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Fir d’ esse Walon !

Blog - Anathème par Anathème

septembre 2013

Longtemps, je me suis refusé au nationalisme. Défiler en culotte courte ou bottes d’équitation avec des fascistes flamands, des indépendantistes bretons, des autonomistes québécois, des isolationnistes catalans, des terroristes basques ou des nostalgiques de l’Empire français, peu pour moi. Toutes ces croix noires, ces aigles, ces oriflammes, ces chansons insupportables, ces gosses à l’œil éteint beuglant […]

Anathème

Longtemps, je me suis refusé au nationalisme. Défiler en culotte courte ou bottes d’équitation avec des fascistes flamands, des indépendantistes bretons, des autonomistes québécois, des isolationnistes catalans, des terroristes basques ou des nostalgiques de l’Empire français, peu pour moi. Toutes ces croix noires, ces aigles, ces oriflammes, ces chansons insupportables, ces gosses à l’œil éteint beuglant près de leurs parents décérébrés leur soutien à la préférence nationale, à l’isolationnisme linguistique, à la pureté génétique ou à je ne sais quelle autre manifestation de la supériorité des abrutis d’ici sur les débiles d’ailleurs, pas pour moi !

Mais maintenant, tout a changé ! Rudy, ce bon Rudy, notre grand leader, si discret, presqu’effacé, mais tellement bienveillant, Rudy, donc, nous a imaginé un nationalisme sur mesure, rien que pour nous. Pas un méchant comme celui des flamands, mais bien un gentil, un doux, un aimable, un respectueux.

Orgue de barbarie et Tchantchè en tête, nous défilerons gentiment pour rappeler que nous sommes meilleurs (et plus gentils) que les Flamands, ces sales cons nationalistes. Parce que ce n’est pas nous qui nous sentirons supérieurs aux autres – aux Flamands, surtout –, c’est juste qu’apparaîtra enfin, dans toute son objectivité, le fait que les Flamands sont imbéciles, haineux et renfermés sur eux-mêmes. Et nazis. Sans compter qu’ils parlent une langue ridicule, alors que nous parlons la noble langue de Voltaire et de Jean Roucas !

Nous allons enfin pouvoir nous lever tôt, fiers de nous-mêmes, unis dans notre marche industrieuse vers un avenir radieux où nous dominerons le monde et les éléments. Le soir venu, la vie sera belle devant un verre de peket entre camarades de chez nous.

Espérons juste que les Liégeois ne commenceront pas à nous les briser avec leur sous-régionalisme fransquillolâtre et leur accent tellement idiot que nous n’avons jamais osé détromper les Français au sujet de l’unicité de « l’accent belge ». Mais je suis sûr qu’ils comprendront, comme les Gaumais, que la pureté de notre engagement implique qu’ils ne la ramènent pas trop.

Parce que, question Gaumais, il n’y a rien de plus compliqué que de faire entendre raison à ces paysans de Luxos. Vous voyez, un Luxo, question arriération mentale, c’est presque pire qu’un de ces Ritals du Centre. Vous savez, ceux qui n’ont renoncé à l’abrutissement des aciéries et des verreries que pour plonger dans celui de la Cara Pils.

Pour les Carolos, ça se fera tout seul. Ils seront tellement contents qu’on leur donne quelque chose à aimer d’autre que le ring de Charleroi, qu’on leur propose d’autres marches que la tournée de mendicité des villages de l’entité qu’ils nous suivront comme un seul homme.

Je suis intimement convaincu que tout ceci se règlera rapidement en expliquant à chacun la différence entre un bon et un mauvais Wallon et en rappelant que, la Wallonie, tu l’aimes ou tu la quittes. Parce que, « terre d’accueil », je veux bien, mais faut pas non plus nous prendre pour des pigeons.

Je crois aussi que, face à la gentillesse et à la positivité de notre nationalisme, chacun rentrera dans le rang et acceptera d’être heureux avec nous. Vola pocwè k’on s’ra fir d’esse Walons !

Anathème


Auteur

Autrefois roi des rats, puis citoyen ordinaire du Bosquet Joyeux, Anathème s'est vite lassé de la campagne. Revenu à la ville, il pose aujourd'hui le regard lucide d'un monarque sans royaume sur un Royaume sans… enfin, sur le monde des hommes. Son expérience du pouvoir l'incite à la sympathie pour les dirigeants et les puissants, lesquels ont bien de la peine à maintenir un semblant d'ordre dans ce monde qui va à vau-l'eau.