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Appel à la poésie

Numéro 6 - 2017 par David Goudreault

octobre 2017

J’en appelle à la poé­sie Ce souffle pro­fond En apnée du monde Pour chaque pro­fes­seur Qui n’esquive pas le module Se plonge les tripes, les mains dans la matière Lumière libre de s’exprimer en vers libres En slam, en son­net, en Hai­ku Oh capi­taine, mon capi­taine Bats-toi pour tes élèves, les profs, la fonc­tion publique Pille les coffres […]

Italique

J’en appelle à la poésie
Ce souffle pro­fond En apnée du monde
Pour chaque professeur
Qui n’esquive pas le module
Se plonge les tripes, les mains dans la matière
Lumière libre de s’exprimer en vers libres
En slam, en son­net, en Haiku
Oh capi­taine, mon capitaine
Bats-toi pour tes élèves, les profs, la fonc­tion publique
Pille les coffres pis ramène-nous du poème
Faut en rem­plir les écoles
Dès le pri­maire ; Du Jean Nar­rache en dictée
Marie Uguay impo­sé aux joueurs de football
Et Vanier aux pre­miers de classe
Qu’on intègre aux cours de sexxxualité
La lec­ture entre les lignes De Michel X côté
Que les ate­liers de création
Meublent récréa­tions et parascolaires
Qu’entre les périodes de Math et d’édu
On leur cré­dite des périodes de silence…
Où faire pous­ser la parole, toute croche et vivante… 

J’en appelle à la poésie
Par les creux de villes et les fonds de rangs
Que tous les tra­vailleurs de rues arpentent le vide
Pour chu­cho­ter du Roland Giguère
À l’oreille de la misère
Que l’on ait des poé­tesses en résidences
Dans chaque rési­dence pour per­sonnes âgées
Que l’on jumelle chaque anal­pha­bète à un poète
Et qu’on les paye pour réin­ves­tir les mots ;
Qu’ils peignent de grandes pancartes
Devant les hôpi­taux psychiatriques ;
Entrez-voir nos spéciaux !
Devant l’Assemblée natio­nale ; Ne nour­ris­sez pas les idéaux
Sur la devan­ture des librai­ries indé­pen­dantes ; Ici résident les forces vives de la résistance
Et gra­ver dans la pierre des Biblio­thèques ; Bien­ve­nue au centre com­mu­nau­taire d’Art-Thérapie…

J’en appelle à la poésie
Que chaque cais­sier de SAQ récite La romance du vin
Pour tout achat de vingt dol­lars et plus
Que la soi­rée du hockey s’ouvre sur un poème de Pozier
Qu’Anonymous tra­fi­cote pour qu’on ne puisse plus acheter
Que du Josée Yvon sur Amazone…
ha, les livres de cui­sine vont rire jaune !
Que l’on cano­nise Yves Boisvert
Que l’on nobé­lise Hélène Dorion
Que l’on imprime du Fran­cœur sur les papiers à rouler
Du Beau­so­leil sur les billets d’avion
Du Des­biens sur les tickets de bus transcanadien
Du Daoust sur tous les fou­lards de soi
Et de l’autre aussi…

J’en appelle à la poésie
Du ter­ri­toire à choi­sir et inven­ter de Miron
À celui occu­pé des pre­mières der­nières nations
Y a pas qu’Annie Koo­nie, tsé !
Que n’enseigne‑t’on pas José­phine Bacon
Jean Sioui les Fon­taine et Mestékosho
Si on cache leurs corps, qu’on écoute leurs voix ; Yawinda !
Des ter­ri­toires Mohawk jusqu’à Ivu­ji­vik… Nakurmik !

J’en appelle à la poésie
Dans le cœur en forme de bouche de Chloé Ste-Marie
Mais oui, don­nez-lui donc un doc­to­rat hono­ris causa
Qu’elle puisse le paw­né pour une infime frac­tion de la valeur de son bénévolat
Et d’ailleurs, Mon­treal City, where the fuck is your Leo­nard Cohen street ?
J’ai beau piton­ner mon GPS, la recon­nais­sance des poètes
Se fait plus rare que la cocaïne bio équitable
Ooooh, par Anne Hébert, Gau­vreau et Dan­tin, J’en appelle à la poésie
Qu’on en parle, qu’on en beurre sur nos toasts
Que l’on deal du qua­train à la livre
Que les poètes ne soient plus abandonnés
Seuls et vul­né­rables, dans les Salons du livre
Qu’on étire le sen­tier de la poésie
De st-venant-de-Paquette
Jusqu’à Paquetteville
Qu’un artiste trifluvien
S’empresse d’escalader la sta­tue de Duplessis
Pour y sculp­ter la face de Godin

J’en appelle à la poésie
Par la chan­son, l’écrit, le slam, le rap
Par Gil­bert Lan­ge­vin, Sol et Manu Militari
Que l’on recon­naisse le bouillonnement
Et que l’on célèbre la relève inspirée
L’apathie ne s’en relè­ve­ra pas
Par les Thouyn, Gué­rette, Grimaldi
Bachand, Youn­si, etc.

J’en appelle à la poésie
Sous toutes ses ramifications
De ses cimes aux racines
De ses frères, sœurs et cou­sins mongols
Oui, si tu veux, même mongol
Mais dans le pré­ju­gé favo­rable à la trisomie
Dans leur sen­si­bi­li­té, leur ouver­ture et leur dévotion
Eux qui ne rap­portent pas une cenne, comme nos poèmes…

J’en appelle à la poésie
Et j’espère que vous me répondrez !

David Goudreault


Auteur

écrivain, travailleur social et humaniste, www.davidgoudreault.org