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Ça finira mal (mais pas de sitôt)
Tout ça finira mal, c’est certain. C’est certain. C’est même une constante historique : un jour les miséreux se rendent compte qu’ils sont nombreux, un jour ils n’ont plus rien à perdre, un jour ils sont le dos au mur. Alors ils sortent, pendent les puissants, violent leurs femmes, brulent leurs maisons, crachent dans leur whisky trente […]
Tout ça finira mal, c’est certain. C’est certain. C’est même une constante historique : un jour les miséreux se rendent compte qu’ils sont nombreux, un jour ils n’ont plus rien à perdre, un jour ils sont le dos au mur. Alors ils sortent, pendent les puissants, violent leurs femmes, brulent leurs maisons, crachent dans leur whisky trente ans d’âge, lacèrent les sièges de leur Maserati. Et il faut tout recommencer.
Un jour, bien sûr, mais plus tard, pas de sitôt. L’expérience enseigne en effet que le peuple peut supporter une misère effroyable et, avant Germinal et les grèves insurrectionnelles, nous en avons encore sous la pédale. Or, il se fait qu’une Maserati donne envie d’une Ferrari, un trente ans, d’un quarante-cinq ans d’âge, une femme, de deux, et ainsi de suite. Il est trop tôt pour nous modérer.
Nous ne pouvons donc que saluer la grandeur des gouvernants actuels : Macron qui rabote les indemnités logement et baisse l’impôt sur la fortune, Trump qui allège les taxes des plus riches et cherche à supprimer l’Obamacare, Charles Michel qui lutte contre la fraude sociale tout en fermant les yeux sur la fraude fiscale… Même Alda Greoli montre son enthousiasme et sa docilité en assimilant chômage et assistanat. Et partout, partout, nos amis au pouvoir vont, disant que ça ne peut plus durer, que la pension survient trop tôt, que les salaires sont trop élevés, que le chômage est une rente, que la sécurité sociale est un luxe impayable, que mille obstacles empêchent le retour de la croissance, que l’on est bien trop dur avec les riches et doux avec les pauvres…
Nous savons que tout cela se paiera cher et que les discours sur la remise au travail, le retour de la croissance et l’assainissement des finances publiques ne valent que pour ceux qui y croient. Certes, nous pourrions œuvrer à la justice pour garantir un avenir à nos descendants, comme nous pourrions limiter les émissions de CO2, annuler la dette du Tiers-Monde, investir dans l’enseignement et la santé. Oui, nous pourrions faire advenir une société plus égalitaire et stable.
Mais, quand on y réfléchit, les générations futures ne sont-elles pas d’infâmes assistées qui comptent sur nous pour créer les conditions de leur survie ? Ne nous sont-elles pas aussi étrangères qu’un migrant noyé en Méditerranée ? Ne sont-elles pas infiniment moins palpables qu’un volant en cuir, l’eau de notre piscine, l’échine courbée de nos valets, voire la fumée de nos havanes ?
Il est donc naturel que nos gouvernants privilégient nos privilèges et nous aident à rouler dans de couteuses berlines de société, à nous payer de multiples résidences, à voler autour du globe au gré de nos envies et à nous payer les corps dociles qui pourvoiront à notre bien-être.
Alors, oui, ça finira mal, mais le calcul le plus rationnel est de penser que nous avons encore un peu de marge. Même Charles Michel, ce dirigeant jeune et fringant, sera un vieillard chenu avant que le peuple assommé ne songe à relever la tête pour couper celle des puissants. Alors, qu’importe si tout est fini : nous aurons vécu. La raison commande donc de ne rien changer.
Nous pouvons nous tromper, bien évidemment, mais ne sommes-nous pas des capitalistes modèles en prenant des risques dans l’espoir de doper notre croissance, de créer vos emplois, de produire nos richesses ?