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Le boulangisme, avenir de la démocratie
On l’a souvent dit, mais peut-être trop rarement, la politique est avant tout une question de sens des priorités. Depuis déjà longtemps, fusent de toute part des critiques à l’adresse de notre personnel dirigeant, l’accusant d’être dépourvu de vision à long terme, incapable de hiérarchiser les problèmes sociaux et privé de toute forme de conviction (autre que celle de la nécessité de leur réélection, ce qui, vous en conviendrez, est mieux que rien).
Faisant fond sur l’adage selon lequel « on a la classe politique qu’on mérite », on est parfois tenté de voir dans ces défauts de nos politiques, le reflet de notre propre inconséquence, de notre désabusement et du désordre qui règne dans nos propres pensées. Car enfin, ne serait-il pas aisé de poser de bonnes questions, de demander des comptes, de refuser de prendre des boniments pour argent comptant ?
L’espoir, en cette matière, n’est pas perdu, car voilà que la presse et la toile viennent de s’enflammer et de dénoncer avec vigueur un impardonnable impair : Jean-François Copé ne connait pas le prix d’un pain au chocolat ! Supéfaction, scandale, scènes de panique, cris d’orfraie, cannibalisme, afflux de nouveaux membres au Parti socialiste français, aucune réaction ne pourrait être considérée comme exagérée face à ce scandale. Enfin, une nation voisine se réveille, prête, à nouveau, à illuminer le monde de ses Lumières !
La faute est d’autant plus grave qu’elle n’est pas le fait d’un individu déconsidéré et isolé, mais bien de M. Copé, à la réputation intacte. Certes, il était soupçonné d’avoir truqué les élections internes de son parti et d’avoir été une des chevilles ouvrières de l’affaire Bygmalion ; bien entendu, il s’était épanché sur le « racisme anti-blanc » et avait raconté des bobards sur des vols de pains au chocolat par des hordes d’allochtones ; en effet, il avait été pris en flagrant délit de soutien à Nadine Morano. Pecadilles que tout cela, pecadilles qu’il était indigne de relever !
Mais qu’il ne connaisse pas le prix d’un pain au chocolat, voilà qui est autre chose ! Car, voyez-vous, la gastronomie est au cœur de l’identité française – comme l’a lui-même rappelé M. Copé, dans son combat contre l’invasion du halal – ; elle est dès lors une chose éminemment sérieuse dépassant de loin la problématique alimentaire. Or, parmi les gloires gastronomiques de la France, sa boulangerie, bien évidemment, tient une place de choix. Le croissant, la baguette, le pain au chocolat sont des aliments de base, pour le corps (national) et l’esprit (de meute). Comment pourrait-on par conséquent considérer comme présidentiable un homme incapable de jauger si le SMIC ou les allocations de chômage permettent un approvisionnement suffisant en pains au chocolat ? Peut-on imaginer élire un candidat qui ne pourrait décliner, à volonté, le budget de l’État en euros (monnaie déconsidérée dont la droite décomplexée aura tôt fait de se débarrasser) ou en pains au chocolat (devise d’avenir dont l’avènement signera le retour de la souveraineté nationale et de l’orgueuil du même acabit) ? Le scandale est patent.
Il est temps de faire taire ceux qui s’acharnent à dénoncer les simplismes de nos politiques, leurs attaques contre les libertés fondamentales, leurs mensonges et leur bêtise volontaire. Broutilles que tout cela ! Certes, il est temps de purger le monde politique, mais pas sur la base de réflexions idéologiques, ni de questions morales, encore moins de la Convention européenne des droits de l’homme. Cette dernière, d’ailleurs, ne tardera pas à être dénoncée par les États occidentaux, comme le promettent de plus en plus de politiques de droite, à l’image de Theresa May ou de François Fillon.
La question de la compétence du personnel politique ? Encore moins ! Que nos ministres n’entravent que dalle aux matières qu’ils jouent à la chaise musicale au long de leur interminable carrière, voilà qui est sans importance ! Que l’on apprenne demain que le ministre des finances ne fait rien contre la fraude fiscale, que celle de la santé creuse la tombe des malades, que celui de la mobilité travaille à la prospérité des embouteillages ou que celui de l’emploi s’applique à rendre invivable le peu qu’il en reste, qu’importe !
Il est par contre urgent de vérifier que les Van Overtveldt, De Block, Bellot ou Peeters connaissent le prix d’une couque au beurre, d’une mitraillette-cervelas ou d’un abonnement illimité de téléphonie mobile ! Gageons que les citoyens et la presse belges, galvanisés par l’exemple de notre grand voisin, trouveront maintenant le courage de poser les bonnes questions. Bravant les périls, ressuscitant l’agora antique en mille microtrottoirs, osant toutes les questions, ouvrant tous les dossiers, ils ouvriront une nouvelle ère démocratique.
D’ailleurs, ils n’ont pas attendu, le mouvement est déjà en route ! Benjamin Maréchal, te voilà ! Enfin !