme chercheur à CFS asbl. Son travail est notamment centré sur l’écriture d’analyses et études (en accès libre sur le site de CFS asbl) dans une démarche d’éducation populaire : confronter les savoirs théoriques et les savoirs d’expérience, sur un pied d’égalité. Ce travail de recherche est très inspiré par les expériences du cinéma documentaire. Il participe régulièrement à des émissions de radio (Radio libertaire, Paris pluriel, Panik, Air libre, Campus…). Il a par ailleurs réalisé trois documentaires de création sonore pour la RTBF ({Histoires Souterraines d’Argentine}, {Le modélisateur}, {Paysages}), et coréalise actuellement l’émission mensuelle {Des singes en Hiver} pour Radio Panik.