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Bienfaisante pauvreté
Récemment, Eurostat a publié de nouveaux chiffres relatifs au chômage. Il y est notamment indiqué que le risque pour les travailleurs et les chômeurs de connaitre une situation de pauvreté a considérablement crû au cours des dernières années. Le corolaire évident en est que l’ensemble de ces gagnepetits vit dans la crainte d’une fatale dégringolade. Ce sont bien […]
Récemment, Eurostat a publié de nouveaux chiffres relatifs au chômage. Il y est notamment indiqué que le risque pour les travailleurs et les chômeurs de connaitre une situation de pauvreté a considérablement crû au cours des dernières années. Le corolaire évident en est que l’ensemble de ces gagnepetits vit dans la crainte d’une fatale dégringolade.
Ce sont bien entendu des chiffres encourageants, puisqu’il est bien connu que les gens ordinaires ne comprennent que la peur et ne se bougent que s’ils sont sous le coup d’une menace suffisante. Là où les gens raffinés, les puissants, les élites seront motivés par l’accroissement de leurs revenus (primes, stock options, incentives, etc.) et de leur pouvoir (strapontins, postes décisionnels, participation à de multiples commissions et conseils d’administration), il faut reconnaitre que la rusticité du vulgum pecus oblige les leadeurs à l’usage de méthodes contraignantes. Ils y répugnent souvent, certes, mais ils se résignent à les mettre en œuvre au nom de l’intérêt général.
Du management par la terreur au contrôle tatillon des chômeurs, en passant par la méfiance envers les malades de longue durée ou le harcèlement des bénéficiaires du CPAS, la menace de privation de moyens d’existence tient donc aujourd’hui une place centrale dans le maintien de la population dans l’état de sujétion et de discipline qui convient à la bonne marche de la société. Le bénéfice en est particulièrement large, puisque l’édifiant exemple des licenciés, déchus et déboutés, profite à de larges cohortes de citoyens : enfants, conjoints, collègues, voisins, etc.
Comme le rappelait récemment un intellectuel de droite, malgré l’ostracisme dont il fait l’objet, les inégalités sont vivifiantes pour l’économie. Il nous faut donc les cultiver. Or, au-delà de la bonne nouvelle de l’accroissement du champ de la menace (bientôt, la moitié des chômeurs européens sera menacée de pauvreté), il faut reconnaitre que la Belgique souffre d’un lourd handicap concurrentiel.
C’est ainsi que notre voisine, l’Allemagne, dont l’économie florissante et l’embonpoint réjouissant des patrons est un exemple pour tous, peut compter sur plus de 70% de chômeurs en risque de paupérisation. Loin devant la Lituanie, ce pays illustre une fois de plus l’enviable « modèle allemand » qui soutient la croissance de ce pays. Songeons à cet égard que, même la Grèce, pourtant amplement pillée par nos germaniques amis, affiche un taux inférieur à 50%! Comment dès lors ne pas s’inquiéter du fait que la Belgique s’en tire encore moins bien qu’elle ?
Pire encore, là où l’Allemagne a intensément précarisé ses chômeurs entre 2006 et 2016 (25% de taux de variation positive sur cette période), là où la Lituanie précitée progresse à marche forcée (près de 140% de taux de variation positive), la Belgique stagne lamentablement, n’engrangeant qu’une négligeable progression positive. Cela en dit long sur l’inefficacité des gouvernements de droite et d’extrême droite au pouvoir durant la période concernée.
Loin de rattraper notre retard, nous creusons notre handicap de précarisation.
Comment trouver ces travailleurs prêts à tout (pour deux fois rien) dont l’économie a besoin ? Comment concurrencer les esclaves du Bangladesh ? Comment assurer aux riches l’accroissement exponentiel de leur patrimoine ? Comment faire de la Belgique un paradis pour les actionnaires ?
Comment, sinon en créant un enfer pour les travailleurs et les allocataires sociaux et, qui plus est, un enfer pire que celui des autres ? Bienfaisants les pauvres, car ils nous ouvrent les portes du Royaume où coule le lait et le miel !