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Comment désactiver les activateurs ?
Depuis son lancement en juillet 2004, à l’initiative du ministre de l’Emploi socialiste flamand Franck Vandenbroucke, la politique d’activation des chômeurs a fait couler beaucoup d’encre, grincer beaucoup de dents et, sans doute aussi, arraché beaucoup de larmes de rage et de désespoir. Au cœur de la critique, portée avec force par la plateforme associative et syndicale […]
Depuis son lancement en juillet 2004, à l’initiative du ministre de l’Emploi socialiste flamand Franck Vandenbroucke, la politique d’activation des chômeurs a fait couler beaucoup d’encre, grincer beaucoup de dents et, sans doute aussi, arraché beaucoup de larmes de rage et de désespoir. Au cœur de la critique, portée avec force par la plateforme associative et syndicale contre la « chasse aux chômeurs », la hausse continue du nombre d’exclusions et de suspensions du bénéfice des allocations de chômage. Le dernier rapport annuel de l’Onem n’en fait pas mystère : de 4.523 personnes exclues en 2008 à 6.530 en 2009, soit une hausse de 44,37 %; de 6.425 personnes suspendues en 2008 à 7.885 en 2009 (+ 22,72 %), sans oublier les 3.272 personnes qui ont subi une réduction des allocations de chômage. Au total, près de 90.000 décisions (dont 14.656 exclusions) ont été appliquées depuis l’entrée en vigueur du système en 2004. À ceux qui disent qu’en période de déficit structurel d’emplois, les sanctions liées à l’activation poussent les exclus du chômage vers les CPAS et pas vers le travail, l’Onem répond que, selon une étude réalisée par l’HIVA de la KUL, 10% des personnes sanctionnées font appel aux CPAS, 19% sortent vers un emploi et 25% se retirent du marché du travail.
Crise ou pas, l’augmentation annuelle des sanctions, dont l’exclusion, est inéluctable tout simplement parce qu’il faut un certain délai avant que les effets de cette massive machine de contrôle bureaucratique n’apparaissent clairement. Songez donc que depuis la mi-2004, 873.934 avertissements ont été envoyés pour informer du lancement du processus et qu’au 31 décembre 2009, 489.895 demandeurs d’emploi étaient impliqués dans une procédure en cours ! De plus, les sanctionnés d’aujourd’hui sont des chômeurs d’avant 2008. Le nombre de chômeurs ayant explosé en 2009 (30.000 chômeurs complets en plus) et les prévisions pour 2010 étant du même ordre de grandeur, il est vraisemblable que le nombre d’exclus et sanctionnés ira en s’amplifiant, en dépit de la réforme du « plan d’accompagnement des chômeurs » (PAC), proposée par la ministre de l’Emploi Joëlle Milquet, et qui vient d’être adoptée par le gouvernement.
Or, n’importe quel lecteur attentif de ce cauchemar kafkaïen qu’est le rapport annuel 2009 de l’Onem, comprend rapidement que les sanctions prises dans le cadre de l’«activation du comportement de recherche d’emploi du chômeur complet » sont vraiment l’arbre qui cache la forêt. Pour s’en convaincre, j’invite le lecteur dubitatif à lire le compte rendu détaillé des « activités des services de sauvegarde du système » et des « services litiges ». En clair, le système de contrôle dont le cœur s’appelle Promes (Productivity Measurement and Enhancement System), un « instrument de mesure et de gestion en matière de politique de sauvegarde du régime » qui permet de « mesurer les efforts et vérifier si ceux-ci sont fournis au bon moment, au bon endroit et auprès des personnes appropriées. L’indicateur de qualité du système vérifie également si les efforts sont préparés d’une manière efficace et s’il en est fait rapport de manière satisfaisante et utile tant pour le contenu que pour la forme ». Promes repose sur D‑Base fraude et OASIS (Organisation anti-fraude des services d’inspection sociale), soit deux outils d’exploitation des banques de données de l’ONSS (en particulier la base Dimona), permettant d’enquêter et contrôler avec « plus d’efficience et d’efficacité, le dépistage et la lutte contre l’usage impropre et la fraude ». Depuis 2009, le contrôle des cumuls illégaux, appliqué par l’Onem et tous les organismes de paiement, ne s’opère plus seulement à posteriori, mais aussi à priori. Résultat ? « En octobre 2008, 32.655 cas Dimona ont été présélectionnés, […]. En octobre 2009, 34.322 nouveaux cas de cumul éventuel ont été détectés. En 2009, après examen et enquête de 39.074 cas, les contrôles ont découvert 21.143 cas de cumul non déclaré (54% des cas).» Il va de soi que ces contrôles débouchent sur ce que l’Onem appelle pudiquement des « décisions négatives » pour le chômeur : 36.287 mesures d’exclusion partielle ou totale en 2009 !
Votre servitrice, rescapée de la lutte anti-fraude à posteriori, tient à témoigner pour les 46% de cas que l’Onem reconnait avoir accusés à tort et pour tous les innocents incapables de se défendre inclus dans les 54% de cas dits coupables. J’ai en effet reçu en février 2010, un courrier de J.‑P. Blombed, « assistant technique » agissant par délégation pour le directeur de l’Onem, qui m’accusait, sur la base « des fichiers de données », d’avoir cumulé des allocations de chômage avec des jours de travail en mai 2008. « Par conséquent, vous serez, en principe, exclue (sic) pour la période précitée du droit aux allocations de chômage et vous devrez rembourser les montants indument perçus. J’ai provisoirement fixé à 297,33 euros, le montant que vous devez rembourser. En outre, je peux vous appliquer une sanction administrative sous la forme d’une exclusion du droit aux allocations pendant un certain nombre de semaines ou me limiter à vous donner un avertissement. Je n’ai pas encore pris de décision. Vous avez la possibilité de vous défendre par écrit ou vous pouvez demander à être entendue. »
Après avoir bataillé avec l’organisation syndicale dont je suis membre depuis quinze ans pour qu’elle instruise mon dossier (ce qu’elle n’a pas fait) et m’accompagne à l’audition demandée (je n’ai reçu confirmation que la veille), je me suis rendue le 4 mars 2010 à l’Onem. L’entretien avec Mme de Jonge, « calculateur » (sic), s’est déroulé dans un énorme couloir aménagé de petites cabines où défilaient au pas de charge des dizaines de chômeurs. Après avoir pris connaissance du courrier accusateur de l’Onem, elle a mis deux minutes, montre en main, pour retrouver la carte de pointage incriminée et constater que la prétendue fraude était inexistante ! Le 11 mars 2010, Veerle Van Riet, attaché (sic), agissant toujours par délégation pour le directeur de l’Onem, me communiquait par courrier que « l’enquête pour laquelle vous avez été convoqué(e) au bureau de chômage le 4 mars 2010 a été clôturée et n’a pas d’incidence négative sur votre droit aux allocations ».
Quelles sanctions sont prévues pour les activateurs incompétents ? Et comment les désactiver ?