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Lutter pour les droits des femmes : un combat radical !

Blog - Actualités par

mars 2018

En ce 8 mars, jour­née inter­na­tio­nale de lutte pour les droits des femmes, La Revue nou­velle prend le par­ti de la mili­tance. Par oppo­si­tion avec un dis­cours qui occupe chaque jour une place crois­sante dans la sphère média­tique lais­sant entendre que l’é­ga­li­té atteinte, il fau­drait main­te­nant que les fémi­nistes revoient leurs reven­di­ca­tions dans un sens bien […]

Actualités

En ce 8 mars, jour­née inter­na­tio­nale de lutte pour les droits des femmes, La Revue nou­velle prend le par­ti de la mili­tance. Par oppo­si­tion avec un dis­cours qui occupe chaque jour une place crois­sante dans la sphère média­tique lais­sant entendre que l’é­ga­li­té atteinte, il fau­drait main­te­nant que les fémi­nistes revoient leurs reven­di­ca­tions dans un sens bien plus consen­suel, nous libé­rons quelques articles d’au­trices réso­lu­ment enga­gées, dont les pro­pos sont empreints d’une bonne dose de radicalité !

Comme le sou­li­gnait Lau­rence Rosier dans une chro­nique parue l’an pas­sé dans nos colonnes, sous l’ac­cu­sa­tion faite notam­ment aux fémi­nistes d’im­po­ser un « poli­ti­que­ment cor­rect » qui irait « trop loin » se dis­si­mule, de manière consciente ou non, la sur­vi­vance de rap­ports de domi­na­tion. Plus encore, l’i­dée que l’é­ga­li­té serait atteinte est bien évi­dem­ment un leurre. Exemple criant : les panels d’ex­perts des col­loques aca­dé­miques comme des émis­sions d’in­for­ma­tion res­tent très majo­ri­tai­re­ment mas­cu­lins, alors que des outils existent per­met­tant de trou­ver des expertes sur de très nom­breux sujets — ce que rap­pe­lait Caro­line Van Wyns­ber­ghe dans notre n°3/2017.

Il est donc néces­saire de rap­pe­ler l’im­por­tance du com­bat pour l’é­ga­li­té, lequel ne se construit pas en oppo­si­tion aux hommes, mais au patriar­cat, c’est-à-dire au sys­tème de la domi­na­tion mas­cu­line, comme le sou­li­gnait Odette Thi­baut dans un article deve­nu célèbre, publié dans un tout aus­si célèbre dos­sier de 1974, « Nais­sance de la femme ». Si, fré­quem­ment, des com­men­ta­teurs ren­voient les fémi­nistes à la haine des hommes, la confu­sion est bien de leur côté : en fait, ils ne font que sous­crire à une longue tra­di­tion de réduc­tion des femmes à « la femme uni­di­men­sion­nelle », à la « femme-sexe » (matrice ou objet de plai­sir) qui « natu­ra­lise » les rap­ports de domination. 

Bien sûr, les femmes qui dérogent à cette opé­ra­tion sont immé­dia­te­ment taxées de furies, d’hys­té­riques, de sor­cières. Cette der­nière figure est sans doute l’une des plus signi­fi­ca­tives, vu la charge his­to­rique qu’elle contient. Nadine Pla­teau, en novembre 2011, sug­gé­rait qu’il y a une conti­nui­té entre les chasses aux sor­cières et les règle­ments qui inter­disent le port du voile. Dans les deux cas, « on tente de dis­soudre les ten­sions sociales en s’acharnant contre une caté­go­rie de femmes mino­ri­taires, vul­né­rables socia­le­ment et économiquement ». 

Mais ce pro­ces­sus n’est pas le seul élé­ment de conti­nui­té his­to­rique. Clau­dine Lié­nard sou­li­gnait ain­si dans notre numé­ro 5 de 2017, « Monstres », que l’as­si­gna­tion « sor­cière » ren­voie avant tout les femmes à la « mons­truo­si­té » construite par dif­fé­ren­cia­tion à la norme impo­sée du mas­cu­lin, que ce soit en ce qui concerne les corps ou les savoirs. Sys­té­ma­ti­que­ment appo­sée et impo­sée aux fémi­nistes, elle est en effet une manière de sug­gé­rer l’ir­ra­tio­na­li­té de leur com­bat, face à une figure de l’homme qui incarne la Science et la Rai­son. Or les tra­vaux des fémi­nistes regorgent de tré­sors de savoirs par­ti­cu­liers, dont la sau­ve­garde et la valo­ri­sa­tion consti­tuent des enjeux essen­tiels aujourd’­hui, rai­son pour laquelle La Revue nou­velle sou­tient la biblio­thèque Léo­nie Lafon­taine de l’U­ni­ver­si­té des femmes. 

La richesse des tra­vaux des fémi­nistes est aus­si liée à une tra­di­tion de débats internes aus­si vifs qu’é­ru­dits, qui se pour­suit aujourd’­hui très lar­ge­ment, jusque dans nos colonnes, comme le prouve l’ar­ticle de Gha­liya Djel­loul dans notre der­nier numé­ro, défen­dant un « fémi­nisme plu­ri­ver­sel » à même de dépas­ser l’ho­ri­zon colo­nial. La force de ces débats est d’être sus­ci­tée par l’ac­tion des fémi­nistes elles-mêmes, ce qui les dis­tingue des débats impo­sés dans les arènes par­le­men­taires ou média­tiques où l’in­jonc­tion à la nuance peut rapi­de­ment deve­nir une manière de faire taire la parole des femmes. Sur­tout lorsque cette parole se fait témoi­gnage de vulnérabilités.

C’est tout le sens d’une jour­née telle que celle-ci de par­ti­ci­per à la libé­ra­tion de la parole, à la célé­bra­tion de l’ir­rup­tion des reven­di­ca­tions fémi­nistes dans la sphère publique. La Revue nou­velle espère y contri­buer chaque jour, en publiant tou­jours plus d’au­trices, cher­cheuses et/ou mili­tantes, enga­gées et/ou radicales.