Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.
Socrate Citoyen
Depuis quelques mois, le monde scolaire belge est en effervescence sur la question de la citoyenneté. La Déclaration de politique communautaire du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui prévoit la mise sur pied progressive pour l’enseignement officiel, au cours de la présente législature, d’un cours d’éducation à la citoyenneté, durant les douze ans de l’enseignement obligatoire, […]
Depuis quelques mois, le monde scolaire belge est en effervescence sur la question de la citoyenneté. La Déclaration de politique communautaire du gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui prévoit la mise sur pied progressive pour l’enseignement officiel, au cours de la présente législature, d’un cours d’éducation à la citoyenneté1, durant les douze ans de l’enseignement obligatoire, tous types d’enseignements confondus (général, technique, professionnel) à raison d’une heure par semaine. Cette heure sera prise sur les heures octroyées auparavant aux cours de religion et de morale. De plus, un arrêt de la Cour constitutionnelle du 12 mars 2015 rendant les cours de religion et de morale dérogatoires dans le réseau officiel, vient remettre en question l’interprétation juridique traditionnelle du fameux Pacte scolaire de 1959.
À la suite de ces faits, les cinq départements de philosophie des universités de la Communauté française ont décidé de se mobiliser pour davantage de philosophie dans l’enseignement. Plus précisément, ils sont unanimes à demander
- que le cours d’éducation à la citoyenneté soit, dans les deux dernières années, à fort ancrage philosophique et ce tant pour l’enseignement général que pour l’enseignement technique et professionnel ;
- que l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur en philosophie (et le master en philosophie option didactique) soit le titre requis pour donner ce cours, le master en philosophie et le master en éthique titres suffisants ;
- que ce cours porte sur deux périodes/semaine, pour les deux dernières années, au lieu d’une heure prévue dans la Déclaration de politique communautaire ;
- que ce cours soit aussi proposé dans l’enseignement libre.
Pourquoi un cours de philosophie et citoyenneté ?
C’est l’accord de gouvernement de la Communauté française qui a mis ce point à l’ordre du jour. Un tel cours nous semble utile aujourd’hui parce que notre société évolue à un rythme très rapide et doit affronter des problèmes absolument inédits, rendant problématique toute tentative d’appliquer au présent sans cesse mouvant les recettes du passé. Les jeunes, qui sont les citoyens de demain, doivent être initiés à la complexité sociale, politique et culturelle du monde actuel afin de pouvoir en être demain des acteurs lucides et affronter les défis sociaux avec les outils intellectuels requis.
Le concept actuel de citoyenneté date, pour l’essentiel, de l’époque moderne, et s’inspire plus particulièrement de penseurs tels que Hobbes, Locke, Spinoza, Montesquieu, Rousseau, Kant. Mais le monde a considérablement évolué depuis et ce concept de citoyenneté doit être aujourd’hui repensé. Pour ne citer que quelques faits plaidant en ce sens :
- le contrat social : jadis quelqu’un qui n’acceptait pas les termes du contrat social pouvait toujours quitter la société qui ne lui convenait pas et essayer de vivre ailleurs, voire dans des territoires vierges de toute présence humaine. Aujourd’hui la tragique actualité des réfugiés, qui veulent quitter des zones d’instabilité et de conflit et ne trouvent nul endroit où être accueillis, montre à quel point la situation a changé. Du mythique Mayflower, pierre originelle du rêve américain commémoré lors chaque Thanksgiving, on en arrive aujourd’hui aux bateaux de migrants qui se font refouler ou sont accueillis chez nous dans des centres fermés pour des procédures longues et incertaines, quand ils ont la chance de ne pas périr en mer. Il n’y a plus d’ailleurs. Ou plutôt l’ailleurs s’est maintenant logé au cœur même de nos sociétés avec cette population sans cesse croissante de SDF, de sans-papiers, de personnes marginalisées et souvent exploitées ;
- notre système démocratique est basé sur l’idée de représentation : les élus du peuple discutent, parlementent et élaborent ainsi les lois jugées nécessaires au vivre ensemble. Mais comme l’indique le mot même de Parlement, ces discussions prennent du temps… D’un autre côté, des flux financiers très importants peuvent être orientés à l’échelle mondiale de manière quasiment instantanée, et une information importante fait aujourd’hui le tour de la planète en quelques minutes. Ces processus peuvent avoir un effet immédiat sur la vie de millions de gens. La temporalité inhérente à nos démocraties (et à nos systèmes judiciaires) est-elle encore capable de répondre aux défis posés par les nouvelles technologies et la globalisation ? De plus, l’organisation des courants politiques en partis n’a pas eu que des aspects positifs. Certains affirment, non sans arguments, que nous vivons aujourd’hui non pas en démocratie mais en particratie, où en réalité la volonté populaire, à force d’être canalisée dans des structures rivales, mais pourtant continuellement liées les unes aux autres par des compromis, aurait été partiellement confisquée ; ceci au moment même où, grâce à internet et aux réseaux sociaux, la parole individuelle se libère et où l’idée d’une démocratie directe n’apparaît techniquement plus si utopique que par le passé ;
- la citoyenneté classique n’intégrait pas la composante environnementale : la nature était réduite à une sorte de mine aux ressources inépuisable, livrée au bon vouloir de l’homme qui n’avait pas les possibilités d’en entamer sérieusement les réserves. Les ressources de la planète n’étaient jamais vues comme une contrainte majeure pesant sur les projets humains. On sait aujourd’hui combien, depuis la Révolution industrielle, les choses ont changé. Notre terre ne peut tout simplement plus supporter les projets de vie actuels des milliards d’individus qu’elle porte. Il y a là une remise en question très profonde de la conception classique de la citoyenneté ;
- traditionnellement la citoyenneté se vivait dans le cadre de l’État nation. Mais là aussi de grands changements se sont produits ; il est indispensable de parler aujourd’hui de citoyenneté supranationale, peut-être même de citoyenneté cosmopolite ; les niveaux infra-étatiques (régionaux) se sont également considérablement développés, en lien d’ailleurs souvent avec les avancées au niveau supra-national. L’État nation ne semble plus être l’échelle à laquelle les grands problèmes économiques peuvent se régler, d’autant plus que ses moyens financiers et donc ses capacités d’action diminuent de façon inquiétante ;
- la tolérance dont Locke et bien d’autres après lui se réclamaient n’est plus la même que celle requise de nos jours : au XVIIe siècle, en dépit de quelques divergences sur des points de détails, catholiques, protestants et juifs concernés défendaient pour l’essentiel des valeurs similaires. Les libres-penseurs aux idées réellement divergentes n’étaient qu’une petite minorité. De plus ces groupes différents, sauf exceptions, se côtoyaient peu dans les faits ; ils se répartissaient dans des régions ou des pays différents. Aujourd’hui les styles de vie de deux voisins de palier peuvent diverger considérablement et provoquer des réactions de rejet mutuel.
Il ne s’agit là que de quelques exemples. On pourrait aisément en citer d’autres.
Nous pensons que dans ces conditions, un cours d’éducation à la citoyenneté, qui formerait à la tolérance, à l’écoute des autres, au dialogue interconvictionnel, à l’affirmation argumentée de ses propres positions dans l’espace public, à l’esprit critique — en particulier à l’égard des informations circulant sur le web et les réseaux sociaux —, qui expliquerait le fonctionnement de notre démocratie complexe, qui réfléchirait sur le monde commun qui nous rassemble tous en dépit de nos multiples divergences, qui ferait comprendre aux jeunes l’utilité des associations de toutes sortes sans lesquelles notre société serait beaucoup pauvre humainement et moins solidaire, et les bienfaits de l’engagement au service des autres, est une bonne chose pour notre enseignement.
La chose est d’autant plus pertinente pour nous d’autant plus que l’école, qui, pour les héritiers des Lumières, représentait un espoir majeur d’émancipation pour les couches défavorisées, traverse une crise grave : elle peine sous sa forme actuelle à assurer sa mission de formation professionnelle que lui confient les entreprises, les familles et la société dans son ensemble ; elle a du mal à donner un cadre de référence commun aux enfants et surtout aux adolescents dans le domaine des valeurs et à faire encore fonctionner l’ascenseur social, rejetant en dehors de ses circuits des nombres importants de jeunes sans diplômes avec tous les risques que cela comporte pour leur insertion professionnelle.
La raréfaction des emplois, condamnant de nombreux jeunes à des postes peu attractifs ou tout simplement au chômage, nourrit la suspicion à l’égard des grands récits traditionnels, attise le rejet de l’autre, perçu comme une menace ; des groupes marginalisés à cause de l’origine, de la couleur de leur peau sont dès lors tentés par des discours radicaux leur offrant une manière alternative de définir et d’affirmer leur identité. Le cours de citoyenneté devrait constituer un élément-clé de la mission de l’école telle qu’il faut la repenser.
Notre avis favorable sur le cours de citoyenneté n’implique nullement que nous soyons pour autant partisans de la suppression des cours de religion et de morale : c’est là un point sur lequel il ne nous appartient pas de nous prononcer.
Pourquoi un cours de citoyenneté à forte composante philosophique dans les dernières années du secondaire ?
En revanche nous sommes fermement convaincus que ce cours d’initiation à la citoyenneté devrait prendre, dans les dernières années du secondaire, une dimension fortement philosophique et nous allons tout à fait à cet égard dans le sens des recommandations du groupe de travail du Parlement de la Communauté française qui entend l’intituler Philosophie et citoyenneté.
La philosophie occidentale et la démocratie sont nées en Grèce en même temps au tournant du VIe et du Ve siècle avant notre ère ; cette émergence simultanée n’est pas l’effet du hasard : sans nous prononcer sur le fait de savoir laquelle a été à l’origine de l’autre, il est clair qu’en démocratie, l’homme prend conscience que c’est lui, par son action, qui est en charge de la société ; l’homme est la mesure de toutes choses, disait Protagoras, explicitant par là un des présupposés de la démocratie ; les réponses de la poésie et de la mythologie gardaient certes pour les Athéniens une forte portée symbolique, mais n’étaient plus comme telles considérées comme directement opérationnelles politiquement ; il incombait à l’homme de réfléchir et de délibérer collectivement sur la manière la plus juste de gérer les affaires de la cité ; autrement dit, de débattre, de décider concrètement un certain nombre de choses… et de philosopher. De proche en proche, en effet, un questionnement sur ce qui est juste amène à réfléchir à des questions sur la nature du bien commun, du bien individuel, sur la vocation de l’homme, la différence entre le vrai savoir et la simple opinion, et même sur les principes premiers du cosmos. La pensée de Platon est à cet égard un bel exemple de ce nécessaire enveloppement de la question de la citoyenneté et de l’État juste dans un ensemble de problématiques philosophiques fondamentales, qui en constituent comme l’arrière-fond.
La vie même de la démocratie athénienne était comme une école permanente de citoyenneté pour tous ses membres, de sorte que chacun pouvait se considérer comme compétent sur ces questions du juste et de l’injuste, du bien commun, alors que quand l’Assemblée du peuple examinait des problèmes techniques, elle s’en remettait naturellement aux experts sur le sujet. Notre démocratie d’aujourd’hui est indirecte et beaucoup plus complexe que son illustre aïeule. Les jeunes, pensons-nous, ne peuvent pas connaître dans le monde actuel cette proximité avec la démocratie en acte qui pourrait les former sur le tas ; ils doivent être dès lors initiés d’une manière beaucoup plus explicite et systématique à son fonctionnement et aux enjeux du vivre ensemble ; que veut dire aujourd’hui socialement et politiquement le fait que « l’homme est la mesure de toutes choses » ? Comment combiner respect des personnes (quels que soient leur origine, leur culture, leur religion, leur genre), solidarité, décisions collectives et affirmation de valeurs communes ? Cela passe, à notre avis, par un cours à forte dimension philosophique dans les classes de cinquième et sixième du secondaire.
Il s’agirait, d’aborder un certain nombre de problèmes tirés de l’actualité sociale et politique, des questions qui préoccupent les jeunes, des débats de société ; d’introduire un certain nombre de concepts philosophiques et montrer comment il s’agit d’outils ayant permis dans le passé de traiter des questions similaires, tout en faisant comprendre que le contexte a changé et qu’il y a lieu de retravailler ces concepts dans le nouveau cadre du monde actuel : bref, il s’agirait, un peu comme on prouve le mouvement en marchant, d’apporter la preuve que la tradition philosophique donne à penser et permet aux jeunes qui y sont initiés d’apprendre à penser par eux-mêmes. Quelques références à des recherches de philosophie contemporaine montreraient que ce type d’activité reste vivant et fécond aujourd’hui.
Dans notre esprit, ces leçons devraient aussi s’ouvrir aux philosophies juives et islamiques ; il serait précieux notamment pour les jeunes musulmans de comprendre qu’il existe d’autres traditions d’interprétations du donné coranique que celles qui inondent les réseaux sociaux et les librairies islamiques ; des philosophes comme Ibn Sina (Avicenne) et Ibn Rushd (Averroès) ont développé des doctrines compatibles avec la révélation, mais où la raison garde tous ses droits, ouvrant par là la possibilité de penser un islam des Lumières. Les emprunts à la tradition philosophique devraient concerner également les philosophies extrême-orientales (Chine, Inde, Japon) car nous ne pouvons rester indifférents à l’entrée de tous ces pays dans le club des acteurs mondiaux de premier plan et encore davantage aux trésors de sagesse que recèlent ces traditions pour une vie de qualité aujourd’hui. De plus, en nous ouvrant à l’altérité philosophique, nous apprenons à mieux cerner les spécificités de notre propre tradition occidentale.
La philosophie telle que nous l’entendons se trouve à l’intersection de deux types de pratiques intellectuelles : les pratiques scientifico-techniques où l’on cherche à expliquer le monde, en sélectionnant un objet d’étude bien délimité et en l’étudiant de façon rationnelle et critique, selon une méthodologie expérimentale adaptée. Ce type de discours a connu des développements considérables ces derniers siècles, à tel point que certains ont voulu y voir le seul mode d’accès valable au réel. Mais, avant le discours scientifique, ont existé et existent encore ce qu’on pourrait appeler les discours de sens : nous visons par là les doctrines religieuses (athéisme inclus), les conceptions artistiques, littéraires, les visions du monde individuelles ou collectives : ils portent sur le tout du réel et prétendent en élucider le sens, définir des notions comme celles de bien et de mal, de beau et de laid, de vrai et de faux ; ils entendent constituer un cadre englobant et signifiant pour la vie des hommes. L’ambition de ces discours à l’égard du tout les amène habituellement à procéder de façon simplement assertive, voire dogmatique, sans argumentation véritablement complète sur le plan rationnel et critique. Mais cette faiblesse méthodologique ne doit pas occulter leur contribution essentielle à la recherche du sens de la vie ; les sciences, quant à elles, sont plus rigoureuses, mais paient cette rigueur d’une fragmentation de leurs objets d’études où toute signification en définitive se dissipe au profit de formalismes abstraits.
Dans le monde actuel, nous voyons ces deux types de discours cohabiter difficilement, dans certains cas s’affronter ouvertement, chacun voulant réduire l’autre à la non-pertinence, en particulier sur la question du vrai. Ce manque de reconnaissance mutuel s’explique par l’absence de point de vue méthodologique véritablement commun. La philosophie a ceci de particulier qu’elle se veut rationnelle et critique comme les sciences, mais ouverte également sur le tout, comme les discours de sens : on peut philosopher sur n’importe quoi, sur tout et même sur le tout, si l’on procède selon la méthodologie adaptée. La philosophie constitue dès lors une sorte d’instance de médiation, capable de discuter avec les discours de type scientifique sur la base d’un idéal commun de rationalité critique et apte également à tenir le rôle d’interlocuteur pour les discours de sens sur des thèmes essentiels tels que le bien et le mal, le sens de l’existence, un concept de vérité qui ne se réduit pas à l’exactitude, etc. Considérée sous cet angle, la philosophie n’est pas du tout un luxe, mais une véritable nécessité, un élément indispensable de la cohésion sociale dans nos sociétés démocratiques et pluralistes ; sans elle, discours de sens et discours scientifiques n’ont tout simplement plus de référentiel commun, et risquent de basculer vers une forme ou l’autre d’intégrisme (l’intégrisme religieux est suffisamment connu ; mais le scientisme peut être considéré comme une forme d’intégrisme scientifique).
En ce sens, nous pouvons vraiment parler aujourd’hui d’un rôle citoyen de la philosophie. Par sa méthode réflexive, elle questionne, argumente, reprend les résultats des sciences, écoute de manière critique les assertions des discours de sens, et intègre tout cela à sa conception qui se veut une contribution rationnelle à la question du sens, tout en restant consciente des limites de son approche. Elle assure un espace commun entre personnes se réclamant d’options différentes et même disparates. Repenser une notion élargie du concept de citoyenneté rentre donc bien dans son domaine de compétence et les élèves pourraient ainsi comprendre qu’avec ce cours de Philosophie et citoyenneté, ils reçoivent des outils pour garder vivant ce monde commun sans lequel il ne peut y avoir de reconnaissance mutuelle et pour ensemble, dans une démarche relevant d’une dynamique d’intelligence collective, œuvrer à définir et mettre en œuvre ce nouveau concept de citoyenneté que le contexte actuel appelle manifestement de ses vœux.
Jean-Michel Counet - président de l’Institut supérieur de philosophie (UCL)
Laurence Bouquiaux - présidente de département (ULg)
Sophie Klimis - présidente de département (USaint-Louis)
Marie-Geneviève Pinsart - présidente de département (ULB)
Laura Rizzerio - présidente de département (UNamur)
- «[…] un cours commun d’éducation à la citoyenneté, dans le respect des principes de la neutralité, en lieu et place d’une heure de cours confessionnel ou de morale laïque. Ce cours sera doté de référentiels spécifiques, incluant un apprentissage des valeurs démocratiques, des valeurs des droits de l’homme, des valeurs du vivre ensemble et une approche historique des philosophies des religions et de la pensée laïque. En aucun cas, cette réforme ne pourra entrainer la perte d’emploi pour les enseignants concernés en place. » DPC – juillet 2014. L’intitulé du cours est devenu depuis Philosophie et citoyenneté, dans le rapport du groupe de travail du Parlement de la Communauté française (1er juillet 2015)