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Nouveaux ennemis

Blog - Anathème - Identité Maroilles valeurs par Anathème

mars 2018

Les musul­mans sapent nos valeurs occi­den­tales. Les fémi­nistes sapent nos familles et notre iden­ti­té. Les com­mu­nistes et les syn­di­ca­listes sapent notre éco­no­mie. Les para­sites sapent la valeur-tra­­vail. Les migrants sapent notre modèle social. Nous savons tout cela.  Nos plus brillants intel­lec­tuels ont for­gé des termes pour dénon­cer avec nuance ces dan­gers qui nous menacent : fémi­na­zis, néocommunistes, […]

Anathème

Les musul­mans sapent nos valeurs occi­den­tales. Les fémi­nistes sapent nos familles et notre iden­ti­té. Les com­mu­nistes et les syn­di­ca­listes sapent notre éco­no­mie. Les para­sites sapent la valeur-tra­vail. Les migrants sapent notre modèle social. Nous savons tout cela. 

Nos plus brillants intel­lec­tuels ont for­gé des termes pour dénon­cer avec nuance ces dan­gers qui nous menacent : fémi­na­zis, néo­com­mu­nistes, assis­tés, Grand Rem­pla­ce­ment, isla­mi­sa­tion, isla­mo­gau­chiste sont quelques-uns d’entre eux. Uti­li­sés à bon escient, c’est-à-dire jetés au visage des gens qui nous contra­rient ou contre­disent, ils affer­missent nos posi­tions et nous aident à résister. 

Cepen­dant, le plai­sir d’être un che­va­lier sans tabou par­ti­ci­pant à la croi­sade contre la bien­pen­sance ne doit pas nous aveu­gler et nous faire oublier qu’il est impor­tant d’identifier tous nos enne­mis. Rien n’est plus fourbe et dan­ge­reux, en effet, que l’ennemi qui échappe à notre regard et our­dit dis­crè­te­ment de noirs com­plots. N’avons-nous ain­si pas récem­ment consta­té que la gen­tille fémi­niste qui approu­vait notre mise en cause de l’oppression des femmes par les musul­mans (tous les musul­mans) pou­vait se muer en une ter­rible vira­go, prête à déco­cher une carte blanche ou à reven­di­quer une parole publique pour cri­ti­quer, cette fois, les agres­sions et les dis­cri­mi­na­tions dont d’innocents mâles sou­chiens se ren­draient pré­ten­du­ment com­plices ? Quel choc ! 

Pour cette rai­son, il me semble aujourd’hui impor­tant d’attirer l’attention sur un nou­vel enne­mi et de jeter son iden­ti­té en pâture à la population. 

Le pire dan­ger est celui qu’on ne recon­nait pas au pre­mier regard. Or, sans le savoir, vous fré­quen­tez sur­ement déjà le nou­vel enne­mi. Sous une appa­rence inno­cente, il dis­tille un insi­pide mais dan­ge­reux poi­son. Mais où ver­ser ce poi­son, si ce n’est dans votre assiette ? 

Oui, vous l’avez devi­né, il cui­sine. Pas­sion­né par l’art de la table, il col­lec­tionne les recettes. Dans le dépliant du Car­re­four, dans les rayons du Col­ruyt, dans les publi­ci­tés Del­haize, il col­lecte des recettes soi­gneu­se­ment sélec­tion­nées. N’importe les­quelles ? Certes non ! Comme dans tout pro­ces­sus d’autoradicalisation, l’ennemi sélec­tionne ses sources d’information. Il n’est pas celui qui demande à sa grand-mère la recette du lapin à la gueuze ou des gaufres de Liège, il n’est pas celui qui achète un livre de recettes régionales. 

L’ennemi est le vec­teur du Grand Rem­pla­ce­ment culi­naire, il tente d’effacer de notre mémoire les gouts d’antan pour les rem­pla­cer par des saveurs impor­tées. Les piments qui échauffent les sangs, les fécu­lents qui alour­dissent l’estomac, les herbes qui enivrent, les pois­sons qui… Enfin, bref, vous avez com­pris. Nous sommes mena­cés par une pen­sée culi­naire unique, qui pré­tend faire taire la mar­mite de nos aïeux au pro­fit du cuit-vapeur. 

Sous l’aspect inno­cent d’une tante qui découvre le tajine, d’une voi­sine qui s’aventure sur les terres du riz sau­té, d’un père (oui, il y en a) qui cède aux charmes du jala­peño ou de la moambe, se cache un vaste mou­ve­ment, celui de la guerre des civi­li­sa­tions culi­naires et du déclin de nos tra­di­tions et valeurs calo­riques. Ne voyez-vous pas que, radi­ca­li­sé ou idiots-utiles, tous œuvrent à l’apparition de menus végé­ta­riens dans les can­tines où régnaient en maitres la bière de table et le haché de porc ? Sous leur impul­sion, le glu­ten, les pro­duits d’origine ani­male, les exhaus­teurs de gout, le sain­doux ou la graisse d’oie reculent, face à des pro­duits exo­tiques, cen­sé­ment plus sains, mais sur­tout vec­teurs du rejet de nos valeurs. 

Vou­lons-nous inter­dire le cur­ry, le cro­co­dile, le riz, l’autruche ou la papaye ? Certes non ! Nous sommes libres, nous man­geons ce que nous vou­lons, mais nous vou­lons res­ter nous-mêmes… et comme nous sommes ce que nous man­geons, pour être surs de ne pas nous perdre, exi­geons l’intégration d’ingrédients tra­di­tion­nels dans toutes les recettes. Toutes ! Répri­mons les réfrac­taires, incri­mi­nons les médias dif­fu­sant des recettes non conformes, stig­ma­ti­sons les popu­la­tions refu­sant de man­ger nos plats ! 

Vive la morue aux bananes plan­tains au brie de Meaux, flam­bée au Cal­va­dos ! Répan­dons le riz sau­té aux gam­bas et joues de porc, et sa gar­ni­ture de choux de Bruxelles gra­ti­nés au Maroilles… accom­pa­gné de frites ! Impo­sons le tajine d’a­gneau aux crottes de Recogne et à la bière d’ab­baye ! Pro­mou­vons le cur­ry de blanc bleu belge à l’ail des ours et au cho­co­lat belge ! 

Sans doute le gout des mets se trou­ve­ra-t-il alté­ré. Peut-être même les plats seront-ils à peine man­geables, mais ils nous res­sem­ble­ront, à nous qui vou­lons res­ter nous-mêmes.

Anathème


Auteur

Autrefois roi des rats, puis citoyen ordinaire du Bosquet Joyeux, Anathème s'est vite lassé de la campagne. Revenu à la ville, il pose aujourd'hui le regard lucide d'un monarque sans royaume sur un Royaume sans… enfin, sur le monde des hommes. Son expérience du pouvoir l'incite à la sympathie pour les dirigeants et les puissants, lesquels ont bien de la peine à maintenir un semblant d'ordre dans ce monde qui va à vau-l'eau.