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Les Européens, un peu ou fort radins quant à l’accueil des réfugiés ?
« Dans ses relations avec le reste du monde, l’Union affirme et promeut ses valeurs et ses intérêts et contribue à la protection de ses citoyens. Elle contribue à la paix, à la sécurité, au développement durable de la planète, à la solidarité et au respect mutuel entre les peuples, au commerce libre et équitable, à l’élimination de la pauvreté et […]
« Dans ses relations avec le reste du monde, l’Union affirme et promeut ses valeurs et ses intérêts et contribue à la protection de ses citoyens. Elle contribue à la paix, à la sécurité, au développement durable de la planète, à la solidarité et au respect mutuel entre les peuples, au commerce libre et équitable, à l’élimination de la pauvreté et à la protection des droits de l’homme, en particulier ceux de l’enfant, ainsi qu’au strict respect et au développement du droit international, notamment au respect des principes de la charte des Nations unies. »
Traité sur l’Union européenne, Article 3.5
Les ministres européens en charge de la Justice, de l’Asile et de la Migration (pour la Belgique : Theo Francken) se sont enfin accordés sur une clé de distribution des réfugiés dont les embarcations prennent la Grèce et l’Italie comme destination.
L’accord porte sur 32.256 personnes qui devront être « redispatchées » depuis ces deux pays vers les autres.
L’opération de réimplantation débutera concrètement à partir d’octobre après l’avis du Parlement européen qui entérinera la décision du Conseil des ministres.
Ce chiffre est ridiculement faible au regard des flux de réfugiés débarquant sur les côtes, sans même parler de ceux qui ont péri au cours du trajet. Selon l’Organisation internationale des migrations, au cours du premier semestre de cette seule année, ce ne sont pas moins de 160.000 personnes qui ont atteint le territoire européen via la Grèce et l’Italie. À titre de comparaison, pour toute l’année 2014, ce sont 276.000 personnes qui sont illégalement entrées en Europe, une hausse de 155% par rapport à 2013.
Ce chiffre, qui semble affoler les dirigeants européens et une partie de leur opinion publique, n’est rien non plus au regard des 345.000 citoyens de Bosnie-Herzégovine auxquels l’Allemagne redonna des perspectives jusque-là ternies par les conflits qui avaient ensanglanté et ravagé les pays de l’ex-Yougoslavie. En 2013, à elle seule, la Suède reconnaissait pas moins de 26.800 demandeurs d’asile.
L’effort européen est encore plus dérisoire lorsque l’on le jauge au regard de la pression migratoire à laquelle le Liban, la Turquie, la Jordanie font face : entre 2013 et 2014, 132.000 demandeurs d’asile provenant d’Irak, de Libye, de la Palestine et de la Syrie se sont enfuis vers ces trois pays… Faut-il encore rappeler que, au total, la Turquie abrite 1,5 million de réfugiés syriens sur son territoire ?
Les ministres ont poussé la bouffonnerie jusqu’à reporter à plus tard la discussion sur une « rawette » de 7.744 personnes. Le lecteur ne pourra qu’être subjugué par la précision très mathématique de ces chiffres : 32.356 et 7.744… Des « comptes d’apothicaires » ? M’enfin, que dites-vous là ?
Notons enfin que ces chiffres ne sont nullement contraignants !
Une annexe aux conclusions du Conseil des ministres précise donc la répartition des réfugiés. Au-delà de ces chiffres froids, il nous semblait intéressant de les mettre pour chaque pays en relation avec deux autres indicateurs :
- la taille du pays telle que définie par sa population totale : l’accueil de 1.100 – 1.400 réfugiés n’est pas aussi « méritoire » pour un pays de 40 millions d’habitants (la Pologne) que pour des pays quatre moins peuplés (le Portugal, la Belgique ou la Suède);
- le niveau de vie des habitants dont rend approximativement compte le niveau du PIB par habitant exprimé en parité de pouvoir d’achat : l’accueil de 1.300 réfugiés est relativement plus facile pour un pays riche (le Belge est, en moyenne, 20% plus riche que l’Européen moyen) que pour un pays moins bien nanti (le Portugais est, lui, 20% moins riche).
Le graphique suivant combine ces éléments pour fournir une grille de lecture originale permettant de situer l’effort fourni par chaque pays. Le nombre de personnes accueillies par chaque pays est rapporté à sa population totale. Le nombre moyen de réfugiés par pays et par millions d’habitants est de 111 et, si l’on exclut du calcul l’Autriche et la Hongrie qui ne se sont pas engagés sur un nombre de réfugiés à accueillir, 121.
Le niveau de vie moyen est exprimé par rapport à la moyenne de l’UE28. Ce type de normalisation des données rend plus pertinentes les comparaisons entre les États membres.
La Belgique ouvrira ses portes à 120 personnes par millions d’habitants, ce qui lui permet de figurer parmi la moyenne. C’est beaucoup mieux que la France (103), mais moins bien que l’Allemagne (130) et que huit autres pays. Compte tenu de son standard de vie qui est l’un des plus élevés de l’UE, son engagement est loin d’être exceptionnel – mais pouvait-on en attendre autre chose de la part de Theo Francken ? – : son effort est proche de celui de la République tchèque (105) et du Portugal (126), pays de taille comparable, mais nettement plus pauvres.
Prochaine étape : la négociation sur la répartition des 7.744 réfugiés supplémentaires, avec une nouvelle formule mathématique savante qui, selon les rumeurs, ferait intervenir le mythique nombre d’or…
(Le Danemark, le Royaume-Uni ne sont pas concernés par l’accord car ils ne se situent pas dans l’espace Schengen de libre circulation des personnes. Quant à l’Irlande, elle pourra participer à l’effort européen si elle marque finalement son accord avec la décision ministérielle de ce 20 juillet.)