Skip to main content
logo
Lancer la vidéo

Conseils à Theo

Blog - Anathème - Asile migration NVA par Anathème

octobre 2017

La poli­tique belge en matière d’asile et d’immigration est régu­liè­re­ment la cible de cri­tiques acerbes. Évi­dem­ment, Theo Fran­cken (N‑VA), le très popu­laire secré­taire d’État en charge de la matière, consti­tue une cible de choix pour les gau­chistes rabiques et autres bobos-com­mu­nistes. Mon­sieur Fran­cken est-il dans la ligne de mire du fait d’une poli­tique en rupture […]

Anathème

La poli­tique belge en matière d’asile et d’immigration est régu­liè­re­ment la cible de cri­tiques acerbes. Évi­dem­ment, Theo Fran­cken (N‑VA), le très popu­laire secré­taire d’État en charge de la matière, consti­tue une cible de choix pour les gau­chistes rabiques et autres bobos-communistes.

Mon­sieur Fran­cken est-il dans la ligne de mire du fait d’une poli­tique en rup­ture avec les options de ses pré­dé­ces­seurs ? Aurait-il fran­chi une quel­conque ligne rouge ? Suc­cè­de­rait-il à de ver­tueux socia­listes, huma­nistes ou libé­raux, pétris d’idéalisme et de com­pas­sion ? Certes non ! Non seule­ment il ne fait qu’appliquer des prin­cipes expri­més de longue date par son par­ti, mais en outre, si sa poli­tique peut sem­bler mus­clée, elle n’en est pas moins dans le droit fil de ce que pra­ti­quaient depuis long­temps l’ensemble des par­tis ayant consti­tué les gou­ver­ne­ments fédé­raux des quinze der­nières années (au moins). Il faut donc voir en Theo Fran­cken un héri­tier du gou­ver­ne­ment Di Rupo, autant qu’un pré­cur­seur de la poli­tique ferme qui, demain, sera accep­tée par tous.

Rien, fina­le­ment, que de très banal dans ce que fait Theo, si ce n’est qu’il le fait clai­re­ment et sans prendre de mine dégou­tée. Se moquer comme d’une guigne des morts en Médi­ter­ra­née, clas­ser comme « surs » des pays en guerre où les droits de l’homme sont un rêve loin­tain, sépa­rer les familles, har­ce­ler les migrants en rue, refu­ser l’aide sociale, faire des deman­deurs d’asile des sus­pects, enfer­mer adultes et enfants est chez nous sont des pra­tiques cou­rantes depuis longtemps.

Pour­quoi tant de haine, alors ? Il me semble que cela tient pour l’essentiel à un pro­blème de méthode : Theo applique des pro­cé­dés datés. Pour tout dire, il est has been, ce qui, conve­nons-en, est grave. Nous ne sommes plus dans les années 1930, que diable ! Il est grand temps pour lui (et pour ses suc­ces­seurs) de prendre acte de l’évolution des sen­si­bi­li­tés. Certes, les étran­gers peuvent conti­nuer de tom­ber comme des mouches, peu nous chaut, mais il est des choses qui nous sont deve­nues into­lé­rables, comme la ges­tion uni­la­té­rale de dos­siers qui relèvent de l’intérêt géné­ral. Il est temps pour les poli­tiques de se réveiller : nous sommes entrés dans l’ère de la démo­cra­tie par­ti­ci­pa­tive ou, en tout cas, de la ges­tion participative.

Il est donc grand temps de doter d’une dimen­sion par­ti­ci­pa­tive les ins­tances de res­tric­tion du droit d’asile, telles que la police, le secré­ta­riat d’État à l’Asile et à l’Immigration ou l’Office des étran­gers. Un pre­mier pas pour­rait être de prendre exemple sur l’intégration des syn­di­cats dans la direc­tion des ins­ti­tu­tions de har­cè­le­ment des chô­meurs et de res­tric­tion de l’accès aux droits sociaux, telles que le Forem ou Acti­ris. Voyant de l’intérieur la dif­fi­cul­té et l’intérêt qu’il y a à per­sé­cu­ter les plus faibles, les orga­ni­sa­tions syn­di­cales ne contestent plus guère le sys­tème mis en place par les gou­ver­ne­ments suc­ces­sifs et veillent même doci­le­ment à son appli­ca­tion. À n’en pas dou­ter, l’exemple est trans­po­sable aux poli­tiques migra­toires. En effet, cri­ti­quer de l’extérieur est tâche bien aisée, mais gérer ces pro­blé­ma­tiques de manière média­ti­que­ment ren­table est une autre paire de manches. 

On peut ima­gi­ner que des per­sonnes se vivant comme des défen­seurs des migrants répu­gne­ront à s’impliquer dans leur oppres­sion. De même, les acteurs impli­qués dans le pro­ces­sus de déman­tè­le­ment du droit d’asile auront cer­tai­ne­ment des pré­ven­tions à tra­vailler aux côtés de bobos d’extrême gauche prêts à sacri­fier leur nation pour se don­ner bonne conscience. Mais, c’est un fait, l’époque n’est plus aux sté­riles affron­te­ments entre camps éter­nel­le­ment oppo­sés. Seule est effi­ciente la par­ti­ci­pa­tion à la ges­tion de pro­jets com­muns. Il faut pou­voir dis­cu­ter et tra­vailler avec tout le monde et aban­don­ner les pré­ven­tions et cris­pa­tions d’un autre âge qui fai­saient consi­dé­rer à cer­tains, par exemple, que les fas­cistes étaient peu recom­man­dables. La recherche d’efficacité oblige en effet à recon­naitre qu’ils obtinrent des suc­cès dont il serait regret­table de se pri­ver. Leur enthou­siasme, leur sérieux et leur amour du tra­vail bien fait ne peuvent être négli­gés sous pré­texte qu’ils auraient quelques tra­vers ou pour de vagues ques­tions idéo­lo­giques. De toute façon, aujourd’hui, il faut « en être » ou bien se taire. Et mes­sieurs Fran­cken et Jam­bon ont tout en main pour pré­sen­ter cette alter­na­tive aux éven­tuels récalcitrants.

Nous sug­gé­rons donc à Mon­sieur Fran­cken de faire évo­luer ses méthodes de tra­vail. Quand les comi­tés de sou­tien aux sans-papiers auront été asso­ciés à la direc­tion de l’Office des étran­gers, quand les centres fer­més seront cogé­rés avec les mili­tants du mou­ve­ment No Bor­der et inclu­ront une repré­sen­ta­tion des sta­ke­hol­ders que sont les per­sonnes qui y sont gra­cieu­se­ment héber­gées, quand le Ciré (Coor­di­na­tion et ini­tia­tives pour réfu­giés et étran­gers) col­la­bo­re­ra à l’organisation des expul­sions et aux négo­cia­tions avec les États d’origine, quand les citoyens ordi­naires pour­ront par­ti­ci­per, aux côtés de la police, à la confis­ca­tion des biens des réfu­giés, il y a fort à parier que les posi­tions tran­chées s’éroderont et que les qua­li­tés de prag­ma­tisme de Mon­sieur Fran­cken appa­rai­tront aux yeux de tous, y com­pris de ses adver­saires d’hier. Rien de tel que des objec­tifs chif­frés, un plan d’action, la ges­tion d’un bud­get plus étique d’année en année et quelques mises en cause dans les forums en ligne pour faire com­prendre à cha­cun la néces­si­té de faire tour­ner la machine sans faiblir.

Qu’y a‑t-il du reste de plus enthou­sias­mant que de voir l’ensemble des forces vives de notre pays unies dans la pour­suite d’un but com­mun, dans l’analyse d’un dia­gramme de flux, dans la recherche d’économies ou dans la créa­tion d’emplois au sein des forces de sécu­ri­té ou de sup­plé­tifs pri­vés ? Il ne fait pas de doute qu’un jour Mon­sieur Fran­cken sera salué pour son œuvre de refon­da­tion de notre com­mu­nau­té nationale.

Anathème


Auteur

Autrefois roi des rats, puis citoyen ordinaire du Bosquet Joyeux, Anathème s'est vite lassé de la campagne. Revenu à la ville, il pose aujourd'hui le regard lucide d'un monarque sans royaume sur un Royaume sans… enfin, sur le monde des hommes. Son expérience du pouvoir l'incite à la sympathie pour les dirigeants et les puissants, lesquels ont bien de la peine à maintenir un semblant d'ordre dans ce monde qui va à vau-l'eau.