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André Molitor
Au moment de mettre sous presse ce numéro, nous avons appris avec une grande tristesse le décès d’André Molitor qui fut le premier directeur de La Revue nouvelle. Âgé de nonante-trois ans, il faisait partie de cette génération qui a traversé le xxe siècle : celle dont la jeunesse s’est formée dans l’effervescence trouble des années trente, […]
Au moment de mettre sous presse ce numéro, nous avons appris avec une grande tristesse le décès d’André Molitor qui fut le premier directeur de La Revue nouvelle. Âgé de nonante-trois ans, il faisait partie de cette génération qui a traversé le xxe siècle : celle dont la jeunesse s’est formée dans l’effervescence trouble des années trente, celle à qui revenait dans l’immédiat après-guerre de refonder la démocratie sur les cendres d’un désastre moral planétaire répété.
Il n’est pas temps ici d’improviser un portrait qui ne pourrait être qu’incomplet. Sur le parcours d’André Molitor, nous reviendrons dans le numéro de septembre, avec Xavier Mabille, Henri Bauchau et Christian de Visscher qui ont accepté, avec d’autres, d’évoquer une personnalité riche, dont l’activité de revue n’a constitué qu’une des facettes.
Une facette précieuse pour nous. Car, soixante ans après sa mise en route, nous restons les dépositaires reconnaissants et passionnés de ce legs des fondateurs. Leur acte de foi initial et le sentiment qu’ils avaient de remplir librement une mission qu’ils s’étaient à eux-mêmes donnée hantent encore notre activité comme des évidences. Cette vocation-là continue de s’imposer comme atypique : ni amateur, ni professionnelle, elle fait appel à un engagement qui mise sur la liberté et l’intelligence, sur leur usage et leur partage public et responsable.
Car faire ou refaire le monde, n’est-ce pas toujours d’abord le rendre plus lisible pour le partager et faire circuler les idées et les visions pour les éprouver ? Que la nature des difficultés ait profondément changé depuis l’origine, que la place de la revue dans un monde traversé par des flots d’informations ne soit plus comparable à ce qu’elle était il y a soixante ans, tout cela laisse intactes l’intention de l’entreprise et les valeurs mises en œuvre son accomplissement et dans la résistance opiniâtre et rusée qu’elle a su opposer à toutes formes de narcissisme et d’instrumentalisation.
La longévité d’une revue tient évidemment à la permanence sans cesse renouvelée d’une communauté de lecteurs qu’elle aimante et qui est tout à la fois sa condition matérielle et sa raison d’être. Pour que ce magnétisme se soit maintenu au mois le mois, il faut que La Revue nouvelle soit bien née d’emblée comme un projet collectif et ambitieux. C’est assurément ce que l’on doit à l’équipe initiale et à son premier directeur : l’élan d’un projet partagé et régénéré par tous ceux qui y engagent leurs forces et qui, par le respect qu’il impose, place chacun à égalité.
Avec ce respect qu’on lui doit, c’est donc plutôt à un frère fondateur que nous rendons hommage ici. Un frère au cœur ardent dont nous voulons continuer à (faire) partager les exigences et le plaisir d’une revue qui entend rester ouverte et diverse dans ses intérêts et ses engagements autant que fidèle dans ses repères.