Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.
Le flash trading annonce-t-il l’émergence de l’@finance ?
Il ne s’écoule plus une journée sans que la presse financière, les régulateurs du G20 ou le monde académique commentent la révolution IT en cours sur les marchés financiers. D’une part, on retrouve une course folle vers « le toujours plus vite » du trading à haute fréquence et, d’autre part, une crainte grandissante tant des régulateurs que […]
Il ne s’écoule plus une journée sans que la presse financière, les régulateurs du G20 ou le monde académique commentent la révolution IT en cours sur les marchés financiers.
D’une part, on retrouve une course folle vers « le toujours plus vite » du trading à haute fréquence et, d’autre part, une crainte grandissante tant des régulateurs que des investisseurs sur les risques potentiels de ces nouvelles technologies en matière de volatilité, de liquidité et de manipulation des marchés.
Diabolisé par les uns, soutenu par d’autres, le trading à haute fréquence n’est pourtant qu’emblématique des questions soulevées par l’émergence des marchés financiers « modernes » ou de la @finance.
De l’émergence fulgurante d’internet aux réseaux sociaux en moins d’une génération, le paradigme majeur de l’économie mondiale naissante repose sur la production et l’exploitation exponentielle d’informations, sur la complexification des organisations ainsi que sur leur profonde interconnectivité rendue possible par la révolution IT. Ce nouveau paradigme est valable dans notre vie sociale de tous les jours ainsi que dans la structuration de l’économie mondiale et de la finance.
Tant en science humaine qu’en finance, l’utilisation d’algorithmes de plus en plus perfectionnés permet de gérer la croissance exponentielle de l’information et de la complexité. Les algorithmes nous permettent au quotidien d’effectuer en des temps records des calculs hors de portée du cerveau humain. Illustrant cette évolution, IBm prédisait que la masse d’informations dans le monde doublerait toutes les onze heures à partir de 2010. En 2012, la même société invente le plus petit stockage informatique du monde en stockant un bit (un zéro ou un un) sur douze atomes.
Est-il dès lors anormal de voir ces innovations technologiques se développer dans le monde de la finance ? Au regard des enjeux d’efficience, d’intégrité et de stabilité des marchés financiers, la technologique d’exécution d’opérations financières à haute vitesse ne représente-elle pas plutôt une avancée nécessaire et utile ?
En route vers la nanoseconde…
Lorsqu’on prend la mesure de la révolution techno-financière en cours, il est légitime de s’interroger sur la pertinence et l’applicabilité de certaines propositions législatives.
Prenons par exemple la proposition du Parlement européen sur l’obligation de détenir une position de trading au minimum une demi-seconde. Cette proposition est présentée comme une solution pour contrer l’avantage compétitif détenu par les flash traders ; ceux-ci annonçant au même moment le cap de la nanoseconde1. Est-il pertinent de vouloir contrer une évolution technologique généralisée dans le seul cas d’application du trading ? Ne faudrait-il pas plutôt accompagner l’innovation pour en prévenir les risques ?
Le paradoxe de cette évolution est résumé par le Financial Times dans son article évocateur « Rage against the machine2 ». Parallèlement aux interrogations et craintes des superviseurs quant à l’impact du flash trading sur la volatilité intraday (c’est-à-dire les opérations d’achat et de vente réalisées sur la même journée) et les risques d’évaporation de la liquidité en période de crise, de plus en plus d’investisseurs perdent confiance en cette technologie jugée trop complexe, trop risquée.
Mais au même moment, la technologie algorithmique couplée à une capacité d’exécution et de transmission d’informations de plus en plus rapide constitue une base essentielle de l’innovation de l’économie mondiale…
L’exemple des chambres de compensation…
Après la crise financière de 2008 – 2009, les principaux régulateurs du G20 ont décidé d’imposer des chambres de compensation centralisées3. L’objectif est de rendre plus visible l’immense marché des produits dérivés négociés jusque-là de gré à gré. Cette situation impliquait un défaut de visibilité sur le risque de contrepartie, et dès lors, de mesure du risque systémique de ce secteur. Aujourd’hui, les marchés assistent à une marche forcée, tant aux États-Unis qu’en Europe, vers une centralisation, mais également une automatisation à haute vitesse du calcul du risque de contrepartie des produits dérivés.
Comme le souligne le Financial Times4, la technologie de la haute fréquence d’exécution permet dès lors la mise en correspondance (mapping) de plus en plus rapide de millions de deals au travers de ces chambres de compensation. Ce nouveau cocktail de centralisation et d’automatisation de produits dérivés, présenté comme une avancée positive pour la stabilité des marchés, soulève malgré tout de nouvelles interrogations.
Vers le renforcement des pratiques de risk management
À l’image de ce qui s’est passé dans le secteur bancaire, l’évolution en cours dans les chambres de compensation soulève diverses questions. Ne faut-il pas craindre une trop forte centralisation débouchant sur la problématique du « trop grand pour pouvoir faire faillite » ? Qui pourra assurer le rôle du « stabilisateur » de dernier ressort en cas de faillite d’une chambre de compensation systémique ? Comment la supervision de ces institutions systémiques pourra-t-elle prévenir en temps réel le risque de défaillance de la technologie du flash mapping des risques de contrepartie ?
À l’heure des débats sur l’Union bancaire européenne, cette nouvelle architecture des marchés financiers balancée entre fragmentation et centralisation ne soulève-t-elle pas le besoin d’une vue consolidée intégrant le nouveau paradigme de la @finance ? À savoir l’articulation de l’information et de la complexité (dans une expansion croissante) couplée à une interconnectivité allant jusqu’au smartphone individuel.
Ce nouveau paradigme implique sans conteste un besoin urgent de normes et d’outils de gestion du risque permettant d’évaluer la question centrale : quelle est la valeur sociale ajoutée d’innovations techno-financières telles le flash trading ?
- Une nanoseconde égale un milliardième de seconde. Zeptonics, une société spécialisée en technologie financière de Sydney, annonce aujourd’hui la commercialisation de la technologie la plus rapide du monde allant de 5 à 130 nanosecondes. www.zeptonics.com/news/index.html.
- 16 octobre 2012.
- La chambre de compensation est un organisme financier ayant pour but d’éliminer les risques de contrepartie sur les marchés dérivés. Concrètement, la chambre de compensation est la contrepartie unique de tous les opérateurs. Elle assure la surveillance des positions. Elle exige la formation dans ses livres d’un dépôt de garantie le jour de la conclusion d’un contrat. En cas de perte potentielle d’un intervenant, elle procède à un appel de marge.
- « Swaps trades on brink of tough new regime », Financial Times, 17 octobre 2012.