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Élections, piège à con

Blog - Anathème - démocratie élections par Anathème

mars 2016

Comme le disait Fran­çois Morel dans son billet radio­pho­nique du 4 mars, sur France Inter, on peut être un excellent can­di­dat à la pré­si­dence et un mau­vais pré­sident. Les Fran­çais, déçus de leur pré­sident actuel[efn_note]Ainsi que du pré­cé­dent, et de celui auquel ce der­nier avait déjà succédé.[/efn_note], frus­trés du grand homme qu’ils cherchent à tra­vers l’histoire, tâtonnent. S’il peut être utile d’écouter ce que les humo­ristes ont à nous dire – ils ne sont pas sou­vent plus ridi­cules que les phi­lo­sophes média­tiques, par exemple – force est de recon­naître qu’ensuite, M. Morel s’égare dans des consi­dé­ra­tions sur les concours de miss.

Anathème

Il faut pour­tant lui recon­naître la ver­tu d’avoir iden­ti­fié une impor­tante part du pro­blème : les qua­li­tés d’un bon can­di­dat et celles d’un bon pré­sident sont for­te­ment dif­fé­rentes. On pour­rait, du reste, étendre l’affirmation à l’ensemble des man­dats élec­tifs. Il est vrai que por­ter beau, ser­rer des pognes dans les foires agri­coles, pro­mettre monts et mer­veilles, écra­ser dis­crè­te­ment une larme au spec­tacle affli­geant de la misère du monde, c’est une chose. Se faire dis­cret, ser­rer des pognes à Davos, pro­mettre du sang et des larmes, écra­ser dis­crè­te­ment quelques mil­liers de chô­meurs et d’affligeants misé­reux, c’en est une autre.

Mais quoi ? Faut-il donc sup­pri­mer les élec­tions ? Certes non ! Elles sont la marque de fabrique des démo­cra­ties, elles per­mettent de faire alter­ner socia­lisme libé­ral et libé­ra­lisme social, elles font vivre les com­mu­ni­cants et les impri­meurs, elles sont l’occasion d’homériques rodo­mon­tades, elles offrent l’opportunité d’une balade un dimanche matin, entre la messe et l’apéro. Et puis, elles amusent le bon peuple. Abdi­quer notre démo­cra­tie, jamais, nos grands-parents se sont bat­tus pour elle !

Tenons des élec­tions, plu­tôt deux fois qu’une et trois que deux ! Mais pour­quoi en faire un tel enjeu ? Pour­quoi choi­sir par là les guides sages et sévères dont nous avons besoin ? Conser­vons cette char­mante cou­tume, décou­plons-la sim­ple­ment de la pro­cé­dure de choix du per­son­nel poli­tique. Enfin, décou­plons-la encore davan­tage que ce n’est aujourd’hui le cas. Au fond, qui a voté pour Charles Michel ? et pour Jac­que­line Galant ? Vous voyez, ça ne chan­ge­rait pas grand chose, hor­mis que ça assu­re­rait une meilleure ges­tion de la chose publique.

Pre­nons ain­si exemple sur l’Union euro­péenne qui, inca­pable de pré­pa­rer elle-même ses textes régle­men­taires, fait lar­ge­ment appel aux lob­byistes, sous la dic­tée des­quels notre conti­nent est conduit vers des len­de­mains qui chantent. Certes, bien­tôt, l’administration publique belge sera éga­le­ment inca­pable de sou­te­nir le per­son­nel poli­tique et les lob­bys pour­ront, pour un coût modique, entrer dans la danse. Mais nous pour­rions faire bien mieux et faire d’une pierre deux coups.

Fai­sons dési­gner les gou­ver­nants par des panels d’experts et de patrons. Ces gens, spé­cia­listes des matières à gérer et rom­pus à la direc­tion des hommes et des choses, ne sont-ils pas les mieux pla­cés pour dési­gner les meilleurs exé­cu­tants des choix qu’ils demandent déjà à leurs hommes de main de souf­fler à l’oreille de nos maîtres ?
Voi­là une répar­ti­tion idéale per­met­tant l’instauration de ce que nous pour­rons nom­mer, comme il est de cou­tume chaque fois qu’il est pro­cé­dé ain­si, une « démo­cra­tie modernisée ».

Anathème


Auteur

Autrefois roi des rats, puis citoyen ordinaire du Bosquet Joyeux, Anathème s'est vite lassé de la campagne. Revenu à la ville, il pose aujourd'hui le regard lucide d'un monarque sans royaume sur un Royaume sans… enfin, sur le monde des hommes. Son expérience du pouvoir l'incite à la sympathie pour les dirigeants et les puissants, lesquels ont bien de la peine à maintenir un semblant d'ordre dans ce monde qui va à vau-l'eau.