Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.
Arabie saoudite, Yémen, Oman, Bahrein, Irak, Syrie, Algérie
Arabie Saoudite L’avenir de la monarchie en Arabie saoudite pose question depuis bien avant la « crise » que connait le monde arabe actuellement. Pourtant, le royaume a toujours réussi à s’adapter, en lâchant à chaque fois du lest et en appliquant certaines réformes pour garder le soutien de sa population. Ainsi, le roi Abdallah a déboursé 25,6 milliards d’euros de […]
Arabie Saoudite
L’avenir de la monarchie en Arabie saoudite pose question depuis bien avant la « crise » que connait le monde arabe actuellement. Pourtant, le royaume a toujours réussi à s’adapter, en lâchant à chaque fois du lest et en appliquant certaines réformes pour garder le soutien de sa population. Ainsi, le roi Abdallah a déboursé 25,6 milliards d’euros de dépenses sociales depuis le début des révoltes et des manifestations arabes.
En fait, il n’y a pas eu de véritables émeutes ni même de grosses manifestations en Arabie saoudite. Si une partie de la minorité chiite — seuls 8% de la population font partie de cette confession religieuse — a manifesté pour la libération de prisonniers politiques, presque personne n’a battu le pavé le 11 mars dernier pour ce qui devait être un « jour de colère ». Il faut dire que les manifestations ont été interdites dans ce pays gouverné par la charia. Et que le gouvernement et les autorités religieuses ont bien fait comprendre à la population qu’il ne fallait pas sortir dans les rues.
Des programmes télévisés, des messages par téléphones portables et des rumeurs sur internet ont été largement diffusés dans le pays pour empêcher un quelconque mouvement protestataire. Les rumeurs prétendaient que les organisateurs fomentaient un complot iranien et que les manifestants risquaient de lourdes amendes et des peines de prison. Le jour même de la manifestation, le dispositif policier était énorme et de nombreux barrages de sécurité ont été installés. Les dignitaires religieux, qui ont une grande autorité dans ce pays très conservateur, appuyaient évidemment le gouvernement et justifiaient l’interdiction de manifester.
Comme elle ne pouvait admettre l’idée d’un renversement de régime d’un des membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG), l’Arabie saoudite a, avec les Émirats arabes unis, envoyé des troupes au Bahreïn voisin pour soutenir le roi Hamad et montrer l’exemple.
Le roi Abdallah a néanmoins programmé un certain nombre de dépenses pour désamorcer l’agitation populaire. Des milliards d’euros ont été débloqués pour améliorer la sécurité sociale, financer des crédits au logement, ou soutenir des étudiants démunis. Le gouvernement répond donc par des mesures socioéconomiques alors que les protestataires auraient voulu une ouverture politique dans un pays où il n’existe toujours pas de Parlement et où beaucoup de blogueurs, écrivains ou essayistes ont été emprisonnés pour avoir posé des questions dérangeantes.
Le 25 mars 2011
Yémen
Il existe également une place Tahrir à Sanaa, la capitale du Yémen. C’est notamment sur ce lieu symbolique que se sont donné rendez-vous des manifestants, principalement des étudiants, le 12 février dernier, afin de protester contre le régime d’Ali Abdallah Saleh.
Encouragés par les évènements égyptiens et tunisiens, des mouvements de contestation ont été organisés dans ce pays gouverné depuis trente-trois ans par le président Saleh. Si la répression fut importante dès le début, elle n’empêcha pas le mouvement de grossir et de provoquer d’importants changements dans le gouvernement.
Après un mois et demi de manifestations, la contestation a pris un tour dramatique le 18 mars, lorsque des snipers ont ouvert le feu sur la foule. Cinquante-deux personnes ont été tuées et six-cents autres ont été blessés. Le président nie toute responsabilité dans ce massacre et accuse l’opposition d’inciter à la violence et au chaos, tandis que des manifestants, eux, prétendent avoir capturé cinq snipers avec des cartes d’identité du gouvernement.
À la suite de cette répression meurtrière, plusieurs membres du gouvernement Saleh ont démissionné, parmi ceux-ci l’ambassadeur du Yémen aux Nations unies ainsi que les ministres des Biens religieux, du Tourisme et des Droits de l’homme.
Les principaux acteurs de l’opposition sont le Parti socialiste yéménite et le parti islamo-tribal al-Islah. Ceux-ci se sont rassemblés, sous le nom de « la Rencontre commune », et ont également organisé plusieurs manifestations. Néanmoins, il ne semble pas qu’ils puissent vraiment incarner le ras-le-bol général qui secoue le pays. Les deux partis ont déjà participé au pouvoir et ils ne cherchent pas à entrer en confrontation directe avec le gouvernement actuel. De plus, cette Rencontre commune allie des partis aux programmes politiques radicalement différents et on voit mal comment un projet politique cohérent pourrait être mis en place par cette coalition.
Ce n’est pas non plus, à la mi-mars, du côté de l’armée yéménite, qui regroupe en son sein beaucoup de membres de la famille du président, que la population va pouvoir trouver un appui. Ce sont plutôt les chefs tribaux qui ont un rôle majeur dans l’évolution du mouvement.
Depuis la fin février, des puissantes tribus semblent de plus en plus tourner le dos au régime et soutenir la population. C’est le cas notamment du clan al-Ahmar qui a récemment demandé à Saleh de prendre en considération les demandes du peuple et de partir pacifiquement.
Le président refuse d’abdiquer avant la fin de son mandat en 2013.
Le 21 mars 2011
Oman
Bien qu’il conserve une image d’État paisible et stable, et que l’on ne parle que très peu de lui dans la presse, le sultanat d’Oman connait lui aussi des heurts violents entre manifestants et agents de l’ordre. Le 27 février 2011, deux manifestants ont même été abattus par la police, qui n’hésite pas à réprimer violemment la moindre critique du régime en place.
C’est à Sohar, au nord de la capitale Mascate, que les protestations sont les plus intenses. De nombreux rassemblements et sit-in ont eu lieu dans ce centre industriel, sur le rondpoint du Globe qui est devenu le lieu symbolique de la contestation. Les revendications sont très similaires à celles des autres pays arabes en révolte. Les manifestants dénoncent la corruption des élites politiques et demandent des réformes constitutionnelles ainsi que la liberté d’expression.
Il est vrai que si le sultan Qabous bin Saïd Al-Said a fait beaucoup pour son pays, notamment avec la construction de nombreuses infrastructures routières et d’hôpitaux, mais il ne tolère pas qu’on mette son pouvoir ou ses décisions en cause. C’est pourtant un dirigeant qui se veut proche du peuple, et qui effectue régulièrement des visites dans les tribus du sultanat pour écouter les problèmes que connait sa population. Il conserve néanmoins les rênes du pays.
Le monarque, qui a également œuvré pour améliorer la place des femmes dans la société omanaise, est au pouvoir depuis 1970, date à laquelle il a renversé son père avec l’aide du Royaume-Uni. Celui-ci voyait dans le sultan Qabous un homme capable de moderniser le pays et surtout d’exploiter le pétrole, découvert peu avant cette année-là. L’or noir représente d’ailleurs 65 % du PIB du sultanat.
La répression n’a pourtant pas été la seule réponse à l’agitation populaire qui a débuté fin février. Le gouvernement a connu trois modifications importantes en un mois et plusieurs ministres controversés ont été limogés. Le sultan a également promis la création de cinquante-mille nouveaux emplois.
Ce pays du Golfe compte trois millions d’habitants dont plus d’un quart est d’origine étrangère. Énormément de migrants, en provenance d’Inde, du Pakistan, du Sri Lanka, etc., s’installent dans ce pays considéré comme plus stable. Alors que c’est plutôt ces « étrangers » qui étaient régulièrement contrôlés, la population omanaise arabe a vu les barrages et les contrôles de police se multiplier.
Plusieurs activistes ont été arrêtés et sont toujours en détention. Certains protestataires sont allés manifester devant l’ambassade américaine pour demander une intervention de la grande puissance occidentale. Celle-ci ne semble pas avoir l’intention de s’immiscer dans les tensions que connait ce pays.
Le 31 mars 2011
Bahreïn
Les manifestants chiites Bahreïnies aussi voudraient un geste de la communauté internationale en leur faveur, et critiquent l’intervention militaire en Lybie. Car si il y a bien eu des mouvements de troupes étrangères sur l’archipel, c’était pour soutenir le gouvernement en place et pas pour appuyer les mouvements de contestation qui secouent le pays depuis plus d’un mois. Le Conseil de coopération du Golfe (CCG) a, en effet, envoyé mille hommes au Bahreïn, principalement en provenance d’Arabie Saoudite, les 13 et 14 mars, tandis que l’état d’urgence a été instauré le 15 mars par le roi Hamad pour tenter d’enrayer les mouvements protestataires qui se multiplient dans le pays.
Les liens qui unissent le royaume saoudien et l’ile sont particuliers, puisque les deux pays exploitent en commun un gisement de pétrole. L’arrivée des soldats saoudiens a d’ailleurs provoqué une vive réaction de la part de l’Iran, qui a longtemps revendiqué l’archipel.
Les revendications des protestataires portent sur des sujets sociaux et incluent des demandes de réformes profondes. Ils remettent notamment en cause le Premier ministre Sheikh Khalifa, un des oncles du roi, en place depuis 1971, qui représente la vieille garde dirigeante — rappel d’un passé douloureux. Les manifestants exigent également une modification de la nouvelle Constitution de 2002, date à laquelle l’émir devint roi. Cette Constitution, écrite dès les premières années de règne du roi Hamad bin Isa Al Khalifa, laisse bien trop de pouvoir à celui-ci. Les manifestants voudraient l’instauration d’une monarchie constitutionnelle.
Néanmoins, même si l’opposition et les manifestants clament qu’il s’agit de contestation principalement politique, celles-ci prennent place dans un pays où deux communautés confessionnelles cohabitent dans une paix sociale toute relative. La dynastie des Al Khalifa, en place depuis deux-cents ans, est sunnite tandis que plus ou moins 70% de la population est de confession chiite.
Il existe chez les chiites un véritable sentiment de discrimination. La situation économique n’est pas florissante et dans la course à l’emploi, ce sont souvent des sunnites qui remportent les postes administratifs. De plus, les autorités ont été accusées d’avoir échafaudé un plan pour modifier la démographie du pays en naturalisant de nombreux sunnites de pays voisins. Si la famille royale ne désire pas s’exprimer à ce sujet, elle ne met pas pour autant en cause la véracité de ces accusations. Les tensions politiques actuelles pourraient donc agrandir la fracture entre les deux communautés confessionnelles. À moins que le prince héritier Salman ben Hamad Al Khalifa, qui passe pour un réformateur, puisse aménager des changements dans le fonctionnement du pays.
Le 23 mars 2011
Irak
Depuis les révoltes de ces derniers mois dans le monde arabe, l’Irak et la Palestine ont quitté l’avant de la scène médiatique. En Irak, des manifestations ont pourtant également lieu, parfois directement inspirées par les évènements de la place Tahrir au Caire.
Au Kurdistan d’Irak, les protestataires ont investi la « place du Palais », un lieu historique important de la ville de Süleymaniye, la capitale de la région. Place où débutèrent, en 1930, les premières protestations contre l’occupant britannique. Durant la période baasiste dirigée par Saddam Hussein, l’endroit connut plusieurs débuts de soulèvement contre le pouvoir de Bagdad. Des exécutions capitales y ont également eu lieu durant les années quatre-vingt. Les manifestations actuelles ont débuté le 17 février 2011 par un rassemblement de soutien aux Tunisiens et aux Égyptiens. Elles ont rapidement dégénéré et se sont soldées, dès le premier jour, par des jets de pierres en direction du quartier général du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), dont le dirigeant, Massoud Barzani, est l’actuel président de la région autonome du Kurdistan. Sa milice d’État a réagi en attaquant les manifestants et en lançant des opérations de représailles sur les sièges des partis d’opposition. Ce qui ne fit que provoquer d’autres manifestations dans d’autres villes de la province de Süleymaniye. Ces évènements ont fait au moins neuf morts et trois-cents blessés. Les contestataires, organisés au sein d’un comité intérimaire, ont rebaptisé cette « place du Palais » en place Tahrir, en référence au Caire. Des imams, des militants d’extrême gauche, ou encore des artistes, sont regroupés sur la place et participent au comité intérimaire. Les revendications vont du jihad à la lutte des classes sans que cela ne pose pour l’instant de problèmes d’incompatibilités idéologiques.
Simultanément, au centre de l’Irak, dans la province de Wasit, un nouveau gouverneur a été désigné fin mars 2011, après un mois de manifestations contre la mauvaise gouvernance et la corruption. La contestation s’est concentrée dans la ville d’Al-Kout, la capitale de cette province. Cette nomination n’a pas satisfait les revendications, car le gouverneur n’est pas originaire d’Al-Kout, ce qui était expressément sollicité par les manifestants. Les observateurs ont cru voir dans les manifestations à Al-Kout le pendant irakien du printemps arabe, alors que d’autres remous ont eu lieu à Bagdad, Mosoul, Basra et Ramadi, entre autres. Mais les évènements d’Al-Kout ont connu un épilogue violent. Les réactions des forces de sécurité, qui auraient tiré à balles réelles, selon certaines sources, ont fait cinquante-cinq blessés et un mort.
Dans l’ensemble des villes irakiennes, les manifestants ont surtout demandé une amélioration des fournitures d’électricité, des opportunités d’emploi, etc. Le Premier ministre Al-Maliki a réagi en donnant cent jours à son administration pour présenter un plan afin d’endiguer la corruption et d’améliorer les services de l’État tels que l’électricité et les cartes de rationnement alimentaire. Al-Maliki a promis, qu’après ce moratoire de cent jours, il démissionnera les ministres négligents. Entretemps, le Parlement irakien a également annoncé vouloir abolir quatorze-mille lois édictées durant la période du gouvernement intérimaire américain et, avant cela, pendant le régime de Saddam Hussein. Rappelons que Paul Bremer, l’ancien envoyé du président Bush en Irak et dirigeant de l’autorité provisoire entre mai 2003 et juin 2004, a été fortement critiqué pour certaines de ses décisions. Les plus contestées étant la démobilisation de l’armée irakienne et le démantèlement des structures de l’État baasiste.
Le 12 avril 2011
Syrie
Le parti Baath prend le pouvoir en Syrie le 8 mars 1963, depuis cette date l’état d’urgence est instauré. Quarante-huit ans plus tard, les protestations populaires qui embrasent le pays, même durement réprimées, obligent le président Bachar al-Assad à effectuer de grandes réformes et, peut-être, à lever cet état d’urgence.
En attendant ces réformes, les manifestants subissent une forte répression et de nombreuses personnes ont déjà été tuées par balle, par la police ou des snipers non identifiés. Les villes de Deraa, Sanameïn, Tafas, Homs, Hama et Lattaquié connaissent des affrontements entre les forces de l’ordre et des protestataires. Des dizaines de civils ont perdu la vie et des centaines de personnes ont été blessées.
Bien que le président autoritaire Assad passe pour un réformateur et que son arrivée au pouvoir en 2000, après la mort de son père Hafez al-Assad, avait suscité un peu d’espoir d’ouverture politique, le régime en place gère d’une main de fer la vie politique syrienne. Les arrestations ont fortement augmenté ces derniers jours, alors que le gouvernement relâche d’autres prisonniers politiques pour désamorcer les protestations.
Seul le secteur économique a véritablement profité des changements apportés par Assad. Depuis la présence de celui-ci au pouvoir, la Syrie est une terre d’accueil pour les investisseurs, notamment dans le domaine du tourisme et de l’immobilier. Néanmoins, la grande majorité de la population ne bénéficie pas de la politique néolibérale du président syrien et en paie même le prix puisque les aides sociales baissent tandis que les prix augmentent.
La Syrie n’échappe donc pas aux révoltes qui ébranlent le monde arabe. Et si la répression mêlée d’annonces de vagues réformes renforce les similitudes avec les autres pays touchés par des mouvements d’insurrection, l’appartenance confessionnelle semble par contre être particulièrement décisive dans ce pays. 60% de la population est sunnite alors que les dirigeants sont alaouites. Celle-ci, qui est une minorité dont est issu le président, s’est mis à dos la majeure partie de la population en monopolisant le pouvoir et les postes haut placés.
Le 22 mars, lors d’une manifestation à Deraa, des slogans au contenu confessionnel ont été clamés par les manifestants. À ce sujet, le gouvernement accuse les fondamentalistes de vouloir « détruire la coexistence » dont la Syrie est un exemple1. Une coexistence qui semble pourtant être fortement mise à l’épreuve ces derniers jours.
Le 29 mars 2011
Algérie
Kamel Daoud est éditorialiste au Quotidien d’Oran et tient la rubrique « Raïna Raïkoum » (« notre opinion-votre opinion »). L’article que nous reprenons est représentatif du contexte algérien.
On ne joue pas avec l’appétit d’un peuple : à la fin, il vous mange. C’est la conséquence de la réforme par la semoule du régime algérien. Après la chute de Ben Ali, la stratégie algérienne pour arrêter l’effet domino a été double : de la semoule à la place de la démocratie et des promesses à la place des réformes. L’État d’urgence a été levé sur papier, mais le reste est resté : interdictions diverses, verrouillages, dialogue avec soi-même, correspondance par lettres avec la plèbe tenue à distance, matraques et « baltaguia2 ». Donc du côté démocratie, rien, et le Pouvoir a cru la question réglée. C’est du côté alimentaire que le risque pointe désormais. Des populations entières ont été provoquées par les promesses d’emploi, de logements et de crédits bancaires sans que l’État en ait les moyens. Succombant à la mentalité du magique propre à la gouvernance en Algérie (dès qu’on pond un décret, on croit que le problème est réglé), le Pouvoir a lancé une vaste opération de charme qui commence à décevoir cruellement les gens : les logements promis n’existent pas, en effet, des agences d’ANSEJ3 sont prises d’assaut ou même saccagées, des usines sont encerclées, des routes sont coupées. La réforme par le sucre a réveillé une bête qui a faim, qui chôme depuis longtemps et qui veut sa part alors que Bouteflika et les siens n’ont pas les moyens d’y répondre dans le temps et avec justice. Du coup, le pays est plongé dans le chaos d’une table, mal servi, bousculé par une sorte de harwala4 vers la part de chacun, affolé de rater encore une fois le bien vacant. Bouteflika a réussi à réunir des populations entières autour de la présidence, mais pas pour le réélire. Les protestataires y viennent directement car quand on veut tout centraliser, on centralise aussi les mécontentements et on s’offre comme cible directe de la colère. La solution à cette situation est du domaine de l’impossible depuis longtemps. Une sorte de SMIG par la déception est désormais là et si les politiques ne peuvent pas en faire un immense parti d’opposition, les concernés peuvent en faire une révolution sans politique précise que le rassasiement.
La situation est rendue encore plus stupéfiante avec des grévistes qui entourent eux-mêmes une présidence en grève ! Car la présidence elle-même assure le service minimum de réception des étrangers, ne communique plus que par lettres, a un délégué en la personne de Belkhadem, n’apparait plus au boulot comme autrefois et fronce les sourcils quand elle est filmée. La différence est qu’on connait les revendications du peuple, mais pas ceux de la présidence en grève d’image et de parole depuis des mois. Beaucoup de gens aiment inverser le fameux slogan « le peuple veut changer de régime » et plaisanter sur le fameux « le régime veut changer de peuple ». Et si c’était vraiment vrai et dramatiquement impossible depuis dix ans ?
Le 26 mars 2011
- Boussaïna Chaabane, dans Dominique Lucas, « En Syrie, de nouveaux affrontements auraient fait des dizaines de morts », Le Monde, 29 mars 2003.
- « Baltaguia » est un terme typique du parlé égyptien qui signifie les « gros bras », utilisés par les pouvoirs autoritaires pour casser et provoquer des troubles lors de manifestations pacifiques d’opposants (ndlr).
- Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes (ndlr).
- C’est un mot de dialecte arabe algérien qui veut dire marche rapide, pas hâtif, empressement, précipitation (ndlr).