Les mots ont une histoire. Et, comme le dit M. Olender, pour certains d’entre eux elle a mal tourné. C’est le cas du mot « race » qui, tout au long des deux derniers siècles, fut à ce point chargé d’idéologie et d’affects que son sort semble scellé. « La race », après avoir été longtemps du « bon côté » (avoir de la race, une ascendance), est passée de l’autre. Avec « les races », il est devenu, pour certains groupes humains, le substrat langagier de leur relégation dans une position inférieure sinon infamante. Faut-il (...)
Les mots ont une histoire. Et, comme le dit M. Olender, pour certains d’entre eux elle a mal tourné. C’est le cas du mot « race » qui, tout au long des deux derniers siècles, fut à ce point chargé d’idéologie et d’affects que son sort semble scellé. « La race », après avoir été longtemps du « bon côté » (avoir de la race, une ascendance), est passée de l’autre. Avec « les races », il est devenu, pour certains groupes humains, le substrat langagier de leur relégation dans une position inférieure sinon infamante. Faut-il conclure que la notion a perdu toute valeur opératoire et ne peut plus servir qu’à figer une vision définitivement hiérarchisée de l’humanité ? Ou est-il encore possible, sans escamoter la complexité de ce qui fait le socle commun de l’espèce humaine, d’en invalider l’usage péjoratif par lequel ceux qui se pressent à la tête de l’humanité intelligente font basculer les autres dans une subalternité irrémédiable ? C’est dans les termes ramassés de ce dilemme que l’on pourrait indiquer la portée du dernier ouvrage de B. Jordan.
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