Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.
Solidarités publiques, vers un nouveau paradigme d’action
Comment un service public de l’emploi peut-il répondre aux évolutions du « marché du travail » et, plus encore, aux transformations profondes des structures de la société ? Incarnant la solidarité dans une configuration particulière de la production reposant sur le salariat, peut-il encore trouver sa place à l’heure de l’économie de la fonctionnalité ?
Un outil de solidarité générale
Le service public de l’emploi (SPE) a vu le jour après un processus politique, économique et social intense entre 1880 et 1910. Il est le fruit d’une véritable alchimie (Castel, 1995) entre des intérêts divergents. C’est un outil de solidarité générale fondée sur l’emploi dont le levier est le droit des travailleurs et l’effet au moment de sa généralisation (après la Seconde Guerre mondiale) et qui permettra un recul considérable de la pauvreté1.
Le SPE est ainsi l’une des pièces techniques du système de sécurité sociale. Cette pièce est d’emblée instituée dans une pratique d’encadrement et de structuration des comportements socioéconomiques des travailleurs et des employeurs2, intermédiaire entre l’offre et la demande d’emploi pour améliorer le fonctionnement du marché. Le SPE injecte de la norme dans les usages du marché du travail pour garantir un droit effectif des travailleurs.
Derrière cet appareillage se révèle une forme de paradigme public de la solidarité : un ordre d’État, centré sur l’emploi qui garantit aux travailleurs un accès à des prestations sociales3 et rend réel l’État de droit. Par là, l’emploi devient une pièce maitresse du système de solidarité.
Quatre incidences majeures
Ce paradigme qui structure la réalité d’une solidarité de masse va, à partir du début des années 1990, progressivement entrer en crise comme suite à l’émergence de l’économie financière, de nouveaux rapports à la norme, de nouvelles formes d’entreprises et d’organisation du travail et de la civilisation du réseau.
a. L’économie financière : du salariat à l’«investariat »
L’émergence de l’économie financière va toucher le modèle par sa recherche de maximisation du profit et donc de diminution des couts. L’emploi structuré par la sécurité sociale apparait alors à certains égards trop rigide.
L’échange économique tend à quitter le cadre de l’emploi. De nombreux statuts hybrides qui traduisent de nouvelles formes d’échanges se développent4.
D’une manière générale, on assiste à une certaine dégradation de la condition salariale.
b. De nouveaux rapports à la norme : du Père aux pairs
L’exigence de plus en plus forte que le travailleur prenne une part de risque dans l’entreprise, la monétisation hors emploi des compétences, de même que l’avènement des politiques actives de l’emploi qui conditionnent le droit au comportement individuel conduisent à une forte individualisation du rapport à la norme.
De cette façon, émerge corrélativement toute une série de comportements adaptatifs de sécurisation que la sociologie va identifier autour du concept de société des pairs. Des pairs qui ne sont plus reliés par ce que Dufour (2017) nomme un « grand récit interdicteur » qui cadre les règles déontiques5 du vivre ensemble par une référence universelle applicable à tous, mais qui s’associent en communautés d’appartenance, d’intérêt ou de risque.
La fonction publique se transforme progressivement de gardienne des règles à la régulation des usages, ce qui demande à l’exécutant de l’action publique de justifier de sa légitimité en permanence non plus par son statut, mais par les résultats de son action ainsi que de développer une intelligence fine et fiable de l’environnement socioéconomique et une compétence d’action stratégique dans un cadre politiquement contraint.
L’individualisation du rapport à la norme (De Munck et Verhoeven, 1997) ne permet plus un traitement de masse standardisé. Donc à la maitrise des activités par processus et procédures, il faut ajouter une nouvelle voie, la maitrise des activités par les métiers et les pratiques, ce qui demande d’équiper le SPE en dispositifs de gestion des ressources humaines et managériales nouvelles comme la gestion des connaissances, le management de l’intelligence collective, la sécurisation de l’autonomie professionnelle.
c. L’intelligence artificielle : du travailleur/employeur à l’acteur
Ce qu’on nomme l’économie numérique et l’ubérisation du marché du travail n’est, plus que probablement, qu’un avatar, une forme d’aboutissement logique de l’économie financière. Elle a, pour des raisons de compétitivité, rejeté à la périphérie les risques et les investissements en les confiant à des sous-traitants et maintenant aux travailleurs eux-mêmes6 dans de nouvelles formes d’organisation du travail virtualisées où l’entreprise est dans la rue et dans les chaumières et n’est identifiable que par son logo.
L’économie numérique quitte alors progressivement la société salariale avec ses normes qui rendent linéaires les parcours de vie, solidifient le marché du travail et s’appuient sur la puissance de l’État pour entrer dans un monde plus opportuniste, contingent et créatif, centré sur l’entreprise comme référence et non plus l’État.
Ce qui caractérise cette nouvelle forme d’entreprise est sa prise de maitrise de process via le logiciel « cette pièce d’intelligence » (Escaude, 2016) qui en quelque sorte diffuse l’entreprise dans le tissu vivant de la cité. Cette atopie7 entrepreneuriale n’est pas sans poser question par rapport à l’exercice de l’État de droit et au rôle de son service public de l’emploi.
Donc, pour exercer sa responsabilité, le SPE doit s’inscrire à terme comme acteur référençant le système en injectant de la norme sociale dans les usages, ce qui est très différent d’exécuter la loi.
La posture d’acteur de soi devient une norme d’accès à l’emploi. Cette caractéristique de l’ère numérique crée de l’inattendu dans les interactions. La maitrise de l’inattendu pour le bien durable de tous devient alors un nouvel espace de responsabilité du SPE que l’on voit progressivement s’installer au travers des demandes et des critiques émanant tant des citoyens que des tutelles ou des médias.
d. La complexité : du statut au réseau
En fait, ce que l’émergence du numérique exprime dans nos sociétés, c’est l’avènement de la « civilisation réseau » qui efface progressivement la structure hiérarchique ayant présidé jusqu’ici au fonctionnement des organisations humaines ce qui pose la question de l’avenir de l’autorité8, du mode de justification de la gouvernance. Cela signifie donc la perte, sans doute irrémédiable, de repères stables, de références universelles et une complexification résultant des rapports sociaux ainsi qu’une augmentation de l’hétérogénéité de la société (Spécialisation et diversité fonctionnelle)9.
Toutefois, des réponses à cette nouvelle structure multipolaire du pouvoir existent.
Le réseau est le mode organisationnel efficace, c’est-à-dire la capacité humaine à agir sur le réel. Il se caractérise par la dimension multilinéaire des interactions sur un plan horizontal et s’oppose à un système vertical unilinéaire. On passe de cette façon d’une pyramide à une trame. Les questions de pouvoir cèdent alors le pas à celles d’autorité. En résumé, le pouvoir s’exerce sur un objet, l’autorité est reconnue par un sujet. La question de l’adhésion, de la participation libre à un but commun (Eraly, 2011) devient un nouveau point d’appui organisationnel de l’action publique.
On ne gouverne donc plus par décret mais par reconnaissance. L’autorité doit donc construire et préserver la légitimité fondatrice de son rôle hiérarchique non plus par son existence instituée mais par ses finalités, l’efficacité et la qualité relationnelle qu’elle déploie.
Pour le service public de l’emploi, il s’impose de transformer les pratiques du pouvoir nécessaires à l’exercice de ses responsabilités publiques. Il doit passer d’un encadrement par la règle à une gouvernance par la médiation. Ce qui, dans la pratique, se traduit par une gestion individuelle et collective des risques et des opportunités dans le champ de l’activité socioéconomique10.
Vers un nouveau paradigme
La question de la solidarité, fondement du SPE, se pose alors pour lui en des termes totalement nouveaux. Les nouvelles formes de monétisation de la compétence qui émergent sur le marché du travail11 mettent au défi le SPE sur ses dimensions institutionnelles, organisationnelles, professionnelles et techniques pour maintenir une solidarité réelle à large échelle.
Une première approche d’un nouveau paradigme d’action publique s’est concrétisée autour des politiques actives de l’emploi. Ces politiques poursuivent l’objectif déclaré de sauvegarder le système de solidarité en mobilisant l’acteur. L’hypothèse est que si le citoyen est acteur et fait ce qu’il faut, le marché du travail répondra. Il y a donc un devoir citoyen à rechercher activement l’emploi et un devoir de l’État de donner à ce citoyen les ressources nécessaires. Deux logiques viennent structurer ce qui constitue une nouvelle vision de la solidarité : la logique de la responsabilisation et la logique de la sécurisation (Arnsperger, 2001 ; 2006).
Ce faisant, on change de paradigme. D’un droit conditionné par une situation sociale, on entre dans un droit conditionné en plus par un comportement adéquat (Chelle, 2013).
Le SPE vit là une réelle rupture. D’acteur du droit et de la solidarité comme producteur, il devient le censeur des actions et le pourvoyeur des moyens disponibles. Comment peut-il porter une solidarité publique nouvelle dans ses pratiques ? Comment peut-il encore garantir le droit alors que son action peut potentiellement mettre en péril l’accès aux droits ? Quels leviers peut-il utiliser pour intervenir sur un marché du travail de plus en plus centré sur l’acteur, les parcours, les usages ? Comment organiser l’agir solidaire public dans un contexte de parcours et de responsabilisation individuelle et non plus de gestion de masse ?
Une stratégie par les « capabilités »
Les données nouvelles pour le SPE sont donc l’acteur, le réseau, les usages qui succèdent à l’emploi12, au statut, aux règles. Mais comment agencer ces nouvelles données dans une action publique efficace ?
L’acteur, il s’agit de le mobiliser dans un contexte général de bien commun. Il n’est pas seulement le citoyen mais aussi l’entreprise et les institutions.
Le réseau qui est une nouvelle forme d’action publique où de nombreux acteurs autonomes s’associent sous l’impulsion du SPE pour un but commun défini autour de l’activité socioéconomique.
Les usages qu’il s’agit pour le SPE de visibiliser et d’évaluer à l’aune des principes de solidarité, de justice et de bien commun.
Nous voyons bien que nous sortons alors du paradigme de l’État vu comme pourvoyeur des solidarités pour entrer dans celui d’un État comme garant d’un bien commun effectif ainsi que l’expriment Dardot et Laval dans leur concept de service public comme institution du commun : « La question est donc de savoir comment transformer des services publics pour en faire des institutions du commun ordonnées aux droits d’usage commun et gouvernées démocratiquement. Il s’agirait non plus de concevoir l’État comme une gigantesque administration centralisée, mais plutôt comme un garant ultime des droits fondamentaux des citoyens au regard de la satisfaction de besoins collectivement jugés essentiels…» (2014, p. 515).
Ce qui veut dire que le SPE se doit de permettre au citoyen un accès à une activité socioéconomique digne, de sécuriser les parcours d’activité économique quels qu’en soient les formes et les statuts, de garantir dans les usages des marchés des mécanismes de solidarité adaptés à la flexibilité grandissante.
C’est là que le concept de capabilité d’A. Sen, qui définit la capacité qu’a une personne à mobiliser les ressources pour réaliser ce qu’elle estime bien pour elle, nourrit une idée stratégique encore en phase d’analyse et de test : l’approche par les capabilités. Il faut en mesurer les conséquences institutionnelles, organisationnelles et professionnelles pour le SPE.
« Une capabilité est donc un vecteur de modes de fonctionnement exprimant la liberté, pour un individu, de choisir entre différentes conditions de vie » (Monnet, 2007).
La capabilité exige à la fois l’existence de ressources13, mais aussi d’instruments pour pouvoir mobiliser ces ressources.
L’approche par les capabilités permet au SPE de garantir l’accès à un bien commun face à une diversité grandissante de situations et de parcours car elle lui permet de sortir d’une logique normative stricte fondée sur un bien universel identique pour tous. C’est une approche qui permet de personnaliser l’action publique tout en tendant à préserver une forme de justice sociale.
De cette manière, le SPE sauvegarde son éthos d’origine, à savoir agir pour le bien et le droit des travailleurs dans une logique de solidarité effective.
Cette approche permet d’éviter le piège dénoncé par Chelle (2012) qui pourrait consister, dans le cadre des politiques actives de l’emploi, à transformer l’action publique en administration du mérite.
Ce qui fait la spécificité de l’approche stratégique par les capabilités du SPE est qu’elle ne s’adresse pas qu’aux personnes, mais aussi aux territoires d’action et aux parties prenantes. Elle constitue alors une sorte de chaine qui unit les décideurs socioéconomiques et politiques, les services publics, les entreprises, les associations aux citoyens à travers une action commune. Cette chaine forme alors une sorte de réseau d’actions qui poursuivent une même finalité : la capabilité des citoyens. Elle forme en quelque sorte ce qu’on pourrait nommer un territoire propre à développer ses aptitudes.
L’objectif du SPE dès lors est de créer les conditions techniques, organisationnelles, institutionnelles et professionnelles à la capabilité citoyenne sur le champ de l’activité socioéconomique.
Un défi institutionnel, organisationnel et professionnel
Institutionnel
L’histoire institutionnelle complexe a comme aboutissement que les SPE sont globalement attendus sur l’emploi dans sa forme traditionnelle de travail salarié. Les activités d’échanges économiques, les pratiques entrepreneuriales nouvelles, les nouveaux usages etc. leur échappent de fait puisque c’est l’emploi qui leur est assigné par leurs autorités. Ils ne sont donc plus habilités à intervenir sur le marché du travail au sens large et sur ses usages comme initialement.
Ils sont aujourd’hui institués comme gestionnaires des leviers censés faire diminuer le chômage et promouvoir l’emploi : l’accompagnement des demandeurs d’emploi, l’intermédiation entre l’offre et la demande d’emploi, la lutte contre les pénuries de main‑d’œuvre, la formation ou encore la gestion des aides publiques à l’emploi. Or, la stratégie par les capabilités transforme ipso facto le rôle et la posture institutionnelle des SPE.
Comme les usages sortent du cadre de l’emploi au sens classique, les SPE doivent pouvoir intervenir pour le bien et la solidarité dans un champ plus vaste et plus complexe qu’est l’activité d’échange économique où de multiples formes de monétisation de la compétence apparaissent.
L’approche par les capabilités demande d’intervenir sur l’ensemble des ressources et leviers pour favoriser une insertion durable et de qualité. Elle implique que les SPE élargissent leur champ d’intervention à de nouvelles formes d’échanges économiques et aussi à des activités hors de ce champ.
C’est tout le cadre institutif qui est là interrogé.
Organisationnel
Pour entrer dans les capabilités, il faut pouvoir relier les ressources, les instruments, les personnes et les organisations ! C’est littéralement une nouvelle gouvernance qui ne peut tenir en termes de bien public que si les acteurs et parties prenantes adhèrent à un projet commun et que cette adhésion trouve ses relais et processus.
Le défi organisationnel est énorme et se pose moins sur le registre de la structure que sur celui du fonctionnement. C’est une question de management des territoires d’action publique dont les formes nouvelles sont encore à inventer et qui doivent répondre à une nouvelle façon de réguler la responsabilité publique.
C’est tout le cadre sociopolitique qui est là interrogé.
Professionnel
Tous les métiers du service public sont concernés et ce, au niveau du sens, des agir et des savoirs.
Le sens n’est plus l’emploi comme finalité mais la dignité citoyenne. L’emploi est et reste un objectif privilégié car il demeure le premier critère d’intégration sociale.
L’agir n’est plus seulement l’intermédiation mais aussi la mobilisation de l’acteur14. Et à ce sujet, de lourdes questions éthiques sont pendantes. C’est tout ce que dénonce O. Vrancken (Aifris, 2015) autour du travail sur soi comme condition d’intégration sociale. Les capabilités devraient pouvoir répondre techniquement à cette question dans la mesure où à l’exigence de travail sur soi correspond l’exigence d’un système public propre à développer des capacités.
Les savoirs sont en complète mutation. Les métiers qui mobilisent des savoirs techniques exécutifs doivent développer des savoirs réflexifs créatifs pour répondre efficacement aux situations. Toute une gestion nouvelle des compétences doit là s’inventer dont il n’existe pas aujourd’hui de modèle adéquat.
C’est tout le cadre managérial public qui est ainsi interrogé.
Conclusion
Toute une série d’évolutions de l’environnement mettent en question la mise en œuvre d’une logique de solidarité par le SPE.
De plus, le développement de l’économie de la fonctionnalité où l’usage supplante la propriété et sa propagation via des plateformes numériques en peer to peer ne sont pas sans poser des questions lourdes par rapport aux risques d’atomisation du travail.
Dans ces conditions, les services publics de l’emploi ont un rôle essentiel à jouer pour donner un contenu effectif à une solidarité future.
Dès lors, les SPE ont l’ambition d’accompagner et de soutenir les travailleurs dans la gestion de leur parcours professionnel et, en particulier, pour favoriser une insertion durable et de qualité à partir d’occupations précaires, pour les aider à gérer les transitions professionnelles.
Cette ambition passe aussi, par exemple, par des actions permettant la réorientation des travailleurs en cours de carrière ou leur maintien à l’emploi sans passer par la case « chômage ».
Ce soutien à apporter aux travailleurs dans la gestion de leur parcours professionnel demande qu’il soit mis en œuvre en tenant compte des trois dimensions suivantes :
- La diversité et la complexité des situations imposent que l’alliance de différents acteurs (pouvoirs publics, entreprises, associations, travailleurs, opérateurs privés, etc.) soit systématiquement recherchée et mobilisée.
- L’accessibilité aux outils et aux dispositifs doit être garantie aux bénéficiaires.
- Les personnes doivent être mises en capacité durable de gérer dans la plus grande autonomie leur parcours professionnel.
Fondamentalement, une des voies envisageables et réalisables, même si elle est ambitieuse, repose sur une approche par les capabilités, approche qui peut constituer une stratégie publique innovante afin de répondre aux défis des solidarités nouvelles.
Cet article et les points de vue qui y sont exprimés n’engagent que leur auteur. Ils ne pourraient en aucune manière engager le Forem (Office wallon de la formation professionnelle et de l’emploi).
- Lorsque Beveridge propose d’instituer le bureau de placement public (1910) c’est devant la commission royale de lutte contre la pauvreté et la détresse humaine.
- Par exemple, les règles de la disponibilité et de l’emploi convenable.
- Par exemple, un revenu de remplacement ou l’accès à des aides à l’emploi.
- Des formes que P. Grogens nomme « investariat » comme succédant au salariat (voir point c.). L’analyse de Lazzarato (2011) montre le processus où le travail se monétise de moins en moins par l’emploi, mais par l’investissement ce qui revient souvent à s’endetter pour le travailleur. Il est tenu économiquement à créer son entreprise pour travailler. Lazzarato va observer par exemple que la plus grande entreprise de transport des États-Unis ne possède aucun camion. Elle organise le travail avec les travailleurs qui ont investi dans l’achat d’un camion.
- Interdire, exiger, autoriser.
- C’est le phénomène où le travailleur prend le risque du marché en charge. Par exemple, Deliveroo ne paie plus le temps, mais uniquement la course. Le risque client est donc à charge du travailleur.
- Partout et nulle part. Sans lieu (topos) défini. Les entreprises « internet native » sont extrêmement volatiles et vont investir des lieux en fonction d’évènements et les quitter rapidement.
- Voir A. Eraly, L’avenir de l’autorité (2011) où la question de la légitimité communicationnelle de l’autorité supplante progressivement celle du statut.
- Tainter (2013) identifie une société complexe comme ayant développé des activités spécialisées (tout le monde ne fait pas la même chose) et ayant structuré des fonctions différentes (la justice, la défense, le cultuel etc.). Ce qui caractérise une société complexe est donc son hétérogénéité. La globalisation augmente la complexité par l’émergence de spécialisations et de fonctions nouvelles.
- En effet, puisque c’est l’acteur qui est la clef de l’action publique et qu’il y a un cadre général nécessaire à cette action pour le bien de la société, le service public ne peut plus seulement appliquer la règle. Il doit aussi tenir compte des conditions de l’acteur, de ses risques et opportunités.
- Uber, freelance, coopérateur, etc.
- L’emploi est toujours là, mais il passe d’objet structuré et structurant à une des finalités de l’action publique.
- Les biens premiers selon Rawls, mais dont la possession, pour Sen, ne suffit pas à garantir une justice. Il faut en plus que la personne puisse en faire un usage libre pour réaliser ses choix.
- Faire appel à l’acteur dans les nouvelles solidarités demande que le citoyen travaille sur lui-même. C’est toute l’émergence dans nos sociétés du travail sur soi comme condition d’intégration qu’O. Vrancken a analysé.