Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.
Angoissé·e·s de tous pays, unissons-nous !
« Moins il y a d’angoisse, moins il y a d’esprit », Kierkegaard Nous sommes nombreux. La pandémie aidant, nous sommes de plus en plus nombreux. À vrai dire, nous sommes légion. Que d’années passées, dans le plus grand secret, à palpiter, hyperventiler, ruminer, trembler, se ronger les ongles, sursauter, transpirer, suffoquer ! Camouflé·e·s et silencieux·ses, comme si nos émotions étaient honteuses, […]
« Moins il y a d’angoisse, moins il y a d’esprit », Kierkegaard
Nous sommes nombreux. La pandémie aidant, nous sommes de plus en plus nombreux. À vrai dire, nous sommes légion.
Que d’années passées, dans le plus grand secret, à palpiter, hyperventiler, ruminer, trembler, se ronger les ongles, sursauter, transpirer, suffoquer ! Camouflé·e·s et silencieux·ses, comme si nos émotions étaient honteuses, de notre seule faute et uniquement le produit d’histoires familiales. Quel chemin de croix thérapeutique ! Que de dépressions diagnostiquées ! Que de pilules ingurgitées ! Que d’alcool versé sur les braises de l’angoisse !
Mais l’angoisse est aussi un affect politique. Elle dit quelque chose du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. Un monde d’individus où le bonheur s’évalue en chiffres et en choses. Où l’estime de soi est réduite à des nombres et le bienêtre à une adéquation entre un projet et des moyens. Où le sujet s’épuise pour des abstractions, la société, une compagnie, une institution. Un monde carnassier et inégalitaire où dominent la virilité toxique et ses privilèges. Un monde du court terme dont la temporalité ne convient pas au rythme des êtres humains et non humains. Longue est la liste des griefs à adresser au système patriarco-capitaliste qui irrigue nos existences.
Cela suffit.
Angoissé·e·s de tous pays, unissons-nous !
Il y a dans l’angoisse un réel potentiel transformateur. Nos cerveaux sont tels des centrales nucléaires. Mettons le combustible anxieux au service de l’empathie, de la sensibilité, de la chaleur, de l’altruisme, de l’humanité. Sortons de l’isolement coupable de la crise d’angoisse pour partager nos attaques de paniques collectives et revendicatrices. Être « angst-emble » pour, ensuite, proliférer en un réseau solidaire de gens tracassés. Formons une communauté d’anxieux.ses en colère. Il y a quelque chose d’amical et de créatif dans la violence de l’angoisse. Mis en commun, les fourmillements, palpitations et autres douleurs thoraciques constituent la glaise de puissantes passions sociales et politiques.
Car le monde a besoin de nous. Certainement en cette période de pandémie, mais pas seulement. Nous, les anticipateurs. Nous, les ruminants. Il a besoin que nous lui donnions les ingrédients de la survie. Nous, les vaches à angoisses, sommes l’avenir laitier de cette planète en train de devenir ruines. Peut-être pourrons-nous prévenir l’horreur humaine qui vient. Non pas par la force. L’orgueil. L’opiniâtreté. La volonté. Dépasse-toi. Dépasse tes peurs. Non. Juste par de la bienveillance. De la porosité à la souffrance d’autrui. De la douceur. Du lait sucré. Des angles arrondis. Un monde dans lequel nos angoisses pourront délicatement rebondir les unes contre les autres jusqu’à s’oublier. Un monde où les loyautés systémiques qui nous habitent et entretiennent l’inertie auront été détricotées pour que nous puissions enfin dire calmement :
Non. Ça suffit.