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Entreprises publiques : éloge de la frugalité
Chacun en est conscient, nos services publics sont dans un état préoccupant. Les usagers – enfin, les clients – n’obtiennent pas le service qu’ils sont en droit d’attendre. Ainsi, les demandeurs d’asile doivent-ils attendre des mois avant de pouvoir être rapatriés dans leur pays en guerre, des chômeurs en fin de droit ne sont contrôlés qu’épisodiquement alors qu’un garde chiourme à domicile leur ferait le plus grand bien et des délinquants patientent longuement avant de pouvoir être incarcérés.

Un des exemples les plus préoccupants est sans doute celui de la SNCB. La ponctualité des trains est catastrophique : feuilles mortes, pluie, gel, trop grande fréquentation, encombrement de la Jonction Nord-Midi, tout se ligue contre la fluidité du trafic ferroviaire. Le matériel est vétuste, la mise en place du RER battra bientôt le record de retard établi lors du creusement de la Jonction, les câbles sont volés par kilomètres… la situation est catastrophique.
N’importe quel patron du privé, la larme à l’œil, vous soufflerait mille solutions : une aide de l’État sous forme d’exemptions fiscales, une autorisation implicite de frauder, des primes à l’embauche, un allègement des charges, une baisse des exigences de sécurité, etc. Soutenir l’emploi, l’innovation, la rentabilité, la compétitivité, mais soutenir à grands frais ; les patrons du privé adorent l’État quand il vient les bras chargés de cadeaux.
Mais pour une entreprise publique telle que la SNCB, pour les services publics, pour le secteur culturel, une cure d’amaigrissement est la solution. Pour améliorer le service, il convient de tailler dans les budgets, de bloquer les investissements, de réduire le personnel et d’exiger l’équilibre budgétaire. Parce que le public est un cas à part…
L’exemple nous est donné par Jacqueline Galant : la SNCB devra (encore) réaliser un certain montant d’économies (voire un montant certain, elle n’en est pas trop sûre), ce qui permettra à l’entreprise publique de mieux assumer son rôle crucial en matière de mobilité. C’est en effet parce que la mobilité est essentielle pour l’économie et l’environnement (notamment) que les chemins de fer jouissent de toute la sollicitude du gouvernement et qu’un plan ambitieux a été mis en place, fondé sur une analyse précise de la situation.
On ne songe bien entendu pas une seconde que la SNCB serait soumise à une injonction paradoxale. Au contraire, il faut voir dans les politiques annoncées le signe à la fois d’une connaissance fine du fonctionnement des services publics et d’une aptitude à faire fi de tout tabou. Et, justement, le problème du public est qu’il dispose de trop de moyens. Pour le rendre plus efficace, il faut l’assécher, comme on le ferait d’une plante trop arrosée. Pour lui, la frugalité est gage de performances, de compétitivité et de service de qualité !
Convenons que ce diagnostic est particulièrement bienvenu : il permettra de réduire les dépenses de l’État et de financer l’augmentation du bonus des patrons de la SNCB, lesquels seront mieux rémunérés à mesure que l’entreprise améliorera la ponctualité de ses trains. Car les patrons ne sont pas comme les entreprises publiques : eux ont besoin d’argent, de beaucoup d’argent pour être efficaces. Et si ça ne fonctionnait pas, ce serait le signe de ce que beaucoup n’est pas encore assez…
Ce dont ont besoin les usagers du rail, c’est de patrons bien payés, pas de nouvelles locomotives !
Photo : Chr. Mincke