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23.000 emplois manquent à l’appel
À la suite de la publication de diverses études, un débat a démarré sur le nombre d’emplois créés réellement imputables au gouvernement Michel. Armé des statistiques officielles, il avance qu’un peu plus de 230.000 emplois (dont quelque 160.000 dans le secteur privé) ont vu le jour depuis le début de la législature. La Fédération des entreprises […]

À la suite de la publication de diverses études, un débat a démarré sur le nombre d’emplois créés réellement imputables au gouvernement Michel. Armé des statistiques officielles, il avance qu’un peu plus de 230.000 emplois (dont quelque 160.000 dans le secteur privé) ont vu le jour depuis le début de la législature. La Fédération des entreprises de Belgique soutient que les mesures prises pour modérer les salaires, en ce compris le tax shift, ont entraîné la création de 140.000 emplois dans le secteur privé. La KULeuven, moins optimiste, avance plutôt le chiffre de +75.000. Enfin, plus récemment, les économistes de l’IRES (UCLouvain ; voir ici pour un détail de ces chiffres) revoyait à la baisse les performances uniquement dues aux décisions prises : +27.500 (secteur privé ; +59.000 pour l’ensemble de l’économie), le reste des emplois étant lié, d’une part, à l’activité économique tributaire des aléas internationaux et, d’autre part, aux réformes lancées par le précédent gouvernement. Il y a donc de quoi alimenter les discussions et, en fonction des paramètres retenus, de ne jamais arriver à un consensus sur le résultat réel.
Une autre manière d’évaluer les performances en termes de créations d’emplois consisterait à arrêter de se regarder le nombril et à les mettre en perspective par rapport à celles enregistrées dans les autres pays européens.
Le graphique suivant met en relation les taux d’emploi nationaux au moment de la prise de fonction du gouvernement Michel à la fin 2014 avec les créations d’emplois jusqu’à la fin 2018 (date la plus récente pour laquelle nous disposons de données). Nous utilisons les données d’Eurostat afin de faciliter les comparaisons en nous basant sur des définitions et des méthodes de collectes des données harmonisées.
Il apparaît que la Belgique, le point noir sur le graphique, présentait fin 2014 un taux d’emploi légèrement inférieur à la moyenne de l’UE. Les créations d’emplois y ont également été inférieures à bon nombre de pays. Si cette différence peut s’expliquer en partie par un effet de rattrapage dans les pays qui furent sévèrement touchés par la crise dans les années 2008 – 2012, il n’en demeure pas moins que des pays davantage similaires à la Belgique comme le Luxembourg, l’Autriche ou la Finlande se sont beaucoup mieux débrouillés.
Plus intéressante encore est l’information donnée par la taille des bulles : elle reflète l’importance relative des temps pleins dans les créations d’emplois de sorte que plus les bulles sont grandes, plus la proportion des temps pleins par rapport aux temps partiels est élevée. Cela donne aussi une idée de la précarisation relative sur le marché du travail d’un État membre par rapport aux autres1.
En Belgique, 76% des nouveaux emplois sont des temps partiels, soit bien moins que les 86 – 87% de la zone euro et des quinze « vieux » États membres.
Plutôt que de se demander quelle est la part des nouveaux emplois attribuable au gouvernement, ce qui revient à un débat sur le sexe des anges, on pourrait s’interroger sur quelle aurait été la situation en Belgique si l’emploi avait évolué au même rythme que dans la zone euro (ou l’UE15) ?
L’emploi ayant progressé plus rapidement en moyenne dans l’UE qu’en Belgique, nous arrivons à la conclusion que 23.000 emplois additionnels — c’est-à-dire en plus de ceux qui ont émergé en Belgique durant la législature — auraient été créés. Mais, la répartition des emplois aurait été sensiblement différentes car ce sont surtout des emplois à temps plein qui auraient été créés (+35.000) au détriment des temps partiels (-15.000)2.
Emploi total | Temps plein | Temps partiel | ||
Belgique | création d’emploi en milliers | 211,5 | 161,0 | 50,7 |
taux de croissance | 4,7% | 4,7% | 4,7% | |
Si évolution de l’emploi belge similaire à celle de la zone euro | ||||
alors : | taux de croissance | 5,2% | 5,7% | 3,3% |
emplois | 234,5 | 196,3 | 35,3 | |
différence | -23,0 | -35,3 | 15,4 |
Autrement dit, on pourrait conclure que des politiques mal pensées mises en œuvre en Belgique ont empêché la création de 23.000 emplois… Ce qui entache quelque peu le slogan « jobs, jobs, jobs » continuellement mis en avant par le gouvernement sortant.
- La Roumanie et la Lituanie sont ici des champions toutes catégories car le nombre de temps partiels y a diminué au cours de ces années tandis qu’il s’y créait beaucoup de temps pleins. Pourtant, on ne peut pas dire qu’ils viennent de loin : les taux d’emploi de ces deux pays ne sont pas médiocres : 65% et 72% respectivement. Évidemment, il ne faut pas en déduire que ce sont des paradis pour les travailleurs : l’analyse faite ici se borne à examiner la situation sur le plan des créations d’emploi, pas sur l’amélioration des conditions de vie et de travail, sur les salaires, etc.
- La somme de ces deux catégories ne correspond pas exactement au chiffre de l’emploi total à cause du « bruit statistique » découlant de l’agrégation des données.